Fleuri Mœurs des Deo dedicata monumenta (quibus nihil hodie spoliatius) Sub fpetiofo eruendæ fuperftitionis obtentu, fordidissimo confpurcari vitu. perio, extremamque manere internecionem: ad altaria Chrifti ftabulati equi, Martyrum effoffæ reliquia; funt quidam Zelatores, adeo religiosè delirantes, ut Religiosos veterum ordines, ex abissi puteo prognatos aiunt: Ita licenter fibi indulget præconcepta passio. C'est neanmoins un heretique qui parle ; & c'est ce qui doit remplir de confusion les autres heretiques, qui ne peuvent parler de la religion Catholique & de la vie Monastique, qu'en invectivant, & faisant paroître la passion dont ils sont prevenus: Ita licenter fibi indulget præconcepta passio. La profession Monastique fut aussi introduite dans l'Irlande par le ministere de faint Patrice, qui est reconnu pour l'Apôtre de ce royaume; & elle s'y multiplia si prodigieusement, que cette ifle fût appellée l'ifle des Saints, à cause dugrand nombre & de l'eminente sainteté des Religieux dont elle fut remplie. Enfin il n'y eut presque point de royaume & de province, qui ne reçût le même avantage; & l'on peut juger par-là, du grand progrès de l'Ordre Monaftique. PARAGRAPHЕ Х. Que les Religieux n'ont rien changé des mœurs & des coûtumes des anciens. Miede ONSIEUR l'Abbé Fleuri fait une excellente apolola vie Monastique, lorsqu'il dit; qu'elle est une pag. 320. preuve sensible de la providence de Dieu, & du foin qu'il a eu de conserver dans son église jusques à la fin des siecles, non seulement la pureté de la doctrine, mais encore la pratique des vertus ; & que si l'on confidere la vie des premiers Chrétiens; & qu'on la compare, avec les usages presents des Monasteres bien reglés, on verra qu'il y a peu de diffe rence. En effet si l'on confidere le zele des premiers Chrétiens, leur detachement pour toutes les chofes de la terre, leur application à la priere, soiten commun ouen particulier, qu'ils se relevoient même la nuit à cet effet, que le filence leur étoit recommandé, qu'ils étoient unisensemble, qu'ils exerçoient charitablement l'hospitalité envers leurs freres, que les noms de peres & de freres leur étoient donnés felon l'age & la dignité; on trouvera que c'est aujourd'hui la pratique des Monafteres. apud. Rof Les Religieux n'ont point pareillement introduit de nouveauté, & n'ont point cherché de fingularité dans leurs habits. Les Fondateurs d'Ordres qui ont d'abord habité les dé- Athan vit. ferts & les folitudes, n'ont donne à leurs Religieux que les ha- S. Ant bits communs aux paysans: car si nous remontons au tems veid pag. de faint Antoine, saint Athanase parlant des habits de ce 9. Hier pere S. Hil des Cœnobites, dit qu'is consistoient dans un Cilice, deux pag. 75. peaux de brebis & un manteau. Saint Jerome dit : que faint Hilarion n'avoit qu'un Cilice, une saye de paysan, & un manteau de peaux. Il en est de même de ceux qui les ont suivis jusqu'au tems de saint Benoît, qui reçut des mains de saint Romain un habit de peaux, dont il se revêtit dans le defert de Greg. lib. Sublac. Il paroît même qu'il donna un pareil habit aux cap. 17. disciples qu'il assembla dans ce defert, avant que d'avoir écrit sa Regle; puisque saint Placide, après avoir été retiré de l'eau par saint Maur, dit qu'il avoit vû dessus sa tête la pelisse de l'Abbé ; ce qui marque, dit le pere Delle, que S. Delle AnPlacide prenoit faint Maur pour S. Benoît ; parce qu'il étoit tiq. Monafvêtu comme lui. Ainfiil y a bien del'apparence que les peaux chap. 4. de brebis etoient déja, tant en Orient qu'en Occident, l'ha bit commun des Bergers & des payfans, qui demeuroient dans les montagnes; comme il est encore en usage parmi ces fortes de gens en Italie, qui appellent pelisses ces fortes d'ha. billements. Mais quand ces saints Fondateurseurent écrit des Regles; prevoyant bien que leurs Religieux ne demeureroient pas toujours dans les deserts, & qu'ils viendroient demeurer dans les villes; ils leur prescrivirent des habillements qui étoient communs aux petites gens & aux pauvres, tels que la Cucule dont il est parlé dans les Regles de saint Antoine & de saint Benoît, qui étoir une espece de capot ou de chappe, qui étant commode pour le froid, est devenu aussi commode à tout le monde dans les fiecles suivants, & est encore en usage parmi les mariniers & la plupart des voyageurs, qui en porrent de même, qu'on nomme cappes de Bearn. On les appelloit aussi Coules ou Goules, d'où vient que les Religieux do 2. dialog. tiq. Tome 2. : Tome 1. cbap. 7. Cîteaux appellent encore coules leurs Chappes. Non feulement les Clercs & les gens de Lettres; mais les nobles même & les courtisans, portoient encore des Chapperons en France fous le regne de Charles VII. les gens d'église & les Magiftrats ont été les derniers qui les ont conservés; & un nommé Patrouille t ayantamené lamode des bonnets quarrés: ils ont quitté le Chapperon, qu'ils ont fait descendre de la tête sur l'épaule & quiest reftépour marque de Docteurou de Licentié aux Arts, en Theologie, Jurisprudence & Medecine. Ainfiil ne faut pas s'étonner si les Jesuates & quelques autres Religieux ont porté de ces fortes de Chapperons. Delle An- Quant à la couleur des habits, leP. Delleremarque que comtiq. Monast me les Religieux sont morts au monde, & que leur profession les engage à la mortification, & à la penitence; ils se sont habillés dès les premiers fiecles de leur établissement, comme des personnes qui portoient le deuil, & qui étoit dans l'affliction. C'est pourquoi dans la Syrie, dans la Palestine, dans la Thrace & dans la Grece, ils prenoient des habits noirs, & dans l'Egypte des habits blancs. Je ne parle point de la nourriture, des jeûnes, des austerités & des autres pratiques des Monasteres; l'on peut voir ce Fleuri. qu'en a dit M. Fleuri, qui, après avoir montré la conformité Mœurs des qu'il ya de ces saintes pratiques avec celles des premiers Chrétiens, & même des anciens Payens les plus reglés, fait ainfila comparaison des Monasteres avec les maisons des anciens Romains. Chret. page 327. pag. 230.0 pag. 231. : Je m'imagine, dit-il, trouver dans les Monasteres des vef,, tiges de la disposition des maisons antiques Romaines, telles ,, qu'elles sont décrites dans Vitruve & dans Palladio. L'église qu'on trouve la premiere, afin que l'entrée en soit libre aux seculiers, semble tenir lieu de cette premiere salle que les ,, Romains appelloient Atrium. De là on passoit dans une cour „environnée de galleries couvertes, à qui l'on donnoit ordinai ,, rement le nom de Peristile; c'est justement le cloître, où l'on ,, entre de l'église, & d'où l'on va ensuite dans les autres pieces, ,, comme le Chapitre qui est l'Exhedre des anciens,le refectoi,, re qui est leTriclinium & le jardin qui eft ordinairement der,, riere tout le reste; comme il étoit aux maisons antiques. Ce qui fait paroître aujourd'hui les Moines si extraordi naires, dit encore ce sçavant Historien, est le changement : qui est arrivé dans les mœurs desautres hommes, comme les « édifices les plus anciens font devenus finguliers, parce que ce « font les seuls qui ont resisté à une longue suite de siecles. Et « comme les plus sçavants Architectes étudientavec soin ce qui « reste des bâtiments antiques,scachant que leur artnes'estre-« levé dans ces derniers fiecles que fur ces excellens modeles: « ainfiles Chrétiens doiventobferverexactement ce qui se pra- « tique dans les Monasteres les plus reguliers, pour y voir des « exemples vivants de la morale Chrétienne. « PARAGRAPHE X I. Du gouvernement des Monafteres, tant en Orient qu'en Q Occident. UELQUES difficultés qui se rencontrententre plusieurs Sçavans, touchant l'autorité & le pouvoir des Exarques ou Superieurs Generaux des Moines d'Orient, nous obligent à parler dela forme du gouvernement qui a été pratiquée entre les Religieux pour le maintien de l'observance reguliere. Il est certain que fi S. Pachome n'a pas été l'auteur de la vie Coæœnobitique; on lui a au moins l'obligation d'avoir le premier prescrit des loix pour le maintien de l'observance reguliere, & d'avoir été le premier Instituteur des Congregations Religieuses. Nous entendons par le mot de Congregation une sainte societé de plusieurs Monafteres, ne faisant qu'un seul corps, soumis à une même regle, unis par des afsemblées generales qui se tiennent de tems en tems pour élire des Superieurs, & pourvoir à tout ce qui peut maintenir la regularité & le bon ordre. Ce ne font pas seulement les maisons Religieuses qui ont formé des Congregations; plusieurs personnes feculieres, fans être engagées par des vœux solemnels, en ont formé à leur imitation, dans lesquelles Congregations on pratique à peu près les mêmes choses que dans les Congregations regulieres, comme sont celles des Prêtres de l'Oratoire, de la Mission, des Oblats de S. Ambroise, du S. Sacrement, des Barthelemites, des ouvriers pieux, & plusieurs autres: & l'on peut dire qu'il ne se pratique presque rien dans ces congregations qui n'ait été pratiqué dans celle de Tabenne établie par S. Pachome. Premierement elle avoit son Abbé ou Superieur General, fon Oeconome ou Procureur pour l'administration du tem. porel. On y entretenoit l'observance par la visite qu'on faifoit tous les ans dans les monasteres; on y faisoit des assemblees generales, où on élisoit des Superieurs & Officiers, selon qu'il en étoit besoin; & l'on se pardonnoit mutuellement les fautes qu'on pouvoit avoir commises les uns contre les autres. Chaque monastere avoit son Superieur à qui l'on donne le ti. tre de Pere & de Chef. Il avoit fous lui un Vicaire ou fecond pour suppléer à son défaut. Et commele monaftere de Pabau ou de Baum étoit le plus confiderable, il tut regardé comme le Chef de l'Ordre; quoique la congregation retînt toujours le nom de Tabenne, à cause que ce fut dans ce lieu-là que que S. Pachome fonda fon premier monaftere. Mais c'étoit danscelui de Baum que tous les religieux se rassembloient à Pâques, pour celebrer la fête avec ce S. Fondateur, & où l'on tenoit les affemblées au mois d'Août. Thomaf- Le P. Thomassin parlant du Concile de Vennes, qui défend fin Difeip à un abbé d'avoir plusieurs abbayes fous le nom de Celles ou desde monafteres, dit: que ce Concile semble ne pas approuver 49.num.9.une chose qui étoit commune à tous ces fameux & illuftres 10. 11. peres des Deferts. Et confiderant le grand nombrede Reli. 3.1. I. C. gieux qui étoient sous la conduite de tant de faints Abbes, il dit aussi : que tous ces exemples ne perimettent pas de douter qu'un seul Abbé ne fût comme le Superieur General chargé d'un grand nombre de Monafteres, qui faifoient comme un seul corps, & une congregation dont il étoit le chef. Mais nous n'avons point de preuves que les disciples de saint Antoine, de saint Macaire, & des autres Peres dont nous avons les Regles, ayent forme des congregations. Cette pratique de faire des affemblées generales a été particuliere à l'Ordre de faint Pathome qui en a été l'Instituteur. Quoique cette pratique ait pris fon origine en Orient, elle n'y subsiste plus depuis un très long tems; mais les religieux d'Occident l'ont toujours conservée comme celle qui pouvoit contribuer au maintien de la difcipline & de la regu. larité, & afin de l'affermir davantage, comme les differentes congregations qui se font établies, se font agrandies, & fe font étenduesen differens pays; elles se sont diviféesen plusieurs Provinces, où l'on tient de pareilles assemblées Provin |