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CONGRE- Maur a donnée au public l'an 1701. où il prouve par des arSATIONSDE gumens très forts (dont M. Baillet n'a pas neanmoins été DE MAR convaincu) que S. Maur Fondateur de l'Abbaïe de GlanMOUTIER. feuil en Anjou, est le Disciple de saint Benoît, & qu'il fut

envoïé en France par ce faint Patriarche des Moines d'Occident.

C'est donc ce Disciple de faint Benoît que nous reconnoiffons pour le Fondateur de l'Abbaïe de Glanfeüil. II étoit parti du Mont-Caffin avec trois Religieux que faint Benoît lui avoit donnés, & il avoit été accompagné par Flodegard Archidiacre de saint Innocent, Evêque du Mans, & par Harderad fon Intendant, qui avoient été les demander à ce saint Patriarche de la part de ce Prélat qui vouloit les établir dans son Diocéfe. Mais étant arrivés à Orleans, & y aïant appris la mort de saint Innocent, & que celui qui avoit ufurpé fon Siege n'étoit pas disposé à les recevoir, ils allerent en Anjou sur les assurances que leur donna Harderad qu'ils pourroient s'y établir par le crédit d'un Seigneur nommé Flore, qui étoit en faveur auprès de Theodebert Roi d'Austrasie, à quicette Province obéïssoit en partie. En effet Flore eut tant de veneration pour faint Maur, que non content d'avoir fondé pour lui un Monastere à Glanfeüil fur la riviere de Loire dans le Diocése d'Angers, il lui offrit encore fon fils Bertulfe âgé de huit ans,pour être élevé sous fa difcipline; & n'étant pas encore satisfait d'avoir fait bâtir ce Monaftere & d'y avoir donné fon fils, il s'y donna luimême, après avoir demandé permiffion au Roi de se retirer de la Cour: ce qu'il obtint de ce Prince, qui s'y étant trouvé le jour qu'il devoit prendre l'habit pour honorer la cerémonie de sa présence, lui coupa lui-même les cheveux, donna au Monastere une terre confiderable, & confirma les donations que Flore y avoit faites.

Huit ans après l'arrivée de saint Maur en France, l'Abbaïe de Glanfeüil fut dédiée par Eutrope Evêque Diocésain accompagné de plusieurs autres Evêques de la Province. On y avoit bâti quatre Eglises dont la premiere fut confacrée en l'honneur de faint Pierre, la seconde en l'honneur de saint Martin, la troisiéme qui étoit la plus petite, porta le nom de faint Severin, Apôtre des Bavarois, & la quatriéme qui étoit en forme de tour quarrée, à l'entrée du Mona

GATIONS

MOUTIER.

stere eut pour titre saint Michel Archange. Les Religieux CONGRE qui y étoient pour lors, au nombre de quarante, se multiplie- FRANCES DE rent beaucoup dans la suite, de forte que vingt-fix ans après DE MARla construction de ce Monaftere, il y en avoit cent quarante; lequel nombre fut fixé par saint Maur, parce que le revenu de l'Abbaïen'en pouvoit pas nourrir davantage. Saint Maur aïant gouverné ce Monaftere pendant plusieurs années, & fentant fes forces diminuer, resolut de ne plus fortir du Monastere,& de se reposer pour le gouvernement de sa Communauté, sur le Prieur, & sur les autres Officiers de sa Maison. Il se démit ensuite de la Charge d'Abbé, & aïant fait élire en sa place Bertulfe, fils de Flore Fondateur de ce Monaftere, il se renferma dans une cellule proche l'Eglise de saint Martin, avec deux Religieux qui voulurent bien demeurer avec lui, & le foulager dans sa vieillesse. Ce fut dans ce lieu qu'il eut une révelation que Dieu devoit bien-tôt retirer du monde la plupart de ses Disciples. En effet il en mourut, en cinq mois, cent seize; ensorte que la Communauté fut réduite à vingt-quatre personnes. Ce saint Abbé ne survêquit pas long-tems à cette perte, étant mort le 15. Janvier 584.

Ce que Bucelin & quelques autres Auteurs ont avancé que saint Maur avoit bâti jusqu'à cent soixante Monasteres en France, & reformé encore un plus grand nombre, est sans aucun fondement: il n'y a pas non plus d'apparence que le Monaftere de Glanfeüil ait été le Chef d'une Congregation, à laquelle plusieurs Ecrivains ont donné le nom de Congregation, de France. Il est bien plus croïable que pen. dant que faint Maur vivoit, ce Monastere dépendoit de ce. lui du Mont Caffin; puisqu'il lui a été encore soûmis dans la suite, jusques en l'an 755. que le Roi Pepin aïant donné ce Monaftere de Glanfeiil avec tout les biens qui en dépendoient à Gaidulfe originaire de Ravene, homme très cruel, il le ruina entierement, & perfécuta cruellement les Religieux qui y étoient au nombre de cent quarante, comme il avoit été fixé par saint Maur. La plupart ne pouvant fupporter les mauvais traitemens de ce tyran qui leur refusoit jusqu'aux choses necessaires pour la vie, abandonnerent le Monastere. Il y en eut seulement quatorze qui y resterent pour chanter l'Office Divin; mais à la fin étant abbatus de

CONGRE faim & de misere, & ne pouvant observer la Regle, ils pri FRANCE, ET rent l'habit de Chanoines.

GATIONSDE

MOUTIER.

DEMAR- Gaidulphe se servit de cette occasion pour les chasser du Monastere, & mit en leur place cinq Chapelains. Il ruina entierement les lieux Reguliers, commençant par l'Eglise qu'il renversa de fond en comble, afin que les Religieux n'y pussent pas revenir. Il brûla ou jetta dans la riviere de Loire les titres & les actes des donations qui avoient été faites à cette Abbaïe, à la réserve de quelques-uns qu'il mit en dépôt dans saint Aubin d'Angers, où ils furent aussi perdus pendant les ravages des Normans. Mais il ne joüit pas long-tems du fruit de ses crimes ; car aïant appellé ses amis pour se réjoüir avec lui de l'extinction de l'Ordre Monaftique dans Glanfeüil, il mourut au milieu du festin. Après sa mort tous les biens de cette Abbaïe furenten proïe à tous les Seigneurs de la Province: le Comte d'Anjou, & plu fieurs autres personnes, s'emparerent des terres & des revenus de l'Abbaïe, qui demeura déferte & inhabitée jufque sous le regne de l'Empereur Loüis le Debonnaire; quoique dès l'an 781. elle eût été restituée au Mont Cassin, comme étant de sa dépendance, par le Pape Adrien I. & par l'Empereur Charlemagne, comme nous avons dit dans le Chapitre quatriéme.

L'Empereur avoit donné cette Abbaïe au Comte Rorignon, qui touché de compassion de l'état pitoïable où elle étoit reduite, en fit relever les bâtimens, fit venir des Religieux de Marmoutier, pour rétablir les Observances Regulieres dans ce Monaftere, qu'il soûmit quelques années après à celui de saint Pierre-des Fossez, appellé depuis faint Maur, & en obtint la confirmation de l'Empereur. Mais Pepin I. Roi d'Aquitaine, aïant donné ce Monastere de Glanfeüil à Ebroïn, qui fut ensuite Evêque de Poitiers, du vivant même du Comte Rorignon, qui étoit proche parent de ce Prelat, il y laissa les Moines de faint Pierre des Foffez tant que le Comte vêcut; mais après sa mort, leur aïant demandé par quel titre Glanfeüil leur avoit été soûmis, & n'aïant pu representer les Lettres de l'Empereur Loüis le Debonnaire, qui avoient été enlevées ou brûlées malicieufement, Ebroïn les fit fortir de ce Monastere. Ils y rentrerent neanmoins quelque tems après, & il leur étoit encore foumis, lorsque l'an 868. l'on porta chez eux le Corps de CONGREsaint Maur, que l'on avoit retiré de Glanfeüil, pour le sau- FATIONSDE ver de la rage des Normans: ce qui lui a fait donner dans DE MAR la suite le nom de ce Saint. Mais sous le Pontificat d'Urbain MOUTIER. II. les Moines du Mont-Cassin aïant encore reclamé Glan

feüil, il leur fut restitué, & ils l'ont possedé pendant près de deux fiécles. A la verité si Glanfeüil n'a pas été Chef d'une Congregation, étant le premier Monastere de l'Ordre de faint Benoît en France, il doit être regardé comme une source feconde qui en a produit une infinité d'autres, par rapport à la Regle de faint Benoît qu'il leur a communiquée, dont faint Maur avoit reçu l'Autographe, écrit de la main de ce faint Fondateur, en partant du Mont-Caffin, avec un poids, & un vase pour mieux observer ce qu'elle prescrit de la quantité du pain & du vin dans le repas.

Le Monastere de Marmoutier, qui fut l'un de ceux qui reçurent cette Regle, doit être regardé comme le Chef de la plus ancienne Congregation de l'Ordre de faint Benoît en France, aïant eu plus de deux cens Prieurés de sa dépendance. Cette celebre Abbaïe eut pour Fondateur le Grand faint Martin Archevêque de Tours. Il exerça d'abord la profession Religieuse à Milan, d'où aïant été chassé par les Ariens, il passa dans l'isle d'Albengue, qui eft proche la côte de Gennes, où il mena pendant quelque tems une vie solitaire. Il quitta ensuite cette retraite, sur l'avis qu'il eut que saint Hilaire qui avoit été banni par les Heretiques, retournoit en son Diocése, & l'aïant suivi en France, il bâtit le Monaftere de Ligugé proche Poitiers, où après avoir demeuré environ quinze ans, il en fut tiré pour remplir le Siége de Tours. Etant devenu Evêque, il ne cessa pas pour cela de vivre en Religieux ; & pour pratiquer toûjours exactement les exercices Monastiques, il fonda un Monastere proche sa ville Epifcopale, dont la Communauté fut en peu de tems de quatre-vingt Religieux, qui menoient avec lui une vie austere & penitente. Personne n'avoit rien en propre, tout étoit en commun, il n'étoit pas permis de rien vendre, ni de rien acheter, quoique ce fût la coûtume des Moines de ce tems-là. L'unique art que l'on y exerçoit étoit de transcrire des Livres ; encore n'y avoit-t-il que les jeunes qui y fussent emploïés ; & les anciens ne s'occu

CONGRE- poient que de la priere. Il étoit rare que l'on fortît de sa FADE cellule, à moins que cene fût pour se rendreau lieu de la DE MAR priere. Ils ne faisoient qu'un repas par jour; l'usage du vin

FRANCE ET

MOUTIER.

n'étoit permis qu'aux malades, quoique le lieu où le Monastere étoit situé fût un grand vignoble. La plupart n'étrient habillés que d'étoffes de poil de chameau; & c'étoit un crime parmi eux d'avoir un habit qui ressentît un peu la mollesse, quoiqu'il y eût dans cette Communauté un grand nombre de personnes de qualité. Telle étoit la Difcipline qui s'observoit dans ce Monastere, qui fut appellé Marmoutier, après la mort de saint Martin, comme qui diroit, le grand Monastere, pour le diftinguer des autres que ce Saint avoit fait bâtir, principalement lorsque l'on en eut élevé un fur fon tombeau, qui a porté son nom depuis, & qui est presentement un Chapitre de Chanoines Seculiers.

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Lorsque ce Monaftere de Marmoutier eut dans la suite reçu la Regle de faint Benoît, plusieurs Seigneurs l'enrichi rent par les donations qu'ils y firent, tant à cause de la grande devotion que l'on portoit en France à saint Martin fon Fondateur, qu'à cause de saint Benoît, pour lequel on n'avoit pas moins de veneration, & dont la Regle étoit pratiquée avec beaucoup d'exactitude dans ce Monaftere. Les Rois de France le prirent même sous leur protection. Mais peu de tems après les Normans en interrompirent la Regularité: car y étant venus l'an 853. ils passerent au fil de l'épée cent feize Religieux, n'y en aïant eu que vingt-quatre qui sauverent leur vie, en se cachant dans des cavernes. Leur Abbé Heberne s'étoit aussi retiré dans un lieu secret; mais ces Barbares l'y aïant découvert, & s'étant saifis de lui, ils lui firent souffrir de cruels tourmens, pour l'obliger à declarer l'endroit où étoit le Trésor de l'Eglife, & les grottes où s'étoient refugiés les Religieux; mais ce fut inutilement, il ne voulut rien avoüer. Les ennemis s'étant retirés, les Chanoines de saint Martin & les Bourgeois de Tours allerent confoler ces Religieux, qu'ils reconduifirent avec leur Abbé dans leur Eglife, & ausquels ils procurerent toutes fortes de secours. Six mois après, comme on eut avis que les Normans retournoient vers la ville de Tours, & qu'ils avoient dessein de l'affieger, douze Chanoines de l'Eglise de faint Martin, pour soustraire fon corps à la fureur de ces

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