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VIE DUR.P.
FOURIER.

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A peine estoit-il jour qu'il entroit au Confessionnal, d'où il ne
fortoit que pour monter en Chaire pour donner quelques In-
structions à ses Paroissiens; & il n'en estoit pas plustostsorti qu'il
rentroit au Confessionnal, où il demeuroit souvent jusqu'à
neuf heures au soir , sans se donner aucun moment pour
prendre sa refection. Ce Saint homme voïant que la source
de toutes les corruptions estoit la mauvaise education des en-
fans , il trouva que le moïen le plus propre pour y remedier,
estoit celui de faire ensorte que dès leurs premieres années
on les pust élever & nourrir dans la connoissance , & dans la
crainte de Dieu , & dans l'amour de la Religion , & qu'à
certe fin il y eust des personnes de l'un & l'autre sexe, les hom-
mes pour les garçons , & les femmes pour les filles, qui fussent
chargés par Veu & par la Profesion Religieuse à les instrui-

Væu
re & à travailler sur ces jeunes caurs comme sur de la cire
molle , pour y imprimer toutes les marques de cette crainte,
& de cet amour , & cela gratuitement, afin que par faute de
biens ou de commodités temporelles, personne ne fust privé
de cette education & de ces fruits, ( ce sont les paroles ex-
presses de son Institution. ) Cette resolution prise le vingt
Janvier 1598. fut tenuë secrette jusqu'à ce qu'il plust à Dieu de
lui donner commencement en certaines filles de Mataincourt,
qui degourées du monde par les Predications de ce saint Insti-
tuteur , furent les premieres qui donnerent naissance à l'Or.
dre de la Congregation de Notre-Dame. Mais comme il tra-
vailloit fortement à leur establissement & à la Reforme des
Chanoines Reguliers , dont nous avons parlé dans le Chapitre
precedent ; ce qui l'avoit obligé de s'absenter de sa Paroisse,
qu'il avoit laissée sous la conduite d'un Vicaire fort vertueux,
les démons unis ensemble y firent un étrange ravage plus
de quarante personnes furent possedées de ces malins

esprits.
Čes tristes nouvelles lui aïant esté porcées, il en fut sensi-
blement touché ; & comme il aimoit ses Paroissiens plus ten-
drement qu'un pere n'aime ses enfans, il quitta toutes ses affai.
res pour courir à leur secours. Ce malheur fut suiviquelques
années après d'un autre , qui fut celui de la guerre, qui me-
naçoit de tout desoler , il predit à ses Religieuses une grande
disette & les avertit de faire quelque reserve & provifions de
grains.

Comme il estoit pour lors General de la Congregation , il

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en

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VIF DUR P. resolut de visiter ses deux Religions, afin de rassurer son FOURIER.

troupeau parmi les troubles & les confusions de la guerre. Comme il alloit de Bar-le-Duc à saint Mihel , pour se retirer

» ensuite à Pierre-Mont, il fut rencontré par des voleurs, qui le contraignirent de retourner sur ses pas. Mais ne sçachant où aller pour chercher un lieu de sureté, il vint à tout hazard à Mataincourt , pour voir encore une fois les habitans , qu'il avoit quitté de droit par sa Profession ; mais non pas de ceur, ni d'affection. Il demeura quelque-tems dans ce Village , qui n'aïant ni portes , ni murailles, fut biçn-toft en la possetion des Soldats, qui le contraignirent d'en sortir , & allant d'un costé & d'un autre pour chercher un azile , il arriva enfin l'an 1636. à Gray dans le Comté de Bourgogne , comme dans un port d'emprunt. Il y vêcut comme un inconnu , sans!aucune

Y aslistance & sans aucun credit, Il secourut les peftiferés, cathechisa les plus ignorans , & tout cassé qu'il estoit, il seignoit à lire & à écrire aux enfans, jusqu'à ce que le douze Octobre de l'an 1640. il fut attaqué d'une fieyre quarte , qui l'aïant fait languir quelque-tems le fit enfin mourir , à l'âge de 76. ans le neuf Decembre de la mesme année.

Je ne m'arrêterai point à décrire ses vertus en particulier, il suffit de dire qu'il les a toutes possedées dans la perfection, on peut les voir amplement descrites dans sa vie que plusieurs Auteurs nous ont donnée. Son corps aïant esté porté de Gray en Lorraine, les Habitans de Maraincourt firent bien paroistre l'estime qu'ils avoient pour leur ancien Pasteur ; car le corps aïant reposé en passant dans leur Eglise , ceux qui le conduifoient ne voulant demeurer qu'une nuit en ce lieu, les Habitans ne voulurent jamais permettre qu'on enlevast de leur Eglise ce précieux Tresor, protestant de perdre plustost la vie, que leur Pere,&qu'on ne l'emporteroit qu'en les foulant aux pieds.C'est dans ce lieu que ce faint homme opere continuellement des miracles,&où on accourt de toutes parts pour honorer ces saintes Reliques, quoique l'Eglise n'ait encore rien determiné sur sa sainteté : mais on attend incessamment sa Beatification qu'on poursuit à Rome, les informations estant toutes faites, n'y ažant plus que le Pape à prononcer.

Voïez sa vie par le Pere Bedel, & Hermant , establissement des Ordres Religieux.

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CHAPITRE

Religieuse de l'ordre de ta Congrégation de Nòtre-Dame

.

119.

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RELIGRU.
SES DE LA
CONGRE-
GATION DE
N. DAMS.

CH A P I T R I

LXIV.

a

ز

Des Chanoinesses Regulieres de la Congregation de Notre

Dame , avec la Vie de la V. M. Ālix le Clerc Fonda

trice ego premiere Religieuse de cet Ordre. 0

Uorque le R.P. Fourier soit l'Instituteur des Filles de

la Congregation de Nôtre-Dame, & qu'on ne lui puisse
pas alfputer ce titre , puisque c'est lui qui a dressé leurs Conf-
titutions , qui leur a prescrit leur maniere de vivre, & qu'il
a emploïé tous ses soins pour leur establissement ; néanmoins la
V. Mere Alix le Clerc, qui a esté la premiere Religieuse de
cer Ordre, a eu tant de part à cette sainte cuvre qu'on ne peut
pas aussi lui en refuser le titre de Fondatrice.

Elle nâquit à Remiremont petite ville de Lorraine le deux
Fevrier 1576. & ses parens qui estoient des premieres familles
de ce lieu, l'éleverent dans la piecé & dans la vertu. Elle ef-
toit d'un naturel fort doux. La modestie qui paroissoit sur son
visage lui attiroit l'admiracion de tout le monde, & sa pre-
fence imprimoit du respect & de la retenue à tous ceux qui
la regardoient. Elle für occupée néanmoins pendant la jeu-
nesse des vanités du monde , & elle s'ennuïoit dans cet estat
sans en scavoir la cause.
Son
pere

estant tombé malade & estant reduit dans une ef-
pece de langueur , on lui conseilla de changer d'air pour le
recouyrement de la santé. Il vint avec toute sa famille demeu-
rer au village d'Hymont qui estoit une annexe de la Cure de
Mataincourt. La jeune Alix en fut ravie , croïant par ce moïen
se retirer du monde en s'esloignant des personnes qui l'en-
tretenoient dans la vanité ; mais le voisinage de la ville de
Mirecourt , qui n'est éloignée d'Hymont que

d'un
quart

de
lieuë , l'engagea dans de nouvelles compagnies. Elle se sen-
tit mesme plus de penchant à la vanité, & elle trouvoit dans
ce lieu plus de contentement selon le monde qu'à Remi -

Deux ans se passerent ainsi jusqu'à ce que le P. Fourier fut pourveu de la Cure de Mataincourt. Il commença à prêcher Tome 11.

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remont

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