CHANOI. NES REGULO DE NOTRE SAUVEUREN LORRAINS Des Chanoines Reguliers de la Congregation de Notre Sauveur en Lorraine. des Congregations de saint Victor & de France, le zele que le Cardinal de la Rochefoucaut avoit temoigné pour la Reforme des Chanoines Reguliers en France. Le Cardinal de Lorraine Legat à Latere en ce Duché avoit aussi entrepris la Reforme du mesme Ordre dans les terres de fa Jurisdiction; mais ce ne fut pas avec le mefme succès. llavoit assemblé à ce fujet l'an 1595. les Abbés de cet Ordre en Lorraine, & ses paroles soutenuës par l'éclat de la pourpre & le rang qu'il tenoit en ce Païs-là, sembloient avoir fait impression sur leurs esprits. Ils dresserent pour lors quelques Reglemens & promirent de s'y soumettre; mais cette entreprise s'evanoüit en peu de tems par la tiedeur & la lâcheté qu'ils apporterent à seconder les intentions de ce Prince. Il ne se rebuta point néanmoins pour cette fois, & aïant de nouveau convoqué tous les Superieurs par ses Lettres du vingt-sept Mai 1604. Il leur allegua plufieurs motifs pour les animer à prendre cette affaire à ceur. Mais ses avis & ses conseils ne furent pas plus suivis dans cette dernierre assemblée que dans la premiere , & l'on ne parla plus de Reforine que dans l'année 1621. après la mort de ce Cardinal. Gregoire XV. enyoïa un Bref du dixiéme Juillet de cette année pour autoriser cette entreprise ; & Jean de Maïllane des Porcelets Evesque de Toul, n'épargna ni ses peines, ni son credit pour executer les volontés du Pape & contribuer au progrès de la Reforme à laquelle le Reverend Pere Pierre Fourier Chanoine Regulier & Curé de Mataincourt eut le plus de part ; car toute la conduite spirituelle de la Congregation qui a produit certe Reforme , & dont il est reconnu pour l'Instituteur,estoit reservéc à sa prudence & à fa vertu. Tandis que cet Evefque faisoit tous ses efforts pour tpouver une Maison pour y placer ceux qui embrasseroient la Reforme,le Pere Fourier presentoit à Dieu , pour ce sujet ses Vaux & ses Prieres , qui furent exaucées peu de tems après ; car: ز REGUL. LORRAINE. GRARGI. l'Abbaïe de saint Remi de Luneville, s'offrit pour servir de DE NOTRE baze & de fondement à cet edifice de la Reforme. Il y eut SAUVEUREN six personnes, tant des anciennes Maisons, que de l'Université de Pont-à-Mousson qui se joignirent à ce saint homme ; & tous sept pour se preparer avec plus de ferveur à l'accomplissement d'un ouvrage de cette importance, se retirerent pour quelques mois dans l’Abbaïe de sainte Marie Majeure de Pont-àMousson de l'Ordre de Premontré comme dans un lieu d'einprunt , & ils y prirent l’habit de la Reforme le jour de la Purification de Notre-Dame de l'année 1623. consistant en une soutane noire chargée d'un petit rocher ou banderolle de lin, large d'environ cinq doigts, dont les extrêmitez sont jointes du costé gauche en forme d'echarpe, à quoi ils ajoutent,pour assister au Cheur,le surplis avec l'aumuce & le grand rochet, avec la chape nuire l’hiver. Aïant esté ainsi reyestus , ils se retirerent à Luneville pour commencer leur Novitiat sous la conduite, & direction du Pere Fourier. Ils entrerent dans cette Ecole de pieté le jour de sainte Scholastique, & à peine furent-ils arrivés , qu'un ancien Profez de la Maison se joignit à eux. Ils firent un grand progrès sous un si habile Maistre, qui peu à peu introduisit l'usage des haires, des disciplines, des cilices & des autres mortifications ; & les voiant animez d'un grand zele pour le falur du prochain , illeur proposa l'instruction gratuite de la jeunesse, non seulement pour apprendre le Lacin ; mais encore à lire & écrire, aux riches & aux pauvres sans aucune distinction, Si-toft qu'ils auroient l'usage de raison, comme il se pratiquoit déja à l'egard des filles dans l'Ordre qu'il avoit fondé peu de tems auparavant pour des Religieuses sous le nom de la Congregation de Notre-Dame, voulant que celle de ces nouveaux Chanoines Reguliers prît celui de notre Sauveur,& non pas de saint Sauveur, pour montrer qu'il est tout à nous ; & afin que ses Religieux en conservassent le souvenir , il leur a ordonné que quand ils s'écriroient les uns aux autres , ils commenceroient par ces paroles de saint Paul à Tite: Gratia vobis & pax à Deo Patre on Christo Jesu Salvatore noftro. Ce fut pendant ce tems de Noviciat que le Pere Fourier ebaucha les Constitutions de cet Ordre; & l'année estant expirée ces Religieux prononcerent leurs Vaux solemnels, à l'exception de ce saint Reformateur , qui voulut differer à le ز NES REGUL. faire pour les raisons que nous dirons dans la suite. Ainsi CHANOIn'aïant esté que sept lorsqu'ils prirent l'habit, ils ne furent aussi de NOTRE que sept à faire Profession, qui fut le vingt-cinq Mars 1624. la ceremonie s'en fit publiquement entre les mains de l'ancien Prieur de la Maison. Le Pere Fourier ne se contentant pas que lui qui estoit le premier mobile de cer Ouvrage & cinq des lept qui faisoient Profession , fussent Religieux anciens, il en voulut encore un pour recevoir les Væux, afin de les incorporer à l'Ordre , & que cette Reforme n'en fust differente, qu'autant qu'un malade retourné en santé est different de luimesme. Ils entrerent l'année suivante à faint Pierre-Mont, à Domevre & à saint Nicolas près Verdun : en 1626. à Belchamp : en 1627. à saint Leon de Toul , à saint Nicolas de Pont-àMousson &au Prieuré de Vivier; de sorte qu'en quatre années , il y eut huit Maisons qui embrasserent cette Reforme. Enfin l'an 1628. le Pere Fourier envoia à Rome deux Religieux d'un grand merite qui ont esté dans la suite Generaux de cet Ordre , pour obtenir l'union de ces Maisons , & en faire une Congregation sous le titre de Notre-Sauveur , qui seroit gou vernée par un General, qui en auroit la conduite pendant sa vie, ce que le Pape Urbain VIII. accorda par Bulle de la mesme année, & l'année suivante le Reverend Pere Nicolas Guinet fut par le consentement unanime des Superieurs & des Vocaux, choisi pour premier General, le P.Fourier n'aïant pas encore fait Profession ; car il avoit bien prevu que s'il estoit Profez, on ne manqueroit pas de le choisir pour General; ainsi croiant que le Pere Guinet qui estoit plus jeûne que viyroit plus long-tems selon les apparences , il fit ses Vaux. Mais la mort ruina tous ses desseins ; car aiant enlevé ce premier General en muins de trois ans & demi , il fut élu pour Chef de cette Congregation en 1632. ce qui lui fit verser des torrens de larmes, Ion humilité lui faisant apporter mille oppositions à cette election. Cette vertu accompagnoit tellement toutes ses actions , qu'on peut dire qu'elle lui fit executer une entreprise où des Cardinaux, des Legats, des Evesques , & d'autres Prelats n'avoient pû réüslır avec les menaces & les forces , tant Ecclesiastiques que Seculieres ; & l'on que ces Chanoines auroient fait un grand progrès, si les guerres qui arriverent en Lorraine , lorsque le Pere de Matain. Tome II, lui, peut croire Ggg LORRAINE. Chanol- court travailloit à l'agrandissement de la Congregation , n'euf- liers à cause de cette banderolle de lin , que ceux-là preten- par ceux de la Congregation de saint Sauveur de Latran. L'on y voit d'un costé un Chanoine de Notre-Sauveur en Lorraine en posture de suppliant, le bonnet quarré à la main , qui demande d'entrer parmi les autres, & un Chanoine de Latran lui faisant figne de la main que cela ne se fe peut pas. L'on y voit aussi d'un autre costé un autre Chanoine à la banderolle, ( comme il y en a plufieurs en France , & en Allemagne , qucre la Congregation de Lorraine , ) qui estoit entre par adresse dans ce cercle , & qu'un Chanoine de Latran challe dehors en le poussant par les épaules, c'est ce que les curieux qui iront à Rome pourront remarquer dans cette Sacristie de faint Laurent. Cependant le Pere Bedel Chanoine de la Congregation de Notre-Sauveur, dans la vie qu'il a donnée du Pere Fourier leur Reformateur , où il parle de l'origine & du progrès de cette Reforme, marque que la dispense de porter ainsi ce petit rochet ou banderolle sur la soutane a esté en usage pendant plusieurs siecles , & confirmée par des Bulles de l'an 1ģ12. C'est aussi le sentiment de Penot , & il y en a encore plufieurs Hif. trip . en France, en Allemagne, & en Flandres , qui portent cette lib.2 . capo Banderole & ne vivent point en Congregation estant soumis aux Evesques. Il y en a en Allemagne qui ne lient point à costé cette banderolle ; mais qui la laissent pendre entierement , & il y a une petite bande, comme au scapulaire des Chartreux, qui tient aux deux costez de la banderolle. Ceux de NotreSauveur en Lorraine ont pour armes d'azur à l'image de Notre-Sauveur tenant un monde dans la main, & outre les Maisons qu'ils ont en France & en Lorraine, ils en ont auffi quelques-unes en Sayoïe. Penot, |