REGLE appuyoient par des autorités de l'Ecriture-Sainte. Ils furent neanmoins tous rejettés, & elle approuva celui qui lui fut pre- DES CARsenté par les religieux Bafiliens, & qui consistoit en une tu. Mes. nique de peau, une ceinture de cuir & un manteau de couleur de safrand : ils ne lui donnerent point de bonnet ; mais ils avoient reprenté ce prophete ayant la tête & les pieds nuds. La congregation ordonna qu'il feroit ainsi peint & exposé dans l'église des Bafiliens, & termina ainsi ce procès le 16. Mars 1686. après dix années de contestations. Le pere Papebroch Papebroch dans sa reponse au pere Sebastien de saint Paul refponf. ad n'a pas oublié de lui parler de ce procès, dont le recit lui avoit paulo art été fait à Rome par le pere dom Pierre Menniti procureur 16. num. general des religieux de l'Ordre de saint Bafile, & qui est assez 32. conforme à ce qui m'en a été dit aussi, étant à Rome en 1699. par le reverend pere dom Appollinaire d'Agresta general de cer Ordre. Avant ce differend ils avoient renoncé à l'alliance avec les Bafiliens: c'est pourquoi ils ont foin de retrancher du titre de leur regle, dans toutes les éditions qu'ils en font, qu'elle a été tirée des écrits de saint Bafile. Elle fut premierement approuvée par le pape Honorius III. l'an 1224. Mais après que les Carmes eurent paffé en Europe, & qu'ils y eurent fondé des couvents, ils trouverent qu'il y avoit dans cette regle quelques articles qui avoient besoin d'être corrigés & mitigés. Ils deputerent à cet effet deux religieux vers le pape Innocent IV. qui donna commission à Hugues cardinal de fainte Sabine, furnommé de saint Cher, de l'Ordre de faint Dominique, & à Guillaume évêque d'Antrada, ville de Syrie appellée presentement Tortose, pour examiner cette regle & faire telles corrections que bon leur sembleroit. Ces commissaires jugerent à propos d'ajoûter au premier article, où il est parlé de l'obéissance que les freres doivent au prieur, qu'ils garderoient aussi la chasteté, & n'auroient rien en propre. Comme il n'y étoit point parlé des lieux où devoient être situés leurs couvents, & que, comme ils étoientermites, il y en avoit qui croyoient qu'ils ne pouvoient demeurer que dans des folitudes; les commissaires Apoftoliques, pour lever tous fcrupules, dirent qu'ils pouvoient avoir des couvents dans des solitudes & dans les autres lieux qui leur feroient offerts, pourvû que l'observance reguliere y pût P. Sebast. à MES. REGLE être gardée. Le patriarche Albert avoit défendu pour tou. DES CAR- jours l'usage de la viande, excepté dans le tems des maladies & d'extrême debilité: les commissaires ôterent les mots de toujours & d'extreme ; & afin que les Carmes ne fussent pas à charge à leurs hôtes, ils ordonnerent que dans les voyages ils pourroient manger des herbages cuits avec la viande ; & même manger dela viande étant sur mer. Ils prescrivirent le filence feulement, depuis complies jusqu'à prime du jour suivant. Ils leur permirent aussi de manger dans un refectoire commun, au lieu qu'auparavant ils devoient manger chacun separément dans leurs cellules. Ils firent encore quelques reglemens touchant l'office divin, & leur accorderent la permiffion d'avoir des ânes ou des mulets, & de nourrir des animaux pour leur usage. Cette regle avec ces corrections & mitigations, fut approuvée par Innocent IV. l'an 1247. & confirmée dans la suite par plusieurs papes. Elle fut encore mitigée par Eugene IV. & Pie II. qui y firent aussi des changemens, comme nous dirons en son lieu. Ceux qui l'observent ainsimitigée sont appellés conventuels,&ceux qui suivent la regle avec les changemens & les mitigations qui y ont été faites par les commissaires d'Innocent IV. font appellés observants. Les Carmes & les Carmelites déchaussés l'observent aussi. Et elle est regardée dans l'Ordre comme la premiere & la primitive : ainsi s'il étoit vrai que Jean XLIV. évêque de Jerusalem, eût donné une regle aux Carmes, ou qu'ils eussent suivi celle de saint Bafile, avant que d'avoir reçu celle du patriarche Albert; il s'enfuivroit que les Carmes & les Carmelites dechausses, aussi-bien que les observants, ne suivroient pas la regle premiere & primitive de l'Ordre. La bulle d'Honorius III. de l'an 1224. par laquelle il approuve la regle des Carmes, est la premiere de celles que les fouverains pontifes ont accordées en faveur de leur Or dre: cependant ils pretendent en avoir de plus anciennes, Silvera, 0-& Silvera entre les autres, dit, que les papes Etienne V. pufcul var. qui vivoit l'an 816. Leon IV. l'an 847. Adrien II. l'an 868. op. 2. refol. 2. Sergius III. l'an 908. Jean XI. l'an 931. & Alexandre II. l'an 1061. ont accordé par leurs bulles de grandes indulgences à ceux qui visiteroient à certains jours de l'année les églises des Carmes; lesquelles bulles furent confirmées par le pape Collect. act. SS. t. I. Sixte IV. l'an 1477. Mais Silvera ne s'accorde pas en cela REGLE avec d'autres écrivains de son Ordre, qui mettent Leon IV. DES CAR. à la tête des papes qui ont accordé ces pretendues indul. MES. gences, qui le font suivre par Adrien II. & Etienne V. qui selon eux ne vivoit quel'an 892. & non pas l'an 816. & qui dans le denombrement des autres papes, si favorables aux Carmes touchant ces indulgences, y ont inferé Sirgilius III. & Sergius V. Et comme Silvera, entre les auteurs qui ont fait mention de ces bulles, cire Emmanuel Rodriguez, & Emmanuel qu'il y renvoye le lecteur, on y peut voir dans une bulle de Rodrig. Sixte IV. du sept des Kalendes d'Avril de l'an 1477. & du fixieme de son pontificat, que Rodriguez rapporte dans toute 1.1. p. 225. sa teneur, Sirgilius III. & Sergius V. au nombre des papes qui ont accordé ces indulgences. Il y a bien de l'apparence que le pere Papebroch a lu la même chose dans cet au- Papebroch teur ou dans quelqu'autre ; car en voulant combattre ces in aud Boll. dulgences, il cite les bulles où il est parlé de ces papes suppo- aprilis sés, & dit que ce Sirgilius III. est inconnu dans le catalo-792. gue des papes, & qu'il espere que dans la suite, il y en aura quelqu'un qui prendra le nom de Sergius V. puisque l'an 1009. le quatrième de ce nom fut elu pour souverain pontife; & que depuis ce tems-là il n'y en a point eu. Mais pour faire connoître davantage l'erreur, dit ce scavant Jefuite, il ne faut que faire attention au sommaire de la bulle de Leon IV. rapporté dans celle de Sixte IV. du sept des Kalendres d'Avril de l'an 1477. que ces trois mots : Leo papa quartus, suffisent pour la convaincre de fausseté; puisque toutes les bulles des papes, long-tems avant & après Leon IV. commencent toutes par ces mots. N. Epifcopus fervus fervorum Dei, & que depuis ce pape jusqu'à present, il ne s'en Id Refp. ad trouve qu'une de Pelage II. où il ne prend point cette qua- P. Sebast. lité de serviteur des serviteurs de Dieu, & dont il fait voir aussi la supposition. Paulo art. 14 N 32. 26. Le P. Papebroch remarque encore que dans toute la vie de Leon IV. qui contient plus de vingt-cinq pages, il y est Ibid. num. parlé fort amplement de toutes les graces & privileges qu'il a accordés aux églises, aux Monafteres, aux oratoires, aux autels, & aux villes qui dépendoient de sa jurifdiction; mais qu'il n'y paroît pas la moindre apparence de quelque indulgence qui ait été demandée à ce pontife, ou qu'il ait MES. REGLE accordée à ceux qui aidoient à la construction & reparation DES CAR-des églises, ou qui seroient presens à leurs dedicaces. Qu'en. tre les autres edifices qu'il fit faire pour l'embellissement de Rome, il fit bâtir la ville neuve qui fut appellée de fon nom Leonine, & qu'on appelle presentement le bourg de S. Pierre; & que lorsqu'elle fut achevée, il ordonna que les évêques, les prêtres, les differents Ordres du Clergé de l'église Romaine, après avoir chanté les litanies & le pseautier, feroient avec lui tout le tour des murailles de cette nouvelle ville, en chantant des hymnes & des cantiques, marchant nuds pieds, portant fur leurs têtes de la cendre, & qu'après la ceremonie, il fit distribuer une certaine quantité d'argent, non seu. lement au peuple de Rome, mais aussi aux étrangers qui s'y trouverent, & qu'étant rentré dans saint Pierre, il fit plusieurs presens aux gentilshommes Romains, qui consistoient en or, en argent, & en des étoffes de foie. C'étoit la maniere dont les papes, & principalement Leon IV. en ont usé dans les ceremonies de dedicaces, de benedictions, & de tranflations de corps saints; ce qui a subsiste jusqu'à la fin duonziéme fiecle, que les papes au lieu d'argent & d'autres prefens, commencerent à donner des indulgences pour augmenter la folemnité de ces fortes de ceremonies, & ils en accorderent aussi pour animer ceux qui prenoient la croix, & s'engageoient dans ces fameuses guerres qu'on a appellées Croisades, & qui étoient destinées pour le recouvrement de la Terre-Sainte. Lezana Annaliste de l'Ordre des Carmes, rapporte une autre bulle d'Innocent IV. de l'an 1245. qui exhorte tous les fideles à foulager les religieux du Mont-Carmel qui ne pof. sedoient rien, qui vivoient dans une grande pauvreté, & qui n'avoient rien en propre ; & qui accorde à ceux qui leur feront quelques aumônes, & qui étant veritablement contrits; se feront confeffés, dix jours seulement d'indulgences à diminuer sur la penitence qui leur aura été enjointe. Comment se peut-il faire (dit encore le P. Papebroch) que les Carmes eussent demandé une petite indulgence de dix jours avec obligation de se confesser, si cinq cens ans auparavant ou environ, ils avoient obtenu pour le même sujet des indulgencesà perpetuité de sept années & douze quarantaines, fans aucune charge ni obligation, comme il est énoncé dans ces pretendues bulles de Leon IV. & de ses successeurs; Crefcenze |