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MONAS- retourner, ce qu'ils font facilement à caufe des grands revenus MOINES dont ils joüiffent. Ils ont encore dans cette Ifle qui eft la plus fertille de tout l'Archipel, fix autres petits Monafteres.

TERES DES

GRECS

A Patras ville de Peloponese, ils ont auffi un Convent. Et fur le chemin de cette ville à Glycana, eft le Monastere de Hierocomium, où il y a environ douze Caloyers & une Eglife dediée à la Panagia, c'est-à-dire à la fainte Vierge. Elle eft ba ftie à la grecque avec quelques petites colomnes d'ordre Ionique, tirées des débris de la fortereffe d'Acaya qui eftoit à dix milles de Patras, comme il paroift par une pancarte de ce Convent.

Il y a dans Amourgo, l'une des Ifles Sporades, deux chofes curieufes à voir; l'une eft le Monaftere de Notre Dame des Caloyers Grecs. Il est pratiqué dans une caverne large & profonde, fur le penchant d'une montagne très-haute, du cofté du levant. On n'y peut aller que par un fentier fort étroit dans le roc, & pour entrer dans le Monaftere, il faut monter une échelle de quinze ou vingt échelons. Au haut de cette échelle on trouve une petite porte de fer qui eft la feule entrée. L'Eglife, le Refectoire, & les Cellules des Religieux qui vivent en Communauté, & qui font au nombre de cent dans cette grotte, font prefque toutes creufées dans le roc avec un artifice admirable. L'autre chose remarquable dans cette Ifle qui a une fingularité furprenante, c'est l'Urne de faint George. A l'entrée de l'Eglife de ce Saint, on voit un gros marbre, enfoncé en terre, creufé & poli en dedans, a peu près en forme de ruche. Cette concavité fe remplit d'eau, & fe vuide d'elle-mefme fans que l'on puiffe fçavoir ce qui donne à l'eau ce mouvement, & par où elle peut paffer, le marbe eftant très épais, & fi poli par dedans, avec une fi grande continuité de parties, qu'on n'y apperçoit pas la moindre interruption ni le moindre petit trou: outre que l'ouverture eft toujours bien fermée à la clef. Ce qui furprend davantage, c'eft que dans l'efpace d'une heure, l'Urne fe remplit & fe vuide vifiblement plufieurs fois. On la voit fi pleine en un moment, que l'eau regorge deffus; & elle devient fi feiche un moment après,qu'il ne paroift pas qu'il y ait eu de l'eau. Les Grecs du païs qui ont un voïage à faire, ont la fupeftition de venir confulter l'Urne avant leur depart. Si l'eau y monte, le fuccès en doit eltre heureux. Si au contraire l'Urne eft feiche &que

MONAS.

Peau y foit baffe; ils en tirent un mauvais augure, & ne par- TERES DES tent point; à moins que les affaires qui les y obligent, ne MOINES foient fort preffées. Ce miracle pretendu dont il eft parlé dans GRECS. toute la Grece, eft fort lucratif au Papas ou Curé de cette Eglife de faint George, où le concours des Grecs eft continuel. On y vient des lieux les plus éloignés ; les uns ferieusement pour s'inftruire de l'avenir, les autres pour eftre témoins oculaires de la chofe, & quelques-uns feulement par divertissement fe moquer de la credulité de ces peuples.

& pour

Mais de tous les Monafteres des Caloyers Grecs,il n'y en a point de plus celebres ni où ces Religieux foient en plus grande eftime, que ceux du Mont-Athos dans la Macedoine. Les Grecs donnent à cette montagne le nom d'Agios-oros, c'està-dire le faint Mont. Il s'avance dans la mer depuis la plaine par l'efpace de foixante-quinze milles, & en a cent cinquante de circuit. Les Modernes lui donnent la longeur de trois journées & la largeur d'une demie. Les Caloyers en font entierement les maistres, il n'y a qu'eux qui y demeurent, & il y a des Efcrivains qui difent qu'aucun feculier ne peut demeurer dans cette peninfulle: encore moins les femmes, qui n'y peuvent pas mefme entrer. Les Religieux y vivent fi regulierement, & y font en fi grande eftime, que les Turcs mefmes fe recommandent à leurs prieres. Il y a vingt-trois Monafteres, dans lesquels, du tems de Bellon qui fit la Description de ce Mont en 1553. il y avoit cinq à fix mille Moines, y en aïant quelques-uns dans lefquels il y en avoit trois cens, dans d'autres deux cens, & dans les autres plus ou moins de cent ou cent cinquante. Mais prefentement le nombre de ces Moines n'eft pas fi confiderable, il n'y en a guéres plus de deux mille dans tous ces Monafteres, dont voici les noms: Panagia, Anna Laura, Carracallos, Iberon,Vatopedi, Chilantari, Dyonifion, Panto-crateron, Xeropo. zani, Cutlumfi,, Protaton, Simon Petra, Zographi, Dochiari, Agios Paulos, Xenophos, Gregorios, Phil oteos,Efphigmenis Ruffion, Caftra moniti & Stauroniceta. Tous ces Monafteres font autour de la montagne, excepté cinq, qui font éloignés de la mer, & fitués dans des vallées & des bois. Selon Jean Comnene Medecin de Valachie, qui a demeuré long-tems au Mont-Athos, dont il a fait la Defcription qu'il fit inprimer en 1701. & que Dom Bernard de Montfaucon Benedictin de la Congregation de faint Maur nous a donnée dans fa PaleographieGrecque en

MOINES

GREES.

MONAS- 1708. il n'y a rien dans ces Monafteres & dans leurs Eglifes TERES DES qui ne foit admirable & incomparable. Tout y eft magnifiques & il s'eftonne, qu'après tant d'irruptions des Barbares, & depuis près de trois cens ans que ce lieu eft fous la domination du Turc, ils n'aïent rien perdu de leur magnificence, & qu'eftant en fi grand nombre dans un mefme lieu, ils aïent esté tous confervés dans leur entier. Les Grecs y viennent de toutes les Provinces d'Orient pour y vifiter à certain tems de l'année tous ces Monafteres, leurs Eglises, les Cellules des Religieux, & les Européens y viennent auffi, tant par curiosité que par devotion. Les principaux de ces Monasteres, font ceux de la Panagia & Anna Laura. On y trouve encore plusieurs Ermitages avec leurs Chapelles & des logemens, & ceux qui y demeurent font appellés Peres, Afcetes, Ermites, Celliotes, & Anachoretes. Les Religieux qui afpirent aux premieres dignités, viennent auffi de tous les endroits d'Orient faire leur Noviciat dans ces Monafteres, où ils paffent quelques années à s'inftruire de tous les myfteres de la Religion Chreftienne & des devoirs de la vie Monastique, & retournent enfuite dans leurs païs où ils font reçus comme des Apoftres. Il y en vient mefme de Mofcovie, & il y a un Monaftere pour ceux de leur Nation, & un autre pour les Georgiens. On leur inf pire fur tout une grande averfion pour le Pape; car les Religieux du Mont-Athos ne manquent pas de dire aux Grecs qui y viennent, & de leur conter entr'autres fables; qu'un Pontife Romain estant venu viliter ces Monafteres en avoit pillé & brûlé quelques-uns à cause que les Religieux avoient refusé de l'adorer; c'eft de cette maniere qu'ils entretiennent le Peuple dans le Schifme. Ils parcourent dans les tems de l'Avent & du Carefme les Ifles de l'Archipel où il n'y a point de Monafteres, pour adminiftrer les Sacremens à ceux de leur Rit; & comme ils font plus hardis que les fimples Preftres; & qu'ils n'oublient pas de crier bien haut contre le Pape; cette hardieffe fait que tout le monde court à eux. Les groffes retributions qu'ils tirent des Confeffions & de leurs declamations contre les Latins, font le principal motif qui les fait fortir de leur retraite. Ils ont ainsi que les autres Preftres une maniere de penitence affez nouvelle qu'ils impofent aux grands pecheurs qui fe confeffent à eux; c'eft de les obliger à prendre l'onction entre les deux épaules un certain nombre de fois, en don

nant

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1

Moine Mingrelien.

38.

P. Giffart F.

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