Page images
PDF
EPUB

Riger MENS

CHAPELLE

[ocr errors]

noît d’Aniane qui regla si bien son Monastere d'Inde près d'Aix-la-Chapelle que les Religieux qui y venoient de divers Concilt païs , s'instruiloient, sans qu'on leur dîć mot , à voir seule-D'Aix Lå ment l'habit , la démarche , & toute la conduite de ceux de cette maison , tant on y observoit exactement les Reglemens faits au Concile d'Aix-la-Chapelle. Pour aider davantage les Moines , saint Benoît fit un recueil de toutes les Regles Monastiques, connu sous le nom de Code des Regles , & divisé en crois Tomes , dont le premier contient les Regles des Moines d'Orient, le second celles des Moines d'Occident, te troisiéme celles des Religieuses. Il fit aussi la concorde des Regles , où elles sont toutes rapportées aux Chapitres de celle de faint Benoît pour lui servir de Commentaire.

Ses grandes austerités , ses travaux continuels , fes jeunes & Tes veilles , & enfin la vieillesse , l'aïant rendu très infirme , il fut attaqué de diverses maladies qui servirent à éprouver encore sa vertu & à exercer sa patience. Il ne laisfoit

pas de s'occuper continuellement à la priere , ou à la leaure ; on lui trouvoit même toûjours le visage baigné de larmes,qui étoient'un don de Dieu qui marquoit bien l'esprit de penitence qui l'avoit animé toute sa vie. Quatre jours avant sa mort, il étoit encore au Palais , oùil donnoit à son ordinaire, des avis pleins de sagesse à l'Empereur. La fiévre l'aïant pris, il se retira au logis qu'il avoit dans la ville , & le lendemain il fut visité par tous les Grands. Il s'y trouva tant d'Evêques & d’Abbés, & un fi grand nombre de Moines qu'à peine les fiens pouvoient en approcher pour le servir. L'Abbé Helisacar Chancelier de l'Empereur , qui étoit de l'Ordre des Chanoines Reguliers , y vint le premier & demeura auprès du malade jusques à la mort. L'Empereur er voïa le foir un de ses Chambelans , avec ordre de le

reporter à son Monastere : il écrivit encore à ce Prince pour lui donner quelque avis : il se recommanda aux prieres de Nebride Archevêque de Narbonne , & à Georges Abbé d'Aniane , aursquels il écrivit pour ce sujet : enfin il mourut le onziéme Février 821. étant âgé de soixante & dix ans, & fut enterré dans son Abbaïe de saint Corneille d'Inde, où l'on conserve encore aujourd'hui fes Reliques.

Posez Anton. Yepes , Chronica general de la Orden de S. Benito. Bulteau , Hift. de l'Ordre de saint Benoit ,Tomh.. So

Tome y,

CONGRE- Mabillon, Annal. Benedict. Tom. 2. & Act. SS. ejusd. Ord. S, VICTOR. Bollandus,Tom. Februarii. Fleury, Histoire de l'Eglise Tom. X.

Baillet, Vies des SS.

DE

la

CHAPITRE E X V I.
De la Congrégation de saint Victor de Marseille.
Code ,

Omme le tems auquel la Regle de saint Benoît fut re

dans l’Abbase de saint Victor de Marseille , est inconnu , nous avons crû ne devoir parler de l'origine de ce Monastere qu'après que nous aurions parlé des Reglemens faits pour l'Ordre Monastique dans le Concile d'Aix-laChapelle l'an 817. auquel tems il n'y a point de doute que Regle de faint Benoît ne fût universellement reçuë dans tous les Monasteres de France, distingués de ceux des Chanoines , pour lesquels on dressa aussi des Reglements dans le même Concile. La celebre Abbaïe de saint Victor eut pour Fondateur Cassien , qui vint de Rome en France au commencement du cinquiéme siécle. Il étoit Scythe de nation, si l'on s'en rapporte à Gennadius ; mais Holstenius croit qu'il étoit François ; sur le témoignage même de Cassien, qui semble insinuer qu'il étoit né en Provence. Etant fort jeune il passa dans la Palestine où il se fit Religieux, dans un Monastere de Bethlehem ; s'étant joint ensuite à un de ses Confreres, nommé Gerinain, il visita les solitudes d'Egypte, pour y voir ceux d'entre les Solitaires qui étoient les plus celebres en sainteté. Il alla ensuite à Constantinople, où il reçut le Diaconat des mains de saint Chrysostome ; & après avoir été pour la seconde fois à Rome, il vint en France & s'arrêta à Marseille , où aïant été ordonné Prêtre, il bâtit l'an 409, un Monastere en l'honneur de saint Pierre & de saint Victor Martyr. Il en fonda aussi un autre pour des filles , & l'on prétend qu'il eur dans la suite plus de cinq mille Moines sous la conduite , ausquels il faisoit observer la même discipline qu'il avoit vûë pratiquer dans les Monasteres de l’Egypte.

Ce fut vers l'an 420. que Castor Evêque d'Apt,qui avoit fondé un Monastere dans son patrimoine , désirant sçavoir quelle étoit cette discipline que Callien avoic vûe pratiquer

GATION DE

[ocr errors]

en Orient, & qu'il avoit introduite dans les Monasteres Congrt. qu'il avoit fondés , le pria de la lui faire connoître. Pour le s. VICTOR. satisfaire , il composa douze Livres des Institutions Monastiques qu'il lui adressa;& qui servirent de Regle à quelques autres Monasteres. En 423. il composa fes Conferences pour expliquer l'interieur des Moines d'Egypte, dont il n'avoit décrit

que l'exterieur dans ses institutions. Il en composa premierement dix , qu'il adresa à Leonce Evêque de Frejus : & à Hallade Anachorete, qui fut aussi depuis Evêque. Environ deux ans après il en compofa sept autres , qu'il adressa à saint Honorat Abbé de Lerins, & à faint Euchér Religieux du même Monastere. Quelques années après vers l'an 428. il en écrivit encore sept autres, qu'il adreffa à quatre Moines des illes de Marseille,qui font en toue vingt-quatre Conferences,

Mais quoique le Monastere de saint Victor de Marseille ait été très celebre dès son origine , on n'en

peut

neapmoins rien dire de certain que depuis le onziéme siécle, n'y aïant aucuns monumens anciens qui en soient restés jusqu'à ce tems-là, par le malheur des guerres qui ont souvent reduit cette Abbaïe en solitude. Car selon ce que dit Ruffi dans fon Histoire de Marseille, cette Abbaïe fut ruinée plusieurs fois par

la fureur des Visigots, qui s'emparerent de Marfeille l'an 464. & par les Normans dans le neuviéme siécle.

. Les Religieux y vivoient avec tant de regularité que ce Monastere étoit appellé la porte du Paradis. On y venoir de toutes parts chercher de ces faints hommes pour reformer decelebres Abbaïes;& pendant plus d'un siécle & demi, plusieurs Maisons Religieuses se loûmirent à l'Abbaïe de S. Victor qu'elles regarderent comme leur Chef.

Cependant quelque fnombreue que pût être la Communauté de cette Abbaïe , pendant les six premiers siécles de sa fondation, elle étoit bien diminuée au commencement du onziéme siécle ; puisqu'elle étoit reduite à cinq Religieux , lorsque Guillaume Vicomte de Marseille la repara Pan 1000. Guifred ou Wifred en étoit pour lors Prieur, & avoit été établi dans cet office par l'Abbé Guarnier qui n'étoit que feculier , aussi bien que quelques-uns de ses predecesseurs qui s'étoient emparés de ce lieu, qui étoit presque redujt en solitude. Guifred aprés avoir été Prieur pendant

GATION DE

Congre. cinq ans, fut ensuite Abbé pendant vingt autres années , &
S. Vicior: rétablit si bien la discipline Monastique dans ce Monastere,

.
qu'au lieu de cinq Religieux qui en formoient la Commu-
nauté lorsqu'on le repara , elle étoit de cinquante lorsque cet
Abbé mourut. Le Vicomte de Marseille ne se concentant
pas d'avoir été le restaurateur de cette celebre Abbaïe,
voulut y être enterré parmi les Religieux ; & étant prés de
mourir l'an 1004. il se fit raser & reçut l’habit de l'Ordre
de saint Benoît. C'étoit la coûtume pour lors que plusieurs
personnes de l'un & de l'autre sexe prenoient l'habit Monas-
tique , se voïant à l'extremité de maladie , afin de pouvoir
être secourus par les prieres des Religieux : c'est ce que

l'on appelloit Monachi ad succurrendum.

L'Abbaïe de saint Victor aïant été ainsi reparée par Guil. laume Vicomte de Marseille , ( qui lui donna aussi quelques terres ; ) fur enrichie dans la suite par les liberalités de plufieurs personnes qui y firent de grandes donations. L'an 1013. Guillaume Comte de Provence lui donna l'Eglise de saint Martin de Monosques qui est encore aujourd'hui un Prieuré dépendant de ce Monastere ; & l'année suivante il lui donna encore quelques metairies. Pierre qui fut élu Abbé en 1048. s'étant trouvé au Concile de Verseil , tenu l'an 1ogo. où le Pape Leon IX. condamna l'heresie de Berenger Archidiacre d'Angers , qui fut le premier qui osa avancer que le faint Sacrement n'étoit que la figure du Corps de JesusChrist, obtint du Pape la confirmation & la restitution de la petite Abbaïe de saint Victor proche Valence : le même Pontife exemta celle de saint Victor de Marseille, de la jurisdiction de l'Evêque, & la follmit immediatement au saint Siege. Pierre Evêque de Vaison donna au même Abbé, l’Abbase de saint Pierre & de saint Victor de Grasele , qu'il foậmit à celle de saint Victor de Marseille. Eldebert Ever que

de Mande lui donna aussi l'Abbaïe de saint Martin de la Canonica , située au territoire de Bannace, y aïantécé excité par sa grande regularité : ce qui se connoît par l'acte de donation, dans lequel ce Prélat témoigne que l'on venoir de

parts à saint Victor, pour y être instruit des observances Regulieres. L'Abbé Pierre vivoit encore: mais étant mort l'année suivante, Durand qui lui succeda , fur commis , conjointement avec Raymbaud Archevêque de Nar

toutes

S. Victor

bonne, qui avoit été Religieux de ce Monaltere , par le Pape CONGRBNicolas II. pour reformer l'Abbaïe de Vabres , qui fut fou-STION

foùmise à celle de saint Victor, du consentement de Robert Comte d'Auvergne & de Berthe son épouse ; & cette Abbaïe fut érigée en Evêché par le Pape Jean XXII. l'an 1317. aussi bien que celle de Castres qui dépendoit aussi de saint Victor. Il y avoit encore des Monasteres en Espagne de sa dépendance, comme celui de saint Servand, qui lui fut uni par le Roi de Castille , à cause qu'il étoit en reputation d'une très parfaite Observance. C'étoit aussi le même motif qui obligeoit plusieurs Seigneurs qui fondojent des Monasteres à les y unir. Le Pape Gregoire VII. voulut qu'il y eût une association entre cette Abbaïe & celle de faint Paul de Rome, dans l'esperance que par l'union de ces deux Monasteres, l'Observance de celui de S. Paul s'augmenteroit & se perfectionneroit : ce qui fait voir comme il le declare dans la Bulle, que l'on vivoit dans l’Abbaïe de saint Victor dans une grande regularité. Enfin ce Pontife la mit encore sous la protection immediare du saint Siége, & lui accorda les mêmes privileges dont jouissoit celle de Cluni.

Mais peu de tems après ces Religieux qui avoient servi de modele à plusieurs Monasteres , que l'on avoit reformés par leur moïen, se relâcherent eux-mêmes de la pureté de leur Regle, en sorte que l'an 1196. Bernard Cardinal du titre de saint Pierre'aux Liens; Legat du Pape Celestin III. en Provence, voulant remedier aux défordres qui s'étoient introduits parmi eux, fit des Reglemens avec l'avis de Fredol d'Anduse qui avoit été Religieux de cette Abbaïe,de Geoffroy de Marseille Evêque de Befiers & de l'Evêque de Sifteron. Ces Reglemens portoienr entr'autres chofes , que personne ne mangeroit de

la viande qu'il ne fût malade ou debile, & ce avec permission de l'Abbé, ou du Prieur en son absence ; qu'ils mangeroient en commun & dans le Refectoire , à la reserve du Sacristain qui garderoit l'Eglise , & de ses compagnons ; que personne ne dormiroit dans des chambres , à la reserve de l'Abbé , mais dans le dortoir; que les Religieux ne pourroient fe servir de linge en leurs lits' ni en leurs habillemens. Mais ces Reglemens ne furent pas longtems observés , par la mésintelligence & la division de ces Religieux , qui aïant obtenu de Rome plusieurs commissions

« PreviousContinue »