DE Latin Casa Dei, c'est-à-dire, la Maison de Dieu, devint CONGREdans la suite Chef d'Ordre, & une Congregation de plu-LACHAISE sieurs Monafteres qui en dépendoient, d'où fortirent plu-D. sieurs Personnages illustres. Robert mourut l'an 1067. & il est honoré comme Saint. Entre les Prieurés qui dépen. doient de ce Monaftere, il y en avoit quelques-uns en Espagne, dont celui de Saint Jean de Burgos qui fut érigé en Abbaïe, eft encore à present un des plus considerables de la Congregation de Valladolid, à laquelle il a été uni, comme nous le dirons en parlant de cette Congregation. Le Prieuré de Montauban dans le Querci, étoit si riche, quele Pape Jean XXII. l'érigea en Evêché, & fit le Prieur premier Evêque.Clement VI. avoit été Religieux de la ChaifeDieu; il avoit toûjours conservé beaucoup d'affection pour cette Maison,où il avoit fait profession, & il voulut même y être enterré. Il fut inhumé au milieu du Chœur de l'Eglife, dans un superbe Mausolée: mais les Heretiques environ l'an 1563. étant entrés dans cette Eglise, où ils commirent beaucoup d'impietés, la ruinerent entierement, & pillerent le Monaftere, où les Benedictins Réformés de la Congregation de saint Maur furent introduits l'an 1640. Voiez Joann. à Bosco, Biblioth. Floriacen. Bulteau, Hift. de l'Ordre de Saint Benoît, Joan. Mabillon, Annal. Bened. & Aft. SS. Fleury, Hift. Ecclef. Tom. XII. & Yepés, Chronique generale de l'Ordre de Saint Benoît. СНАРІTRE X I. De l'ancienne Congregation de saint Denis en France. S I l'on a donné le titre de Chefs d'Ordres & de Congregations aux Abbaïes dont nous venons de parler dans le Chapitre précedent, l'on ne peut sans injustice refuser le même titre à celle de saint Denis en France, puisqu'outre qu'elle est la plus celebre du Roïaume, & même de l'Europe; elle a non seulement été Chef d'une veritable Congregation, qui a été érigée sur la fin du seixiéme fiécle; mais elle a encore eu de tout tems un grand nombre de Mona-steres & d'Eglifes de sa dépendance. Quoiqu'on attribuë la fondation de cette illustre Abbaïe au Roi Dagobert I. il y NE CON S.DENIS EN ANCIEN avoit déja neanmoins un Abbé & des Religieux dans cette GREGA- Eglise de saint Denis, avant que ce Prince eût fait jetter les DENNS DE fondemens des nouveaux édifices; comme il paroît par une FRANCE. Charte datée de la quarante-troifiéme année du regne de Clotaire II. c'est-à-dire, l'an 627. d'une donation faite par une Dame nommée Theodetrude, auquel tems Dodon en en étoit Abbé. Cependant quoique Dagobert n'en ait pas été le premier Fondateur, nul autre que lui n'a mieux merité ce titre, par les grands biens dont il a enrichi cette Abbaïe. L'on ne peut dire certainement en quelle année elle fut fondée pour la premiere fois, ni en quel tems Dagobert entreprit de rebâtir avec une magnificence Roïale l'Eglife de ce Monaftere, où il emploïa un grand nombre de colomnes de marbre, & d'autres ornemens de même matiere. Elle étoit même, felon quelques Historiens, toute pavée de marbre, & brilloit au dedans de l'éclat de riches tapisseries, toute rehaussée d'or, de perles, & de pierres précieuses. Au milieu de toutes ces richesses, il fit construire sur la sepulzure de saint Denis, Apôtre des Gaules, dont le corps se conserve dans cette Eglife, avec ceux de ses Compagnons Rustique & Eleuthere, un magnifique Tombeau, dont il donna la conduite à saint Eloi. Comme son dessein éroit d'établir la Pfalmodie continuelle dans cette Eglife, à l'exemple des Abbaïes de saint Maurice d'Agaune & de S. Martin de Tours, il fit faire des bâtimens suffisans pour loger les Religieux qui devoient vacquer à ce faint exercice,aufquels il fit de grands biens; & tant qu'il vêcut, il ne laissa échapper aucune occasion de favorifer ce Monastere, & de le combler de nouveaux bienfaits. Enfin, ce Prince étant mort l'an 638. dix ans ou environ après la fondation de cette Abbaïe, autant qu'on peut le conjecturer; il voulut y être enterré: ce qui servit d'exemple à nos Rois, qui ont toûjours depuis élu leur sepulture dans ce lieu, à la referve de quelques-uns, qui ont été enterrés en quelques autres lieux. Clovis II. fils de Dagobert, regardant l'Abbaïe de saint Denis comme l'ouvrage de la pieré & de la magnificence de fon pere, ne manqua pas de lui donner sa protection, & confirma toutes les donations que ce Prince y avoit faites. II lui procura aussi l'affranchissement de la Jurifdiction de l'Evêque de Paris, par le Privilege d'exemption qu'il demanda NE CON DE S DENISEN faint Landry, & qu'il fit confirmer l'an 653. dans un ANCIEN Synode ou Assemblée de plusieurs Evêques & des Grands GREGA du Roïaume. Charderic en étant Abbé en 674. fit bâtir TION fur fon propre fonds le Monastere de Toussainval dans le FRANCE. Chambli. Il en fit dedier l'Eglise sous les noms de saint Denis & de faint Marcel, & y mit des Religieux de saint Denis, qui furent comme le premier essain qui sortit de cette Maison. Le Roi Thierri premier autorisa ce nouvel établissement & lui donna même avec beaucoup de privileges la terre de Noisi, pour l'entretien des Religieux ; mais ce Monastere n'est plus connu, & le P. Dom Felibien dans l'Histoire de l'Abbaïe de saint Denys, dont nous avons tiré la plus grande partie de ce que nous dirons dans ce Chapitre, croit que c'est peut-être, l'Abbaïe du Val près Pontoise, poffedée par les Feüillans. La Pfalmodie continuelle qui avoit été établie dans cette Eglise par le Roi Dagobert avoit été interrompuë; mais l'an 723. Thierri II. ordonna qu'elle seroit rétablie: Et pour y engager les Religieux, il confirma leurs anciens Privileges accordés par les Evêques de Paris & les Rois ses predecefseurs. Une chose digne de remarque qui se trouve dans les Lettres que ce Prince en fit expedier, c'est que l'on y lit que faint Denis & fes deux Compagnons, saint Rustique & faint Eleuthere, furent les premiers Apôtres des Gaules & qu'ils vinrent à Paris par ordre du Pape saint Clement, pour y prêcher l'Evangile. Déja les biens dece Monastere avoient été usurpés en partie, lorsque Fulrad en fut Abbé l'an 750. Un de ses premiers soins, fut de les recouvrer : ce qu'il fit aisément avec le credit de Pepin qui n'étoit encore que Maire du Palais, mais qui avoit déja la souveraine autorité, & qui étant parvenu à la couronne, protegea cette Abbaïe comme auparavant: il honora même l'Abbé Fulrad de la dignité de Maître de sa Chapelle, En cette qualité cet Abbé fut obligé de suivre le Roi en Italie, lorsqu'il y porta la guerre pour remettre le Pape Etienne III. en possession des terres de l'Eglife, dont Altofe Roi des Lombards s'étoit emparé. Ce Pontife qui étoit venu en France implorer le secours du Roi, avoit sacré de nouveau ce Prince & fes deux fils Charles & Carloman dans 'Abbaïe de faint Denis, où il avoit séjourné quelque tems: NE CON- FRANCE. ANCIEN & comme il avoit besoin du credit de l'Abbé Fulradauprès de ce Prince, il lui accorda beaucoup de privileges. Entre 5.DONS DE autres, il lui donna permission & à ses successeurs de fonder autant de Monafteres qu'il leur plairoit, sous la protection du saint Siége. Il accorda deplus à cet Abbé de ne pouvoir être fait Evêque contre son gré & fans la volonté du Roi Pepin, d'user de certaines chaussures, & de parer fon cheval d'un ornement particulier qui ne convenoit, selon les apparences, qu'aux grands Seigneurs ou à quelques ceremonies. Cette grace fut accordée par ce Pontife au seul Fulrad à la priere du Roi. Il ordonna même qu'aprés la mort de cet Abbé ces ornemens feroient mis avec son corps dans le tombeau. Il lui donna encore le pouvoir d'élire un Evêque qui fît les fonctions Epifcopales dans ce Monaftere & dans les autres qui en dépendoient, & beaucoup d'autres graces, qu'on peut lire dans l'Histoire de cette Abbaïe. Il y avoit de ces fortes d'Evêques à saint Martin de Tours Fleury, bift. & en d'autres celebres Monasteres. M. l'Abbé Fleury Ecclef. T. dit à la verité, que ce n'étoient point des Evêques titulaires, IX.liv. 44. comme si ces Monafteres & ceux de leur dependance eussent été des Diocêses;mais qu'ils étoient de ceux qui aïant été ordonnés sans aucun titre, ou qui après l'avoir quitté, se retiroient dans ces Monafteres & y faifoient les fonctions, comme en des lieux exemts de la jurisdiction des Ordinaires. Quelquefois c'étoient des Coévêques, qui avoient leur fiége fixe dans les Monafteres, ou l'Abbé qui étoit en même tems Evêque de son Monaftere, & d'autres fois c'étoient de fimples Prêtres à qui on donnoit le titre d'Evêques, parce qu'ils avoient Mission pour prêcher l'Evangile en certain territoire. Pepin aïant voulu rendre la Basilique de saint Denis plus auguste, avoit fait commencer un nouveau bâtiment dont la construction fut interrompuë par sa mort, qui arriva l'an 768. mais Charlemagne son fils l'aïant fait continuer, il fut achevé l'an 775. Ce Prince vint à saint Denis & fit faire la ceremonie de la Dedicace avec toute la pompe imaginable. Le Monaftere se sentit aussi de ses liberalités : car il lui fit don de ses metairies de Luzarches avec l'Eglise du lieu Fâtie sous l'Invocation de saint Cosme & de faint Damien, & d'une autre metairie, située à Messi au Diocêse de Meaux. NE CON ΤΙΟΝ DE L'année précedente il avoit confirmé la donation que son pere ANCIENy avoit faite des terres de Faveroles & de Noron, avec une GREA partie de la forêt Jueline, des cerfs & des chevreüils qui y D étoient, dont les cuirs devoient servir pour couvrir les li- FRANCE. vres des Religieux & la chair pour la nourriture des malades: d'où le P. Mabillon tire une conféquence, qu'en ce tems là l'abstinence de la viande étoit en usage dans cette Abbaïe. Un differend que l'Abbé Fulrad eut avec l'Evêque de Paris au sujet d'un Monastere bâti au village de Plaisir près de saint Germain en Laïe, fournit un exemple d'une épreuve qui se faisoit dans ce tems là pour juger des procès. L'Evêque alleguoit que ce Monastere avoit été donné à fon Eglise Fulrad foûtenoit que c'étoit un don fait à son Abbaïe. Les Juges ne sçachant lequel des deux avoit droit, eurent recours à l'épreuve qu'on appelloit le Fugement de Dieu devant la Croix. Deux hommes dont l'un soûtenoit les droits de l'Eglise de Paris, l'autre ceux de l'Abbaïe de saint Denis, allerent dans la Chapelle du Roi, & pendant qu'un Prêtre recitoit des prieres, ils commencerent tous deux en même-tems à étendre les bras en forme de Croix. Celui de saint Denis étant demeuré ferme dans cet état, & l'autre aïant chancelé un peu, il n'en fallut pas davantage pour faire perdre le procès à l'Evêque, qui avoüa lui-même que Dieu s'étoit déclaré en faveur de l'Abbaïe de saint Denis: fur quoi le Roi assisté des Comtes & des autres Officiers de justice prononça en faveur de l'Abbé Fulrad, qu'il maintint en possession du Monastere de Plaisir par un Arrêt du 28. Juillet 775. mais cette forte d'épreuve fut interdite quelques années aprés par Loüis le Debonnaire. L'Abbé Fulrad par son testament fait à Heristal, sept ans avant sa mort, donna à son Abbaïe tous les biens qui lui étoient échus en heritage, dont quelques-uns étoient situés en Alface & en Brisgau, avec ceux qu'il avoit eus par presens, soit de nos Rois, soit de ses parens ou de quelques-uns de ses amis, & les terres qu'il avoit acquises à titre d'échange, ou autrement. 11 assujettit à la même Abbaïe tous les Monafteres qu'il avoit fondés ou rebâtis au Diocêse de Mets & ailleurs, comme ceux de Salone, de sainte Hippolyte ou faint Bist, de saint Cucuphas, d'Arberting, d'Ada |