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TINS DE-
CHAUSSEZ.

eut jufqu'à vingt, qui furent gouvernés dans la fuite par un AvousProvincial particulier. Cette Reforme a été appellée la Province de faint Guillaume,ou la Communauté de Bourges, & depuis quelques années elle a pris feulement le nom de Province de S. Guillaume: on les appelle à Paris les Petits Auguftins, ou les Auguftins de la ReineMarguerite,à caufe que leur Couvent a été fondé par Marguerite de Valois, premiere femme d'Henry IV. Roy de France, qui n'étoit encore que Roy de Navarre, dont le mariage fut diffous. Leur habillement eft à peu près semblable à celui des Auguftins de l'ancienne Obfervance, qu'on nomme en France Grands Auguftins. Toute la difference qu'il peut y avoir, c'eft que ceux de la Reforme de Bourges portent leurs habits plus étroits; & afin que leurs Quêteurs à Paris foient diftingués de ceux du Couvent des Grands Auguftins, ils font habillés, en faifant la quête, comme on peut voir dans la figure qui represente un de ces Freres Quêteurs. Voiez pour les differentes Congregations dont nous venons de parler, les Auteurs ci-devant cités pour la Communauté de Bourges, Felix Auguftine::fium Communitatis Bituricenfis exord. progreff. per Chriftinum Francæum;& le Pere Bonanni,pour les Colorites & les Ermites de Centorbi, dans fon Catalogue des Ordres Relig. Tom. I. & 3.

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De l'origine & progrès des Religieux Auguftins Déchauffés, avec la Vie du V. P. Thomas de Jefus, Auteur

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de cette Reforme.

Y a quelques Historiens qui ont prétendu que le P. Louis de Leon avoit été le premier Auteur de la Reforme des Auguftins Déchauffés: mais cette gloire appartient au V. P. Thomas de Jefus, qui nâquit à Lifbonne l'an 1520. Son pere qui étoit de l'illuftre Famille d'Andrada, originaire de Castille, dont une branche s'étoit établie en Portugal dès l'an 1302. crut qu'il ne pouvoit pas mieux faire, le voïant en état d'apprendre les Lettres humaines, que de lui donner pour Maître le Pere Louis de Montoya, Religieux de l'Ordre des Ermites de faint Auguftin, qui n'étoit pas moins recommandable par fa pieté que par fa fcience. Ses excellentes qualités l'avoient

TINS DE

AUGUS fait choifir pour être du nombre de ceux qui furent demandés CHAUSSEZ. par le Roi Dom Jean III. pour reformer les Augustins de ce Roïaume; & il avoit fi bien correfpondu aux bonnes intentions de ce Prince, que par fon moïen les Religieux de cet Ordre avoient repris l'Obfervance Reguliere qu'ils avoient abandonnée. Il fut Prieur de Lisbonne, Provincial & Vicaire General; & enfin fon humilité lui fit refufer l'Evêché de Vifeu, qui lui fut offert par le Roi Dom Sebastien, dont il fut auffi Confeffeur.

Thomas n'avoit que dix ans lorsqu'il entra fous la Difcipline d'un fi excellent Maître. Il profita fi bien de fes leçons, qu'il fit en peu de tems un grand progrès dans les Sciences. Avançant en âge il croiffoit auffi en vertu, & Dieu le voulant attirer à lui avant que le monde le pût corrompre, il le prevint de bonne heure par fes faintes infpirations, en lui failant naître le defir de fe confacrer à fon fervice. Il n'avoit pas plus de quinze ans lorfque renonçant aux vanités du fiecle, il reçut l'habit de l'Ordre des Ermites de S. Auguftin, des mains du Pere Louis de Montoya fon Maître.

Après qu'il eut prononcé fes Voeux, fes Superieurs l'envoïerent à Conimbre pour y finir fes études. Il s'adonna enfuite à la Predication, & s'acquitta de cet emploi d'une maniere qui faifoit bien voir qu'il s'étoit rendu Difciple de Jefus Chrift, pour devenir le Maître des hommes. Mais en inftruifant les peuples, il eut auffi un grand foin de s'inftruire luimême, en s'appliquant à la lecture des Livres des Peres de T'Eglife, dont il fit fa principale étude. Ce fut par la lecture de ces Livres qu'il fe fentit embrafé de cet amour divin,& animé de ce zele du falut des ames, qui lui firent dans la fuite preferer les rigueurs d'une rude captivité aux douceurs d'une agreable liberté dont il pouvoit jouir.

Il ne fut pas animé d'un moindre zele pour l'Obfervance reguliere; car quoique le Pere Louis de Montoya l'eût par fes foins retablie en Portugal dans les Couvens de fon Ordre, & qu'il y eût fait pratiquer les mêmes Conftitutions des Peres de IObfervance d'Efpagne, le zele du Pere Thomas de Jefus ne fut

pas pour cela fatisfait. Comme il y avoit d'autres Congre gations du même Ordre en Italie, où l'on vivoit dans une plus étroite Obfervance, & que de fervens Religieux de la Province de Portugal paffoient en Italie pour embraffer cette

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Augustin Dechausse de la Congregation d'Espagne.

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CHAUSSEZ.

Obfervance, il crut que pour retenir ces Religieux dans leur Au GusProvince, & ne la pas priver de fi bons Sujets, & en même TINS DEtems pour fatisfaire fes defirs, qui tendoient à une plus haute perfection, il étoit à propos d'encherir fur les aufterités, les mortifications, & les autres pratiques des Congregations les plus austeres du même Ordre des Ermites de faint Auguftin. Pour cet effet il commença la Reforme des Auguftins Déchauffés, telle qu'on la voit encore aujourd'hui, aïant été celui qui a jetté les fondemens de cet édifice, qui bien loin d'être élevé dans fa perfection en Portugal, fut au contraire en même tems renversé jufqu'aux fondemens, nonobftant l'autorité du Cardinal Infant Dom Henry de Portugal, & celle du P. Loüis de Montoya, Vifiteur de cette Province, qui appuïoit cette Reforme.

Plufieurs Religieux de l'Obfervance, non feulement de Portugal, mais encore de Caftille, la favorifoient auffi par leur exemple, aïant été les premiers à l'embraffer; mais les moins fervens qui étoient en plus grand nombre, se foûleverent, & emploïerent tous leurs efforts, non feulement pour en empêcher le progrès, mais même pour l'étouffer dans fon berceau de forte que le Pere Thomas de Jefus fut contraint de ceder à leur violence, & de furfeoir en Portugal; ce qui fut plus heureusement executé quelques années après en Caftille.

Ce faint homme fe retira dans le Couvent de Peña- Firme, dont il avoit été Prieur, pour ne s'occuper plus que des penfées de l'éternité; & il croïoit y être inconnu aux hommes, lorfque le Roi Dom Sebaftien s'embarquant pour l'Afrique, lui commanda de le fuivre. Après la défaite de l'armée Chrétienne, ce faint Religieux demeura captif parmi ces Barbares, où il fouffrit des maux qui ne fe peuvent exprimer ; car il fut vendu à un Morabite, (efpece d'Ermite Mahometan ) qui demeuroit proche de Mequinez. Ce méchant homme n'épargna aucun mauvais traitement pour l'obliger à renoncer à la Foi; mais Thomas de Jefus dans cette extrémité s'abandonna à Dieu avec tant de confiance, que non feulement il demeura inebranlable dans fon zele, mais devint encore la force & le foûtien des autres Chrêtiens. Il fut enfuite Efclave du Roy de Maroc, à la follicitation d'un Ambaffadeur de Portugal, qui étoit venu pour traiter de la rançon de plufieurs

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