MARONI TES. ou le Superieur du Monastere. On s'assemble à l'Eglise, où l'on MOINES recite un grand nombre de prieres: on demande au Novice s'il veut faire Profeffion & s'engager dans la Religion ; & s'il refpond qu'il y consent, il est dès ce moment veritablement Religieux, les Maronites estant perfuadés que le confentement du Novice renferme les trois Vœux de pauvreté, de chasteté & d'obeissance. On lui donne le petit capuce qui le diftingue des feculiers, & la ceremonie se termine par quelques prieres. Ils ne peuvent quitter l'habit de Religion fans estre declarés Apostats, & ils sont punis très severement par la prifon, ou par d'autres peines s'ils quittent l'habit. Ils obfervent encore quelques Reglemens qui leur ont esté donnés par le Patriarche Eftienne Aldoën, natif d'Eden, dont les Religieux Maronites poursuivoient la confirmation en Cour de Rome : lorfque le P. Bonanni donna fon Catalogue des Ordres Religieux en 1706. Il dit qu'il y avoit pour lors à Rome le P. Gabriel Hæva Maronite qui y estoit venu pour obtenir cette confirmation du Pape Clement XI. Il y a aussi des Religieuses Maronites au Mont-Liban, où elles ont deux Convents, & gardent la Closture; & il y en a d'autres qui vivent seules dans des folitudes & en Anachoretes. Il s'en trouve pareillement à Alep, mais elles ne gardent pas la Closture à cause qu'elles font parmi les Turcs; néanmoins elles demeurent deux ou trois en semble chez leurs parents, ne permettant à aucun homme d'entrer dans leurschambres, d'où elles ne fortent que pour aller à l'Eglise les Festes & les Dimanches. Elles observent très-rigoureusement & à la Lettre la Regle de faint François, sous la Juridiction des RR. P.P. Capucins, dont elles portent l'habit. Mais les Religieuses du Mont-Liban font de l'Ordre de saint Antoine, disent leur Office en langue Syriaque, auffi-bien que les Religieux, & sont habillées comme eux, portant une tunique de serge brune, avec une ceinture de cuir noir, & une robe pardessus, quieft de gros camelot de poil de chevre de couleur de fumée, & aïant les jambes nuës. Toute la difference qu'il y a entre ces Religieux & ces Religieuses de faint Antoine, c'est que lesReligieux ont un capuce de drap noir & ne portent point de chemises ; & que les Religieuses en ont, & mettent sur leur teste un voile noir qui les couvre depuis la teste jusqu'aux pieds. Elles font presque toutes filles des plus qualifiées & des plus no MOINES bles de leur Nation: ainsi elles ne manquent de rien, leurs paMARONI- rens leur fournissant abondamment leurs besoins. Elles s'occu- TES. pent néanmoins au travail des mains, emploïant le profit qu'elles en retirent à l'ornement de leur Eglife; & elles ont les mesmes jeusnes & les inefmes observances des Religieux. Monfieur Simon, Auteur du Dictionaire de la Bible,impriSimon Die- mé pour la seconde fois à Lion en 1703. dit: qu'on fait paftion. de la fer pour une chose surprenante & tout-à-fait admirable, que 1. pag. 312. depuis peu de tems il se soit establi un Convent de filles au au mot ca- Mont-Liban;ce qui ne s'estoit jamais veu en Orient. Il ajoûte Bibl. Tome mobin. que la Fondatrice ou Institutrice de ce nouveau Monaftere, eftoit une pauvre fille qui s'occupoit à l'éducation de la jeunesse de son sexe, leur apprenoit à lire, à escrire & toutes >>> les autres chofes qu'elles font obligées de sçavoir.Elle fut, dit-il, >> infpirée de Dieu d'assembler les plus grandes, & celles qui fe دو دو دو roient les plus propres àla feconder dans sa fainte entrepriseselle » n'eut pas beaucoup de peine à les faire entrer dans sa pensée; & quoiqu'elles n'euffent jamais oiii parler de Communauté elles en compoferent une d'environ trente filles qui font non feulement l'édification des Chreftiens de ce païs-là, mais en>> core des Sarrafins. Leur pauvreté est extréme; leurs cellules » qui ne font que de chaumes, font basties autour de leur Cha>> pelle; & quoiqu'elles n'aïent rien que le travail de leurs mains, دو elles tiennent pourtant leur autel très proprement orné, & » on ne peut rien voir de plus decent que leur Chapelle. Elles » éprouvent la vocation de celles qui veulent entrer dans leur » Compagnie, par un noviciat de trois ans: elles empient la nuit à la priere & à chanter les loüanges de Dieu, & le jour à travailler des mains, pour faire valoir le peu de bien qu'elles » poffedent aux environs de leur Monaftere. Une autre fille, à l'imitation de cette premiere, a entrepris le mefme dessein à un » autre quartier du Mont-Liban; & d'autres filles se font retirées dans des Ermitages, où elles prétendent passer le reste de leurs jours dans la penitence. دو دو دو در Cet Auteur paroift peu informé de ce qui regarde l'histoire Morastique d'Orient; puisqu'il dit: que l'on fait paffer pour une chose admirable, & tout-à-fait surprenante, que depuis peu de tems il se soit eftabli au Mont-Liban un Monaftere de filles, ce qui ne s'estoit jamais veu en Orient, à ce qu'il pretend. Les Sçavans ne demeureront pas fans doute d'ac MARONI TES. cord avec lui, que ce n'est que depuis peu que l'on voit des MOINES Communautés de filles en Orient; puisque l'Histoire Ecclesiastique nous fournit une infinité d'exemples du contraire, & qu'il y a encore plusieurs Monafteres de filles, tant Grec ques qu'Armeniennes, Neftoriennes, & Melchites, en Orient, qui sont sous la domination des Turcs, comme nous dirons dans la suite. M. Simon a encore efté mal informé de la Regle que suivent les Maronites, lorsqu'il dit qu'ils font del'Ordre de faint Bafile; car il est certain qu'ils se disent de l'Ordre de faint Antoine. Les Religieux & les Religieuses qui y demeurent, dependent entierement du Patriarche qui est aussi Religieux, & qui fait sa demeure au Monaftere de Canobin, * situé dans un affreux Defert, dans lequel il y a environ vingt-cinq ou trente Religieux. Son revenu peut monter à vingt mille livres par an, & confifte en vin, froment, huile, foye & bestail; il païe environ mille livres au Bacha de Tripoli, & a fous lui fix ou sept Evefques, avec un Abbé Mitré, qui demeure au Monaftere de Mar-Antonois. Il prend le titre de Patriarche d'Antioche, que plusieurs Papes lui ont accordé, & eft vestu d'une longue veite ou foutane de bleu turquin. Il porte un gros turban de toile de mefme couleur, auffi-bien que les Evefques; mais quand ces Prelats vont à l'Eglise ou ailleurs il ont fur la foutane une robe noire fans collet, avec un capuce de mefme couleur, comme on peut voir dans la figure du Patriarche que nous avons fait graver.M.RichardSimon (autre que celui dont nous avons parlé ) faisant mention de l'election de ce Patriarche, dit: que le peuple y a beaucoup de part, car elle depend du Corps de leur Republique qui doit reconnoistre celui qui a esté elu; mais que comme les Ecclefiaftiques tiennent le premier rang dans l'Estat, aussi contribuentils le plus à l'election. Douze des principaux Prestres s'af femblent dans le Monastere de Canobin, où ils procedent à l'election du Patriarche par la voie du ferurin; & quand i's font tous d'accord, la Republique qui est assemblée, c'eftà-dire, les Ecclefiaftiques & le Peuple, donnent leur con * Tous les Voïageurs donnent à ce Monastere le nom de Canobin parce qu'ils l'carendent ainsi nommer; mais il y a de l'apparence que les Maronites, ne le nomiyeng ainsi que par excellence, comme estant le principal Monaftere & le plus confiderable du Mont-Lib an; car Carobin en Arabe, veut dire Monastere ou Convent. C'eft se quia cité remarqué par M. l'Abbé Renaudot, |