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dont

VIE DE S.

feux & negligé n'aïant que des peaux toutes déchireés, PAUL il couvroit fes épaules, & qui lui fervoient de manteau: que PREMIER ce Saint les falua fort honneftement: & qu'après les avoir fait ERMITE repofer, il leur donna deux lions pour les remettre dans leur chemin. Mais l'habillement du Solitaire Barradat, dont parle le mefme Theodoret, devoit encore plus epouvanter ceux qui abid.6.27. le voïoient, & leur caufer plus de fraieur; car il avoit une tunique de peaux qui le couvroit depuis les pieds jufques à la tefte, & n'avoit que deux petites ouvertures vers le nez & la bouche pour refpirer. Il fait encore mention du SolitaireZe- Ibid.c.1 2. non,qui eftant fort riche, & aïant quitté la profeffion des armes qu'il avoit embraffée, se retira dans un fepulchre proche la ville d'Antioche, & n'avoit pour tout habillement que de vieilles peaux. Un autre Solitaire nommé Serapion, dont parle Pallade, n'eut point d'autre habit qu'un linceul, ou un grand, Pallad. morceau de toile dont il fe couvroit; ce qui lui fit donner le nom de Sindonite. Enfin il y en avoit qui n'avoient point d'autres habits que ceux que la nature leur avoit donnés, comme celui dont parle Sulpice Severe, fur le rapport d'un Religieux Dialog. 1. François qui revenoit d'Egypte,& qui l'affûra avoir veu un So- . 11. litaire caché dans une caverne du Mont Sinaï depuis cinquante ans, qui n'eftoit couvert que de fes cheveux & des poils de fon corps ; ce que confirme auffi l'Auteur du Pré fpirituel, Joan. qui fait mention d'un Anachorete, nomméGregoire, qui avoit Prats piris paffé trente-cinq ans tout nud dans les Deserts; & d'un autre, cap. 191. nommé Sophrone, qui demeura dans une caverne auprès de 19. la Mer-morte, auffi tout nud,pendant foixante-deux ans, ne fe nourriffant que d'herbes.

Voiez pour la vie de faint Paul: Hieronim. Opera Tom. 4. Edit. Benedict. pag. 68. Rosveid, Vit. PP. Fleury, Hift. Ecclef. Tom. 2. & 3. Bolland. A&t. SS. 15. Jan. Bulteau, Hift. Monast. d'orient, pag. 50.

Lauf. 6.83.

Mofch.

ANTOINE

Par. 20

CHAPITRE II.

Vie de Saint Antoine Abbé, Pere des Religieux Co

SAL

nobites.

AINT Antoine naquit fous l'Empire de Gallus, environ l'an 251.à Coma, près d'Heraclée dans la haute Egypte ou Arcadie. Il fut élevé dans la Religion Chreftienne par les parens qui eftoient également nobles & riches; & commençant à croître,il ne voulut point eftre inftruit aux Lettres humaines, pour eviter la communication avec les autres enfans, dont les moeurs pouvoient eftre corrompuës. Saint Auguftin a cru que ce Pere des Cœnobites ne fçut jamais lire, ni efcrire, ni aucu Aug. ne autre langue que l'Egyptienne. Il dit qu'Antoine, le Moine Duct-Chrift. Egyptien qui eftoit un homme faint & parfait, avoit appris par cœur, à ce que l'on tient, toutes les divines Efcritures, fans fçavoir les Lettres, en les entendant lire aux autres; & en avoit compris le fens, en les méditant souvent ; que neanmoins ceux qui ont appris à lire, ne voudroient pas que ce Saint homme leur infultât & leur reprochât, qu'ils ont pris une peine inu tile. M. l'Abbé Fleury a fuivi le fentiment de ce Pere de l'EHift. Eccl. glife, qui eftoit apparemment fondé fur ce que faint Athanafe Tom.pag. dit: que faint Antoine ne voulut point apprendre les Lettres; & fur ce que rapporte Evagre: qu'un Philofophe aïant demanà ce faint Solitaire, comment il pouvoit faire, eftant privé de la confolation que les autres trouvent dans la lecture; il Bolland. lui refpondit: que la nature lui fervoit de livre. Mais BollanAt SS.17. dus & M. de Tillemont pretendent, que faint Athanafe avoit Fanuar. voulu feulement marquer qu'il n'avoit pas appris la langue, De Tillem. & les fciences des Grecs, & ce qu'on appelle les belles Lettres, He Real d'autant plus qu'il ajoûte, qu'eftant encore chez fon pere, & tem 7. pag. depuis, lors qu'il commença à vivre feul, il eftoit très-appliqué $66. à la lecture.

Fleury.

417.

pag. 119.

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Ses pere & mere eftant morts, le laifferent orphelin à l'âge de dix-huit ans, avec une four fort jeune dont il prit foin; mais à peine fix mois furent-ils paffés, qu'allant, felon fa coutume à l'Églife,& entendant lire ces paroles de l'Evangile Kaih.19. fi vous voulez eftre parfait, allez, vendez ce que vous avez,& donnez-le aux pauvres, & vous aurez un trefor au ciel,puis ve

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ANTOINE

nez & me fuivez ; il les prit pour lui mefme, & voulant obeïr VIEDE S. à la voix de Dieu, il ne fut pas pluftoft forti de l'Eglife qu'il diftribua à fes voifins tous les heritages qu'il avoit eu de la fucceffion de fes pere & mere,qui confiftoient en trois cent arrures de terre, qui faifoient près de cent cinquante arpens, pour païer les impofts publics, à condition que lui & fa foeur leroient libres & déchargés de tout; & aïant fait une fomme confiderable des meubles qu'il vendit, il en distribua la meilleure partie aux pauvres, refervant l'autre pour fa fœur.

Mais comme une autre fois, eftant entré dans l'Eglife, il entendit auffi lire dans l'Evangile, qu'il ne fe falloit pas mettre en peine du lendemain ; il diftribua aux pauvres ce qu'il avoit refervé, & mit sa sœur entre les mains de quelques filles Chreftiennes pour l'élever avec elles. Il quittà enfuite fa maifon pour mener la vie Afcetique, hors du lieu de fa naiffance, veillant fur lui-mefme, gardant une très-grande temperance, & imitant un faint vieillard qui vivoit de cette forte auprès d'un village voifin. Il s'occupoit dans la folitude au travail, à la priere, & à la lecture; & alloit de tems en tems voir d'autres Solitaires, pour en recevoir des inftructions, & remarquer en quelle vertu chacun d'eux excelloit, pour pouvoir les imiter, auffi-bien que leurs aufterités & leurs mortifications.

Le demon ne put pas fouffrir un fi grand zele dans un homme de cet âge. Il lui fufcita plufieurs combats. Il lui mit d'abord devant les yeux les biens qu'il avoit quittés, fa four dont il devoit prendre foin, la gloire qu'il pouvoit acquerir dans le monde, les plaifirs qu'il y pouvoit gouter, & plufieurs autres penfées qu'il reprefentoit en foule à fon imagination.

Mais la foi & fes prieres continuelles aïant diffipé ces tentations, les pensées d'impureté prirent leurs places pour le tourmenter plus violemment jour & nuit. Il les furmonta encore par l'affiftance de Jefus-Chrift: de forte que le demon lui ef tant apparu fous la figure d'un enfant noir, fe confeffa vaincu, & avoua qu'il eftoit l'efprit de fornication. Cette premiere victofre fervit à augmenter les aufterités, car il veilloit tellement qu'il paffoit des nuits entieres fans dormir. Il ne mangeoit qu'une fois le jour après le foleil couché, quelquefois de deux jours en deux jours, & fouvent de quatre en quatre. Sa nourriture eftoit du pain & du fel. Il ne buvoit que de l'eau. Son lit

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