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tant refté fur une colomne pendant quarante-huit ans, ex- Bolland; pofé aux ardeurs du foleil,& aux autres incommodités des fai-Ass.s. Tons. La premiere colomne fur laquelle il monta, n'avoit que PP. apud quatre coudées de haut, à ce que ditAntoine l'un de fes Dif-Rofveid page ciples, qui a efcrit fa vie; & Theodoret marque qu'elle en 170. & 84. en avoit fix ; mais eftant monté fucceffivement fur des colomnes de diverses hauteurs ; la derniere fur laquelle il eftoit lorsqu'il mourut, vers l'an 460. & felon d'autres, vers l'an 463. avoit quarante coudées. On crut que ce genre de vie ne pouvoit eftre pratiqué par d'autres ; il y eut cependant deux autres Simeons, un Daniel, un Julien & quelques autres,qui termi- Mofch nerent une fainte vie dans une penitence pareille à celle du tit grand Simeon qu'ils imiterent, eftant reftés plufieurs années 38. fur des colomnes, & aïant eu des Disciples.

Quant aux Ermites de ce tems,on en voit un très grand nombre qui ne font foûmis à aucun Superieur, & qui ne fuivent d'autre Regle que celle que leur dicte le plus fouvent le libertinage. Il eft vrai qu'il y en a quelques-uns qui imitent les veritables Solitaires des premiers fiécles, & qui marchent sur leurs traces; mais ces exemples font rares, & on peut comparer les autres aux Rhemobotes, aux Sarabaïtes, & aux Girovagues. Il vaut mieux ne les pas comprendre dans l'Ordre Monaftique; puifqu'ils en portent indignement l'habit: fi l'on excepte neanmoins ceux qui font gouvernés par des Superieurs, & qui vivent en Communauté,aufquels l'on peut donner le nom de Coenobites, comme à ces anciens Solitaires conventuels, qui n'avoient point d'autre Regle que la fage conduite de leurs Abbés.

Joann.

c. 28.57.

que

Il- eft vrai que ce fentiment n'eft pas univerfellement receu. Ceux qui le combattent,pretendent que pour eftre Coenobite, il ne fuffit pas de vivre en commun, mais qu'il faut auffi ce foit fous l'authorité d'une Regle. C'eft l'interpretation qu'ils ont donnée à cet endroit de la Regle de faint Benoift, où il est parlé des Coenobites: Monachorum primum genus Cœnobitarum, cap. 1. hoc eft monafteriale militans fub Regula, vel Abbate ; pretendant qu'il faut prendre la particule disjonctive pour conjonctive. Les autres qui ont interpreté la Regle du mesme Saint, ont expliqué plus naturellement cet endroit ; & prenant la particule en queftion pour disjonctive,ou alternative, ont dit: que les Coenobites font ceux qui vivent fous une Regle, ou

Col. 18. cap.

17.

fous un Abbé. C'est auffi le fentiment de Callien qui estoit Caffian. parfaitement inftruit de la vie Coenobitique, & qui nous apprend que ce font ceux qui vivent en Communauté, & qui font gouvernés par le jugement d'un Superieur. Il ne parle point de Regle, comme remarque le P. le Mege dans fon explication de la Regle de faint Bonoift ; parce qu'il croïoit que pour eftre un Solitaire Coenobite, il fuffifoit de vivre en commun fous l'authorité d'un Abbé. Ainfi ceux qui font de fentiment contraire, ont ofté à faint Antoine la qualité qui lui eft deuë de Pere & de reftaurateur des Coenobites, pour la donner à faint Pachome, qui, à ce qu'ils difent, eft le premier qui ait establi de veritables Monafteres. C'eft ce que nous allons examiner dans le paragraphe suivant.

PARAGRAPH E V I.

Que Saint Antoine eft le Pere des Canobites; & qu'il a eftabli les premiers Monafteres parfaits.

C

OмME après que les perfecutions eurent ceffées, faint Antoine le vit Chef d'un grand nombre de Solitaires qui fe rangerent fous fa conduire, qu'il les fit vivre en commun; & que les Monafteres qu'il eftablit à Pisper,à Nacalon & en d'autres endroits,avoient toute une autre forme que ceux des trois premiers fiécles que nous avons appellés fimples Monafteres, quoiqu'ils fuffent neanmoins de veritables Monafteres ; on ne peut pas refufer à ce Saint le titre de Pere des Coenobites, qu'on doit lui donner par excellence, comme on a donné à faint Paul celui de Premier des Ermites, quoiqu'il y en ait eu avant lui.

Entre ceux qui n'admettent point de fucceffion de Moines & de Monasteres, depuis S. Marc jufques à S. Antoine; il y en a qui ont cru qu'ils ne pouvoient pas refufer fans injuftice à ce dernier le titre d'Inftituteur de la vie CœnobitiThomaff. que & de Fondateur des Monafteres reglés. Le P. ThomafDifcipl Ee. fin a reconnu qu'on ne pouvoit pas lui difputer cette quaelef part. 1. licé, & que mefme c'eftoit l'opinion la plus commune; lorfque voulant prouver que les Monafteres de filles eftoient auffi anciens que ceux des hommes, il dit, qu'on ne doute point que faint Antoine ne foit le Pere & le premier Inftituteur des Monafteres, & que fa fœur fuivit de bien près fon

1.1. c. so.

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exemple, s'eftant enfermée avec d'autres filles dans un Mo nastere dont elle fut Superieure.

Mem.pour

Il y en a neanmoins qui ne lui attribuant que la qualité de premier Pere des Solitaires, donnent à S. Pachome celle De Tillem. d'Instituteur de la vie Cœnobitique. M. de Tillemont qui Hiß. Eccl. est de ce nombre, dit, en parlant de S. Antoine, que ce Tom.7.pag. fut vers l'an 305. au milieu des fureurs de la perfecution de 1o9. Dioclétien & de Maximien, qu'il commença à faire des miracles, & à perfuader à un grand nombre de perfonnes d'embraffer la vie Solitaire : que ce fut la caufe de tant de Monasteres, cest-à dire de Maisons, ou pluftoft de Cabanes, dont on remplit les montagnes, pour la demeure des Anachoretes qui s'y retirerent, & que quelques-uns de ces Monafteres purent d'abord s'unir ensemble, & former des efpeces de Communautés, mais fort peu nombreuses. Et en parlant de faint Pachome, il dit: que le respect que fon nom, n'est l'Eglife a aujourd'hui pour pas une devo- Pag. 1671 tion nouvelle, mais une jufte reconnoiffance des obligations qu'elle lui a, comme au faint Fondateur d'un grand nombre de Monafteres, & à l'illuftre Pere d'une multitude infinie de Moines, ou pluftoft comme au premier Inftituteur, non feulement des Congregations Religieuses, mais abfolument de la vie Cœnobitique & des faintes Communautés ; & il marque que ce pouvoit eftre l'an 325. qu'il commença fon premier Monaftere à Tabenne.

per

Pag. 176.

Ainfi, felon M. de Tillemont, les veritables Monafteres, ou pluftoft les Monafteres parfaits,ne furent establis par faint Pachome, ou bien commencés, que l'an 325. & les Monaften'eftoient que des Cabares que S. Antoine establit en 305. nes. Il faut donc conclurre que chaque Monaftere estant une Cabane, & que quelques-uns de ces Monafteres aïant pû deflors s'unir ensemble, & former des efpeces de Communautés, apparemment de cinq, de fix, ou de dix fonnes au plus ; c'eftoit cinq ou fix perfonnes, ou dix au plus, demeurant en autant de Cabanes qui confervoient quelqu'union entr'elles, & obeiffoient au mefme Superieur. C'eft, ce me femble, le fens qu'on peut donner aux paroles de M. de Tillemont, à moins qu'il n'y eût point de Superieurs pour ces fortes de Communautés, & qu'elles ref- Pag. 177 femblaffent à celles, dont il fait la description dans un au

tre endroit, qui n'eftoient que de cinq, de fix, ou de dix perfonnes au plus, où l'on vivoit fans aucune fubordination, & fans autre difcipline que les regles generales de la crainte de Dieu, & où on ne fe maintenoit ainfi qu'avec beaucoup de peine dans la pieté.

Cependant lorfque faint Antoine voulut fe retirer dans fa premiere Solitude l'an 270. auprès du lieu de fa naiffance, M. de Tillemont dit, qu'il mit fa foeur dans un Monaftere Pag. 107. de Vierges, qui eft peut-eftre, dit cet Auteur, le plus ancien dont on faffe mention dans l'Eglife. Si ce Monaftere pag. 101. n'eftoit qu'une Cabane, & que dans chaque Cabane il n'y avoit ordinairement qu'un Solitaire, il ne pouvoit pas y avoir plufieurs Vierges enfemble qui demeuraffent dans ces fortes de Monafteres ; & fi c'eftoit une Communauté pareille à celle des Afcetes; quelle apparence, que faint Antoine eût voulu mettre fa fœur dans un lieu, où l'on avoit tant de peine àfe maintenir dans la pieté ! c'eftoit donc fans doute un véritable Monaftere; puifqu'il dit, que c'eft le plus ancien dont il foit fait mention dans l'Eglife; par confequent il y en avoit de véritables, felon lui, cinquante-cinq ans avant que faint Pachome eût commencé celui de Tabenne en 325.ou plutoft foixante-dix ans auparavant; car nous prouverons par M. de Tillemont mefme,que faint Pachome n'a fondé fon premier Monaftere qu'après l'an 340.

raœurs des

Chreft pag.

168.

Mais le mot de Parthenon dont fe fert faint Athanafe, & que M. de Tillemont a eu foin de marquer à la marge, ne fignifie pas véritablement un Monaftere, mais une demeure de Vierges; & M. l'Abbé Fleury a expliqué ce que c'eftoit que ces demeures de Vierges; lorsqu'il dit: que dans Fleury, les premiers fiécles de l'Eglife, les Vierges confacrées à Dieu demeuroient la plufpart chez leurs parens, ou vivoient en leur particulier deux ou trois ensemble, ne fortant que pour aller à l'Eglife, où elles avoient leurs places feparées du reste des femmes. En effet dans fon Hiftoire Ecclefiaftique, il ne dit pas que faint Antoine mit fa foeur dans un Monaftere Tm.2.pag. de Vierges; mais entre les mains de quelques filles chrestiennes de fa connoiffance,pour l'élever vec elles. C'eft la maniere dont Rofveide, M. Arnaud d'Andilly, & plufieurs autres ont auffi traduit cet endroit de faint Athanafe.

Hift. Ecl.

418.

Il n'y a donc point lieu de douter que faint Antoine n'ait

39

establi de veritables Monafteres parfaits & reglés où l'on Rofreid. vivoit en commun; puifque, comme dit faint Athanafe, les vit. Par. Monafteres qu'il eftablit, eftoient remplis de Solitaires qui pag.s03. paffoient leur vie à chanter, à estudier, à jeufner, à prier, à fe rejouir dans l'efperance des biens à venir, à travailler pour pouvoir donner l'aumofne, confervant entr'eux l'union & la charité ; mangeant auffi en commun,comme nous le pouvons juger par la complaifance de faint Antoine, qui aimant à manger feul, ne laiffoit pas fouvent de manger avec fes freres lorfqu'ils l'en prioient, afin de pouvoir avec plus de liberté leur tenir des difcours utiles.

Ce

Apni Boll.

que Rufin rapporte encore d'un des difciples de ce Saint, nommé Pior, qui, après avoir demeuré quelque tems dans fon Monaftere, arriva de fi bonne heure à une fi grande 14 Ma perfection, que faint Antoine lui permit à l'âge de vingtcinq ans de demeurer feul où il voudroit, marque affez que fes autres Difciples demeuroient ensemble.

PARAGRAPHE VII.

Que faint Amon a fondé fes Monafteres avant ceux de

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faint Pachome.

DeTillem Mem. pour IHft. Eecl Tom.7.pag.

nous en croïons le P. Papebroch dans la vie de faint 107.676 Pachome qu'il a donnée, comme efcrite par un Difciple mefme de ce Saint, quelques-uns de fes Difciples aïant esté voir faint Antoine, il leur dit: que lorfque la paix avoit esté renduë à l'Eglife, il n'y avoit point encore de communautés : & que c'eftoit faint Pachome qui avoit procuré un fi grand bien. C'eft fur le témoignage de ce Difciple de faint Pachome, Auteur de fa vie ( felon le P. Papebroch) que M. de Tillemont semble appuïer le plus fon fentiment, que faint Pachome eft l'Inftituteur des Coenobites, puifqu'il repete la mefme chose en plufieurs endroits. Mais nous pouvons agir fur les mefmes principes de cet Auteur, & de plufieurs Modernes qui revoquent en doute beaucoup de faits, que quelques Efcrivains contemporains n'en ont pas parlé: ainfi nous rejettons le témoignage de cet Efcrivain de la vie de faint Pachome; puifque faint Athanafe qui a efcrit celle

, parce

1bid. pag

679.

Rofreid.

Vit. PP. pag. 477

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