fang pour la justice. Cependant les Carmes, qui par autorité Orans du faint Siege ont eu permission d'en celebrer l'Office, ne MES. le font que d'un Confesseur, & ne mettent sa mort qu'au huit Avril. Voiez Bolland. Act. SS. Tom. I. April. pag. 769. & la Chronologie des Patriarches de Ferusalem au commencement du Tome III. des mesmes Actes ; & Baillet, Vies des SS. au 8. Avril. CHAPITRE XLI I I. Du grand progrés de l'Ordre des Carmes depuis leur passage en Europe. L A paix que l'Empereur Frideric II. fit avec les Sarasins en 1229. fi desavantageuse à la Chrestienté & fi favorable à ces Infidelles, fut cause que les Carmes abandonnerent la Terre-Sainte. Alain cinquiéme General de cet Ordre & Breton de naissance, voïant que les Religieux enduroient beaucoup de perfecutions, prit resolution de fonder des Couvens en Europe & de quitter la Syrie. Il convoqua un Chapitre General à ce sujet, où les Religieux se trouverent de sentimens contraires; car les uns aimoient mieux souffrir la perfecution que d'abandonner la Syrie; les autres au contraire à l'imitation du Prophete Elie leur Pro-tecteur & Patron, qui se voïant perfecuté par Jezabel, quitta sa demeure ordinaire pour s'enfuir sur la montagne d'Oreb, & conformément à ce que dit Jesus-Christ dans l'Evangile qu'il faut quitter la Ville où l'on fera perfecuté pour fuir dans une autre, voulurent venir en Europe. Sur ces differens sentimens le General Alain ne scachant qu'elle.re-folution prendre, les Historiens de cet Ordre disent que la Sainte Vierge s'apparut à lui, & lui ordonna de fonder des Monafteres hors de la Terre-Sainte. Il envoïa premierement des Religieux en Chypre qui y aborderent l'an 1238. & ils y fonderent un Monastere dans la foreft de Fortani. Des Sici-liens estant aussi sortis en mesme tems du Mont-Carmel, allerent dans leurs pays, où ils bastirent un autre Monastere dans l'un des Fauxbourg de Messine. Des Anglois fortirent de la Syrie l'an 1240. pour en fonder d'autres en Angleterre. Ils commencerent par la foreft d'Alvenic & d'Ailesford. Una R.r. iij ORDRE autre Miffion se fit par des Religieux Provençaux,qui arriverent l'an 1244. aux Aigualates à une lieuë de Marseille, & fonderent un Monastere dans ce Defert: ainsi le nombre de leurs Couvens s'augmentant, ils tinrent leur premier Chapitre General en Europe l'an 1245. Ce fut dans le Couvent d'Aylesford en Angleterre où ils s'assemblerent, & le B. Simeon Stok y fut élu pour successeur d'Alain. Sous fon Generalat, cet Ordre s'étendit beaucoup en Europe. Car voïant l'accueil favorable que l'on faisoit aux Carmes, il en envoya deux envoya à Lion où le Pape Innocent IV. eftoit, pour obtenir de sa Sainteté des lettres de recommandation à tous les Princes Chreftiens; & à la faveur d'un Bref que le Pape leur accorda, les Religieux qui estoient en Chypre, y fonderent plusieurs Monafteres. Ceux de Sicile s'estendirent dans ce Roïaume, dans la Poüille & dans plufieurs Provinces d'Italie. Ceux de Provence se multiplierent dans la Province Narbonnoise & l'Aquitaine. Ceux d'Angleterre en Ecoffe & en Irlande ; & l'an 1254. faint Loüis Roi de France, aïant mené du Mont-Carmel de ses sujets en France, il leur donna l'an 1259. un Couvent à Paris, d'où sont sortis ceux de France & d'Allemagne. Cet Ordre a pris un fi grand accroiffement dans la suite, qu'il est presentement composé de trente huit Provinces, outre la Congregation de Mantouë, qui a cinquante-quatre Couvents & un Vicaire General, & les Congregations des Carmes Dechauffés d'Espagne & d'Italie qui ont des Generaux particuliers. Mais ils ne faut pas ajouster foi à ce que disent certains Historiens de cet Ordre, que dans ces Provinces il y a eu jusqu'à sept mille cinq cens Monafteres & plus de cent quatre vingt mille Religieux. Ce nombre est exceffif, & il y auroit beaucoup de Monafteres à retrancher, s'ils en avoient donné un Catalogue; puisqu'il y a plusieurs de ces Provinces qui n'ont pas plus de dix ou douze Couvens, & mesme quelques-uns qui n'en ont que cinq ou fix. Cet Ordre est gouverné par un General qui est élu tous les fix ans, & qui fait d'ordinaire sa refidence à Rome dans le Couvent de fainte Marie au-delà du Tibre, appellé communément de la Transpontine, qui lui est immediatement sousmis, auffi-bien que celui de faint Martin des Monts, dans la mesme Ville, celui de Paris à la Place Maubert, & celui du : : Mont Olivet proche de Gennes, qui ne relevent d'aucune des ORDRE trente-huit Provinces. Le Schisme qui divisa l'Eglise au quatorziéme fiécle, divisa aussi cet Ordre. Il se trouva en mefme tems deux Generaux élus par deux partis differents qui n'élisoient pas le plus digne; mais celui qui soustenoit avec plus de chaleur l'intereft de celui qu'ils reconnoisfoient pour Pape. Chacun de ces Generaux donnoit beaucoup de dispense à ces Religieux tou chant les austerités commandées par la Regle, & n'ofoit les punir, ni les chastier, de peur qu'ils ne se jettassent dans le parti qui lui estoit contraire : ce qui fit que le defordre eftoit fi grand, qu'on ne reconnoissoit les Carmes que par l'habit, & non pas par la pratique de leur Regle qu'ils n'observoient en aucune maniere... Cela dura jusqu'enl'an 1430. qu'au Chapitre General tenu cette année, l'on traita du moïen de retablir l'Ordre dans sa premiere perfection; & on jugea que pour le tems present, il ne falloit pas passer de l'extremité du desordre à l'obfer vance primitive. Il fut donc resolu qu'on demanderoit aus Pape quelque dispense de la Regle touchant le jeûne, l'abf tinence de la viande, & la demeure continuelle dans les Cellules. Ce fut Eugene IV. qui l'an 1431. mitigea cette Regle; & qui sans parler du jeune, permit aux Religieux de cet Ordre de manger de la viande trois fois la semaine, de se promener dans leurs Cloistres & dans les autres lieux de leur cloture, aux heures convenables, ausquelles ils ne seroient pas occupés aux exercices de Communauté ou d'obeissance. Mais comme le Pape n'avoit rien decidé touchant; le jeûne, plusieurs Superieurs le faifoient observer aux jours mesmes ausquels on mangeoit de la viande, ce que d'autres ne faifoient pas; c'est pourquoi le Pape Pie II. permit en 1459.. aux Generaux, d'en user à cet égard, felon qu'ils le ju geroient à propos, aïant égardà la qualité des personnes, des lieux & des tems. Lorsque ces Religieux pafferent d'Orient en Europe, ils avoient leurs Chappes barrées de blanc & de tanné, d'où on les appella les Barrés ; & de la eft venu le nom de la ruë des Barrés à Paris, qui est celle de l'Ave-Maria, où estoit la Croix des Barrés, & la porte des Barrés. M. Menage dans son Dic-tionnaire Etymologique de la langue Françoise, dit, que DES CAR |