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les appeller de fimples Monafteres pour les diftinguer de ceuxcy & je croi que le P. Papebroch voudra bien me paffer cette diftinction de simples Monafteres & de parfaits; puifque, nonobstant qu'il dise que les Disciples des Apoftres, dont nous venons de parler, fussent de véritables Moines, 15mm.12.

Ibid. are.

At. SS. 14. maii in

il ne laisse pas de dire aussi, qu'ils eftoient de simples Moines, qu'il compare aux Ermites de ce tems-cy, pour les diftin-vt. s.Pach. guer de ceux du quatriéme siécle, engagés par des vœux; & comme il se voit à présent des Communautés considérables d'Ermites de dix, de vingt, de trente, & mesme de plus grand nombre,qui sont de véritables Communautés; on peut les comparer à celles des premiers siécles, où l'on vivoit sans doute avec plus de fubordination que dans la pluspart de celles cy, qui sont néanmoins gouvernées par un Supérieur.

PARAGRAPHE I V.

Preuves de l'antiquité de la Vie Monastique, contre le

Sentiment du Pere Thomassin.

clef. part. 1.

E R. P. Thomassin, après avoir parlé de l'origine & de Thomaff. Finftitutioner la vie Monastique qu'il attribue à faint Defe pl. EcAntoine & à saint Paul premier Ermite, convient que liv. chap. depuis les premiers Fidelles de l'Eglise de Jérusalem, il y a 46. n. is toujours en des Particuliers qui ont pratiqué toutes les 11. vertus des véritables Solitaires; & qu'ainfi, comme on eft remonté au dessus de S. Antoine jusqu'à S. Paul premier Ermite, on pourroit encore monter plus haut, & former la suite de cette fainte institution qui remplit les trois premiers fiécles : « Mais à dire la vérité (ajoûte-t-il) cet enchaisnement est imaginaire, l'Histoire nenous apprend rien " de cette continuation, elle n'est appuiée que sur des conjectures. A quoi il faut ajoûter que ces Solitaires des premiers fiécles n'ont point formé de Disciples, n'ont point "" ouvert d'Escoles, n'ont dressé aucune Regle, n'ont pu se " diftinguer par aucune forte d'Habits, n'ont point formé " de Corps différent du Clergé & des Laïques; ce qu'on ne peut pas opposer à S. Antoine & à ses Imitateurs...... ....... Il faudroit outre cela rencontrer une Regle, une Communauté, un Habit particulier, un Estat "

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→ distingué des autres, des Exercices reglés & uniformes, >> des Escoles, des Colonies; & c'est ce qu'on ne trouve „ point qu'après saint Antoine.

Il est aifé de respondre à cela, en disant que: durant les trois premiers siècles de l'Eglise il n'y a point eu d'autres Regles Monastiques que les conseils Evangéliques; qu'il s'est pu trouver des Communautés, comme nous avons montré dans le Paragraphe III. qui n'estoient que de cinq, de fix, ou de dix au plus, comme M. de Tillemont en demeure d'accord. Les persecutions ne permettoient pas qu'elles fussent plus nombreuses. L'Habit que saint Palemon donna à saint Pachome, temoigne affez qu'il y avoit un Habit particulier pour les Moines. Celui qu'il portoit lui - mesme lui avoit esté donné sans doute par ceux qui l'avoient instruit dans les pratiques de la vie Solitaire, & aïant esté instruit dans ces pratiques, c'est une preuve que ces Solitudes estoient des Escoles où l'on apprenoit la pieté en mesme tems qu'on Orig. in la pratiquoit. Origene aïant mené la vie des Afcetes, l'a marquée comme un estat diftingué entre les Chreftiens, lorsqu'il dit qu'ils font attachés uniquement au service de Dieu, dégagés des affaires temporelles, combattans pour les foibles par la priere, le jeûne, la justice, la piete, la douceur, la chasteté, & par toutes les vertus, ensorte que les foibles mesmes profitent de leurs travaux. On trouve aussi dans ces Afcetes ou Solitaires des exemples de ces Colonies que le P. Thomassin demande, puisqu'ils eftoient répandus par toute la terre. Leurs exercices font affez connus, ils estoient reglés & uniformes, ils vivoient par tout dans une grande retraite, ils gardoient tous la continence; & la vie de ceux qui gardoient ainsi la continence, eft ap

oum Hom.

24.

454 457

pellée vie Monastique ou Solitaire par Clement d'AlexanSmom liv. drie, comme nous avons dit ailleurs. Ils renonçoient auffi 1.67 à tous les biens de la terre, pour embrasser la pauvreté; ils chastioient leurs corps, & le reduisoient en servitude, pour pratiquer le confeil de l'Apoftre. Tels estoient donc les Moines des trois premiers siécles.

Mais pourquoi le P. Thomassin exige-t-il des Moines des trois premiers fiécles des Regles escrites, puisqu'il n'en demande point à ceux du quatriéme ? car en parlant des Regles escrites & non escrites que diftingue S. Gregoire de

Eccl. L.I.

Nazianze, & qu'il dit que S. Bafile donna à ses Religieux, il ajoûte encore qu'on pourroit bien penser que les Monaf- " teresd'Egypte & de la Palestine , avant S. Bafile, n'avoient " que des Regles données de vive voix, escrites sur les Ta- " Thom. bles immortelles des cœurs, & dans les mœurs & coustu- « Discipl. mes de faints Religieux. Disons donc ( continuë cet Au- "Chap.48. teur) que lorsque les Congregations n'avoient point d'au " num. 5. tre Regle que l'Evangile, elles estoient parfaitement fou- " mises aux Evesques par la divine autorité de cette Regle, " puisque les Evesques font les Successeurs des Apoftres. " Cela estant, il n'y a donc point d'inconvenient de dire que les Moines des trois premiers siécles ont pû vivre sous la Regle de l'Evangile; puisque, selon le P. Thomassin, ceux du quatriéme fiécle n'ont point eu de Regle escrite avant S. Bafile.

Il reconnoist qu'il y a eu de veritables Religieuses dès le commencement de l'Eglife; pourquoi ne dirons nous pas qu'il y a aussi eu de veritables Religieux ? & l'on doit entendre qu'il y a eu de veritables Religieuses, lorsqu'il dit " qu'il faut ingenuement avoüer que la profession des Veuves & des Vierges est beaucoup plus ancienne que celle " des Moines; car en comparant la profession des Veuves & des Vierges des premiers siécles, à celle qu'ont fait les Moines, c'est les reconnoistre pour Religieuses ou Moniales; puisqu'elles avoient deflors les mesmes engagemens que les Moines n'ont eu, selon lui, que dans la suite. Et après avoit rapporté l'occupation de ces Veuves & de ces Vierges, il ajoûte : ce filence, cette retraite, ces mortifications cette application continuelle à la priere & à la lecture des « saintes Lettres, nous obligent de croire qu'avant qu'il y « eust des Monasteres distingués des Maisons communes y avoit autant de veritables Monasteres qu'il y avoit de « Maisons communes, où ces Vierges saintes habitoient au « milieu des Villes & de Rome mesme; & il cite ce que dit « S. Jérôme escrivant à Marcelle en lui faisant l'eloge de Hier Ep ad fainte Afelle: Ut in Urbe turbida inveniret Eremum Monachorum.

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il «

Il paroist par-là que selon le P. Thomassin les Maisons où demeuroient ces Vierges & ces Veuves, non seulement des trois premiers siècles de l'Eglife, mais encore du quatrième,

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Ibid.

Chap. so n. 8.

Marcell. de
Laud Afel
Ibid n. g.

eftoient comme de veritables Monafteres, quoiqu'elles fuffent des Maisons communes & ordinaires; pourquoi donc ne veut-il pas qu'il y ait eu aussi dèsce tems-là des Moines qui demeuroient dans des Maisons communes & ordinaires, comme dans de veritables Monafteres ? Mais nous ne demeurons pas d'accord avec le P. Thomassin, que fainte Afelle, & quelques autres Veuves & Vierges qui estoient sous la conduite de saint Jerôme, ne vivoient pas dans des Monafteres diftingués des Maisons communes, & -nous

sommes obligés de croire Pallade qui se connoissoit parfaiPallad. tement bien en veritables Monafteres, & qui nous assure Hist. Lauf. qu'estant à Rome, il avoit veu fainte Afelle qui avoit vieil

Cap. 133

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lie dans un Monaftere.

Ce que nous avons dit, que le P. Thomasfin reconnoist pour de veritables Religieuses les Veuves & les Vierges des premiers fiécles qui estoient consacrées à Dieu, eft confirmé

par ce qu'il ajoûte dans la suite. » Il y avoit, dit-il, deux Thom., fortes de filles Religieuses: les unes s'estoient consacrées cy-dessus " à Dieu, en prenant l'habit brun & modefte qui distin19. 11. guoit les Vierges Religieuses des autres, & c'estoit la

comme

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marque de leur profession. Les autres avoient receu de >> la main de l'Evesque un voile de confecration au jour >> de quelque feste folemnelle , en présence de tout le Peu» ple, pendant qu'on celebroit le Sacrifice.... Ces filles-pre>> noient elles - mefmes ου recevoient des mains de >> leurs parens ces habits vils & modeftes qui estoient des marques publiques de leur profession; mais il y en avoit >> d'autres qui recevoient de l'Evesque le voile d'une con>> fecration plus sainte & plus auguste. Telle fut DemeHieron. >> triade à qui saint Jerôme efcrit en ces termes : Scio quod ad imprecationem Pontificis, flammeum virginale fanctum opefero. Vir-" ruit caput. Telle fut aussi celle, dont il parle en un au>> tre endroit : Post Apostoli Petri Bafilicam in qua Chrifti " flammeo confecrata eft &c. Ce n'est pas que le voile des » autres Vierges Religieuses (continuë ce sçavant Escrivain) >> ne fust saint, & ne fift connoistre le Vœu qu'elles avoient

ad Deme-, triad. de

nitate

Idem ad Sabnia

num.

Tertul.

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>> fait de leur Virginité; car Tertulien le fait assez conde Virgi- » noistre, quand il dit que ceux qui dévoilent ces filles >> font des facrileges : O facrilege manus que dicatum Deo >> habitum detrahere potuerunt.

nibus ve

landis.

On ne peut donc pas dire que le P. Thomassin, parlant des Veuves & des Vierges consacrées à Dieu, n'a reconnu pour veritables Religieuses que celles du quatrième siécle; puisque Tertulien, qu'il cite pour prouver ce qu'il avance, vivoit dans le deuxiéme & le troifiéme siècle. Et fi le P. Thomassin pretend que les Monafteres reglés & parfaits des Religieuses n'ont commencés qu'après l'Empire de Constantin; pourquoi veut-il que pour admettre des Moines dans les trois premiers fiécles, l'on justifie que dès ce tems - là il y a eu des Monasteres aussi parfaits & aussi reglés qu'au tems de faint Antoine, de faint Pachome & de faint Bafile ?

Enfin s'il ne veut point reconnoistre de Moines avant le quatriéme fiécle; pourquoi dit-il que faint Denys, qu'il qualifie de sçavant Theologien, faisant la description de la confecration d'un Moine, n'a pas oublié la Ceremonie myftérieuse de lui faire quitter l'habit, aussi bien que la vie & P'esprit du fiécle, & de le revestir de l'habit de Religion., pour lui apprendre à mener une vie nouvelle ? car en donnant la qualité de saint & de sçavant Theologien à l'Au-teur de la Hiérarchie Ecclefiaftique, il a prétendu fans dou te parler de S. Denys l'Areopagite, suivant l'opinion la plus commune, & s'il avoit suivi le sentiment de quelques sçavans qui prétendent que l'Auteur de ce livre & des autres ouvrages attribués à saint Denys, vivoit dans le cinquiéme fiécle, & que selon quelques-uns c'estoit un artificieux, De Tille: un fourbe, un menteur & un heretique ; il ne lui auroit montMem. point donné la qualité de Saint. C'est donc de faint Denys pour l'Hist. l'Areopagite dont il a voulu parler; & par confequent, 2. pag. 376 selon lui, il y avoit des Moines dès le premier fiecle de l'Eglife.

Je ne trouve donc rien qui nous puisse empescher de croire ce que dit Anastase le Bibliothequaire, & les autres qui ont escrit les vies des Papes: que faint Thelesphore & Taint Denys, comme nous avons dit dans le Paragraphe III. avoient esté Moines ou Anachoretes; & je ne fais point difficulté de reconnoistre pour tels les autres dont nous avons parlé au mesme Paragraphe; aussi bien qu'un grand nombre de Saints qui ont vescu pendant les trois premiers fiéeles, dont il est fait mention dans les Menologes des Grecs, qui ne peuvent pas s'estre trompés en toutes choses. Les

Ecclef. tom.

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