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fon vifage foit caché. On lui met auffi l'anable, le manteau, MONASla ceinture & des fandales neuves. On eftend enfuite par MOINES terre une couverture de laine dans laquelle on enfevelit le GRECS. corps, en liant cette couverture en trois endroits en forme de croix avec un cordon de laine, fur la tefte, fur la poitrine, & fur les genoux feulement, ce qui reste de ce cordon sert à lier les pieds. Les Prieres, qui font fort longues auffi-bien qu'aux Enterremens des feculiers, eftant finies, on porte le corps à la fepulture, on s'arrefte trois fois en y allant ; & à chaque fois on dit de nouvelles Prieres & Oraifons fur le corps. Quand on l'a mis dans la foffe, & qu'on a jetté de la terre deffus, on y répand auffi de l'huile de la Lampe.

Jacob Goart, Eucolegium five Rituale Gracor. Grelot, Relation de Conftantinople. La Croix, Turquie Chreftienne, & D. Apollinaire d'Agrefta, Vit. di S. Bafilio part. 5.

CHAPITRE XX.

Des principaux Monafteres de Caloyers ou Moines Grecs.

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UOIQUE l'Ordre de saint Bafile ait perdu une infinité de Monafteres en A fie & en Europe, par le changement de Religion qui eft arrivé dans les lieux où ils eftoient fitués, & qui font prefentement fous la domination des Turcs & autres Princes Mahometans; neanmoins la Providence divine a permis qu'il s'en foit confervé un grand nombre, pour témoigner quelle eftoit autrefois la grandeur de cet Ordre. Le plus confiderable des Monafteres que les Caloyers Grecs ont en Afie, eft celui du Mont-Sinaï, qui fut fondé par l'Empereur Juftinien, & doté de foixante mille efcus de revenu. Les Grecs lui ont donné le nom de fainte Metamorphose, & les Latins celui de la Transfiguration de Notre-Seigneur Jefus-Chrift. L'Abbé de ce Monaftere qui eft auffi Archevelque, a fous lui deux cens Religieux, outre ceux qui demeurent en plufieurs endroits, tant de cette Montagne, que de celle qu'on nomme de fainte Catherine, à caufe que le corps de cette Sainte y fut porté par les Anges, d'où il a efté depuis tranfporté par ces Religieux dans leur Monaftere de faint Sauveur.

Ce Monaftere a efté autrefois très-recommandable par la

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GRECS.

MONAS-fainteté des Religieux qui y ont demeuré, comme faint Atha MOINES nafe de Sinaï, & faint Jean Climaque qui y a compofé fon Eschelle fainte. Il eft au bas de la Montagne où l'on montoit autrefois depuis le pied jufqu'au fommet par quatorze cens degrés qu'on prétend avoir efté faits par ordre de l'Imperatrice fainte Helene, & dont on voit encore les veftiges. Ce Convent eft un grand baftiment de figure quarrée, entouré de murailles de cinquante pieds de hauteur. Elles n'ont qu'une porte qui eft mefme bouchée pour en defendre l'entrée aux Arabes ; & du cofté de l'Orient, il y a une feneftre par où ceux de dedans tirent les Pelerins avec une Corbeille qu'ils defcendent au bout d'une corde paffée dans une poulie; & par cette feneftre & cette mefme corde, ils envoïent à manger aux Arabes. Il y a plufieurs Granges ou Metairies dans plufieurs endroits de la Chreftienté qui appartiennent à ce Monaftere. Il y en a une entre les autres à Meffine, nommée fainte Catherine des Grecs, qui a titre de Prieuré & où refideun Prieur avec quelques Religieux qui y font envoïés par l'Abbé du Mont-Sinaï. Ils y officient felon le Rit Grec d'Orient ; mais quand ils arrivent, il faut qu'ils renoncent à leurs erreurs, & faffent profeffion de la Foi Catholique.

Quoique la ville de Torre fituée fur le bord de la MerRouge, paroiffe voifine du Mont-Sinaï, d'où l'on la décou vre; elle en eft neanmoins eloignée de cinquante milles. Les Moines Grecs y ont auffi un Convent dedié à fainte Catheri ne & à l'Apparition de Dieu à Moïfe dans le Buiffon ardent. Ils ont fait depuis long-tems un Jardin fort fpacieux à demie lieuë de cette ville dans un lieu que l'Efcriture appelle Elim & où elle marque qu'il y avoit foixante & dix Palmiers, & douze Fontaines ameres que Moïfe rendit douces en y jettant un morceau de bois quand les Ifraëlites y pafferent. Il y a prefentement plus de deux mille Palmiers. Les douze fources qui y eftoient du tems de Moife fe voïent encore dans ce lieu, la plufpart eftant dans l'enclos du Jardin, & elles ont repris leur premiere amertume, elles font chaudes, & il y en a une où l'on fe baigne: les Arabes l'appellent: Haman-Moufa, c'està-dire Bain de Moïle. Les Religieux retirent quelque revenu du grand nombre de Paliniers qui font dans ce Jardin, ils produifent les dattes les plus douces de la contrée, & on n'en voit aucun des foixante & dix dont l'Efcriture-fainte rend témoignage.

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Dans la Palestine à quatre ou cinq lieuës de Jerufalem & a MONAStrois de Bethléem, il y a le Monaftere de S. Sabas fitué dans MOINES un lieu defert & le plus fterile qu'on fe puiffe imaginer, quoi- GRECS. que du tems de ce faint Abbé il y euft en mefme tems une grande multitude de Moines qui fe retiroient & vivoient dans des Laures, dont la plufpart eftoient des cavernes & des tanieres qui fe voïent au tour de ce Monaftere dans la pente d'une longue & rude Montagne, au pied de laquelle paffe le Torrent de Cedron. Prefentement le nombre de ces Religieux est reduit à quinze qui fuivent la Regle de faint Bafile & demeurent dans ce Monaftere, dont l'Eglife eft belle, devote & fort bien entretenuë, par le moïen des aumofnes que les Grecs y envoïent. La porte du Convent eft toute couverte de peaux de Crocodiles, de peur que les Arabes n'y mettent le feu, ou ne la rompent à coups de pierres. A trois cens pas de l'Eglife, il y a une Tour feparée du Convent par un profond precipice. Cette Tour a douze toifes en quarré & dix de hauteur, yaïant à trois toises de terre une petite feneftre pour paffer un homme. Il y a toûjours un Religieux qui demeure en ce lieu, vivant comme un Reclus. Le P. Eugene Roger Recollect, dans fon voïage de Terre-Sainte, dit que lorsqu'il y fut, il y avoit un Frere laïc qui demeuroit dans cette Tour depuis vingt-deux ans, & ne defcendoit que trois fois l'an à Noël, à Pafques, & au jour de faint Sabas, pour recevoir les Sacremens, & remontoit enfuite dans fa Tour, où les Religieux lui donnoient fa nourriture dans un panier, qu'il tiroit avec une corde attachée d'un cofté à cette Tour & de l'autre au Dofme de l'Eglife, où font auffi attachées deux fonetes que le Religieux qui demeure en cette Tour fonne pour avertir les Religieux,lorfqu'il voit approcher les Arabes, ou des Lions, des Tigres & autres beftes feroces. Les autres Convents que les Moines Grecs ont en Afie, font peu confiderables.

Ils en ont un plus grand nombre en Europe. Nous commencerons par ceux qui font fur le Mont-Himette dans l'Attique, d'où l'on découvre non feulement toute l'Attique, mais aufli une grande partie de l'Archipel & de la Morée, 1 Iftme de Corinthe, & Negrepont de l'autre costé jufqu'à l'Euripe, & qui n'eft éloigné d'Athenes que de quatre lieuës. Les Moines Grecs y ont deux Monafteres, dont l'un s'appelle Hagio-Ja

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MOINES
GRECS.

MONAS- niho-Charias,& l'autre Agios-Kyriani, ce dernier eft affez bien bafti pour le païs. H ne païe qu'un Sequin où piece d'or qui vaut deux écus & demi, pour tribut. Cela vient de ce que, lorfque Mahomet II. prit Athenes, ce fut l'Egumene ou Abbé d'agios-Kyriani, qui lui porta les clefs de la ville, & la joïe que cet Empereur en eut, lui fit impofer à cette Maison un tribut fi mediocre. On trouve encore fur cette Montagne un autre Monastere abandonné, & on dit que les Italiens y avoient autrefois une Eglife commune avec les Grecs, appellée Agios-Giorgios-ho-Koutelas. Ils ont auffi quelques Monaf teres à Athenes.

A Pendeli ou Penteli, autre Montagne de l'Attique dans le voifinage d'Athenes, il y a un Monaftere au pied de cette Montagne dont il porte le nom. C'eft un des plus celebres de la Grece, & il y a ordinairement plus de cent Religieux qui païent tous les ans de Carach ou de tribut fix mille livres pefant de miel, pour la Mosquée neuve que la Sultane mere de l'Empereur Mahomet IV. a fait baftir à Conftantinople, & ils font encore obligés d'en fournir autant à raison de cinq Piaftres le quintal. Hs ont rarement moins de cinq mille Ef fains d'Abeilles, outre beaucoup de terres labourables, des troupeaux de brebis & autre beftail, avec de grands vignobles & quantité d'Oliviers. La fituation de ce Monaftere eft fort agreable pendant l'Efté, à caufe qu'elle eft entre les croupes de la Montagne, d'où fortent plufieurs ruiffeaux qui se rendent dans des Refervoirs pour conferver du poiffon, & pour faire tourner leurs Moulins. Ils ont une affez belle Bibliotheque dont la plufpart des Livres font manufcrits, ils consistent en un grand nombre de Volumes de Peres Grecs.

A Naxe Ifle de la Mer-Egée ils y ont plufieurs Monafteres, dont l'un des principaux appellé Fanaromeni, eft dedié à la fainte Vierge, à caufe d'un tableau où elle eft reprefentée, & qu'on trouva en ce lieu - là. Ce Monaftere eft bafti depuis peu de tems. Il y a foixante-dix chambres,fans celles qui font fous terre. L'Eglife eft petite, mais bien baftie, & elle n'eft deffer vie que par dix Moines qui font fort ignorans.

A Paros autre Ifle de la Mer-Egée l'une des Cyclades, les Moines Grecs y ont fix ou fept Monafteres qui font fort beaux, où ils vivent fort commodement. Celui qui eft dans laville de Kefulo est dedié à faint Antoine. Il y a ordinairement dou

ze Religieux qui font gouvernés par un Abbé.

MONA

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Celui de Calimache, l'un des principaux village de l'Ifle MOINES de Chio, qui eft encore une Ifle de la Mer-Egée, est très con- GRECS. fiderable. Il eft fitué parmi les forefts & les rochers; on le nomme Niamogni, qui veut dire feule Vierge. L'Eglife eft grande & belle. Elle fut baftie à l'occafion d'une image de la fainte Vierge trouvée miraculeufement fur un arbre, demeuré feul de plufieurs aufqels on avoit mis le feu. Conftantin Monomaque Empereur de Conftantinople,averti de ce miracle, fit Voeu de baftir une Eglife en ce lieu-là, s'il remontoit fur le trône d'où il avoit efté chaffé, ce qu'il executa l'an 1050. Elle eft ornée de quantité de pieces de marbre & de porphyre qu'il y fit porter de Conftantinople, entr'autres, de trente deux colomnes de marbre. Le Dome eft tout revetu de peintures à la mofaïque. Cette Eglife eft fi bien entretenue, qu'elle femble toute neuve. Derriere le grand Autel, on voit l'image miraculeufe peinte fur bois, & le lieu où eftoit planté l'arbre qui la portoit. Ce lieu est enfermé dans l'Eglife. Le Convent eft fort grand & basti en maniere de Chafteau. Les femmes n'y entrent point, & il y a ordinairement deux cens Caloyers gouvernés par un Abbé. Ils ne paffent point ce nombre, & quand il y a des places vacantes, ceux qui les veulent remplir païent cent piaftres, & portent tout leur bien au Convent, où ils en joüiffent toute leur vie, fans en pouvoir donner que le tiers, encore faut-il que cette donation fe faffe à quelque parent ou à quelque ami qui fe faffe Caloyer; deforte que le Convent ne perd rien du fond. Il fournit tous les jours à chacun des Caloyers du pain noir, d'affez mauvais vin, & du fromage pouri, c'est à eux à fe pourvoir pour le refte. Ils ne mangent ensemble dans le Refectoire que les Dimanches, & les grandes Feftes. Le revenu du Convent est de plus de foixante mille piaftres, dont ils en paient tous les ans cinq cens au Grand Seigneur. Ils ont auffi d'autres Convents dans la mefme Ifle, mais peu confi

derables.

Dans l'Ifle d'Andra, anciennement Andros, proche des villages d'Arni & d'Amolacos, il y a un Convent de cent Caloyers appellé Tagia. Il est basti en forme de forrereffe, & a une Eglife très bien ornée, quoique petite. Ces Moines don-nent à manger aux Etrangers pendant tout le tems qu'ils de-meurent là ; & quand ils s'en vont, ils leur fourniffent de quoi !

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