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GRECS.

Moines en pratique dans quelques Monasteres bien reglés ; mais comme il s'en trouve peu presentement, fi ce n'est au Mont Athos, & que dans ces Convents peu reglés la pluspart des Superieurs & des Religieux sont fort ignorans, & presque tous Heretiques & Schifmatiques, ils ne les obfervent pas si exactement. On en voit peu qui soient revestus du petit & du grand & Angelique habit, & ceux que l'on voit ordinairement dans le Levant n'ont pour tout habillement qu'un Doliman ou veste de couleur minime qui defcend jusqu'à la cheville du pied. Ce Doliman est serré d'une ceinture de toile brune qui fait plusieurs tours au tour du corps, & par dessus ce Doliman ils ont une autre veste, ou tunique qui a les manches mediocrement larges. Cette veste ne se ferme jamais, quoiqu'il y ait quantité de petits boutons depuis le haut jufqu'en bas, elle defcend seulement jusqu'à la moitié des jambes. Par dessous ces habits ils portent des chemises de toile, dont les manches qui font ouvertes par le bas defcendent auffi-bien que le Doliman jusqu'au poignet, & un caleçon de toile en esté, ou de drap en hyver, qui leur tombe, en faisant beaucoup de plis, jusqu'à la cheville du pied. Ils ont des chausfons de Maroquin violet attachés à ce caleçon, & ont pour chaussure des Babouches ou pentoufles qui se terminent en pointe, comme portent tous les Levantins, ausquelles il n'y a ni talons ni quartiers. Ils ne portent point la cucule ou voile dont nous avons parlé, comme on peut voir dans la figure que nous avons fait graver fur un dessein qui m'a esté envoïé d'Alep, & c'est proprement l'habit des Novices. C'est pourquoi nous l'avons mise la premiere des trois que nous donnons, & qui reprefentent les differens habillemens des Religieux Grecs, suivant les trois eftats de Novices, de Parfaits, & de plus Parfaits.

Tous les Religieux travaillent au bien du Monaftere pendant qu'ils y demeurent. Les uns ont le soin des fruits, les autres des grains, les autres des troupeaux, & generalement de tout ce qui peut appartenir au Convent. Ils se servent en cela du secours de leurs Novices, qu'ils emploïent durant leur Noviciat plus souvent à la campagne, qu'aux exercices de la Meditation & de la Retraite spirituelle, à quoi ils ne s'appliquent gueres, non plus qu'à l'estude; ce qui fait que ces Caloyers font extremement groffiers & ignorans. A peine en

trouve-t-on dans les plus grands Convents qui entendent MOINES quelque chose du Grec Litteral, dans lequel sont escrits tous leurs Offices & toutes leurs prieres.

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La necessité que ces Caloyers ont de cultiver eux-mesmes leurs terres, leur font recevoir quantité de Freres Laïcs. Il n'y a gueres de Convents qui n'en aïent pour le moins autant que de Religieux destinés pour le Chœur. Ces Freres font presque tout le jour à la campagne, & ne reviennent que le foir à la maison, où, nonobstant la fatigue de leur travail ils ne laissent pas d'assister à une longue Priere & d'y faire quantité de genuflexions, qu'ils appellent Metanai, c'est-àdire inclinations jusqu'à terre; après quoi s'estant contentés d'un fouper fort leger, ils vont se reposer de leurs peines fur un lit qui n'est gueres moins dure que du bois, en attendant que la Priere du matin soit fonnée, & que le point du jour les rappelle à leur travail.

Sur tous ces Religieux il y a des Vifiteurs ou Exarques, dont nous avons descrit les fonctions dans le dernier Paragraphe de la Dissertation préliminaire. Ils n'entreprennent la visite des Convents qui leur font foumis, que pour en tirer la fomme d'argent que le Patriarche leur demande ; & ces pauvres Caloyers ont beau travailler, fatiguer & faire fuer leurs Freres Laïcs, ils ont toûjours beaucoup de peine à amasser quelque chose, soit pour la Communauté, soit pour leur particulier; d'autant que leur Patriarche leur envoïe souvent ces fortes de Visiteurs pour les descharger de ce qu'ils ont de meilleur. Nonobstant toutes ces taxes que les Religieux Grecs font obligés de païer, tant à leur Patriarche qu'aux Turcs, il ne laisse pas d'y avoir des Convents bien rentes, & des Religieux affez riches en leur particulier pour ofer quelquefois encherir fur le Patriarche mesme, & s'emparer du Siege à force d'argent.

Les Egumenes ou Superieurs des Monasteres font fort estimés & respectés des Religieux, principalement dans les grands Monafteres ou Convents bien reglés; car dans les petits où il y a quelques-autres anciens Religieux, ils ne font pas fi abfolus. Ils ont quelquefois mesme affez de peine à se faire obéir; fur tout lorsqu'ils enjoignent quelques penitences qui ne confiftent qu'à faire plusieurs genuflexions & à jeûner quelquefois, car pour d'autres peines les Superieurs

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MOINES n'ofent pas mesme seulement en parler. Ils craindroient qu'en menaçant un Religieux de quelque chastiment, ils ne lui donnassent lieu de s'en exemter pour toûjours en proferant quelques paroles, ou bien en levant seulement la main vers le Ciel pour se faire Turc. Ainsi la crainte que les Superieurs ont de perdre tout-à-fait les gens en voulant les chastier un peu rudement, fait que toutes les penitences que l'on donne font toutes legeres ou volontaires, à moins que l'on ne trouve un sujet tout-à-fait foumis, qui se porte lui-mesme à recevoir de bon cœur tout ce que l'on voudra lui imposer de plus rude.

Après que le Superieur a esté elu par les Religieux, il doit estre confirmé par l'Evesque, ce qui se fait de cette maniere. L'Evesque vient au Monaftere, où, après avoir recité quelques Prieres, les Religieux lui presentent celui qui a esté elu, en lui disant: Le Reverendiffime Prestre Moine N. elu est presenté pour estre confirmé & establi Superieur de ce Venerable Monastere N. L'Evesque lui mettant la main fur la teste dit une Oraison: on chante ensuite quelques Antiennes, après lesquelles on fait affeoir le nouveau elu au milieu de l'Eglife, on lui oste son manteau, on lui en donne un neuf: l'Evesque dit : Le Serviteur de Dieu est mis fur le Siege, & fait Superieur & Pasteur de ce Venerable Monastere N. Les Religieux le levent ensuite de son siege en disant trois fois : Il est digne. L'Evefque l'embraffe, & les Religieux en font de mefme; & l'Evefque, en lui mettant en main le Bafton Paftoral, lui dit: Recevez ce Baston qui vous doit servir d'apui pour gouverner votre Troupeau, parce que Dieu vous en demandera compte au jour du Jugement. On souhaite enfin plusieurs années au Pontife & au Superieur, & on commence la Meffe.

Nous ajoûterons encore une ceremonie qui s'observe aux Enterremens des Religieux Grecs. Comme après leur mort on doit laver leurs corps, mais qu'ils ne peuvent pas estre veus nuds; celui qui eft commis pour cet effet, trempe une esponge dans de l'eau tiede, & en la pressant, en fait fortir l'eau qu'il repand en forme de croix fur le front du Mort, fur sa poitrine, sur ses mains, fur ses pieds, & fur ses genoux. On lui oste ses vieux habits, on lui en donne de propres; & s'il est du grand & Angelique Habit, on lui met la cuculle & P'on fait defcendre son bonnet jusque sur la barbe, afin que

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Patriarche Grec, de Jerusalem.

P. Ciljart f

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