GRECS. MOINES chacun se retire dans sa Cellule ou à son travail, jusqu'à neuf heures, que l'on retourne à l'Eglise pour y dire Tierce, Sexte & la Messe; après laquelle on va au Refectoire, où l'on fait la lecture pendant le dîner. Mais au sortir du repas, tant le matin que le soir, le Cuisinier se met à genoux à la porte du Refectoire; & comme s'il demandoit la recompense de ses peines ou le pardon de ses fautes, il dit de tems en tems aux Religieux: Eulogite Pateres: benissez moi, mes Peres, & chacun d'eux le faluant, lui refpond: ô Theos fyncoresi, que Dieu vous beniffe ; puis s'estant tous retirés à leurs chambres, ils y demeurent s'ils veulent, ou vont travailler jusqu'à quatre heures, qu'ils s'afsemblent à l'Eglise pour dire Vespres; après quoi ils font quelque petit exercice, & viennent souper à fix heures. Le souper estant fini, ils rentrent à l'Eglise pour y dire un Office qu'ils nomment Apodipho, l'après soupé, qui est ce que nous appellons Complies, lequel estant fini environ les huit heures du soir, chacun se retire à sa chambre pour se coucher & se relever à minuit. Tous les jours après Matines le Superieur se tient à la porte de l'Eglise où les Religieux se prosternent à ses pieds pour dire leur coulpe. C'est ce qui s'observe dans les Convens bien reglés; & il y en a beaucoup plus de ceux où regne le defordre, que de ceux où l'observance reguliere est en pratique, la pluspart faisant consister toute l'observance, dans les austerités & les mortifications, car ils ne mangent jamais de viande, & jeûnent trois fois la semaine, le Lundi, le Mercredi, & le Vendredi, pendant lesquels jeûnes, & ceux de leurs Carefmes, ils ne mangent qu'à deux heures après midi. Ils retournent neanmoins après Complies au Refectoire, où on leur presente de petits morceaux de pain dans un panier avec de l'eau ; mais il n'y a ordinairement que les jeunes qui en prennent par neceflité, & ils repassent à l'Eglife pour rendre graces à Dieu & faire la priere du foir, après laquelle le Superieur fait le signal, & chacun se retire en filence asa Cellulē. Ils ont quatre Caresmes qui leur font communs avec le reste du peuple de leur mesme Rit. Le plus grand & le premier, eft celui de la Refurrection de Notre Seigneur qu'ils appellent la Grande Quarantaine, & quidure huit semaines. Pendant la premiere ils peuvent manger du poisson, des œufs, du lait, du fromage; c'est pourquoi ils nomment cette semaine la Tirini, qui signifie fromage. Pendant les sept semaines qui suivent, ils : 1s ne peuvent point manger de tous ces alimens. Il y a nean- MOINES moins quelques poissons qui leur font permis comme ceux qui GRECS. n'ont point de sang, tels que font les Huitres, les Polypes, les Petalydes, les Seches, les Moules, les Escargots de mer, & les poissons à coquilles : il leur est aussi permis de manger de la boutargue qui eft faite d'œufs sechés d'un poisson appellé Tétard; & du Caviard composéaussi d'œufs d'un autre poiffon appelléMaroni qui vient de la Mer-noire. Mais le jour de l'Annonciation de Notre-Dame, pourveu que cette Feste n'arrive point dans la semaine Sainte, ni le Dimanche des Rameaux, ils peuvent manger du poisson de toute forte d'espece. Ainfi leur nourriture pendant ce tems-là est de choses mal faines & de dure digestion, avec des legumes, du ris, du miel, des olives, & des herbages. A Zante la pluspart des Grecs ne veulent pas mesme user d'huile, parce qu'elle est graffe, quoiqu'ils ne fassent pas de difficulté de manger des olives; mais en Grece il n'y a que les Religieux, les Religieuses, & quelques devots qui s'en abstiennent. Pendant ce Caresme les Religieux ne boivent point de vin, ou du moins n'en doivent point boire, excepté le Samedi & le Dimanche ; & leur abstinence eft si grande, que fi durant le Caresme ils font obligés, en parlant, de nommer seulement du lait, du beure ou du fromage, ils ajoûtent toûjours la parenthese de Timitis agias faracostis, sauf le respect du faint Caresme, & le Peuple à leur exemple en fait autant. Le second Caresme est celui des Ss. Apostres, qui commence huit jours après la Pentecoste sans estre borné par des jours fixes; car en certaines années il dure trois semaines, & quelquefois plus long-tems. Ils boivent du vin pendant ce jeune, & mangent du poisson, mais ils s'abstiennent de laitages, & des autres chofes qui ont rapport à la viande. Le troifiéme Caresme est celui de l'Afsomption de Notre-Dame: il dure quatorze jours, pendant lesquels il ne leur est pas permis de manger du poisson, excepté le Dimanche & le jour de la Transfiguration de Notre-Seigneur. Le quatriéme Caresme est celui que nous appellons de l'Advent, qu'ils commencent quarante jours avant Noel, & qu'ils observent de la mesme maniere que celui des Apoftres. Outre ces Caresmes, qui comme nous avons dit sont communs avec les Seculiers, ils en ont encore trois autres, dont le premier commence avant la Feste MOINES GRECS. de saint Dimitri, & dure vingt-fixjours. Le second est de quin ze jours avant la Feste de l'Exaltation de la sainte Croix; & le troisiéme de huit jours avant la Feste de saint Michel. Tous les Grecs jeûnent encore les Vendredis & les Mercredis, & quelques-uns les Lundis; mais ils ont en horreur le jeûne des Ninivites ou de Jonas, que quelques Orientaux observent, comme nous avons dit dans les Chapitres précedens. Ils le regardent comme superstitieux; c'est pourquoi pendant la semaine que les autres jeûnent, ils mangent de la viande. L'orsqu'il se presente quelqu'un pour embrasser la vie Monastique, on le fait poftuler quelque tems, & estant admis on le fait venir à l'Eglife, où le Superieur lui demande, si c'est de son propre mouvement qu'il vient à Jesus-Christ: s'il n'y est point contraint par la necessité: s'il renonce au monde & à tout ce qui lui appartient: s'il perseverera dans le Monaftere & dans les exercices de la vie Monastique : s'il sera soumis à ses Superieurs : s'il gardera la chasteté jusqu'à la mort. Il l'exhorte de bien prendre garde aux engagemens qu'il va contracter avec Jesus - Christ; il l'avertit que les Anges font prêts pour recevoir fon Vœu, dont on lui demandera compte au jour du Jugement. Le poftulant aïant refpondu qu'il se soumet à tout ce qu'on lui propose, le Superieur dit: Notre Frere N. prend le commencement du faint & Monastique Habit; disons pour lui que le Seigneur lui fasse mifericorde : les Religieux repetent toûjours par trois fois, que le Seigneur lui fasse mifericorde. Il lui coupe les cheveux en forme de croix en commençant par le sommet de la tefte; il coupe enfuite le devant, le derriere, & les costés en difant: Notre Frere N. a les cheveux coupés, au nom du Pere, du Fils, & du faint Esprit; disons pour lui que le Seigneur lui fasse misericorde. En lui donnant la Tunique: Notre Frere N. eft revêtu de la Tunique de justice pour gage du Saint & Angelique Habit;difons &c. En lui donnant le Bonnet: Notre Frere N. reçoit le Casque sur sa teste, au nom du Pere, du Fils, & du Saint Esprit; disons pour lui &c. Voila en quoi confiste l'Habit des Religieux de la premiere classe; & lorsqu'ils l'ont porté pendant trois ans, on leur donne l'Habit des Profez, que l'on nomme le petit Habit, & qui fe donne avec les ceremonies qui fuivent. Les Religieux aïant commencé leur Office, le Sacriftain conduit hors del'Eglife celui qui doit prendre l'Habit; & com |