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commença à recevoir ceux qui fe prefentoient à lui pour em brafier l'Eftat Monaftique ; & après les avoir examinés, il a leur donnoit l'habit de Moine. Tant qu'ils furent en petit « nombre il fe chargea de tous les foins de la maifon, afin qu'ils ne penfaffent qu'à leur avancement fpirituel; mais ils fe trouverent bien-toft monter, jufques à cent. Son Monaf-« tere eftoit formé dès devant la mort de Conftantin, &mefa me dès les premieres années de l'Epifcopat de faint Athanafe, c'eft-à-dire au plus tard avant l'an, 333 Saint Theodore qui « ne fe retira à Tabenne que lorfque ce Monaftere eftoit déja rempli d'un grand nombre de Religieux, & que leur repu- a tation eftoit repandue affés lom de là, y vint apparemment dès l'an 328, ainfi il femble qu'on peut mettre le commencement du Monaftere vers l'an 325 auquel faint Pachome pouvoir « avoir 33. ans d'âge, & onze de retraite, moto

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Il paroift visiblement par tout ce difcours, que le Monaftere de faint Pachome n'eftoit pas tout formé en 328. Il peut bien avoir efté commencé en 325, puifque ce fut à peu près dans ce tems-là que ce Saint eut la premiere vifion de l'Ange qui lui commanda de bastir un Monaftere à Tabenne, Mais quel pouvoit-eftre ce Monaftere que faint Pachome baftit d'abord? une Cellule fans doute, ou une cabane, faite de branches d'arbres & de rofeaux; car il n'y a pas d'apparence que faint Palemon, qui l'aida à ce travail, & qui eftoit un vieil lard fort caduc, fuft en eftat de porter de gros matereaux. Comme en le quittant, ils promirent de fe vifiter chacun une fois l'année, & qu'ils exécuterent ponctuellement leur promeffe jufques à la mort de faint Palemon; il y a bien de l'apparence que faint Palemon vêcut encore quelques années après. Comme on ne nous dit point fi ce fut devant ou après la mort de faint Palemon que le frere de faint Pachome le vint trouver à Tabenne pour demeurer avec lui, nous pouvons croire que ce fut après la mort de faint Palemon. Il n'y a point de doute que faint Pachome ne demeuraft encore feul après la mort de fon frere ; puisque dans les combats qu'il eut à foûtenir contre les Demons,ce Solitaire Hieracapollon le venoit encourager. Croirons-nous que tout cela ne s'eft fait que dans l'efpace de trois ans, depuis l'an 325. jufqu'en 328. auquel tems on nous veut perfuader que faint Theodore vint à Tabenne pour y demeurer, & que le Monaftere de faint Pacho

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me eftoit déja rempli d'un grand nombre de Religieux? Comment cela fe peut-il accorder avec ce qui eft dit dans la vie de faint Pachome , que durant quinze ans il ne dormoit que fur un banc, fans s'appuïer contre la muraille,& que ce fut après cela, que l'Ange lui eftant encore apparu, & lui aïant dit par trois fois que la volonté de Dieu eftoit qu'il fervift les hommes pour les reconcilier avec lui, il reçut pour lors dans fon Monaftere ceux qui fe presentoient à lui Ce fut donc après l'an 340. que cela arriva, & non pas l'an 328. puisque faint Pachome s'eftoit retiré à Tabenne en 325. & peut-eftre mefme après.

C'eft ainfi fans doute que M. Bulteau a compté, lorfqu'il dit que l'on peut mettre l'eftabliffement du Monaftere de Tabenne par faint Pachome entre les années 340. & 350. & quoique ce Monaftere euft efté commencé en 325. on ne le pouvoit pas appeller un Monaftere reglé,&où l'on pratiquoit les exercices de la vie Monaftique, puifque perfonne n'y demeuroit. Mais quand l'on ne voudroit compter ces quinze années de grandes aufterités de faint Pachome que depuis fa retraite, qui fut en 314. (ce qui n'eft pas vraisemblable) il fe trouveroit qu'il n'auroit commencé à recevoir du monde dans fon Monaftere, qu'après l'an 329. & non pas l'an 328. comme dit M. de Tillemont. Ainfi faint Amon s'estant retiré à Nitrie en 323. il a pu avoir des Difciples, & avoir fondé des Monasteres confiderables, avant ceux de faint Pachome. Le P. de MontObferunt faucon prétend mefme qu'il y avoit déja des Monafteres fur Jur la Lettre de Philon de le Mont de Nitrie, lorfque faint Amon s'y retira, & qu'il la vie cont. augmenta feulement ceux qui y eftoient, & qui n'estoient autres que ceux des Therapeutes qui avoient les premiers habité cette montagne.

part. 2. Pa

rag. 3. pag. 109.

Le P. Papebroch ne veut point non plus admettre de Monasteres avant faint Pachome. Il fembloit que dans fes Ephemerides des Mofcovites, au vingt-deuxième Avril, il avoit mefme Apud Bol- pretendu que la vie Monaftique n'eftoit qu'une nouveauté land Tome du commencement du quatriéme fiécle, puifqu'il le temoigne 1. Mais affez par ces paroles: Nolumus credere Monachatus initia DioEphemerid. cletiani atate vetuftiora ; & le P. Sebaftien de faint Paul, ExMoscou. provincial des Carmes de Flandre, avoit raifon de l'accufer de n'avoir point voulu admettre la vie Monaftique avant l'an bib. error. 300. Mais dans la refponse que le P. Papebroch fait au P. Paul

Mais.pag

19. Col 1.

S. Paul. Ex

σποτ.

lc. art. 19.

de faint Sebastien, il rapporte la conference de faint Antoine Daniel.Pa avec les Difciples de faint Pachome, dont nous avons ci-de- pebrachii. vant parlé, & dit : que c'est ce qui lui a donné occafion de mettre le troifiéme paragraphe qui fe trouve au commence- Daniel Pament de la vie de faint Pachome: Cenobialis vita, feu perfec- peb.rosp.ad tioris monaftica initium & exemplum, an à fanéto Pachomio ac- as. P auceptum ? & qu'aïant refpondu affirmativement, c'eft une preuve qu'il n'a entendu parler que de la vie Coenobitique dont faint Pachome eft l'Auteur, qui a auffi fondé les premiers Monasteres, n'y en aïant point eu avant lui, foit en Egypte, id. foit en aucun autre lieu: apparet enim queftionem mihi effe & femper fuiffe, de Canobitica feu Monafticâ perfectiori, ad quan exiftimo non pervenisse ulla monasteria, vel in Ægypto, vel alibi, ante Pachomium.

8. 122.

Comme on croiroit peut-eftre que le P. Papebroch par la vie Cœnobitique parfaite, n'a entendu parler que de plufieurs Monafteres unis ensemble fous un Chef; il s'explique plus bas en difant: qu'il pretend non feulement parler de ceux-là; mais encore des Monafteres particuliers, où plufieurs Religieux demeuroient ensemble. ( C'eft toûjours en refpondant bid n. 125. au P. Sebastien,) vt ut eft: apparet falfo me accufari, quafi negem Monachatum incepiffe ante annum 300. cùm tam manifefè declarem me agere de perfecto, id eft Cœnobitico Monachatu, & quidem tali qui non folùm multos in unum colligebat Monafterium ; fed uni Monafterio ejufque Abbati plurima alia fubjiciebat tanquam capiti ; quemadmodùm nunc fit in Religiofis Ordinibus ; eftenim hac regiminis forma proculdubio optima & perfectissima. Nititur paternitas tua contrarium probare ex fanctis Patribus: fed hi omnes intelligipoffunt de folitariis fimplicibus loqui, eorumque Cellas appellare Monafteria.

Il n'y avoit donc point, felon le P. Papebroch, de Monafteres avant faint Pachome. Cependant le P. Sebastien, pour prouver l'antiquité de la vie Monaftique, lui apporte pour exemple le martyre de fept Moines, arrivé fous l'Empire de Maximin, dont il eft fait mention dans le Martyrologe Romain au dixneuviémeOctobre. Le P. Papebroch lui refpond, que cet exemple n'eft pas valable pour prouver l'antiquité de la vie Mona!tique; puifqu'ils ont fouffert fous l'Empire de Maximin, qui commença à regner enEgypte l'an 310.auquel tems il reconnoist qu'il y avoit des Monafteres: Et Maximinus ifte primùm cœpit

Caffian. Coll 18.

cap. 10.

1bid n. 129 anno 310. in Egypto regnare, quando iftic fuiffe Cœnobia agnofco, le mot de Canobium, dont il fe fert, ne peut s'entendre que d'un Monaftere où l'on vivoit en commun, fuivant ce que dit Caffien: Cœnobium appellari non poteft, nifi abi plurimorum cohabitantium degit unita communio. Reconnoiftre des Monafteres en 310. & n'en vouloir point admettre avant ceux de faint Pachome, qui ne fe retira que l'an 314. & qui ne fonda fon premier Monaftere qu'après l'an 340. ou au pluftoft,qu'après l'an 329. cela demandoit, ce me femble, quelque éclairPapebroh. ciffement.

124.

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us fupra .. On pourroit dire, qu'il a donné l'éclairciffement que l'on demande dans le mefme article de fa response au P. Sebastien de faint Paul, lorfqu'il dit: que les anciens & les modernes, » ont pris indifferemment le nom de Moines, & donné celui de Monafteres à leurs demeures, de mefme que l'on donne prefentement le nom de Celle ou de Cellule à la demeure d'un feul Ermite, ou à la chambre d'un feul Religieux qui vit regulierement dans un Cloiftre. Il ajoûte que vers le milieu des fiécles, le nom de Cellules ou Celles eftoit aufli » donné à des Monafteres; ce qui a fait que quelques François & quelques Italiens, ont ainfi appellé des Abbaïes & des Prieurés; comme ceux de Celle-neuve, Celle-Dieu, Vaux-Celle, & Celle de faint Ghilin. Pourquoi donc, dit-il » encore au P. Sebastien, fi je distingue ainfi les Monasteres, felon les differents tems, voulez-vous que je fois plus ridicule, que celui qui voudroit excufer (comme quelques-uns des voftres ont fait en ma prefence) ce nombre exceffif de Monafteres de Carmes, dont il eft parlé dans voftre Eglife de Louvain, où l'on dit qu'Omar, Chef des Sarafins, ordonna à un petit nombre de Monafteres, qui eftoient les restes de fept mille, de porter des habits barrés? Que l'on prenne, ajoûte-t-il, le » mot de Cœnobium pour un Monaftere, & le mot de Monaf„tere pour une Cellule; on ne peut entendre par-là, finon, que les Religieux qui changerent d'habit, eftoient ce qui reftoit du nombre de fept mille dont Omar avoit detruit les Monafteres, & qu'il en avoit fait mourir plufieurs.

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Mais bien loin que cet esclairciffement puille fatisfaire, on en tirera au contraire cette confequence, que le P. Papebroch difant que pour parler d'un Monaftere, il s'eft fervi de ces mots, Monafterium, Cella, & Cœnobium, felon les differens tems

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aufquels on les appelloit ainfi ; & aïant donné, dans fa relponte au Pere Sebastien, le nom de Canobia aux Monasteres qui eftoient du tems de l'Empereur Maximin, c'est-à-dire vers l'an 310. il a pretendu en cet endroit que la vie Cœnobitique eftoit déja eftablie dès ce tems-là; puifque par les Cœnobites, l'on ne peut ne peut entendre que les Religieux qui vivoient en commun, & que le mot de Coenobite vient de celui de Canobium, qui ne peut fignifier autre chofe qu'une Communauté de plufieurs perfonnes qui vivent ensemble, fuivant l'explication qu'en a donnée Caflien, comme nous avons déja dit, auquel on doit ajoûter d'autant plus de foi, qu'il avoit efté vifiter les Monafteres d'Egypte & de la Thebaïde l'an 394. qu'il fçavoit bien la difference qu'il y avoit entre les Monafteres où l'on vivoit en commun, & ceux où il n'y avoit qu'un feul Solitaire, & le nom qu'on leur donnoit ; qu'il affure mesme, comme nous avons auffi remarqué dans un autre endroit, que les Coenobites avoient commencé avant faint Paul Ermite & avant faint Antoine, par confequent avant faint Pachome, ce qu'il pouvoit avoir appris de leurs Difciples qui estoient encore vivants. On a donc fujet de s'eftonner de ce que le P. Papebroch, aïant prétendu avoir eu raifon de faire cette demande: Gænobialis vita, feu perfectioris Monaftica initium & exemplum, an à fancto Pochomio acceptum ? & d'avoir refpondu affirmativement que faint Pachome a efté l'auteur de la vie Cœnobitique, & le fondateur des premiers Monafteres, & qu'il n'y en a point eu avant lui, foit en Egypte, foit en aucun autre lieu, il ait donné enfuite le nom de Canobia aux Monafteres qui estoient déja fondés dès l'an 310.. c'eft-à-dire près de vingt ou trente ans avant que faint Pachome euft fondé fon premier Monaftere ; & il fera toûjours vrai de dire, que s'eftant fervi du mot de Canobia,il reconnoiffoit des Monafteres parfaits dès l'an 310. quoi qu'il tâche de prouver lecontraire en plufieurs endroits.

A Dieu ne plaife que je veüille accufer le P. Papebroch d'avoir avancé des faits qui fe contredifent, auffi-bien que le P. Thomaffin & M. de Tillemont. Si je combat leur fentiment touchant l'origine de la vie Monaftique & des Monafteres je ne le fais point par un efprit de critique : j'ai trop de refpect pour leurs perfonnes, & trop d'eftime & de veneration pour ces excellents ouvrages qu'ils nous ont donnés, qui font d'u

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