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GRECS.

trouve-t-on dans les plus grands Convents qui entendent MOINES quelque chofe du Grec Litteral, dans lequel font efcrits tous leurs Offices & toutes leurs prieres.

La neceffité que ces Caloyers ont de cultiver eux-mefmes leurs terres, leur font recevoir quantité de Freres Laics. Il n'y a gueres de Convents qui n'en aïent pour le moins autant que de Religieux deftinés pour le Choeur. Ces Freres font prefque tout le jour à la campagne, & ne reviennent que le foir à la maifon, où, nonobftant la fatigue de leur travail ils ne laiffent pas d'affifter à une longue Priere & d'y faire quantité de genuflexions, qu'ils appellent Metanai, c'est-àdire inclinations jufqu'à terre; après quoi s'eftant contentés d'un fouper fort leger, ils vont fè repofer de leurs peines fur un lit qui n'eft gueres moins dure que du bois, en attendant la Priere du matin foit fonnée, & que le point du jour les rappelle à leur travail.

que

Sur tous ces Religieux il y a des Vifiteurs ou Exarques, dont nous avons defcrit les fonctions dans le dernier Paragraphe de la Differtation préliminaire. Ils n'entreprennent la vifite des Convents qui leur font foûmis, que pour en tirer la fomme d'argent que le Patriarche leur demande ; & ces pauvres Caloyers ont beau travailler, fatiguer & faire fuer leurs Freres Laïcs, ils ont toûjours beaucoup de peine à amaffer quelque chofe, foit pour la Communauté, foit pour leur particulier; d'autant que leur Patriarche leur envoie fouvent ces fortes de Vifiteurs pour les defcharger de ce qu'ils ont de meilleur. Nonobftant toutes ces taxes que les Religieux Grecs font obligés de païer, tant à leur Patriarche qu'aux Turcs, il ne laiffe pas d'y avoir des Convents bien rentes, & des Religieux affez riches en leur particulier pour ofer quelquefois encherir fur le Patriarche mefme, & s'emparer du Siege à force d'argent.

Les Egumenes ou Superieurs des Monafteres font fort eftimés & refpectés des Religieux, principalement dans les grands Monafteres ou Convents bien reglés; car dans les petits où il y a quelques-autres anciens Religieux, ils ne font pas fi abfolus. Ils ont quelquefois mefme affez de peine à fe faire obéir ; fur tout lorfqu'ils enjoignent quelques penitences qui ne confiftent qu'à faire plufieurs genuflexions & à jeûner quelquefois, car pour d'autres peines les Superieurs

GRECS,

MOINES n'ofent pas mefme feulement en parler. Ils craindroient qu'en menaçant un Religieux de quelque chastiment, ils ne lui donnaffent lieu de s'en exemter pour toujours en proferant quelques paroles, ou bien en levant feulement la main vers le Ciel pour fe faire Turc. Ainfi la crainte que les Superieurs ont de perdre tout-à-fait les gens en voulant les chaffier un peu rudement, fait que toutes les penitences que l'on donne font toutes legeres ou volontaires, à moins que l'on ne trouve un fujet tout-à-fait foumis, qui fe porte lui-mefme à recevoir de bon cœur tout ce que l'on voudra lui impofer de plus rude.

Après que le Superieur a efté elu par les Religieux, il doit eftre confirmé par l'Evefque, ce qui fe fait de cette maniere. L'Evefque vient au Monaftere, où, après avoir recité quelques Prieres, les Religieux lui prefentent celui qui a efté elu, en lui difant: Le Reverendijjime Preftre Moine N. elu eft prefenté pour eftre confirmé & eftabli Superieur de ce Venerable Monaftere N. L'Evefque lui mettant la main fur la teste dit une Oraison: on chante enfuite quelques Antiennes, après lefquelles on fait affeoir le nouveau elu au milieu de l'Eglife, on lui ofte fon manteau, on lui en donne un neuf: l'Evefque dit: Le Serviteur de Dieu est mis fur le Siege, & fait Superieur & Pafleur de ce Venerable Monaftere N. Les Religieux le levent enfuite de fon ficge en difant trois fois : Il eft digne. L'Evefque l'embraffe, & les Religieux en font de mefme; & l'Evefque, en lui mettant en main le Baston Pastoral, lui dit: Recevez ce Bafton qui vous doit fervir d'apui pour gouverner votre Troupeau, parce que Dieu vous en demandera compte au jour du Jugement. On fouhaite enfin plufieurs années au Pontife & au Superieur, & on commence la Meffe.

Nous ajoûterons encore une ceremonie qui s'observe aux Enterremens des Religieux Grecs. Comme après leur mort on doit laver leurs corps, mais qu'ils ne peuvent pas eftre veus nuds; celui qui eft commis pour cet effet, trempe une efponge dans de l'eau tiede, & en la preffant, en fait fortir l'eau qu'il repand en forme de croix fur le front du Mort, fur fa poitrine, fur fes mains, fur fes pieds, & fur fes genoux. On lui ofte fes vieux habits, on lui en donne de propres ; & s'il eft du grand & Angelique Habit, on lui met la cuculle & 'on fait defcendre fon bonnet juíque fur la barbe, afin que

fon

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Ton vifa

MONAS TERES D:S

gefoit caché. On lui met auffi l'anable, le manteau, la ceinture & des fandales neuves. On eftend enfuite par MOINES Terre une couverture de laine dans laquelle on enfevelit le GRECS. liant cette couverture en trois endroits en forme de corps, en croix avec un cordon de laine, fur la tefte, fur la poitrine, & furle genoux feulement, ce qui refte de ce cordon fert à ieds. Les Prieres, qui font fort longues auffi-bien

lier les

corps

corps.

qu'aux Enterremens des feculiers, eftant finies, on porte le
à la fepulture, on s'arrefte trois fois en y allant; & à
chaque fois on dit de nouvelles Prieres & Oraifons fur le
Quand on l'a mis dans la foffe, & qu'on a jetté de la
terredens, on y répand auffi de l'huile de la Lampe.
Jacob Goart, Eucologium five Rituale Grecor. Grelot, Rela-
tion de Conftantinople. La Croix, Turquie Chreftienne, & D.
Apollinaire d'Agresta, Vit. di S. Bafilio part. 5.

CHAPITRE XX.

Des principaux Monafteres de Caloyers ou Moines Grecs.

UOIQUE l'Ordre de faint Bafile ait perdu une infi-
nité de Monafteres en Afie & en Europe, par le chan-

gement de Religion qui eft arrivé dans les lieux où ils eftoient
fitués, & qui font prefentement fous la domination des Turcs
& autres Princes Mahometans; neanmoins la Providence di-
vine a permis qu'il s'en foit confervé un grand nombre, pour
témoigner quelle eftoit autrefois la grandeur de cet Ordre.
Le plus confiderable des Monafteres que les Caloyers Grecs
onten Afie, eft celui du Mont-Sinaï, qui fut fondé par l'Em-
pereur Juftinien, & doté de foixante mille efcus de revenu.
Les Grecs lui ont donné le nom de fainte Metamorphofe, &
les Latins celui de la Transfiguration de Notre-Seigneur Je-
fus-Chrift. L'Abbé de ce Monaftere qui eft auffi Archevel-
que, a fous lui deux cens Religieux, outre ceux qui demeu-
rent en plufieurs endroits, tant de cette Montagne, que de
celle qu'on nomme de fainte Catherine, à cause que le corps
de cette Sainte y fut porté par les Anges, d'où il a efté depuis
tranfporté par ces Religieux dans leur Monaftere de faint

Sauveur.

Ce Monaftere a efté autrefois très-recommandable par-la

Tome I.

Bb

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