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DE L'ORA

dans la suite les Prêtres de cette Congregation, n'aïent eu PRETRES des Colleges & des Seminaires dans lesquels ils ont enseigné TOIRE EN les lettres humaines & la Theologie. Quant aux Réglemens, FRANCE. le P.de Berulle n'en fit point, voulant qu'il fût à la difpofition du Superieur Général de regler & conduire la Congregation felon la prudence, conformément aux personnes & aux tems. Ce zelé Fondateur fit paroître dans cette Charge l'éminence des vertus dont Dieu l'avoit avantage. Il étoit à fa Congregation un exemple d'humilité, de patience, de douceur, de foûmission aux avis de ses Confreres, de charité envers les pauvres, les malades & les pécheurs. Quoiqu'il fuivît la Cour & qu'il se cachât le plus qu'il pouvoit, il fut fouvent emploïé en des negotiations importantes. La Reine Marie de Medicis s'étant éloignée de la Cour sur des mécontentemens prétendus, le Roi lui envoïa le Pere de Berulle pour lui perfuader de revenir, & il réüffit fi bien dans cette commiffion, qu'il réconcilia leurs Majestés. Peu de tems après, il fut envoïé à Rome afin d'obtenir du Pape la difpense neceffaire pour le mariage d'Henriette de France avec le Prince de Galles heritier présomptif de la Couronne d'Angleterre; & à fon retour il conduifit en ce Roïaume la Princesse. Etant revenu en France la pureté de sa foi & fon attachement pour le faint Siége le porterent à perfuader au Roi la necessité qu'il y avoit de réprimer l'infolence des Herétiques en leur ôtant les places fortes qu'ils avoient dans le Roïaume,par le moïen desquelles ils se soutenoient dans leur rebellion contre l'Eglise & contre l'Etat. Peu de tems après ce Prince & la Reine sa mere demanderent au Pape sa promotion au Cardinalat. Urbain VIII. qui occupoit pour lors le faint Siége, n'eut pas de peine à déferer à leurs prieres, aïant connu le merite du Pere de Berulle dans le voïage qu'il avoit fait à Rome. Il fut donc fait Cardinal l'an 1627. & le Pape le dispensa en même tems du vœu qu'il avoit faitde n'accepter aucun Benefice, lui aïant commandé par sainte Obedience d'accepter la Dignité de Cardinal.

Son humilité parut encore davantage lorsqu'il fut revêtu de cette éminente Dignité. Il demeura toûjours dans la modestie, la pauvreté & la simplicité d'un Prêtre de JesusChrist, gardant la même frugalité dans ses repas, ne prenant de domestiques que ceux qui lui étoient absolument necef

TOIRE EN

PRETRES faires & se faisant toûjours accompagner comme les autres DE L'OKA- de la Congregation par un Prêtre de la maifon. 11 ne perFRANCE. mit pas qu'on changeât son lit, couchant toûjours sur une paillasse, il confentit seulement que l'on mit une tapisserie & un dais de ferge violete dans sa salle d'Audience: cependant il ne se mit jamais sous ce dais; mais il y fit mettre un crucifix comme l'image de celui à qui cet honneur appartenoit. Pour sa chambre il n'y voulut jamais souffrir ni dais ni tapisserie, &elle n'étoit pas plus ornée que celles des autres Prêtres de la Congregation qui avoient en lui un parfait modele de toutes les vertus, mais particulierement d'une profonde humilité au milieu des honneurs de la pourpre dont il ne joüit pas long-tems : car dès l'année qui suivit sa promotion, le tems auquel Dieu voulut récompenser la fidelité de son serviteur étant arrivé il fut saisi d'une langueur qui lui ôtant l'appetit & le sommeil, le réduisit à une extréme foiblesse. Il ne relâcha rien néanmoins de ses exercices ordinaires. 11 eut toûjours la même attention pour tout ce qui regardoit le gouvernement de sa Congregation & la conduite des Carmelites, dont il étoit aussi Superieur, & il ne negligea point le fervice de la Reine mere qui l'avoit choisi pour Chef de fon Conseil, pendant que le Roi portoit ses armes victorieuses au delà des Alpes. Il ne manquoit pas de dire la Messe tous les jours avec une devotion & une tendresse de cœur qui en inspiroit à ceux qui l'entendoient. Mais enfin le deuxième jour d'Octobre de l'année 1629. étant monté à l'Autel & aïant continué la Messe jusqu'à la fin de l'Evangile, il tomba dans une si grande foiblesse qu'on fut obligé de le foutenir & de le faire affeoir. Etant revenu à lui il voulut poursuivre le faint Sacrifice; mais comme il étoit sur le point de prendre l'Hostie pour la consacrer & qu'il prononçoit déja ces paroles du Canon, Hanc igitur oblationem, il retomba dans une plus grande défaillance On lui ôta ses ornemens Sacerdotaux, & on dressa dans la Chapelle même un petit lit, sur lequel on le mit demi habillé. Il y reçut en cet état tous les Sacremens de l'Eglise & rendit paisiblement fon ame à Dieu après avoir exhorté ses Confreres à perseverer dans la pratique deleurs faints exercices & dans la fidelité qu'ils devoient à Dieu & à son Eglise, dont il leur recommanda les interêts dans la personne des Herétiques qu'ils devoient à son exemple s'efforcer de combattre & de ramener à l'obéïssance du PRETRES laint Siege. Il fut ouvert après sa mort, son cœur fut porté DE LOKA au grand Couvent des Carmelites de Paris, & fon corps fût FRANCE. enterré dans l'Eglise de l'Oratoire de la ruë faint Honoré où Dieu a fait connoître la sainteté de son serviteur par un grand nombre de miracles qui ont été faits à fon tombeau :

ce qui n'a pas peu contribué au grand progrès que la Con

gregation de l'Oratoire a fait depuis la mort de ce
dateur: car sans parler des Maisons qu'elle a dans les païs
étrangers qui sont au nombre de onze dans les Païs Bas, une
à Liege, deux dans le Comtat d'Avignon & une en Savoye,
il y en a cinquante-huit en France, dont plusieurs ont été
établies du vivant du saint Fondateur, du nombre desquelles
est la Maison de l'Oratoire de la ruë saint Honoré à Paris,
où il y en a encore deux autres, dont l'un est au fauxbourg
saint Michel, & l'autre au fauxbourg saint Jacques. Les
Prêtres de cette Congregation n'avoient point de Régle-
mens dans les commencements comme nous avons dit.
Leur Fondateur étoit lui.même l'Oracle & le Maître de fa
Congregation & plusieurs villes leur accorderent des établif-
sements fur ce pied fans aucune difficulté ; mais quand ils
voulurent faire celui de Roüen, & qu'ils porterent leurs Let-
tres Patentes au Parlement de Normandie pour les enregis-
trer, les Curés de la ville, & le Procureur Général s'y oppo-
ferent, demandant qu'ils eussent à communiquer leur Regles
& Statuts, sans lesquels aucune Societé même Ecclesiasti-
que ne peut & ne doit être reçue. Cette difficulté à laquelle
les Prêtres de l'Oratoire ne s'attendoient pas les obligea à
faire promptement des Reglemens qu'ils produisirent en dé-
clarant qu'ils n'étoient point Religieux ; mais seulement Prê-
tres Associés ensemble, dépendants immediatement des Evê-
ques des lieux où leur Congregation est établie, ne travail-
lant que par eux, que sous eux & pour eux. Ils ajoûte-
rent de plus, qu'ils étoient dans l'Ordre de la Hierarchie de
l'Eglife, accomplissant tout ce que les Curés requeroient
d'eux, comme confesser, administrer les Sacremens aux Pa-
roisses sous eux, & par leur autorité expresse, & non autre-
ment, comme les Chapelains deleurs Paroisses. Les Curés de
Roüen, & le Parlement se contenterent de cette déclaration,
& leurs Lettres Patentes furent verifiées.

PRETRIS Peu de tems après la mort du Cardinal de Berulle sa ConDE L'ORA gregation prit une nouvelle forme de Gouvernement. Le FRANCE. Pere Charles de Gondren qui lui fucceda, fit une Affem

TOIRE EN

blée de toutes les Maisons dans celle de la ruë faint Honoré à Paris, le premier jour d'Août 1631. Ils y arrêterent tous d'une commune voix que leur état étoit purement Ecclefiastique, ne pouvant être engagés par aucuns vœux ni simples ni solemnels: que ceux qui voudroient obliger les Sujets de la Congregation à faire des vœux, ou se porteroient à les embraffer, encore qu'ils fussent en plus grand nombre, feroient cenfés se séparer du Corps, & obligés de laisser les Maisons & tous les biens temporels qui en dépendroient, à ceux qui voudroient demeurer dans l'Institut, purement Ecclefiaftique & Sacerdotal, quoiqu'ils fuffent en petit nombre. Il fut de plus arrêté dans cette Assemblée que la puifsance & l'autorité supreme & entiere appartiendroit à la Congregation legitimement assemblée, & non pas au Général, qui feroit obligé de suivre la pluralité des suffrages en toutes chofes, sa voix n'étant comptée que pour deux ; & comme ces Assemblées qui se doivent faire tous les trois ans, alloient à de trop grands frais, ils refolurent aussi que ces frais feroient supportés par les Maisons qui auroient eu part à la députation. Enfin appréhendant que les biens de la Congregation ne fussent dissipés par le mauvais ménage du Général, qui est à perpetuité, l'Aff mblée fut d'avis qu'on limitat fa puissance temporelle : c'est pourquoi on lui donna trois Afsistans (sauf à augmenter ce nombre dans la fuite) lesquels auroient voix décisive avec lui dans les déliberations pour les choses temporelles ; comme fondations, établissemens, emprunts, & autres choses semblables : ils ordonnerent encore que ceux qui en auroient le moïen païeroient quelques penfions, sans s'arrêter aux services qu'ils rendent ; & que personne ne seroit admis dans la Congregation, qu'il n'eût un titre pour être reçu aux Ordres, à moins que le Général n'en disposât autrement.

Dans la feconde assemblée générale qu'ils tinrent, ils ordonnerent que ceux qui entreroient dans la Congregation, y feroient incorporés par ordre exprès du Général, trois ans & trois mois après leur premiere reception. Ce Decret fut confirmé dans quelques autres Assemblées ; mais on n'y a plus.

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d'égard présentement : & dans une autre Affemblée générale PRETRES ils ont déclaré que la Congregation ne fait point de Corps: DE ainsi il n'y a plus de Membres qui en foient inféparables, & FRANCE. il est libre à un chacun d'en fortir quand bon lui semble.

La premiere Maison, qui est comme la Mere des autres, est celle de la ruë faint Honoré à Paris, où le Général doit faire sa residence avec ses Assistans. Elle jouït de deux Abbaïes qui y font unies: l'une dans l'isle de Ré, & l'autre au Diocêse de Meaux. Les deux autres Maisons queces Prêtres ont dans cette Capitale de la France, font l'Abbaïe de faint Magloire au fauxbourg S. Jacques, unie à l'Archevêché, & qui fert de Seminaire à l'Archevêque; & celle de l'Institution au fauxbourg saint Michel, qui joüit du Prieuré de faint Paulau Bois, de 8000. livres de rente, au Diocêse de Soiffons. Il y a eu jusqu'à present six Généraux de cette Congregation. Le premier a été le Cardinal de Berulle, qui eut pour successeur le Pere Charles de Gondren,mort l'an 1641. Le Pere François Bourgoing fut mis en sa place, & gouverna jusqu'à sa mort, qui arriva l'an 1662. Le Pere Jean François Senaut lui succeda, & à celui-ci le P. Loüis- Abel de SainteMarthe, qui s'étant demis de cet Office l'an 1696. on élut pour Général le Pere Pierre- François d'Arcrés de la Tour, qui gouverne presentement la Congregation. Elle a donné à la France plusieurs Prélats, & un grand nombre de personnes qui se sont diftinguées par leur science & par leurs écrits, dont les plus illuftres font les Peres Malbranche, Morin & Thomaflin. Cette Congregation a pour Armes les noms de Jesus & Marie, d'azur en champ d'or, l'écu entouré d'une couronne d'épines de finople.

Germain Habert, Vie du Cardinal de Berulle. SainteMarthe, Gall. Christ Tom. IV. Giry, Vies des Saints, Tom. II. aux Additions,2. Octobre. & Hermant, Histoire des ordres Religieux, Tom. III.

L'ORATOIRE EN

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