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S. ESPRIT

cun Prince étranger, ce qui ne pouvoit être obfervé par ORDRE DU ceux qui n'étoient pas fujets du Roi de France, c'eft ce qui EN FRANCE fit qu'Henri III. déclara par le XXXVII. article des Statuts qu'aucun étranger s'il n'étoit regnicole & naturalisé dans le Roïaume ne pourroit être reçu dans l'Ordre, ni pareillement les François qui auroient déja quelqu'autre Ordre,excepté celui de faint Michel. Il excepta auffi les Cardinaux, Archevêques & Evêques,& pareillement tous fes fujets qui avec fa permiffion ou des Rois fes prédeceffeurs, auroient été ou pourroient être dans la fuite reçus aux Ordres de la Toifon d'or & de la Jarretiere.

Mais Henri IV. confiderant combien il étoit avantageux pour la reputation de l'Ordre du faint Efprit & pour le bien du Roïaume de France, que les Rois, les Princes Souverains & les Seigneurs étrangers, non regnicoles, fuffent aggregés à cet Ordre, ordonna par une Déclaration du dernier Decembre 1607. dans l'Affemblée generale de l'Ordre qui fe tint à Paris, que les Rois, les Princes Souverains, & les Seigneurs étrangers non regnicoles, étant de la qualité prefcrite par les Statuts,pourroient être à l'avenir Chevaliers de cet Ordre: qu'à cet effet on envoiroit un Commandeur & Chevalier vers le Roi ou Prince Souverain qui feroit élu & affocié à l'Ordre, pour lui donner le collier & la croix & le revêtir du manteau en la maniere qui feroit prefcrite par les memoires & inftructions qui lui feroient donnés : que le Roi ou Prince Souverain aïant accepté l'Ordre, feroit tenu d'en remercier le Souverain & Grand Maître par une perfonne qu'il envoiroit exprès dans l'année de fa reception, & qu'à l'égard des Seigneurs étrangers non Souverains, ils feroient obligés de venir trouver en perfonne fa Majesté dans l'année de leur élection pour recevoir de la main le collier & la croix de l'Ordre & prêter le ferment ordonné par les Statuts, à moins qu'ils n'en fuffent difpenfés. L'an 1608. ce Prince fit Chevaliers de l'Ordre du faint Esprit Dom Jean Antoine Urfin Duc de Sanfo. Gemini Prince de Scandriglia & Comte d'Ercole, & Dom Alexandre Sforze Conti, Duc de Segni, Prince de Valmontane. Loüis XIV. a honoré de cet Ordre plufieurs Seigneurs Efpagnols & Italiens: il l'envoïa auffi l'an 1676. à Jean Sobieski Roi de Pologne, & depuis aux deuxrinces Alexandre & Conftantin fes fils.

ORDRE DU

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Pour entretenir cet Ordre & donner moïen aux CardiIN FRANCE naux, Prélats & Commandeurs de fe maintenir honorablement felon leur état, Henri III. voulut qu'il y eût un fonds de fix vingt mille écus pour être partagés & païés tous les ans en plein Chapitre felon l'état qu'il en feroit. Il voulut auffi que cet Ordre ne fût composé que de cent personnes outre le Souverain, auquel nombre feroient compris les quatre Cardinaux & les cinq Prélats, le Chancelier, le Prevôt Maître des ceremonies, le Grand Tréforier & le Greffier, fans que ce nombre pût être augmenté, ni qu'à la mort de quelques uns des Prélats ou Officiers l'on pût remplir leurs places que par d'autres de la même qualité. Outre ces quatre Officiers qui font Chevaliers ou Commandeurs & qui portent la croix coufuë fur leurs habits & une autre d'or attachée à un ruban bleu comme les autres Chevaliers, il y en a encore quatre autres qui font un Intendant, un Genealogiste, un Heraut & un Huiffier,qui portent feulement la croix attachée à un ruban bleu à la boutonniere de leur juft au corps. Ces Offices d'Intendant, de Heraut & d'Huiffier font du tems de l'Inftitution de l'Ordre, & il en eft fait mention dans les Statuts; mais l'Office de Genealogiste pour dreffer toutes les preuves & les Genealogies des Chevaliers fut créé l'an 1595. M. Clairambaut quicit à prefent pourvû de cette Charge a fait un recueil de plus de cent cinquante volumes in folio, manufcrits concernant l'Histoire de l'Ordre & les Genealogies de tous les Chevaliers, depuis leur inftitution jufqu'à prefent, & plufieurs autres volumes concernant les autres Ordres Militaires.

Outre ces Officiers il y a les Tréforiers & Controlleurs Generaux du Marc d'or, créés à l'inftar du Heraut; ils en portent la croix & joüiffent des mêmes privileges. Le droit du Marc d'or eft une espece d'hommage & de reconnoiffance que les Officiers du Roïaume rendent au Roi, lorfqu'ils font pourvûs de leurs Offices. Henri III. fut le 111. premier qui par une Déclaration du 7. Decembre 1582. ordonna que les deniers qui proviendroient de ce droit feroient affectés & hipotequés au payement des frais de l'Ordre,auquel par une autre Declaration du 7. Decembre de l'année précedente, il avoit encore accordé le cinquiéme des dons & aubeines, confifcations, amendes, lods & ventes, rachats

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& autres droits feigneuriaux. Ce Prince avoit affecté ces de- ORDRE DU niers à l'Ordre pour remplir en partie les fix vingt mille écus EN FRANCE par an qu'il lui avoit affignez d'abord. Les Treforiers des parties cafuelles, mettoient entre les mains du Grand Tréforier de l'Ordre ce qui pouvoit revenir du cinquiéme des dons & aubaines, amendes & autres droits Seigneuriaux, & le commis du même Tréforier de l'Ordre fut chargé de la recette du droit du marc d'or. Mais Loüis XIII. l'an 1628. créa trois Receveurs Generaux du Marc d'or qui devoient joüir des mêmes honneurs, prééminences, privileges, franchifes & immunités, que le Heraut & l'Huiffier de l'Ordre du faint Efprit. Ce Prince par un Arrêt du Confeil du mois d'Octobre de la même année augmenta en faveur de l'Ordre le droit du Marc d'or, & ordonna que tous ceux qui obtiendroient des dons de fa Majefté à l'avenir, feroient tenus d'en païer le dixiéme denier entre les mains des Receveurs du Marc d'or. Par une Declaration du quatre Decembre 1634. il ordonna que fur la recette du Marc d'or, les Cardinaux, Prélats, Chevaliers & Officiers de l'Ordre feroient païés de la fomme de trois mille livres de pension par chacun an fur leurs fimples quittances à la fin de l'année, nonobstant que par le XXXVIII. Article des Statuts, il fût dit qu'ils devoient être païés tous les ans en plein Chapitre, auquel article fa Majefté dérogeoit, attendu que les Chapitres ne fe tenoient pas régulierement fur la fin du mois de Decembre comme il eft porté par le XVII. Article defdits Statuts, & même qu'il ne s'en étoit point tenu depuis plufieurs années tant fous le regne d'Henri IV. fon prédeceffeur que fous le fien, finon pour les promotions qu'on avoit faites pour remplir les places des Chevaliers decedés. Louis XIV.augmenta du double le droit du Marc d'or l'an 1656. & le ceda pour toûjours & à perpetuité à l'Ordre du faint Efprit pour lui tenir lieu du fonds qui lui avoit été promis dès le tems de fa fondation. Il fupprima les Offices de Receveurs Generaux du Mare d'or, permit à l'Ordre d'établir pour la recette de ce droit, tels Receveurs, Controlleurs & Officiers qu'il jugeroit à propos, & ordonna que le même Ordre toucheroit par an fur la recette de la Generalité de Paris, vingt mille livres, pour les interêts de deux cens mille livres d'une part qu'il avoit prêté à sa Majefté, & deux cens mille livres d'au

Tome VIM.

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IN FRANCE

ORDRE DU tre qu'il avoit fourni à Louis XIII. pour les befoins de l'ES. ESPRIT tat. Par un autre Edit de la même année le Roi fuivant ce qui avoit été réfolu au Chapitre tenu au Louvre, ordonna l'alienation de la moitié du droit du Marc d'or, avec faculté à l'Ordre de racheter cette moitié alienée en rendant le prix de l'alienation,& qu'après le rachat, elle demeureroit réünie à l'Ordre fans en pouvoir être démembrée ni emploïée ailleurs qu'à l'entretien de l'Ordre ; & par le même Edit sa Majefté créa deux Tréforiers Generaux & deux Controlleurs Generaux du Marc d'or aufquels il accorda les mêmes honneurs, privileges, franchises, & immunités, dont joüiffoit le Heraut, & jufqu'à prefent ils ont été maintenus dans leurs droits par plufieurs Arrêts du Confeil. Ils prêtent ferment entre les mains du Chancelier de l'Ordre & rendent compte au Grand Tréforier.

Quant aux privileges dont joüiffent les Cardinaux, Prélats, Chevaliers & Officiers de cet Ordre, Henri III. par les Statuts les exemta de contribuer au Ban & Arriere- Ban du Roïaume,de païer aucuns rachats, lots, ventes, quints & requints, tant des terres qu'ils vendroient que de celles qu'ils pourroient acheter, & voulut qu'ils euffent leurs caufes commises aux Requêtes du Palais à Paris ; & par un Edit du mois de Decembre 1580. il ordonna qu'ils feroient francs & exemts de tous emprunts,fubfides, impofitions, peages, travers, paffages, fortifications, gardes & guets de villes, châteaux, & fortereffes : ce qui a été confirmé dans la fuite par les Déclarations d'Henri IV. l'an 1599. & de Louis XIV.l'an 1658 en vertu defquelles les Chevaliers ont été maintenus & confervés dans les mêmes privileges, dont leurs veuves joüiffent pareillement. Un des privileges dont les Prélats, Chevaliers & Commandeurs joüiffent auffi, eft d'avoir l'honneur de manger avec le Roi à la même table aux jours de cerémonies de l'Ordre. Henri III. par l'arti cle LXXIV. des Statuts avoit ordonné que ces jours-là le Prevôt, le Grand Tréforier & le Greffier dîneroient à une table à part ; mais Henri IV. confiderant que ces trois Officiers font auffi Chevaliers & qu'ils ont les mêmes marques d'honneur que les autres, ordonna l'an 1603. qu'ils mangeroient auffi à sa table & seroient affis immediatement après le Chancelier, ce qui fut executé à toutes les promotions;

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mais à celle qui fe fit l'an 1661. il y eut de la conteftation fur ORDRE DU ce fujet. Les Chevaliers fe plaignirent au Roi de ce que les ENFRANCE. Officiers prétendoient manger à sa table contre les Statuts qui le défendent & qui ordonnent qu'ils mangeront en un lieu à part avec le Heraut & l'Huiffier. Les Officiers en demeuroient d'accord; mais ils prétendoient manger à la table du Roi en confequence de la Déclaration d'Henri IV. Le Roi ordonna qu'avant la prochaine cerémonie les Officiers lui représenteroient l'original de la Déclaration d'Henri IV. faute de quoi, il vouloit que le Statut fût obfervé. Et cet original n'aïant pu être repréfenté,il n'y eut que le Chancelier qui dîna à la table du Roi avec les Chevaliers.

Henri III. ne fe contenta pas de diftinguer ainsi par ces marques d'honneur & ces privileges les Chevaliers de l'Ordre du Saint- Efprit, il voulut auffi qu'ils fe diftingualfent par la pieté. C'est pourquoi il les exhorta d'affifter tous les jours à la Mefle & les jours de fêtes à la celebration de l'Office Divin. Il les obligea à dire chaque jour un chape let d'un dixain qu'ils doivent porter fur eux, l'Office du faint Efprit avec les Hymnes & Oraisons comme il eft marqué dans le Livre qu'on leur donne à leur reception, ou bien les fept Pleaumes de la Penitence, avec les oraifons qui font dans le même Livre, & n'y fatisfaifant pas de donner une aumône aux pauvres. Il leur ordonna de plus de fe confeffer au moins deux fois l'an & de recevoir le précieux Corps de Nôtre Seigneur Jefus-Chrift le premier jour de Janvier & à la fête de la Pentecôte, voulant que les jours qu'ils communieroient en quelque lieu qu'ils fe trouvaffent,ils portaffent le collier de l'Ordre pendant la Meffe & la communion: ce qu'ils doivent faire aufli aux quatre fêtes annuelles, quand fa Majefté va à la Meffe, aux proceffions generales, & aux Actes publics qui fe font aux Eglifes.

Celle des Augustins de Paris fut choifie par ce Prince pour y celebrer le premier jour de Janvier la fête de l'Ordre, à moins que le Roi ne foit abfent de cette ville. Cette cerémonie commence la veille de ce jour-là à Vêpres où les Cardinaux, Prélats, Chevaliers & Officiers de l'Ordre doivent accompagner le Souverain depuis fon Palais jufqu'à l'Eglife. L'Huiffier marche devant, le Heraut après ; enfuite le Prevôt, aïant à fa droite le Grand-Tréforier,& à fa gauche

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