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ORDRE

fion des mauvais, qui eft le but auquel tendent nos pensées « & actions, comme au comble de notre plus grand heur & « ESPRIT felicité.

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Cette priere & les defirs de ce Prince témoignent affez quelle étoit fa pieté, & qu'il n'y a rien eu que de faint dans l'inftitution de fon Ordre, ce qu'il avoit plus expreffément déclaré un peu auparavant dans fes mêmes Lettres patentes, où il dit encore qu'aïant adreffé fes vœux & mis toute fa confiance dans la bonté de Dieu dont il reconnoît avoir & tenir tout le bonheur de cette vie, il eft raifonnable qu'il s'en reffouvienne, qu'il s'efforce de lui en rendre des graces im- « mortelles, & qu'il témoigne à toute la pofterité les grands bienfaits qu'il en a reçus, particulierement en ce qu'au milieu de tant de différentes opinions au fujet de la Religion, qui avoient partagé la France, il l'a confervée en la connoif- « fance de fon faint nom dans la proffeffion d'une feule foiCatholique & en l'union d'une feule Eglife, Apoftolique, & « Romaine. De ce qu'il lui a plu par l'infpiration du SaintEfprit le jour de la Pentecôte, reünir tous les cœurs & les « volontez de la Nobleffe Polonoife, & porter tous les Etats « de ce Roïaume & du Duché de Lithuanie à l'élire pour Roi, & depuis à pareil jour l'appeller au gouvernement du Roïaume de France; au moïen de quoi ( ajoûte il) tant « pour conferver la memoire de toutes ces chofes que pour fortifier & maintenir davantage la foi & la Religion Catholique, & pour décorer & honorer de plus en plus la Nobleffe de fon Roïaume, il instituë l'Ordre Militaire du SaintElprit.

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Des expreffions fi pieufes ne font que trop fuffifantes pour faire voir les bonnes intentions de ce Prince. Cependant comme il y a certains caracteres d'efprit, qui ne peuvent s'empêcher de donner un mauvais fens aux actions les plus faintes & les plus juftes, l'institution de l'Ordre du SaintEfprit n'a pas manqué d'interpretations autant injuftes que chimeriques, puifqu'on l'a plûtôt attribuée à des misteres d'amourettes que de Religion. Le vert naiffant, dit M. le Laboureur, le jaune doré, le bleu, & le blanc étoient les cou- « leurs de la Maîtreffe d'Henri III. les doubles M. qu'il fit mettre au collier de l'Ordre défignoient fon nom,& les deux lettres grecques qu'on appelle Delta entrelaffées ensemble

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ORDRE » qui dans la rencontre du cercle formoient un Phy grec pour ESPRIT fignifier fidelta, devoient fervir d'affurance de cette fidelité NEKAN, qu'il lui avoit jurée, & qu'il ne continua pas long tems. Les »H qui furent ajoûtées aux chifres des doubles M, marquoient le nom du Roi, & les fleurs-de-lis dans les flammes reprefentoient le feu de fon amour. Ce qui eft donner ainfi une mauvaise interpretation aux intentions de ce Prince. A la verité il ne s'eft point expliqué fur la fignification des chifres qu'il fit mettre au collier; mais ne peut-on pas croire que les doubles Delta entrelaffés enfemble qui par la rencontre du centre,comme dit M. le Laboureur, formoient un Phy grec pour fignifier fidelta,marquoient la fidelité que les Sujets doivent à leur Princes? Les doubles Lambda, qui felon Favin, defignoient le nom de la Reine qui s'appelloit Loüife, ne pouvoient ils pas plûtôt figniffier la loïauté & l'hommage que les Chevaliers doivent à leur Souverain? Les doubles M, la magnanimité qui eft la vertu des Heros dont un Chevalier doit faire profeffion ? Et les flammes, ces langues de feu fous la figure defquelles le Saint Efprit defcendit fur les Apôtres dans le faint Cenacle le jour de la Pentecôte? Ce qui femble une interpretation beaucoup plus naturelle que celle des misteres d'amourettes, & qui eft entierement conforme aux termes de ces Lettres patentes, par lefquelles les Chevaliers font excitez à demeurer fermes dans la Religion Catholique dans l'amour de Dieu, dans la fidelité à leur Roi & dans la pratique de toutes les vertus, dont les Lettres & les Flammes qui compofoient le collier de l'Ordre étoient le fymbole.

Il fe trouve plufieurs exemplaires des Statuts de cet Ordre, differens des uns des autres, & qui ont été tous fuivis chacun dans leurs tems, Les derniers qui ont été imprimez en 1703. & qui font les plus corrects, contiennent quatrevingt quinze articles, qui portent entre autres chofes, qu'il y aura dans cet Ordre un Souverain Chef & Grand-Maître,qui aura toute autorité fur tous les Confreres, Commandeurs & Officiers, & à qui feul il appartiendra de recevoir ceux qui entreront dans cet Ordre. Henri III. s'en déclara Chef & Souverain Grand- Maître,& unit la GrandeMaitrise à la Couronne de France fans qu'elle puiffe en être féparée. Les Rois fes fucceffeurs ne peuvent dif ofer en façon quelconque de

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S. ESPRIT

cet Ordre, des deniers qui y font affectez, ni disposer d'au- ORDREDU cune Commande, .quoiqu'elle foit vacante qu'après avoir INFRANCI été facrés & couronnez ; & le jour de leur Sacre & Couronnement, ils doivent être requis par l'Archevêque de Reims, ou celui qui fait la cérémonie du facre,en préfence des douze Pairs & Officiers de la Couronne,de jurer l'obfervation des Statuts de l'Ordre, felon la forme prefcrite par les mêmes Statuts, ce qu'ils font tenus de faire fans en pouvoir être difpenfez pour quelque caufe que ce foit ; & le lendemain du Sacre, le Roi reçoit l'habit & le collier de l'Ordre par les mains de celui qui le facre, en préfence des Cardinaux, Prélats, Commandeurs & Officiers de l'Ordre. C'eft pourquoi Henri III. ordonna que la forme du ferment feroit inferée & tranfcrite au livre du Sacre, avec les autres fermens que les Rois font tenus de faire avant que d'être couronnez ; & comme ce Prince avoit déja été facré & couronné, il se referva la liberté de preter ferment, entre les mains de l'Archevêque de Reims ou d'un autre Evêque qu'il lui plairoit en la premiere Affemblée de l'Ordre qu'il tiendroit.

Des memoires portent que cette Affemblée se tint pour la premiere fois le dernier Decembre de l'an 1578. dans l'Eglife des Auguftins de Paris. Sa Majefté s'y rendit fur les deux heures, tous les Evêques & Abbés qui avoient été mandés. s'y trouverent, & pareillement les Princes & Seigneurs qui devoient être reçus dans l'Ordre, tous revêtus de chauffes & pourpoints de toile d'argent fous leurs habits ordinaires. Dans le chœur de l'Eglife à main droite, on avoit dreffé un trône pour le Roi, couvert de drap d'or & d'argent, femé de fleurs-de lis, avec un dais au deffus de pareille étoffesau bas du trône il y avoit des bancs pour les Officiers, en la maniere que l'on avoit accoûtumé d'obferver aux cérémonies des Fêtes de l'Ordre de faint Michel. A l'entrée du chœur à main gauche de fa Majefté, étoient placés les Princes & Seigneurs qui devoient être faits Chevaliers felon leur rang;& il y avoit d'autres bancs pour les Ambaffadeurs, & les Seigneurs de la Cour. Après que les Vêpres eurent été chantées par la Mufique du Roi, ce Prince fe leva, defcendit de fon trône, & accompagné des Officiers de l'Ordre, alla devant le grand Autel, où s'étant mis à genoux, le Grand-Aumônier, affifté de cinq Evêques & Abbés, en habits Pontifi

Tome VIII.

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ENFRANCE

que

ORDRE DU Caux,l'un tenant la vraïe croix,& un autre le Livre des Evangiles, présenterent à fa Majefté fon vocu & ferment de Chef & Grand- Maître Souverain de l'Ordre du Saint Efprit, qu'il prononça en cette maniere. Nous Henri par la grace de Dieu Roy de France & de Pologne, jurons & voüons folemnellement en vos mains à Dieu le Createur, de vivre & mourir en la Sainte foy & Religion Catholique Apoftolique & Romaine, comme à un Roy tres Chreftien appartient. & pluftoft mourir d'y faillir: de maintenir à jamais l'Ordre du Saint-Efprit fondé & inftitué par nous, fans jamais le laisser decheoir, amoindrir, ne diminuer, tant qu'il fera en noftre pouvoir: obferver les Statuts & Ordonnances dudit Ordre, entierement Selon leur forme & teneur, & les faire exactement obferver par tous ceux qui font & feront cy-aprés receus audit Ordre,& par exprés ne contrevenir jamais ni difpenfer, ou effayer de changer, ou innover les Statuts irrevocables d'iceluy. Sçavoir eft le Statut parlant de l'union de la Grande-Maiftrife à la Couronne de France: celuy contenant le nombre des Cardinaux, Prelats, Commandeurs & Officiers: celuy de ne pouvoir transferer la Provifion des Commandes, en tout ou en partie, à aucun autre fous couleur d'appanage ou conceffion,qui puiffe eftre. Item celuy par lequel nous nous obligeons en tant qu'à nous eft, de ne pouvoir difpenfer jamais les Commandeurs & Officiers receus en l'ordre, de communier & recevoir le précieux Corps de Noftre Seigneur Jefus-Chrift, aux jours ordonne, qui font le premier jour de l'an,& le jour de la Pentecofte. Comme femblablement celuy par lequel il eft dit, que nous & tous Commandeurs & Officiers ne pourront eftre autres que Catholiques · & Gentilshommes de trois races paternelles, ceux qui le doivent eftre. Item celuy par lequel nous oftons tout pouvoir d'employer ailleurs les deniers affectez au revenu & entretenement defdits Commandeurs & Officiers, pour quelque caufe & occafion que ce foit, ni admettre audit Ordre aucuns Étrangers s'ils ne font naturalifez & regnicoles: & pareillement celuy auquel est contenu la forme des vaux, & l'obligation de porter toujours la croix aux habits ordinaires, avec celle d'or au cou, pendante à un ruban de foye couleur bleue celefte & l'habit aux jours deftinez. Ainfi le jurons, vonons, & promettons fur la fainte vraye croix, & les faints Evangiles touchez. Le Roi après avoir prononcé ce vou,& l'avoir figné de sa main,

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INFRANCE

fut revêtu du manteau, qui lui fut donné par celui qui fer- ORDRE DY voit de premier Gentilhomme de sa Chambre, & le Grand- S E PRIT Aumônier lui mit le collier au cou, & recita quelques prieres, après lefquelles le Roi fe leva & defcendit un peu plus bas où étoit un fiége, fur lequel il s'affit. Le Chancelier de Chiverny se présenta devant la Majesté pour être fait Chevalier de cet Ordre ; il fe mit à genoux, & aïant les mains fur les faints Evangiles, il fit le ferment, & après avoir été revêtu du grand manteau, le Roi lui mit au cou le collier & ainfi des autres Officiers & des Cardinaux; le Chancelier. de Chiverny reçut auffi les Sceaux de l'Ordre, qui lui fu-rent donnés par fa Majefté. Les Officiers étant créés,le Prévôt Maître des Cérémonies, le Heraut & l'Huiffier, allerent querir le plus ancien des Princes & Seigneurs qui devoient être faits Chevaliers, & après qu'il eut reçu l'Ordre, ils allerent prendre les autres de même à leur rang. Il y eut dans cette premiere promotion vingt huit Chevaliers de recus,

Les Rois de France, fucceffeurs d'Henri III. ont fait après leur facre le même ferment que ce Prince fit lorfqu'il reçut le premier le collier de l'Ordre qu'il avoit inftitué, ou à peu près femblable, & ont tâché de donner un nouveau luftre à cet Ordre, dans lequel il doit y avoir quatre Cardinaux & quatre Archevêques, Evêques ou Prélats, outre le Grand Aumônier de France, qui eft Commandeur de cet Ordre, auffi.tôt qu'il eft pourvu de la Charge de GrandAumônier, fans être obligé de faire preuves de nobleffe comme les autres. Tous ces Prélats portent la croix pendante à leur cou, avec un ruban bleu. Ils font obligés d'affifter aux fêtes & cérémonies de l'Ordre, les Cardinaux avec leurs grandes chapes rouges, & les Evêques & Prélats vêtus de foutannes de couleur violette, avec un mantelet de même couleur, un rochet & un camail, & fur le mantelet il y a auffi une croix de l'Ordre en broderie. Au jour que l'Office le fait pour les Chevaliers décédés, les Cardinaux portent les chapes violettes, & les Prélats font vêtus de noir. Ĉhacun de ces Cardinaux & Prélats eft obligé le jour de fa reception de faire entre les mains du Roi ce ferment. Je jure à Dieu vous promets, Sire, que je vous feray loyal & fidele toute ma vie, vous reconnoitray, honoreray & ferviray,comme Souverain de l'Ordre des Commandeurs du Saint-Esprit, du

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