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OBLATS DE par le Concile de Trente, & il demeura dans les exer SAINT AM cices de ses Charges ordinaires, à la referve du gouvernement de l'Etat, qu'il abandonna pour vaquer avec plus d'attention aux affaires purement spirituelles & Ecclesiastiques. Il envoïa pour son Grand- Vicaire à Milan Nicolas Ormanette, dont il connoissoit la capacité, la prudence & la pieté, & qui secondant les intentions du faint Cardinal, s'efforça de réformer ce Diocêse, qui étoit fort dereglé; mais les contradictions qu'il trouva, principalement dans le Clergé, firent prendre la resolution au saint Prélat de se rendre à Milan, avec la permission du Pape, qui avant qu'il partît de Rome, le nomma son Legat à Latere pour toute l'Italie. Il arriva à Milan au mois de Septembre de l'an 1563. & il y fut reçu aux applaudissemens du peuple, qui l'attendoit avec des defirs qu'on ne sçauroit s'imaginer. Cet abregé ne nous permet pas de rapporter tout ce que ce saint Cardinal fit pour la réforme de fon Diocêse; ce qui se passa dans les six Conciles Provinciaux qu'il tint, & les onze Synodes qu'il assembla, les Reglemens qu'il fit pour les personnes consacrées au fervice de Dieu, ce qu'il eut à souffrir pour la défense de la Jurifdiction Ecclesiastique, le zele avec lequel il entreprit de rétablir les Obfervances Regulieres dans plusieurs Ordres Religieux, où le relâchement s'étoit introduit, & les fondations qu'il fit d'un grand nombre de Monasteres, de Seminaires & de Colleges. Nous nous contenterons de parler ici de l'établissement qu'il fit de la Congregation des Oblats de faint Ambroise, comme celle à laquelle peut être rapporté tout ce qu'il a fait de plus beau, tant pour le bon ordre de fon Eglife, que pour l'utilité du prochain.

Ce grand Saint aïant reconnu par une longue experience de plusieurs années, qu'il lui étoit difficile de maintenir dans fon Diocese la difcipline Ecclesiastique, d'y faire executer les saintes Ordonnances qu'il avoit faites; d'y gouverner les Colleges, les Séminaires & les autres lieux de pieté qu'il avoit fondés, fans être assisté de quelques bons Ouvriers, qui étant dégagés de tous les embarras & de toutes les affaires du fiecle, ne s'appliquassent uniquement qu'à gouverner les Eglises qu'il leur confieroit; scachane sur tout combien on avoit besoin de bons Pasteurs dans les Paroisses qui étoient proche des païs infectés d'heresie, & combien il

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étoit souvent à propos de changer les Curés, & deles en- OBLATS DE voïer en d'autres Cures vacantes où ils étoient plus necef- S. AMBROL saires, particulierement dans les Paroisses abandonnées ; il prit la résolution, après avoir tenu son cinquiéme Sinode l'an 1578. de fonder une Congregation de Prêtres féculiers, qui étant unis à lui comme à leur Chef; fuflent entierement foumis à faire tout ce qu'il leur ordonneroit, & dont il pût disposer ainsi qu'il le jugeroit à propos pour le gouvernement de son Diocese. Pour cet effet il fit choix de quelques Ecclesiastiques qu'il connoissoit avoir de l'inclination pour ce saint Institut, & qui étoient propres pour ce dessein, aufquels il en joignit plusieurs autres, qui touchés des difcours qu'il leur avoit fait au dernier Sinode, vinrent s'offrir volontairement à lui, pour être aggreges dans cette nouvelle Congrégation qu'il mit sous la protection de la sainte Vierge & de faint Ambroise dont il leur donna le nom, auquel il ajoûta celui d'Oblats, à cause qu'ils s'étoient offerts d'eux-mêmes. Cette sainte Societé commença le jour de la Fête de saint Symplicien l'un des Prédécesseurs de nôtre Saint, qui arrivoit le 16. du mois d'Août de la même année 1578. Elle fut approuvée par le Pape Gregoire XIII. qui lui accorda plusieurs graces spirituelles, & quelques revenus qui avoient appartenu à l'Ordre des Humiliés, qui, comme nous avons dit dans la quatrième partie de cet ouvrage, fut fupprimé à cause des déreglements de ses Sectateurs, & de l'attentat qu'ils commirent contre la personne de ce saint Cardinal, qui enfin assigna à ces Oblats, pour faire leurs fonctions, l'Eglise du saint Sepulchre qui étoit en grande vénération à Milan, & qui acheta des maisons voines pour les loger. Ce ne fut pas fans beaucoup de raisons qu'il choisit particulierement cette Eglise pour les placer} car outre qu'elle est ancienne, aïant été bâtie dès l'an 1171. elle est au milieu de la ville & fort commode pour le peuple qui y a grande devotion, à cause du Sepulchre de NôtreSeigneur, & de quelques mysteres de sa Paffion qui y sont representés en relief, fort devots, & touchants. Depuis long tems elle avoit été desservie par des Prêtres de sainte vie, & quand saint Charles vint à Milan, il y trouva le Pere Gaspard Belinzago homme de grande pieté & fort zelé pour la gloire de Dieu & le salut des ames, avec quelques autres Tome VIII.

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OBLAT'S Prêtres qui vivoient sous sa conduite, & s'emploïoient à DE S. AM- toutes fortes de bonnes œuvres sans être engagés à aucun Benefice, afssistant les pauvres, visitant les malades, & tâchant, autant qu'ils pouvoient, de rétablir la pieté Chrétienne dans un tems qu'elle étoit presque éteinte à Milan. Quelques-uns de ces Prêtres, aprés la mort du Pere Gafpar, qui arriva en 1975. entrerent dans la Congregation des Oblats, & entre autres le Pere François Gripa, qui fut un homme veritablement Apoftolique, & regardé de tout le monde comme un Saint. La pieté de ces bons Prêtres fut un puissant motif au saint Cardinal pour établir dans ce lieu fa Congretation des Oblats ausquels il les associa dans l'efperance qu'il eut qu'ils la soûtiendroient par leur vertu, qui étoit comme hereditaire depuis plusieurs années dans cette celebre Eglife.

Après que le saint Cardinal eut ainsi établi cette nouvelle Congregation, qui comme nous l'avons déja dit, n'étoit qu'une assemblée d'Ouvriers Evangeliques dont il pût disposer, aufsi-bien que ses Successeurs felon le besoin de fon Diocese, il leur prescrivit des regles & obligations convenables à cet état, dont les principales étoient qu'ils feroient un vœu simple d'obéissance entre les mains de l'Archevêque de Milan, qu'ils le reconnoîtroient comme leur Superieur, qu'ils lui seroient unis comme les membres à leur Chef, qu'ils n'auroient point d'autre volonté que la fienne, qu'ils ne rechercheroient que la gloire de Dieu & le salut des ames, qu'ils se comporteroient en toutes chofes avec une modestie & une sainteté qui fût digne de cette union, qu'ils n'auroient point d'autre occupation que celle d'assister l'Archevêque dans la conduite & le gouvernement de fon Diocese, & de travailler avec beaucoup de zele dans tous les emplois & les diférentes fonctions ausquelles il les appliqueroit, comme de visiter la ville & le Diocese ; d'aller en Mision à l'exemple des Apôtres dans les lieux les plus difficiles & les plus fâcheux où les ames font abandonnées, & ont besoin d'instruction; de desservir les Cures vacantes; d'être Grands Vicaires ou Archiprêtres; de diriger les Colléges & Séminaires, les écoles de la Doctrine Chrétienne & les Confrairies; de faire faire les exercices spirituels à ceux qui aspiroient aux Ordres sacrés; en un mot

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d'être disposés pour toutes les fonctions Ecclefiaftiques, comme de prêcher, confeffer, enseigner, & administrer les BROSA Sacrements. Il voulut encore que dans l'Eglise du faint Sepulchre on fît tous les jours les mêmes exercices qui se pratiquent à Rome dans l'Eglise des Prêtres de l'Oratoire qui font très- utiles pour les ames, & qui donnent lieu à quantité de personnes qui n'ont point d'affaires d'emploïer faintement leur tems.

Ces Oblats furent divisés en deux Ordres. Les uns refidoient toûjours dans la Maison du faint Sepulchre, fans être engagés dans aucun Bénéfice, afin d'être plus libres pour s'emploïer aux principaux exercices que nous venons de rapporter ; & les autres étoient dispersés par la ville & par le Diocese dans les Bénéfices où on les envoïoit. Quoiqu'ils fussent ainsi separés les uns des autres, faint Charles trouva cependant un moïen pour les tenir aussi unis d'esprit, que s'ils avoient demeuré ensemble, afin de les conferver dans le premier esprit de l'Institut, de les avancer dans la pieté, & de les perfectionner de jour en jour dans les fontions Ecclefiaftiques & la conduite des ames; ce fut de partager toute la Congregation en fix Assemblées ou Communautés, dont il y en avoit deux dans la ville & quatre dehors, c'est-à-dire dans le reste du Diocese, & il donna à chacune un Superieur & un Directeur pour le spirituel ; ordonnant que tous les Oblats de chaque Communauté, s'assemblassent une fois par mois, ceux de la ville dans la Maison du faint Sepulchre, en la présence de l'Archevêque; & ceux de la campagne, tantôt dans un lieu, tantôt dans un autre felon que le regleroit le Superieur ou le Directeur de la Communauté: que l'on commenceroit ces Affemblées par lire la Regle des Oblats: qu'enfuite on traiteroit par maniere de Conference du moïen de la pratiquer fidellement; de s'avancer dans la pieté & de se perfectionner dans la conduite des ames: & que le Superieur ou President de l'Afsfemb'ée feroit une Conference particuliere à tous ceux qui la compoferoient pour les exhorter à la vertu. Par ce moïen tous ces Prêtres quoique dispersés en divers endroits de la ville & du Diocese de Milan, ne laissoient pas d'être toûjours étroitement unis ensemble par les liens d'un même esprit & d'une charité fraternelle, & étoient toûjours dif

OBLATS DE pofés à recevoir de l'Archevêque comme de leur Chef les S. AMBROI lumieres qui leur étoient necessaires pour se conduire euxmêmes, & pour conduire les peuples qui leur étoient confiés.

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Saint Charles témoignoit assez par les effets combien il aimoit ces Oblats; il les confideroit comme ses propres enfans & leur donnoit ordinairement cenom. Il les alloit voir fouvent à la Maison du saint Sepulchre où il avoit une chambre pour lui, dans laquelle il se retiroit quelquefois pour jouïr plus familierement de leur conversation; & dans laquelle il se comportoit avec autant d'humilité que s'il eût été le dernier de la maison. Il assistoit à tous les exercices qui s'y pratiquoient avec tant de joïe & de fatisfaction, qu'il disoit qu'il n'avoit point de plus grand plaifir que lorsqu'il s'y trouvoit: aussi avoit il coûtume d'appeller cette maison les délices de l'Archevêque de Milan. Il avoit dessein d'en établir de pareilles dans les villes, les bourgs & les lieux les plus confiderables du Diocêse, comme on peut voir dans les Regles qu'il avoit dressées pour cela ; & il vouloit mettre dans toutes ces maisons plusieurs Oblats; mais la mort l'empêcha d'executer ce dessein. Il associa à la même Congregation des Laïques qui restant dans le monde demeuroient dans leurs propres Maisons, & il leur donna aussi des Regles particulieres. Leur principale obligation étoit de s'emploïer à toute forte d'œuvres pieuses, & fur tout à enseigner la Doctrine chrétienne. Il institua encore dans l'Eglise du saint Sepulchre une Congregation de femmes qu'il appella la Compagnie des Dames de l'oratoire,ausquelles il prescrivit quantité de Regles & d'exercices convenables aux personnes même les plus qualifiées de la ville qu'il souhaitoit attirer dans cette Compagnie, dont les principales obligations étoient d'assister fidelement à tous les Sermons & à tous les autres exercices de pieté qui se pratiquoient au saint Sepulchre, selon l'usage de l'Oratoire, & à s'appliquer souvent à la méditation de la Passion de Nôtre-Seigneur Jesus-Christ, ce qui eut un succès admirable.

Le zele de ce saint Cardinal pour le salut des ames étoit infatigable, il alloit par tout chercher les brebis égarées de fon troupeau & même quelquefois dans des lieux si inaccefibles qu'il étoit obligé de mettre des crampons de fer à ses

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