: DIJON ET GRES. par les Religieuses de l'Ordre du Saint Esprit; mais cette Hospita La nouvelle de cet établissement ne se fut pas plûtôt répanduë, que l'on fut surpris de voir à Dijon une troupe de filles pieuses qui y venoient des Provinces mêmes les plus éloignées pour s'y consacrer au service des pauvres. Il en vint de Paris, de Champagne & de Flandres, qui s'étant unies à celles de la ville, furent logées dans une maison qui leur avoit été préparée, en attendant qu'on les fît entrer dans l'Hôpital de Notre-Dame de la Charité, où après quelques mois elles prirent enfin la place des Religieuses du Saint-Esprit, & y demeurerent en habit seculier jusqu'à ce que du consentement de l'Evêque de Langres, M. Joly donna l'habit deNovice à quinze d'entr'elles le 6. Janvier 1685. Cet habillement est semblable à celui des filles de Ste Agnes d'Arras & de la sainte Famille de Doüay, dont quelques unes vinrent à Dijon pour instruire ces nouvelles Hofpitalieres des observances regulieres. Trois ans après, c'est à direen 1688. le Roi accorda ses Lettres Patentes pour l'établissement de ces filles en Tome VIII. Hh HOSPITA corps de Communauté seculiere, & en 1689. elles furent ena DIJON ET registrées au Parlement le 23. Mars. LIERES DE CRES. DELAN- Quoique M. Joly eût été établi Superieur de cet Hôpital pour le spirituel par autorité de l'Evêques son humilité néanmoins l'empêcha d'en accepter ni la qualité, ni la charge, dont il pria un autre Ecclesiastique de ses amis d'un merite diftingué & d'une grande pieté, de vouloir bien se charger; mais s'y étant trouvé des difficultés, on conseilla à ces bonnes filles de choisir elles mêmes un Superieur, sous le bon plaisir de l'Evêque de Langres. Elles suivirent ce conseil comme le moïen le plus seur pour en avoir un, qui leur fût convenable; & s'étant assemblées pour cet effet, elles élurent M. Joly, dont elles avoient déja experimenté le zele. Lorsque ce faint Prêtre en fut averti, il témoigna beaucoup de repugnance pour cet emploi ; mais il se soumit enfin aux ordres de la Providence, en acceptant la conduite de ces Hospitalieres, dont la fidelité à remplir tous leurs devoirs l'encouragea à leur dresser des Reglemens, afin qu'il y eût entr'elles uné uniformité d'actions & de pratiques. Il passa plusieurs années à cet ouvrage, auquel il s'étoit disposé par le jeûne & la priere, afin d'implorer le secours & les lumieres du ciel ; & après avoir consulté les personnes les plus éclairées dans ces matieres, il les fit pratiquer pendant quelques années, afin que l'experience lui en aïant fait connoître les défaurs & les inconveniens, il pût les retoucher, comme il fit effectivement, en y retranchant plusieurs choses superfluës ou difficiles à observer, & y en ajoûtant d'autres qui lui semblerent plus conformes à l'efprit de cet Institut & plus proportionnées à la foiblesse de ces filles, ausquelles il les fit observer jusqu'à la veille de sa derniere maladie, que lui paroissant sans défaut, il prit la resolution de les faire approuver, & les présenta pour cet effer à l'Evêque de Langres quiles fit examiner par son Conseil & par des personnes spirituelles experimentées en ces fortes d'affaires, & les lut aussi avec beaucoup d'attention. Mais M. Joly n'eut pas la consolation de les voir approuvés de son vivant, ne l'aïant été que quelques jours après sa mort qui fut causée par une espece de maladie contagieuse qui suivit immédiatement la disette des grains, dont la France fut affligée en 1693. & 1694. Car ce saint homme s'em LIER'S DI ploïa au secours spirituel & corporel de ceux qui en étoient at- HOSPITA taqués avec tant d'ardeur & fi peu de ménagement pour sa B santé, qui n'étoit pas encore bien rétablie d'une maladie qu'il DE LANavoit eue, qu'ilne put résister à la malignité de ce mal, dont il *** regarda les premieres attaques comme un avertissement qu'il devoit achever son sacrifice; c'est pourquoi il s'y prépara par une Confeffion générale, & reçut le saint Viatique dans des transports d'humilité, de reconnoissance &d'amour qui tirerent les larmes des yeux de tous les assistans. Enfin après avoir souffert pendant dix jours des douleurs excessives sans qu'il lui échapât aucune plainte, sentant approcher le moment auquel il devoit quitter le monde, pour aller joüir de la présence de fon Créateur & de son souverain bien, il demanda l'Extréme-Oction, répondit lui-même à toutes les prieres marquées dans le Rituel pour la recommandation de l'ame, & mourut fur les neuf heures du soir le 9. Septembre 1694. étant âgé de cinquante ans. Peu de jours avant sa maladie aïant donné son propre lit à des pauvres, il eut la confolation de mourir sur un lit d'emprunt après avoir prodigué sa vie pour le soulagement des miferables: aussi les pauvres le regardant comme leur Pere, le titre lui en est resté après fa mort. Il y eut contestation entre les Chanoines de faint Etienne, & les filles Hospitalieres à qui auroit son corps, fur une clause de son Testament; mais il fut adjugé aux Hospitalieres comme étant leur Fondateur. Il fut enterré dans le cimetiere de l'Hôpital, & fon cœur fut donné aux Chanoines de saint Etienne. Douze jours après sa mort le 22. Septembre, l'Evêque de Langres approuva avec éloge les Reglemens qu'il avoit faits pour les Hospitalieres, ausquels il ajoûta quelques modifications, qui étoient plûtôt des marques de l'exactitude avec laquelle il les avoitlus, que des corrections qu'il y eût faites. Ces filles étant demeurées en habit de Novices l'espace de près de douze ans, firent leurs premiers vœux le 25. Février 1696. dix huit mois après la mort de M. Joly, qu'elles reconnoissent pour leur feul & veritable Instituteur, dont elles imitent encore à présent la charité pour les pauvres malades, ausquels elles donnent toutes les assistances dont ils ont befoin : ce qu'elles font avec tant d'édification, que la bonne odeur de leur pieté & de leur charité a donné lieu à l'établif FILLES DU sement de leur Institut dans trois autres maisons, dont il y BON PAS- en a une à Langres. Quoique l'Ecrivain de la Vie de M. TEUR. Joly donne à ces Hospitalieres le titre de Religieuses ; elles ne font pas néanmoins de vœux folemnels. Elles font cinq ans de Noviciat, après lesquels elles font seulement trois vœux simples de chasteté, d'obéïssance & de charité envers les ma'ades. Elles sont sous la conduite de l'Evêque pour le spirituel, & des Administrateurs de leurs Hôpitaux pour le temporel. Les Superieures sont éluës tous les fix ans. Leur habillement qui est noir & tel que nous l'avons fait graver, eft, comme nous l'avons déja dit, semblable à celui des filles de Ste Agnés d'Arras, & de la sainte Famille de Doüay, dont l'Institut est d'élever de petites filles orphelines & abandonnées jusqu'à ce qu'elles foient en âge d'être mariées ou d'entrer en service Elles font aussi trois vœux simples, & ont eu pour Fondatrice Mademoiselle Jeanne Biscot née à Arras l'an 1601. & qui mourut le 27. Juin 1664. âgée de 63. ans. Le Pere Beaugendre Benedictin, Vie de M. Foly, imprimée à Paris l'an 1700. & Memoires envoyés par ces filles Hospitalieres, & par les filles de la Societé de Ste Agnés d'Arras. CHAPITRE ΧΧΧΙΙ. Des Filles du Bon Pasteur, avec la Vie de Madame de M Combé, leur Fondatrice. ADAME de Combé Fondatrice des Filles du bon Pasteur, étoit fille de Jean deCyz fils d'un Genti homme Hotlandois qui s'étant signalé dans les guerres des Pais Bas n'en eut pas une fortune plus avantageuse, puisqu'il laissa si peu de bien à son fis, qu'il fut obligé d'abandonner sa Province, où il n'avoit pas de quoi se soutenir selon sa condition, pour aller s'établir à Ley de, où s'étant marié il eut fix enfans, du nombre desquels fut Madame de Combé qui nâquit en 1656. & reçut sur les Fonts de Baptême le nom de Marie. Cette enfant qui quoiqu'élevée dans l'Herésie étoit choifie de Dieu pour l'execution d'un nouveau dessein de sa mifericorde pour les ames égarées de la voix du falut, fit paroître tant d'inclination pour la Religion Catholique à mesure que TEUR. la raison se développoit en elle, que cela excita un bon Prêtre FILLES DT caché à Leyde pour y foûtenir les Fideles qui dansle chan- BONA PASgement de Religion étoient demeurés fermes dans la foi Catholique, à chercher les moïens de l'instruire des verités de nôtre sainte foi & de la prévenir contre les faussetés de l'erreur & du mensonge, en quoi il réüssit si bien qu'il jetta dans son cœur une divine semence qui a donné fon fruit dans son tems. Avec la foi, les vertus croissoient en l'ame de la jeune Marie, principalement son amour pour Dieu & sa charité pour le prochain: heureuse si elle eut perfeveré dans de fi beaux commencemens ; mais l'ennemi du genre humain qui en craignoit les suites, les troubla par le moïen de ses parens, qui irrités de ce qu'elle ne laissoit échaper aucune occafion de prendre le parti de l'Eglise Romaine contre les Herétiques, n'oublierent rien pour lui faire sentir les effets de leur ressentiment : ce qui eut un effet fi funeste fur fon cœur, qu'elle négligea peu à peu ses exercices de pieté, & facrifia à fon repos, par un amour propre trop ordinaire aux personnes de son sexe, les verités que Dieu lui avoit fait connoître; mais aigrie plûtôt que gagnée par leur conduite à son égard, elle passa en Angleterre où elle demeura trois ans chez une Dame amie de sa famille. Ses parens la rappellerent à l'âge de dix-neuf ans pour la marier à un Gentilhomme nommé de Combé, dont les richesses étoient assez grandes pour faire le bonheur de leur fille, si Dieu, qui est admirable dans ses Saints, n'en eût difposé autrement, en se servant de son humeur violente & déréglée, pour punir l'infidelité de celle dont il ne vouloit pas la mort, mais la converfion & la vie. Comme elle n'avoit pas une patience à toute épreuve, au bout de dix huit mois elle demanda sa separation, & l'obtint. Son mari étant mort fix mois après, un autre Gentilhomme, confi derable par ses biens & par fon credit charme de sa grande beauté, qui étoit soutenuë d'un esprit folide, d'une humeur douce, & de manieres infinuantes, la rechercha en mariage; mais ce qu'elle avoit fouffert avec fon mari l'en dégouta si fort, qu'elle y renonça pour toûjours. Quelque tems après sa fœur & fon beau frere la menerent en France, où ses premiers sentimens de Religion se renouvellerent, & lui donnerent de grands remords de confcien |