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LIRES DE

DE LAN

GRES.

par les Religieufes de l'Ordre du Saint Efprit; mais cette HOSPITA
union aïant changé l'état des chofes, & les Magiftrats qui en HRS D
avoient l'inspection, s'étant apperçu qu'il y avoit quelque
chofe dans l'administration qui n'étoit pas favorable au pu-
blic, s'y oppoferent pendant plufieurs années: mais voïant que
toutes leurs remontrances & leurs oppofitions ne fervoient à
rien, ils jugerent que le moïen le plus convenable
pour re-
medier aux abus, étoit de renvoïer les Religieufes à l'ancien
Hôpitaldu Saint-Elprit pour y prendre foin des pauvres qu'-
on y recevoit, & deconfier ceux de l'Hôpital de Notre Dame
deCharité,à des filles qui dépendroient pour le temporel,des
Administrateurs,& pour le fpirituel des Superieurs Ecclefiaf-
tiques qu'il plairoit à l'Evêque de Langres de leur donner.
Cette refolution prife,on l'executa,nonobftant les oppofitions
qu'on y fit, & qui furent levées trois ans aprés par un Arrêt
du Confeil d'Etat du 22.Septembre 1688. L'Evêque de Lan-
gres informé du bon ordre qu'on gardoit dans cette maison
depuis qu'il en avoit confié la conduite fpirituelle à M. Joly,
donna volontiers fon confentement à l'établissement d'une
nouvelle Communauté de Filles feculieres
pour le fervice
des pauvres, auquel elles feroient attachées par des voeux
fous l'obéïffance d'une Superieure autant de tems qu'elles
demeureroient dans cet Hôpital.

La nouvelle de cet établiffement ne fe fut pas plûtôt ré-
panduë, que l'on fut furpris de voir à Dijon une troupe de
filles pieufes qui y venoient des Provinces mêmes les plus
éloignées pour s'y confacrer au fervice des
Il en
pauvres.
vint de Paris,de Champagne & de Flandres, qui s'étant unies
à celles de la ville, furent logées dans une maifon qui leur
avoit été préparée,en attendant qu'on les fît entrer dans l'Hô-
pital de Notre-Dame de la Charité, où après quelques mois
elles prirent enfin la place des Religieufes du Saint-Efprit,&
y demeurerent en habit feculier jufqu'à ce que du confente-
ment de l'Evêque de Langres, M. Joly donna l'habit deNo-
vice à quinze d'entr'elles le 6. Janvier 1685. Cet habillement
eft femblable à celui des filles de Ste Agnés d'Arras & de la
fainte Famille de Douay, dont quelques unes vinrent à Dijon
pour inftruire ces nouvelles Hofpitalieres des obfervances
regulieres. Trois ans après,c'eft à dire en 1688. le Roi accor-
da fes Lettres Patentes pour l'établissement de ces filles en
Hh

Tome VIII.

de Communauté feculiere, & en 1689. elles furent en2 DIJON ET registrées au Parlement le 23 Mars.

HOSPITA Corps

LIBRES DE

DE LAN

CRES.

Quoique M. Joly eût été établi Superieur de cet Hôpital pour le fpirituel par autorité de l'Evêque;fon humilité néanmoins l'empêcha d'en accepter ni la qualité, ni la charge, dont il pria un autre Ecclefiaftique de fes amis d'un merite diftingué & d'une grande pieté, de vouloir bien fe charger; mais s'y étant trouvé des difficultés, on conseilla à ces bonnes filles de choifir elles mêmes un Superieur, fous le bon plaifir de l'Evêque de Langres. Elles fuivirent ce confeil comme le moïen le plus feur pour en avoir un, qui leur fût convenable; & s'étant affemblées pour cet effet, elles élurent M. Joly, dont elles avoient déja experimenté le zele. Lorsque ce faint Prêtre en fut averti, il témoigna beaucoup de repugnance pour cet emploi ; mais il fe foûmit enfin aux ordres de la Providence, en acceptant la conduite de ces Hofpitalieres, dont la fidelité à remplir tous leurs devoirs l'encouragea à leur dreffer des Reglemens, afin qu'il y eût entr'elles une uniformité d'actions & de pratiques.

Il paffa plufieurs années à cet ouvrage, auquel il s'étoit difpofé par le jeûne & la priere, afin d'implorer le fecours & les lumieres du ciel ; & après avoir confulté les personnes les plus éclairées dans ces matieres, il les fit pratiquer pendant quelques années, afin que l'experience lui en aïant fait connoître les défauts & les inconveniens, il pût les retoucher, comme il fit effectivement, en y retranchant plufieurs chofes fuperfluës ou difficiles à obferver, & y en ajoûtant d'autres qui lui femblerent plus conformes à l'efprit de cet Inftitut & plus proportionnées à la foibleffe de ces filles, aufquelles il les fit obferver jufqu'à la veille de fa derniere maladie, que lui paroiffant fans défaut, il prit la refolution de les faire approuver, & les préfenta pour cet effet à l'Evêque de Langres qui les fit examiner par fon Confeil & par des perfonnes fpirituelles experimentées en ces fortes d'affaires, & les lut auffi avec beaucoup d'attention. Mais M. Joly n'eut pas la confolation de les voir approuvés de fon vivant,ne l'aïant été que quelques jours après la mort qui fut caufée par une efpece de maladie contagieufe qui fuivit immédiatement la difette des grains, dont la France fut affligée en 1693. & 1694. Car ce faint homme s'em

LIERES

GRES

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ploïa au fecours fpirituel&corporel de ceux qui en étoient at HOSPITA taqués avec tant d'ardeur & fi peu de ménagement pour fa DIJON fanté,qui n'étoit pas encore bien rétablie d'une maladie qu'il DE LA Navoit eue, qu'il ne put réfifter à la malignité de ce mal, dont il regarda les premieres attaques comme un avertiffement qu'il devoit achever fon facrifice; c'eft pourquoi il s'y prépara par une Confeffion générale, & reçut le faint Viatique dans des tranfports d'humilité, de reconnoiffance &d'amour qui tirerent les larmes des yeux de tous les affiftans. Enfin après avoir fouffert pendant dix jours des douleurs exceffives fans qu'il lui échapât aucune plainte, fentant approcher le moment auquel il devoit quitter le monde, pour aller joüir de la présence de fon Créateur & de fon fouverain bien, il demanda l'Extréme-Oction, répondit lui-même à toutes les prieres marquées dans le Rituel pour la recommandation de l'ame, & mourut fur les neuf heures du foir le 9. Septembre 1694. étant âgé de cinquante ans. Peu de jours avant fa maladie aïant donné fon propre lit à des pauvres, il eut la confolation de mourir fur un lit d'emprunt après avoir prodigué fa vie pour le foulagement des miferables: auffi les pauvres le regardant comme leur Pere, le titre lui en eft refté après fa mort. Il y eut conteftation entre les Chanoines de faint Etienne, & les filles Hofpitalieres à qui auroit fon corps, fur une clause de son Testament; mais il fut adjugé aux Hofpitalieres comme étant leur Fondateur. Il fut enterré dans le cimetiere de l'Hôpital, & fon cœur fut donné aux Chanoines de faint Etienne.

Douze jours après fa mort le 22. Septembre,l'Evêque de Langres approuva avec éloge les Reglemens qu'il avoit faits pour les Hofpitalieres, aufquels il ajoûta quelques modifications, qui étoient plûtôt des marques de l'exactitude avec laquelle il les avoit lus, que des corrections qu'il y eût faites. Ces filles étant demeurées en habit de Novices l'efpace de près de douze ans, firent leurs premiers vœux le 25. Février 1696. dix huit mois après la mort de M. Joly, qu'elles reconnoiffent pour leur feul & veritable Inftituteur, dont elles imitent encore à préfent la charité pour les pauvres malades, aufquels elles donnent toutes les affiftances dont ils ont be foin: ce qu'elles font avec tant d'édification, que la bonne odeur de leur pieté & de leur charité a donné lieu à l'établi£

TEUR.

FILLES DU fement de leur Inftitut dans trois autres maisons, dont il
BON PAS- en a une à Langres. Quoique l'Ecrivain de la Vie de M.
Joly donne à ces Hofpitalieres le titre de Religieufes; elles
ne font
pas néanmoins de vœux folemnels. Elles font cinq
ans de Noviciat, après lefquels elles font feulement trois
vœux fimples de chafteté, d'obéïffance & de charité envers
les ma'ades. Elles font fous la conduite de l'Evêque pour le
fpirituel, & des Administrateurs de leurs Hôpitaux pour le
temporel. Les Superieures font éluës tous les fix ans. Leur
habillement qui eft noir & tel que nous l'avons fait graver,
eft,comme nous l'avons déja dit,femblable à celui des filles de
Ste Agnés d'Arras,& de la fainte Famille de Doüay,dont l'In-
ftitut eft d'élever de petites filles orphelines & abandonnées
jufqu'à ce qu'elles foient en âre d'être mariées ou d'entrer
en fervice. Elles font auffi trois vœux fimples, & ont eu
pour Fondatrice Mademoiselle Jeanne Biscot née à Arras
l'an 1601. & qui mourut le 27. Juin 1664. âgée de 63.

ans.

Le Pere Beaugendre Benedictin, Vie de M. Joly, imprimée à Paris l'an 1700. & Memoires envoyés par ces filles Hofpitalieres,& par les filles de laSocieté de Ste Agnés d'Arras.

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Des Filles du Bon Pasteur, avec la Vie de Madame de
Combé, leur Fondatrice.

M

ADAME de Combé Fondatrice des Filles du bon Pa-
fteur, étoit fille de Jean deCyz fils d'un Genti hɔmme
Hollandois qui s'étant signalé dans les guerres des Païs Bas
n'en eut pas une fortune plus avantageuse, puifqu'il laiffa si
peu de bien à fon fis,qu'il fut obligé d'abandonner fa Pro-
vince, où il n'avoit pas dequoi fe foutenir felon fa condition,
pour aller s'établir a Leyde, où s'étant marié il eut fix enfans,
du nombre defquels fut Madame de Combé qui nâquit en
1656. & reçut fur les Fonts de Baptême le nom de Marie.
Cette enfant qui quoiqu'élevée dans l'Heréfie étoit choifie
de Dieu pour
l'execution d'un nouveau deffein de fa miferi-
corde pour les ames égarées de la voix du falut, fit paroître
tant d'inclination pour la Religion Catholique à mesure que

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BON PAS

TEUR.

la raison fe développoit en elle,que cela excita un bon Prêtre FILLES DIT caché à Leyde pour y foûtenir les Fideles qui dans le changement de Religion étoient demeurés fermes dans la foi Catholique, à chercher les moïens de l'inftruire des verités de nôtre sainte foi & de la prévenir contre les fauffetés de l'erreur & du menfonge, en quoi il réüffit fi bien qu'il jetta dans fon cœur une divine femence qui a donné fon fruit dans fon tems. Avec la foi, les vertus croiffoient en l'ame de la jeune Marie, principalement fon amour pour Dieu & fa charité pour le prochain : heureuse fi elle eut perseveré dans de fi beaux commencemens ; mais l'ennemi du genre humain qui en craignoit les fuites, les troubla par le moïen de fes parens, qui irrités de ce qu'elle ne laiffoit échaper aucune occafion de prendre le parti de l'Eglife Romaine contre les Herétiques, n'oublierent rien pour lui faire fentir les effets de leur reffentiment: ce qui eut un effet fi funefte fur fon cœur, qu'elle négligea peu à peu fes exercices de pieté, & facrifia à fon repos, par un amour propre trop ordinaire aux perfonnes de fon fexe, les verités que Dieu lui avoit fait connoître ; mais aigrie plûtôt que gagnée par leur conduite à son égard, elle paffa en Angleterre où elle demeura trois ans chez une Dame amie de fa famille.

Ses parens la rappellerent à l'âge de dix-neuf ans pour la marier à un Gentilhomme nommé de Combé, dont les richeffes étoient affez grandes pour faire le bonheur de leur fille,fi Dieu, qui eft admirable dans ses Saints, n'en eût dispofé autrement, en fe fervant de fon humeur violente & déréglée, pour punir l'infidelité de celle dont il ne vouloit pas la mort, mais la converfion & la vie. Comme elle n'avoit pas une patience à toute épreuve, au bout de dix huit mois elle demanda fa feparation, & l'obtint. Son mari étant mort fix mois après, un autre Gentilhomme,confiderable par fes biens & par fon credit charmé de fa grande beauté, qui étoit soutenuë d'un efprit folide, d'une humeur douce, & de manieres infinuantes,la rechercha en mariage; mais ce qu'elle avoit souffert avec fon mari l'en dégouta fi fort, qu'elle y renonça pour toûjours.

Quelque tems après fa fæcur & fon beau frere la menerent en France, où fes premiers fentimens de Religion fe renouvellerent, & lui donnerent de grands remor is de confcien

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