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LA CON

DE SAINT
JOSEPH.

arrivées, la plûpart étudiant pour lors en Theologie. Ce MISSION-
tems étant arrivé ils allerent recevoir leur Miffion du Grand- NAIRES DE
Vicaire du Cardinal de Richelieu Archevêque de Lyon, GREGATION
qui loüant leur zele & les encourageant à fouffrir genereu-
fement toutes les peines & les fatigues qu'ils auroient à fou-
tenir, leur donna tout le pouvoir qui leur étoit neceffaire.
M. Cretenet fournit aux frais de leur voïage & de la Miffion
à laquelle ils fe difpoferent par le pelerinage de faint Claude
qu'ils entreprirent à pied, jeûnant au pain & à l'eau, afin
d'obtenir par l'interceffion de ce faint Archevêque les lu-
mieres & les graces dont ils avoient befoin dans leur Mini-
ftere apoftolique. Ils l'exercerent enfin dans le village de
Martignat avec tant de fatisfaction par rapport aux grands
fruits qu'ils y firent ; qu'ils réfolurent de confacrer à la Mis-
fion tout le tems des vacances qu'ils auroient à la fin de cha-
que année de Theologie, & de s'y emploïer entierement
lorfqu'ils auroient achevé leurs études.

M. Cretenet aïant connu par les fruits des premieres Miffions que fes difciples avoient faites, combien il étoit important pour le falut des ames de les continuer, s'appliqua avec beaucoup de foin à former les Ecclefiaftiques qu'il croïoit être appellés de Dieu à cet emploi, dont le nombre s'augmentant tous les jours, il leur confeilla d'entreprendre toutes les Miffions qui fe presenteroient & d'aller dans tous les lieux où on les demanderoit. Le Bugey, la Breffe & le Dauphiné, furent les premiers champs qui eurent le bonheur d'être défrichés par ces bons Miffionnaires,qui dans une Miffion qu'ils firent à Verjon au mois d'Octobre 1648.toucherent fi vivement par leurs prédications le Marquis de Coligni & sa femme, qu'ils réfolurent dès lors de fe donner entierement à Dieu par un gé néreux renoncement à toutes les chofes de la terre. Depuis ce tems là ce Seigneur s'étant mis fous la conduite de ces Mif. fionnaires,& aïant reglé fa maison par leurs avis,il commença de mener une vie fi Chrêtienne,qu'après avoir fait l'admiration de tout le monde,il mourut très faintement en 1664. Ce qui ne fut pas le premier ni le feul fruit de leurs travaux Evangeliques: car fans parler d'une infinité de perfonnes de tous âges, fexes & conditions qui leur étoient redevables de leur converfion,ils avoient eu le bonheur dès l'an 1647. de gagner à Jesus Christ le Baron d'Attignat,qui mourut en 1650.dans sa

preuves

LA CON

GREGATION
DE SAINT
JOSEPH.

MISSION quarante-deuxième année, après avoir donné des
NAIRES DE d'une veritable converfion, & d'une finguliere pieté.
De fi heureux progrès fembloient devoir mettre ces zelés
Miffionnaires à couvert de la perfecution: mais Dieu, qui
veut éprouver les Juftes,permit qu'il s'éleva contre eux trois
bouralques en trois differentes années, non feulement par la
malice des méchans, dont ils combattoient les vices, mais
même par la trop grande facilité de quelques perfonnes de
pieté, qui mal informées de leur conduite, & prévenuës con-
tre M. Cretenet, fur qui, comme fur leur Chef, tomboit le
plus gros de la tempête, crurent qu'ils feroient un grand
fervice à Dieu & à l'Eglife, s'ils pouvoient contribuer à
détruire cette Societé naiffante avant qu'elle augmentât.
Dans l'une de ces perfecutions, l'Archevêque de Lyon
publia un Mandement, par lequel il déclaroit excommunié
un certain Chirurgien qui fe mêloit de gouverner des Prê
tres, & défendoit à ces mêmes Prêtres de fe conduire à l'a-
venir par les confeils de ce Laïque, leur ordonnant de com-
paroître au plûtôt devant lui pour être interrogés fur ce fait.
Mais ce Prélat après les informations qu'il fit, aïant été def-
abufé des mauvaises impreffions qu'on lui avoit données,
revoqua tout ce qu'il avoit fait contre les Miffionnaires, leur
permit de confulter M. Cretenet, comme auparavant, & leur
donna même des pouvoirs beaucoup plus amples que ceux
qu'ils avoient reçus de fon Grand- Vicaire, afin qu'ils puf-
fent fans aucun obftacle, continuer leurs Miffions dans fon
Diocêfe.

Dans une autre perfecution qui s'éleva contre eux au même Diocêfe, & dans celui du Puy en Velay, on prêcha publiquement contre leur Doctrine; on les traita de Cabalistes & de Sectaires, qu'il falloit éviter comme Heretiques. L'on diftribua par tout des libelles diffamatoires; l'on fit même graver à Lyon une eftampe qui representoit les Heretiques Vaudois, qui avoient eu pour Chef un Marchand de cette ville, & au deffous de l'eftampe on avoit mis des difcours injurieux contre M. Cretenet & contre fes Miffionnaires pour les rendre odieux : ce qui fit qu'on les infultoit par tout, & qu'on les chargeoit d'injures, principalement M. Cretenet, contre lequel on fit des vers fatyriques, qui furent imprimés, & affichés aux coins des rues, & qu'on venoit infulter

jufques

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NAIRES DE

S. JOSEP

jufques dans fa maison. Mais enfin cet orage ceffa l'an 1656. MISIONla verité prévalut fur le menfonge, & la malice des ennemis LA CONGRE de M. Cretenet & des Miffionnaires fut confonduë par le té- GATION DE moignage autentique qu'une infinite de gens de bien rendirent en leur faveur : en forte que l'on commença à honorer ceux qu'on avoit méprifés ; & Dieu pour récompenfer la patience de fes Serviteurs, leur procura d'illuftres Protecteurs & de puiffans amis. Monfieur le Prince de Conty fut de ce nombre, & les emploïa aux Miffions qu'il fit faire dans fon Gonvernement de Languedoc.

Quelques années après l'Archevêque de Lyon perfuadé du bien qu'ils faifoient dans fon Diocêse pour l'inftruction des peuples, confentit qu'ils fiffent un établissement à Lyon. Pour cet effet, M. le Prince de Conti leur obtint des Lettres Patentes du Roi, qui leur permettoit de s'établir dans cette ville, à l'Ifle Adam dans le Diocêfe de Beauvais & à Bagniol, en Languedoc : & le Marquis de Coligni, dont nous avons parlé, & la femme fournirent aux frais de la fondation de Lyon avec tant de générosité & d'humilité qu'ils ne voulurent pas même prendre le nom ni la qualité de fondateurs quoiqu'ils en fiffent toutes lesdefpenses. Un fi heureux fuccès donna bien de la joïe à M. Cretenet,il en remercia Dieu & let pria de proteger cette Communauté naiffante,de benir les fujets quila devoient composer,& de verfer abondamment fes graces fur tous leurs travaux. Cette nouvelle maison étant achevée,ce zelé Fondateur propofa aux Miffionnaires de faire une retraite spirituelle avant que d'y aller demeurer,ce qu'ils accepterent avec joïe, & voulurent même la faire l'un après l'autre dans fa maifon. Lorfqu'elle fut finie, ils allerent dans leur maifon, ou ils commencerent leur établissement & continuerent à fuivre les reglemens qu'ils avoient obfervés depuis fi long tems par les Confeils de M. Cretenet, qu'ils ont toûjours reconnu comme leur pere & le veritable Inftituteur de leur Congrégation, à laquelle ils donnerent le nom de faint Jofeph, quoique dans quelques lieux ou les appellât les Creteniftes.

C

Quelque tems après ces Miffionnaires prierent leur Inftituteur de prendre un appartement dans leur maison, mais il ne se prévalut point de cet avantage, & voulut païer le loïer des chambres qu'il occupoit, comme s'il eût été un étranger;;

Tome VIII.

C.c.

LACONGRE

MISSION- & fon humilité fut fi grande qu'il ne difcontinua point l'exerNAIRES DE cice de fa profeffion, quelqu'inftance & quelque follicitation GATION DE qu'on lui en fît, afin qu'il eût plus de facilité & de tems pour continuer à conduire ces Miffionnaires & toutes les perfonnes qui alloient à lui,dont le concours fut plus grand qu'il

S. JOSIPH.

n'avoit encore été.

Sa femme avec laquelle il y avoit plus de vingt ans qu'il vivoit en continence, étant morte l'an 1665. il fe fentit infpiré de fe confacrer à Dieu dans l'état du Sacerdoce. Il redoubla fes prieres, fes jeûnes & fes mortifications, il fit dire plufieurs Messes pour connoître la volonté de Dieu, & confulta ce qu'il y avoit de plus habiles gens dans Lyon, qui tous lui confeillerent de fe faire Prêtre, l'affurant que Dieu l'appelloit infailliblement à cet état. Il commença d'efperer que Dieu lui feroit la grace d'y arriver,& cela avec tant d'affurance que toutes les contrarietés du monde ne furent pas capables de lui faire changer de fentiment. Un jour étant en prieres dans l'Eglife deS.Romain, où le faint Sacrement étoit expofé pour la Fête de ce Saint, qu'on y folemnifoit le 18. Novembre 1665. il fut fi fortement preffé par des mouvemens interieurs de fe faire Prêtre, qu'il ne put s'empêcher d'en faire le vou, à condition que l'Archevêque de Lyon le trouveroit bon. Ce Prélat qui connoiffoit la fainteté de ce ferviteur de Dieu y confentit, nonobftant fon peu d'étude; il le difpenfa même du Seminaire, & lui accorda un Dimiffoire pour aller prendre les Ordres où il voudroit, ne pouvant les lui donner lui même, parce qu'il étoit pour lors à Paris. M.Cretenet pourvu de ce Dimiffoire & d'une permission de Rome pour recevoir tous les Ordres hors les tems prefcrits par les faints Canons, partit pour les aller recevoir à Bellay, où il arriva le 6. Août 1666. L'Evêque qui connoiffoit auffi fa vertu, lui donna la Tonfure & les quatre neurs dès le lendemain qui étoit un Samedi ; le Dimanche il lui donna le Soudiaconat; le Mardi Fête de faint Laurent, le Diaconat; & le jour de l'Affomption de NotreDame, la Prêtrife. M. Cretenet la reçut avec de fi faintes & de fi humbles difpofitions, que quoiqu'il fût venu à l'Eglife dès cinq heures du matin, il y refta jufqu'à une heure après midi pour remercier Dieu de la faveur qu'il lui avoit faite. Etant forti de Bellai, il prit la route de Lyon pour y re

Mi

L'ENFANT

JESUS.

tourner : mais en paffant à Montluet, où il arriva le 19. du FILLES DE mê.ne mois, il tomba le lendemain en deffaillance après avoir Jesus entendu la Messe à laquelle il communia, & cette défaillance fut fuivie d'une groffe fiévre, qui augmentant tous les jours, l'enleva de ce monde, le premier jour de Septembre de la même année. Son Corps fut inhumé dans une Chapelle de l'Eglife Collegiale de Montluet, dont une partie des Chanoines avoient été fes difciples. Son cœur,une partie de fon foie & fes poumons furent embaumés & portés au troifiéme Monaftere des Religieufes du Tiers Ordre de faint François à Lyon où il avoit mis fa fille : & dix ans après l'an 1677. les Chanoines de Monluet accorderent encore une partie de ses offemens à ces Religieuses.

Ce faint homme avoit prédit la mort fix ans auparavant, & il femble que c'étoit pour cela qu'il fouhaitoit de recevoir fi promptement les Ordres,n'ignorant pas que pour peu qu'il eut differé, il feroit mort fans cette confolation, après laquelle il foupiroit comme étant la confommation de toutes les graces qu'il avoit reçuës de Dieu dans cette vie.

Čes Miffionnaires font habillés comme les autres Ecclefiaftiques & font gouvernés par un Général.

N. Orame, Vie de M. Cretenet, Instituteur de la Congré-gation des Pretres Miffionnaires de faint fofeph."

CHAPITRE XX V I.

Des Filles de l'Enfant Jefus, à Rome.

pour

L

Es Filles de l'Enfant Jefus à Rome reconnoiffent Fondatrice une fainte Fille nommée Anne Moroni,qui prit naiffance dans la ville de Luques. Se voïant orpheline & fans biens, elle vint à Rome où elle entra au service de quelques Dames de qualité. Etant âgée de quarante ans, elle voulut se retirer de l'embarras du monde,dont elle connoiffoit la vanité & l'inconftance par la pratique qu'elle avoit euë avec lui pendant le tems de fon service; & Dieu lui inspira d'affembler quelques Filles, avec lesquelles elle commença à vivre en commun l'an 1661. après en avoir obtenu la permiffion des Superieurs. D'abord elles les entretenoit de ces qu'elle avoit pu amaffer étant en service; mais comme cela

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