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L'UNION

veur que dès lors le Seminaire commença à produire des FILLES D fruits de bénédiction par les bonnes œuvres qui s'y prati C querent. On y fecourut les pauvres & les malades des envi- NE. rons, on y fit des instructions reglées aux enfans & aux personnes qui ignoroient les obligations du Chriftianisme. "On y éleva de jeunes filles dans les exercices de la Religion & de la picté. Enfin on y reçut grand nombre d'orphelines & de nouvelles Catholiques qui s'y refugioient de toutes parts, tant du Roïaume que des païs étrangers. Elles y étoient gardées & instruites avec tant de charité, que l'on ne s'en déchargeoit après un long tems que pour leur procurer un établissement conforme à leur état, dans lequel elles pussent faire aifément leur falut & vivre avec édification.

L'intention de Monfieur Vachet dans l'établissement de ces Seminaires fut d'emploïer les Sœurs qui les compoferoient dans la fuite, premierement à la converfion des filles & femmes Herétiques, à l'exception néanmoins de celui de Charonne dans lequel elles ne recevoient que celles qui avoient fait leur abjuration: secondement à retirer & instruire des filles & veuves de qualité destituées de biens ou de protection, qui ne pouvant être requës en d'autres Communautés, voudroient entrer dans l'Institut, ou apprendre & fe disposer à vivre saintement dans l'état où il plairoit à la divine Majesté de les appeller; & troisièmement à élever de jeunes filles à la vertu & dans la pieté & leur enseigner non feulement les verités de la Religion, mais encore à lire, écrire & travailler à des ouvrages qui conviennent à des perfonnes de leur fexe.

Ce premier Seminaire établi d'abord à Charonne & depuis transferé à l'Hôtel de saint Chaumont, ruë saint Denis à Paris, où elles demeurent depuis l'an 1685. fit en peu d'années des progrès si surprenans que Monfieur Vachet eut la confolation de voir plusieurs Communautés établies par les filles de ce même Seminaire à Paris & dans les Provinces Ces Communautés reçurent toutes les Reglemens qu'il avoir dressés & fait approuver l'an 1662.par M.de la Brunetiere qui après avoir été Archidiacre de Paris & l'un des Administrateurs de ce Diocêse pendant la vacance du Siége, fut ensuite Evêque de Xaintes. La maison de Metz établie du vivant de Madame Polaillon par la Sœur des Bordes , reçut la.

Tome VIII.

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FILLES DE premiere ces Reglemens qui quelque tems après furent apUNIONN. prouvés par le Cardinal de Vendôme Legat à Latere en France du Pape Clement 1X. comme il paroît par ses Lettres données à Paris le 15. Mai 1668. La Scœur des Bordes qui avec les Sœurs du Seminaire de Charonne avoit déja fait un troisiéme établissement à Caën, en fit un quatriéme & un cinquiéme dans les années 1672. & 1673. l'un à Loudun & l'autre à Sedan, qui furent suivis de ceux de Noyon & de Libourne au Dio êse de Bourdeaux en 1675. & de ceux de Tours, Luçon, aux Sables d'Olone & à Angoulême dans les années suivantes. Monfieur Vachet voïant que Paris étoit rempli de Filles que la necessité reduifoit à se mettre en service, & souvent sans sçavoir de quelle maniere elles devoient s'y comporter tant pour le bien de leur ame, que pour l'interêt & l'avantage des personnes qu'elles fervoient, d'où il s'enfuivoit beaucoup de negligence pour leur salut & peu de capacité pour contenter ces mêmes personnes, entreprit par une charité peu commune de former une Communauté où les Dames engagées dans le monde pussent prendre des femmes de chambres & des servantes après qu'elles y auroient été élevées dans la pieté & dans le travail, & qui pût être un azile pour ces filles quand elles feroient forties de condition. Ce dessein paroissoit difficile à cause des sommes d'argent qu'il falloit pour établir cette Maison ; mais rien n'étant impossible à celui qui animé d'une charité ardente & d'une foi vive, espere en la Providence de Dieu , ce saint Prêtre eut le bonheur de le voir réüssir lorsqu'il y pensoit le moins, & cela par les foins de Monfieur de Noailles pour lors Evêque Comte de Châlons, à present Cardinal & Archevêque de Paris. Ce Prélat touché de l'état malheureux auquel ces Filles sont exposées, en parla à Mademoiselle Lamoignon fille du premier Président de ce nom & à Mademoiselle Mallet toutes deux d'une pieté insigne; mais particulierement la premiere, laquelle aïant herité de la pieté de ses ancêtres avoit part à toutes les bonnes œuvres qui se faisoient dans Paris : ce qui avoit obligé le Roi de lui confier la distribution de ses aumônes. Elles lui furent d'un grand fecours pour cet établissement, que ces trois illustres personnes resolurent enfin après une meure déliberation, & qui fut executé en 1679. par l'erection d'une nou

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velle Communauté qu'on nomme ordinairement la petite FILLEST Union pour la diftinguer du Seminaire qui est à l'Hôtel de CHRETIENfaint Chaumont. Monfieur Berthelot & la femme y contri- NE. buerent beaucoup, en donnant une maison qu'ils avoient fait bâtir à la Villeneuve pour retirer les foldats estropiés & invalides, jusqu'à ce que le Roi les eût logés dans le superbe Hôtel-Roïal des Invalides. Sa Majesté confirma cette donation par ses Lettres Patentes de la même année, & permit aux Sœurs du Seminaire de l'Union Chrétienne d'en prendre possession pour y vivre conformément à leur Institut.. Monfieur Vachet ne vécut pas beaucoup après cet établissement. Il y avoit déja du tems qu'il étoit attaqué d'une maladie, qu'il supporta pendant trois ans avec une patience: admirable, & il mourut enfin l'an 1681. âgé de soixante & dix-huit ans après avoir reçu les Sacremens de l'Eglife avec: une pieté qui répondoit à sa vie. Il fut enterré à faint Germain l'Auxerois..

Après sa mort l'Institut des Filles de l'Union Chrétienne a fait de nouveaux établissemens à Poitiers, à Auxerre, à saint Lo, à Bayonne, à Pau, à Partenay,à Alençon, à Mantes, à Chartres, à Fontenay le Comte, sans compter plusieurs Hospices formés sur le modelle de ces Communautés. Quoique dans les Lettres que le Cardinal de Vendôme donna pour l'approbation de cet Institut, la Sœur des Bordes foit nommée la premiere, & que même dans la Préface des Constitutions imprimées l'an 1703. on lui donne la qualité de Fondatrice & d'Institutrice de la Congregation, la Sœur Anne de Croze est néanmoins la veritable Fondatrice de: l'Institut conjointement avec Monfieur Vacher. Ce fut fon humilité qui lui fit donner ce titre à la Sœur des Bordes, qui: mourut quelques années avant elle. Il est vrai que ses infirmités ne lui permettant pas d'entreprendre de longs voïages, elle n'a pas fait de nouveaux établissemens comme la Sœur des Bordes ; mais elle n'étoit pas moins necessaire à Paris pour y foûtenir par son exemple le poids de la régularité de ces Communautés, où elle formoit les Sœurs, qui après avoir pris l'esprit du Seminaire sous sa direction, étoient trouvées dignes de remplir les places de Superieures dans les autres. Maisons.

Cette sainte fille nâquit le 30. Avril 1625. elle donna dès

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FILLES DE fa plus tendre jeunesse des marques d'un esprit superieur, CUNION, qui dans la suite fut cultivé par la connoissance des belles Lettres & par l'étude de la Philofophie qu'elle se rendit familiere. Elle étoit douée d'un jugement solide, avoit le cœur grand & genereux, une memoire heureuse qu'elle a confervée jusques dans son extrême vieilleffe, & tous ces avantages de la nature étoient foûtenus par une modeftie & une douceur qui lui attiroient l'estime de tout le monde. Pourveuë par la naissance & par la fortune de tout ce qui pouvoit la faire distinguer dans le monde & y paroître avec honneur, elle n'eut jamais d'autre ambition que celle de plaire à Dieu & de se consacrer dès ses premieres années à son service. Penetrée des verités éternelles qu'elle avoit gravées dans son cœur, elle fut toûjours fidelle aux mouvemens de la grace. Elle y cooperoit avec tant de soûmission & de facilité, qu'elle s'en fit une sainte habitude qui devint en elle la source d'une infinité de saintes actions qui la faifoient avancer à grands pas dans les voïes de Dieu. Sa ferveur ne fut point passagere, elle s'accrut & se fortifia avec l'âge. L'amour de Dieu fut toûjours l'unique motif qui lui fit entreprendre les grandes choses qu'elle a faites pour sa gloire & le salut des ames. Cet amour divin la dépoüilla de tous ses biens, & elle compra pour rien le sacrifice qu'elle en fit à Dieu, si elle ne se consacroit elle même à son service. C'est pourquoi elle entra dans l'Institut des filles de l'Union Chrétienne qui n'avoit encore aucune forme d'établissement. Elle le commença avec les Sœurs des Bordes & de Martaigneville, & donna fa propre maison, comme nous avons dit, pour en faire le premier Seminaire & le Chef de toutes les Communautés qui en sont sorties. Elle ya vécu dans une vie exemplaire & toute sainte, elle y a exercé les Emplois de Superieure, de premiere Assistante & de Maîtresse des Novices, dont elle a rempli dignement tous les devoirs jusqu'en l'an 1710.qu'elle decéda le premier jour de Septembre à quatre heures du soir après avoir reçu tous les Sacremens de l'Eglife, étant âgée de plus de quatre-vingt cinq ans.

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Nous avons dit quelle étoit la fin principale de l'Institut de ces filles & veuves de l'Union Chrêtienne, il ne nous reste plus qu'à parler de leurs principales observances. Elles ont choisi pour devotion speciale la sainte Famille de Notre Sei

CHRATIEN

gneur Jesus Christ. C'est pourquoi elles folemnisent com- FILLES DE me Fêtes de Patron, celles de la Nativité de Notre Sei- L'UNION gneur, del'Annonciation de la sainte Vierge & de saint Jo- N. feph, & elles renouvellent tous les ans leurs vœux le jour de la Présentation de la sainte Vierge. Tous les jours elles disent en commun son petit Office, & font l'Oraifon mentale de demi heure le matin & autant le soir. Les Fêtes & Dimanches elles y emploïent trois quarts d'heures. Tous les ans elles font une retraite de neuf jours, vers les Fêtes de l'Ascension & de la Toussaints. Pendant les huit jours de la Fête de l'attente des Couches de la sainte Vierge, il y a chaque jour quelques Sœurs en retraite pour se préparer avec l'Eglise à la Naissance du Sauveur du monde. Elles font la même chose pendant les trois derniers jours du Carnaval, & les jours de jeûne des Quatre Tems. Elles prient auffi tous les jours en commun pour le Pape, les Prelats de l'Eglife, le Roi, leurs Superieurs spirituels & temporels, pour leurs Fondateurs & Bienfaicteurs, pour la conversion des Pecheurs, des Heretiques & Infideles, & pour les Missionnaires Apoftoliques qui s'emploïent à leur converfion. Elles ne font point d'autres penitences corporelles, que celles qui font ordonnées par l'Eglife, excepté le jeûne du Vendredi qu'elles obfervent pendant toute l'année. Elles tiennent les petites écoles gratuitement pour les pauvres filles. Lorfqu'elles sçavent qu'il y a quelque division entre des personnes de leur sexe, elles tâchent autant qu'il leur est poffible de les reconcilier. En un mot, elles font tout le bien qu'elles peuvent sans jamais rien refuser. Celles qui veulent être reçuës dans cet Institut, doivent faire deux années d'épreuve avant que d'y être associées, aprés lesquelles elles font trois vœux simples de chasteté, d'obéïssance & de pauvreté, & un quatriéme d'union, en la maniere sui

vante.

O Mon Seigneur Jesus-Christ, Fe N. prosternée en esprit d'humilité, en presence de votre divine Majesté au très faint Sacrement de l'Autel, & entre vos mains, Monsieur notre très honoré Superieur, sous l'autorité de Monseigneur l'Archevêque ou Evéque de N. fais vœu à Dieu de pauvreté, de chafteté perpetuelle, d'obéissance & d'union avec mes sœurs de cette maison, comme aussi avec toutes les Communautez du même

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