LA PROVI minaire. Non contente de cela, après avoir fait enregistrer FILLES DE les Lettres Patentes du Seminaire sans aucune restriction, DENCE DE elle donna encore dix-sept mille livres pour l'entretien de Din. trois Ecclesiastiques; & lorsque les Directeurs du Seminaire furent obligés de bâtir, n'aïant pas assez de logement, elle leur donna une somme confiderable, & leur en procura encore davantage. Ce Seminaire a fait dans la suite de si grandes acquisitions, que l'an 1695. les Assemblées de la Bourse Clericale cesserent. L'Abbé de Choisy, Vie de Madame de Miramio N Des Filles de la Providence de Dieu. Ous n'avons garde d'omettre dans cette Histoire la Communauté des Filles de la Providence de Dieu établie à Paris, puisqu'elle a donné naissance ou servi de modelle & d'exemple à plusieurs autres Communautés, qui par la diversité des noms & des observances, ont formé comme autant de Congregations particulieres. C'est au zele de Madame Polaillon, Marie de Lumagne, veuve de Monfieur Polaillon, Conseiller du Roi en ses Conseils, & fon Resident à Raguse, que l'on est redevable de l'établissement de cette Communauté; où par un effet de la Providence de Dieu, l'on trouve tous les secours de la vie & du salut, & où l'on fait profession de retirer comme dans un azile & un port assuré les jeunes filles à qui la beauté, la pauvreté, l'abandon, ou la mauvaise conduite des parens peuvent être une occafion prochaine de leur perte & de leur damnation. Madame Polaillon aïant conçu le dessein de cet établissement, le proposa à plusieurs personnes de pieté qui l'approuverent; mais qui néanmoins lui conseillerent de ne le pas entreprendre, n'aïant pas de fonds fuffisans pour foutenir cette entreprise. Mais elle leur répondit avec assurance que fon fonds seroit la divine Providence, qui ne manque jamais à ceux qui cherchent veritablement à honorer Dieu. En effet cette Providence divine ne lui aïant jamais manqué, elle fut fi reconnoissante des faveurs qu'elle en reçut, qu'elle ne voulut point donner d'autre nom que celui des Filles de la Providence de FILLES DE Dieu à sa Communauté, qu'elle commença enfin nonobstant LA PROVI- ce que purent lui representer ceux qui lui conseilloient de DINCE DE n'en rien faire, après avoir obtenu au mois de Janvier de l'an 1643. des Lettres Patentes de Loüis XIII. pour l'établissement de cette Maison, où elle reçut en fort peu de tems un grand nombre de filles, les unes pour éviter le danger qu'elles couroient de se perdre, les autres pour leur inftruction dans la Religion, ou pour apprendre à travailler, & d'autres auffi pour leur fervir de Maîtresses & les instruire. Madame Polaillon aïant rencontré dans plusieurs des Sœurs qui travailloient à l'instruction des pauvres filles une veritable vocation au Service de Dieu & du prochain, en choisit quelques-unes pour former une Communauté sous la conduite de deux filles qu'elle avoit fait venir de Lion, dont l'une appellée Catherine Florin est morte en odeur de fainteté. M. Vincent de Paul Instituteur des Prêtres de la Miffion, duquel nous avons parlé dans les Chapitres précedents, étant pour lors Superieur de cette maison de la Providence, & aïant été chargé par François de Gondy Archevêque de Paris, de l'ériger en Communauté, y fit deux visites regulieres pour reconnoître la vocation & la capacité des filles que Dieu destinoit pour former cette societé ; en forte qu'elle fut enfin commencée en 1647. par sept de ces mêmes filles, qui entre trente qu'elles étoient pour l'instruction de la jeunesse, furent choifies comme les plus propres à former cette Communauté & à soûtenir cette entreprise par des Regles certaines & par des pratiques constantes de pieté. Comme la charité de Madame Polaillon n'avoit point de bornes, & qu'elle recevoit dans sa maison toutes les pauvres filles qui se présentoient pour y entrer, elle se trouva l'année suivante chargée de cent quatre-vingts de ces filles, & encore dans un tems où elle auroit eu plus de besoin que dans un autre, d'un fonds extraordinaire pour leur entretien; car c'étoit dans les premiers mouvemens de la guerre de Paris, où l'incertitude de ce qui pourroit arriver, & du tems qu'elle pourroit durer, obligeoit la pluspart des personnes de retrancher leurs charités. Cependant, quoique cette pieuse Fondatrice se vît reduite à n'avoir que douze écus, pour la subsistance de ce grand nombre de filles, elle ne LA PROVI- ne perdit point courage: au contraire, perfuadée que la Di- FILLES DE vine Providence qui a soin des animaux les plus petits & les plus méprisables, n'abandonneroit pas ses servantes, elle s'a- DIEU. dressa à Dieu avec une parfaite confiance, & le pria avec tant de ferveur de lui faire fentir les effets de sa protection, & de lui donner les moïens de continuer cet ouvrage, dont elle le reconnoissoit l'Auteur, & qu'elle n'avoit entrepris que pour sa gloire, que le jour même il lui accorda sa demande, en lui procurant une aumône extraordinaire de quinze cens livres, qui lui furent envoïées de saint Germain en Laïe,par une personne de la premiere qualité. Quoique cette zelée Fondatrice eût obtenu des Lettres Patentes de Loüis XIII. pour l'établissement de cette Communauté, comme elle ne les avoit pas fait verifier au Parlement dans le tems qu'il falloit ; elle eut recours à Loüis XIV. son successeur, qui lui en accorda d'autres au commencement de fon Regne, pour remedier à la surannation des premieres. Jusqu'alors cette Communauté n'avoit pas eu de demeure fixe; mais la Reine Anne d'Autriche mere du Roi, étant perfuadée de l'utilité de cette Communauté naissante, & prevoïant qu'il étoit difficile qu'elle pût subsister dans une vie exacte & reguliere, sans avoir une demeure fixe, leur donna l'an 1651. l'Hôpital de la Santé, situé au Fauxbourg faint Marcel dans la ruë de l'Arbalétre. Cette maison destinée pour les pestiferés, étoit une dépendance de l'HôtelDieu de Paris, où les convalefcens, hors le tems de contagion, alloient se rétablir, & où ils restoient quelque tems après leurs maladies, sous la direction des Administrateurs, & sous la conduite de quelques Religieuses de cet Hôpital, qui fut transferé & bâti hors la ville, entre Torabisfoire & le Champ-de-l'Alloüete. Ce fut ainsi que cette pieuse & charitable Princesse fonda ce Seminaire de la Providence, qu'elle plaça exprès en ce lieu, contigu au Magnifique & Roïal Monastere du Val-deGrace, pour l'avoir fous ses yeux, comme elle le déclara elle-même dans le Contrat de donation qu'elle leur fit de cette maison; ne pouvant pas perdre de veuë un établissement qu'elle jugeoit devoir procurer de très grands biens. L'Archevêque de Paris Jean François de Gondy donna fon consentement, & permit à ces filles d'en prendre poffeffion Tome VIIL. T FILLES DE le jour de saint Barnabé de l'an 1652. M. Talon Curé de LA PROVI- faint Gervais, & Grand-Vicaire de Paris, posa la Croix DENCE DE DIEU. fur la grande porte de la Maison. La Reine honora de sa présence cette cérémonie, qui étoit comme le sceau dont la Providence de Dieu se servoit pour approuver & ratifier la confecration que ces bonnes filles avoient faite de leurs personnes pour procurer la Gloire de Dieu & le falut du prochain. Elles s'y appliquoient avec tant de zele, dans l'éducation qu'elles donnoient aux filles qui étoient sous leur conduite, qu'oubliant leurs propres interêts, elles négligerent encore la verification de leurs Lettres Patentes au Parlement. Ce défaut de vérification les aïant obligées en 1677. d'avoir recours une seconde fois à la bonté du Roi, pour arrêter l'effet d'une Déclaration, portant suppression de l'établissement de toutes les Communautés, dont les Lettres patentes n'avoient pas été verifiées au Parlement, Sa Majesté leur donna en cette occasion de nouvelles preuves de sa protection. Car elle autorisa non seulement ce qu'elle avoit déja fait en leur faveur ; mais elle leur assura par de nouvelles Lettres patentes tout ce que leur avoit donné le Roi Loüis XIII. fon pere, avec tous les privileges, droits, & exemptions accordés aux Hôpitaux de fondation Roïale. Il les confirma encore dans la possession de la maison que la Reine sa mere leur avoit donnée, & leur fit une remise de toutes les finances & des droits que Sa Majesté pouvoit prétendre pour le présent & pour l'avenir. Cet Institut fut encore autorisé par les Lettres de confirmation de M. François de Harlay de Chanvalon Archevêque de Paris, & les Lettres patentes du Roi furent enregistrées au Parlement, après que ces filles eurent encore obtenu le consentement du Prévôt des Marchands & des Echevins de Paris. Après que tout ce qui regardoit la seureté & confirma tion exterieure de leur établissement fut ainsi terminé, il ne restoit plus à Madame de Polaillon que de mettre la derniere main à ce qui concernoit la perfection interieure de son Institut, en prévenant les effets de l'inconstance humaine. C'est pourquoi elle proposa à ces sept filles qui avoient été choisies pour former la Communauté, de renouveller avec elle leur afsociation : ce qu'elles firent au mois d'Octobre de la même année, sur la fin d'une retraite, où elles se confir DENCE DE merent dans les resolutions qu'elles avoient prises d'imiter FILLES DE autant qu'il leur feroit possible la vie & les actions de Notre- LA PROVISeigneur Jesus-Christ qu'elles avoient choisi pour modele DIEU. du nouveau genre de vie qu'elles alloient établir ; & parce que les sentimens que Dieu leur donna à ce sujet, furent à leur égard comme une marque assurée de sa sainte volonté sur leur vocation, elles en firent leur premiere regle d'union, qui fut redigée par écrit en la maniere suivante. Au nom de Dieu, Pere, Fils, & Saint Esprit, sous l'Invo cation de la sainte Vierge; la Providence Divine aïant difposé que nous filles Seculieres de diverses Provinces, afssemblées Sous la conduite d'une fainte veuve notre Superieure toute conSacrée à Dieu & à la charité du prochain, aïant eu pendant quelques années une mutuelle communication des sentimens de pieté qu'il a plu à Dieunous inspirer; nous avons reconnu que les lumieres & les graces que la divine Bonté a départies à chacune de nous en particulier,se rapportent toutes & tendent à une méme fin, qui est de nous unir af. C. par une continuelle meditation & une fidelle imitation de sa sainte vie, pour le Suivre en la compagnie de ses premieres Saintes difciples, quile suivoient, & des autres qui l'ont suivi dans tous les fićcles, cherchant les ames, & nous faisant toutes à toutes celles de notre sexe par son esprit de charité pour les lui gagner toutes, en procurant son regne par tout, professant ses maximes Evangeliques par les œuvres & par l'instruction aux filles, en demeurant unies entre nous du lien indissoluble de la dilection fraternelle en son divin amour, quoique nous vinssions à étre separées en diverses Provinces même en des païs étrangers, en nous fécourant & aidant les unes aux autres de tout ce qui nous fera possible, le tout avec l'agrément & les ordres de nos Superieurs. C'est ce qu'aujourd'hui, nous au nombre de huit, avons promis à Dieu toutes ensemble, par un pur amour, en renouvellant & confirmant notre union faite cydevant, & ce fur la fin d'une retraite de dix jours que nous achevons & que nous avons faite devant le faint Sacrement dans un lieu retiré, & après la Messe & la Communion nous nous sommes donné le baiser de paix, pour témoignage de notre devotion & union en Jesus-Christ, le tout à la plus grande gloire de Dieu, & à l'édification de son Eglise Catholique Apostolique & Romaine. Amen. Fait à Paris ce jourd'hui 17. Octobre 16.52. Tij |