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RES

DE S.

chaleurs de l'Eté: ce qui lui caufa une fiévre violente, dont SEMINAIil reffentit plufieurs accès ; mais en arrivant à Laurette, il fe SULPICE trouva parfaitement guéri de cette fiévre, & du mal qu'il avoit aux yeux.

Après qu'il eut fatisfait à fes devotions dans ce faint lieu, retourna encore à pied à Rome; mais la mort de fon pere qui arriva quelque tems après, l'obligea de revenir à Paris, où dans une retraite qu'il fit à faint Lazare chez les Prêtres de la Miffion, il se disposa à recevoir le Soufdiaconat & fut affocié par M. Vincent de Paul à la compagnie des Ecclefiaftiques qui s'affembloient tous les Mardis à faint Lazare. Dès lors il conçut un fi grand zele pour l'inftruction des pauvres gens de la campagne, qu'il douta s'il devoit demeurer à Paris pour le mettre fur les bancs,ou fuivre les mouvemens de fon zele qui le portoit à travailler aux Miffions & à prêcher dans les villages. Aïant confulté d'habiles gens, ils lui confeillerent de preferer le fruit que les peuples pouvoient retirer de fes inftructions & des études qu'il avoit faites, à la reputation qu'il pouvoit acquerir en prenant le bonnet de Docteur en Theologie: il regarda ce confeil comme une déclaration de la volonté de Dieu, & l'éxecuta avec tant d'ardeur, qu'avant qu'il eût atteint l'âge requis pour recevoir la Prêtrife, il avoit fait faire des Milfions à fes dépens prefque dans tous les lieux où il avoit du bien ou de l'Eglife ou de fon Patrimoine. Il n'aidoit pas feulement les ouvriers de la Miffion; mais il travailloit fous leur conduite, & faifoit affidument le Catechifme & des prédications. Il ne rencontroit pas un pauvre qu'il ne l'intruisît, il fe détournoit même de fon chemin pour catechifer les Laboureurs. Il s'arrêtoit encore dans les rues de Paris pour inftruire les pauvres qui lui demandoient l'aumône, il les menoit chez lui & les difpofoit à faire des Confeffions gé

nérales.

Si-tôt qu'il fut élevé au Sacerdoce, fon zele s'augmenta de telle forte ; qu'après avoir célébré fa premiere Meffe l'an 1633. il quitta Paris pour aller fecourir les ames les plus abandonnées. Il attira avec lui plufieurs Ecclefiaftiques d'une naiffance diftinguée, & les engagea d'aller enfemble en Auvergne (ou étoit fcituée fon Abbaïe de Pebrac) pour y faire des Miffions dans les montagnes de cette Province. Il

R DE S.

SULPICE.

S MINAI- fe prépara à ce voïage par une retraite qu'il fit encore à faint Lazare au mois de Mars de l'année 1634. Ileft difficile d'exprimer quels furent les travaux de ce faint Prêtre dans le cours de fes Miffions en Auvergne, où après avoir demeuré fix mois, il-fut obligé (par les pourfuites de ceux qui s'oppofoient à la reforme de fon Abbaïe de Pebrac qu'il avoit entreprise de revenir à Paris, où étant arrivé il le défit de fon carroffe & de tous fes domeftiques, à l'exception d'un qu'il garda par obéïffance à fon Directeur qui le lui or

donna.

Pendant fon féjour dans cette Ville, il fut fort follicité par un Evêque d'une infigne pieté de vouloir prendre fa place, & fe charger de fon Evêché: ce Prélat y emploïa même les follicitations de M. de Paul,qui avoit beaucoup d'autorité fur l'efprit de M. Olier: mais aïant formé le deffein d'aller en Canada pour y prêcher la Foi ; il préfera à cette dignité les fruits qu'il efperoit faire dans cette Miffion : cependant il ne réüffit pas felon fes défirs,n'aïant pu découvrir aucune ouverture pour ce voïage. Dieu ne permit pas néanmoins que fon zele fût inutile,car aïant trouvé les moïens de retourner en Auvergne, il partit de Paris avec plufieurs Ecclefiaftiques, qui pendant dix-huit mois firent des Miffions dans tous les quartiers de cette Province & du Vellay. M. Olier n'y contribua pas moins de fa perfonne & de fes biens que la premiere fois ; mais avec cette différence, qu'il eut pendant tout ce tems-là de grandes mortifications. Il fut traverfé dans tous fes deffeins par des ufurpateurs du bien de fon Abbaïe, qui ne pouvant fouffrir qu'il leur refiftât,foûleverent une infinité de perfonnes contre lui, ce qui lui fut fort fenfible. Pendant le tems qu'il demeura en Auvergne, il parcourut tous les cantons des Diocêfes deClermont, de faint Flour & du Puy, dont le Clergé & les peuples devinrent la bonne odeur de Jefus-Chrift. On voïoit les Chanoines, les Curés & les Prieurs, travailler avec une fainte émulation à inftruire le peuple, à entendre les Confeffions générales des Païfans, à faire faire les exercices fpirituels aux Prêtres & à vifiter les Hôpitaux. Tout le monde admiroit la modeftie & la pieté avec laquelle on célébroit l'Office Divin dans les Eglifes depuis le tems de la Miffion: ce qui fit concevoir tant de vénération pour M. Olier, qu'un Chapitre députa en

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SULPICE

Cour, afin de le demander au Roi pour leur Evêque. Ceux S.MINAL mêmes qui l'avoient perfecuté, reconnurent leur faute & le RES DE S vinrent trouver, lui amenant leurs familles pour recevoir fa bénédiction.

Cette Miffion étant finie, il fe fentit preffé par un mouvement interieur de la Grace,de fe tranfporter en Bretagne, où l'évenement fit voir que Dieu le conduifoit pour la reforme d'un Monaftere de Religieufes qu'il entreprit, & dont il vint à bout. Il retourna enfuite à fes exercices ordinaires & aux Miffions. Pendant qu'il y travailloit, le Cardinal de Richelieu lui écrivit que le Roi l'avoit nommé à la Coadjutorerie de l'Evêché de Chaalons fur Marne, & lui en envoïa en même tems le brevet. M. Olier reçut cet honneur avec beaucoup de reconnoiffance: mais ne pouvant fe perfuader que Dieu le voulût dans cette dignité, il remercia le Cardinal de Richelieu, & le pria de perfuader au Roi qu'il nommât une autre perfonne pour remplir cette place. Ce refus étonna tout le monde, & fit peine à fes parens qui ne pouvoient gouter une conduite fi extraordinaire, felon le monde ; mais Dieu qui le deftinoit à être l'Inftituteur de beaucoup de Communautés ou Seminaires d'Ecclefiaftiques, qui devoient faire l'ornement & le bon exemple de plufieurs Diocê les, ne permit pas qu'il fe fixât à la conduite d'un feul, dans lequel il auroit été obligé de borner fon zele, lui donnant pour cet effet un efprit de force & de fageffe pour prifer les difcours du monde & les interêts de fa famille,aufquels il préfera ceux de Jefus-Chrift & de fon Eglife, qu'il croïoit fervir plus utilement par fes Millions qu'il avoit deffein de continuer. Mais la divine Providence en disposa au

trement.

Le Pere Charles de Condren qui étoit pour lors Général
de la Congrégation de l'Oratoire & qui n'étoit pas moins zelé
le bien univerfel de l'Eglife, que pour
pour
l'accroiffement
& la perfection de fa Compagnie, defirant depuis long tems
voir l'établissement de quelque Seminaire, dans lequel on
difposât les jeûnes Clercs aux Ordres & aux fonctions Ec-
clefiaftiques, en communiqua avec plufieurs Ecclefiafti-
ques d'un merite diftingué, qu'il avoit fous fa direction, du
nombre defquels étoit M. Olier, qui tous approuvant ce
defcia s'unirent enfemble pour en former un, qui dans la

SULPICE.

SEMINAL fuite fit un très grand progrès, & devint une école de vertus RES DE S. fous la conduite de M. Olier que Dieu qui l'avoit destiné à cette entreprise, voulut éprouver en le tenant pendant les deux années qui précéderent cet établissement, dans un état de fouffrance & d'abjection fi grande, que celui qui devoit être le Chef des autres, paroiffoit pendant ce tems là le rebut

des hommes.

Ces faints Ecclefiaftiques s'étant ainfi unis dans l'intention de former un Seminaire, lorfque la Divine Providence leur en fourniroit quelque occafion favorable, s'occuperent pendant ce tems là à faire plufieurs Miffions, jufqu'à ce que s'étant arrêtés à Chartres, ils effaïerent d'y en établir un ; mais y aïant demeuré huit mois fans que perfonne fe joignît à eux, ni que l'entreprise eût aucun fuccès, ils crurent que l'heure de cet établiffement n'étoit pas encore venuë, & que Dieu refervoit cette œuvre à un autre tems: ainfi ils jugerent qu'ils devoient recommencer des Miffions. Mais dans le tems qu'ils s'y difpofoient, &que plufieurs étoient en differentes Provinces pour diverfes affaires, un de ces Ecclefiaftiques étant venu à Paris, & dans un entretien qu'il eut avec une perfonne de pieté, lui aïant fait le recit de leur dessein & du mauvais fuccès qu'ils avoient eu à Chartres, elle lui réprefenta qu'il ne falloit pas abandonner cette entreprise, qui pouvoit leur réüffir, s'ils vouloient venir demeurer à Vaugirard proche Paris. Elle fit de fi grandes inftances pour cela, qu'elle obligea ce bon Prêtre d'en écrire à ceux de fa Compagnie, dont plufieurs ne voulurent pas écouter cette propofition: M. Olier s'y oppofa même affez long-tems. Mais enfin perfuadé que Dieu dans l'éxecution de fes deffeins fe fert quelquefois de ce qui paroît le plus oppofé au jugement des hommes il ne méprifa pas tant cet avis qu'il ne confentit à la priere qu'on lui fit de recommander cette affaire à fa Divine Majefté. S'étant retiré pour cet effet au commencement de l'année 1641. à une maison de campagne aux environs de Paris, pour y faire les exercices fpirituels & demander les lumieres du Ciel, il fe trouva fur la fin de fa retraite, fi encouragé à l'entreprife de cet établiffement, que ne doutant point que ce ne fût la volonté de Dieu, il porta plufieurs Ecclefiaftiques à fe joindre à lui pour se fujet. Il fir dans le même tems une feconde retraite, où

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RES DE S SULPICE.

Dieu le confirma dans ce deffein, & le remplit de l'efprit qu'il SEMINALdevoit infpirer à la Communauté qu'il établit enfin à Vaugirard où il loüa, pour cet effet, une maison au commencement de l'année 1642.

Dieu donna auffi-tôt une telle benediction à cette entreprife,que quoique ce faint Inftituteur fût logé avec fes Ecclefiaftiques dans une des plus petites & des plus pauvres maifons du village, & que les dépenfes qu'ils avoient faites pour leurs Miffions & pour l'établiffement du Seminaire de Chartres les euffent réduits à y vivre des liberalités d'une perfonne de pieté qui les y entretenoit, néanmoins dés les premiers mois, plufieurs perfonnes confiderables par leur naiffance & par leur pieté s'eftimerent heureuses d'être reçues dans cette fainte Compagnie pour se former aux vertus & aux fonctions Ecclefiaftiques fous la conduite de Monfieur Olier. Ils n'eurent pas demeuré quatre mois à Vaugirard, que la providence divine les en tira pour les établir à Paris. Elle choifit pour cela le moïen fuivant, qui donna à Monfieur Olier une grande ouverture pour faire des biens ineftimables dans cette Capitale du Roïaume. Monfieur de Fiefque pour lors Curé de faint Sulpice étant affligé des defordres qui regnoient dans fa Paroiffe, & ennuïé de l'oppofition qu'il trouvoit dans plufieurs de fes Prêtres habitués qui refiftoient à tous fes bons deffeins, prit la résolution de quitter fa Cure. Comme il avoit entendu parler du merite de Monfieur Olier & de la vertu des Ecclefiaftiques qui étoient fous la conduite, il jetta la veuë fur eux pour l'execution de fon deffein, & prit l'occafion d'une Proceffion qui fe faifoit de faint Sulpice à Vaugirard, pour demander à quelqu'un du Seminaire s'il n'y avoit perfonne dans leur Compagnie qui voulût fe charger de fa Cure & permuter quelque Benefice fimple contre le fien. Cette propofition ne fut point écoutée d'abord; mais le Curé de faint Sulpice perfiftant dans fa réfolution, fit tant d'inftances, que plufieurs perfonnes de pieté representerent à Monfieur Olier qu'il ne devoit point negli ger une occafion qui lui donnoit entrée dans une moisson abondante. Ce qui ne fut pas fans effet ; car après avoir recommandé cette affaire à Dieu, il écouta les propofitions de Monfieur de Fiefque,accepta fa Cure & en prit poffef fion au mois d'Août de la même année 1642.

Tome Ville

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