LA CHA que de tous les lieux où il alloit & envoïoit faire la Miffion, & SOEURS DE Dieu donna tant de benedictions à cette œuvre de pieté,que quoique le premier deffein de ces Confrairies ne fût pour la campagne, il s'en établit néanmoins une à Paris dans la Paroiffe de faint Sauveur en 1629. & elles fe répandirent dans tant de villes,que quoique leur, Instituteur leur eût donné des Reglemens propres pour leur conduite, & qu'il allật de tems en tems les vifiter ou qu'il y envoïât des Prêtres de fa Congregation, elles auroient néanmoins manqué des fecours dont elles avoient befoin, fi Dieu qui n'abandonne jamais les fiens n'eût inspiré à Mademoiselle le Gras de fe dédier particulierement à ces œuvres de charité fous la direction de M. de Paul. Cette Demoiselle nâquit à Paris le 12. Août 1591. & eut pour pere Louis de Marillac Sieur de Ferrieres, & pour mere Marguerite le Camus. Elle reçut le nom de Loüife fur les Fonds de Baptême, & perdit fa mere dans fon bas âge. Son pere s'en voïant chargé lui-feul, prit un foin particulier de fon éducation. Il la mit en penfion dans le Monastere des Religieufes de Poiffy, où il avoit quelques parentes, afin que par leurs foins elle y reçût les premieres teintures de la pieté & de la vertu. L'aïant retirée quelque tems après, il la mit entre des mains d'une Maîtreffe habile & vertueuse pour lui apprendre des ouvrages convenables à fa condition: & n'oubliant rien de tout ce qui pouvoit lui faire acquerir un merite distingué, il lui fit apprendre la peinture, & lui donna des Maîtres de Philofophie, afin qu'elle pût s'élever audeffus des connoiffances ordinaires aux perfonnes de son fexe. Les lumieres qu'elle acquit par l'étude & par la lecture, qui faifoit une de fes plus grandes occupations, lui donnerent un fi grand mépris pour les vanités du monde, & un fi grand goût pour la vie Religieufe,'qu'elle fe feroit faite Capucine, fi le Pere Honoré de Champigny Capucin, qui vivoit pour lors en odeur de fainteté ne l'en eût détournée, en lui représentant que la foibleffe de fon temperamment ne lui permettroit pas de foûtenir les aufterités d'une vie fi dure & fi penitente, qu'elle feroit toûjours en état d'embraffer, lorfqu'après une plus ample deliberation, Dieu lui auroit fait connoître que c'étoit fa fainte volonté. Mais fa divine SOEURS DE Majefté en difpofa autrement. Car peu de tems après aïant LA CHA- perdu fon pere & fe trouvant obligée de prendre un parti, > Dieu benit fon mariage par la naiffance d'un fils qu'elle éleva avec un foin particulier, & qu'elle fit pourvoir dans la fuite d'une Charge de Confeiller en la Cour des Monnoïes. Elle perdit fon mari fur la fin de l'année 1625. & elle commença dès lors à n'avoir point d'autre Epoux que JefusChrift,conformément au vu qu'elle en avoit fait le 4 Mai 1623. lorfque voïant fon mari dangereufement malade, elle forma le deffein, fi Dieu en difpofoit, de garder la Viduité, felon le confeil de faint Paul, comme effectivement elle l'executa après que la mort le lui eût enlevé, ne fongeant plus pour lors qu'à redoubler fes devotions & fes prieres, & à fe fanctifier de plus en plus par la frequentation des Sacremens, par les œuvres de charité, par les lectures, les meditations, les jeûnes & les aufterités. L'Evêque du Bellay Jean Pierre Camus, fous la direction duquel elle s'étoit mife, la voïant dans le deffein de s'appliquer uniquement aux œuvres de pieté, & ne pouvant toûjours être préfent pour la conduire à l'état de perfection où elle fouhaitoit arriver, ne crut pas la pouvoir confier à un meilleur Directeur, qu'à Monfieur Vincent de Paul, qui commençoit pour lors fa Congregation dans le College des Bons- Enfans; ce qui obligea Mademoiselle le Gras, de venir demeurer en 1626. dans la Paroifle de faint Nicolas du Chardonet proche de ce College, dont le voift nage CHA *f nage lui donnant occafion d'être informée des actions de cet SOEURS DE homme Apoftolique, qui s'occupoit inceffamment dans A KITA'. tous les exercices de la charité, elle fe fentit plus animée que jamais de confacrer fa vie au fervice des pauvres. Elle communiqua fon deffein à ce fage Directeur, qui ne jugeant pas propos de feconder pour lors fes defirs, & voulant connoître fi c'étoit l'Efprit de Dieu qui agiloit en elle, en differa l'accompliffement jufqu'en 1629. qu'il l envoïa vifiter les Confrairies de Charité qu'il avoit établies dans plufieurs villages pour le fecours des pauvres malades. Elle reçut les ordres de Monfieur de Paul avec beaucoup de joïe & de foûmiffion, & elle lui rendit une obéïffance fi parfaite, que depuis elle n'entreprit rien que par fes avis & par fon ordre, le regardant comme le Miniftre & l'Interprete des volontés de Dieu. 1 Le premier voïage qu'elle fit pour ce fujet fut à Montmirail, dans le Diocêfe de Soiffons. Avant que de faire ces voïages, elle prenoit une inftruction par écrit de la main de ce faint Fondateur touchant ce qu'elle avoit à faire. Le jour de fon départ elle communioit pour recevoir de Jefus-Christ une communication plus, abondante de fa charité, & un gage plus affûré de fa protection & de fa conduite. Elle étoit ordinairement accompagnée dans ces voïages, de quelques Dames de pieté ; & elle les faifoit dans des voitures penibles, fouffrant beaucoup d'incommodités, vivant & couchant fort pauvrement, afin que fe conformant à la mifere des pauvres, elle pût les encourager à fouffrir patiemment leurs peines. Elle procura de pareils établissemens à Paris. Le premier fut à fa Paroiffe de faint Nicolas du Chardonet l'an 1630. L'année suivante il y en eut dans celles de faint Benoît & de faint Sulpice, les autres fuivirent leur exemple, & ces établissemens fe répandirent aufli par fes foins à la campagne. Ces Confrairies n'aïant été établies jufqu'alors que dans des villages ou au plus dans des petites villes, les femmes qui s'y engageoient, affistoient elles mêmes les malades, faifoient leurs lits, & leurs preparoient les nourritures & les remedes neceffaires ; mais après que l'établissement en fut fait à Paris, il s'y introduifit quelque changement dans le fervice des malades. Car comme il y entra un grand nombre de Dames de la premiere qualité, qui ne pouvoient par ellesTome VIII. Q |