Page images
PDF
EPUB

petit Elie fortant du fein de fa mere, & l'un de ces prophetes qui lui fait avaller une cuillerée de feu ?

Joann.

1. Joann.

I.

Specul.Hi

Joann. de
Cimento

Ord. Car

Ne femble-t-il pas que Jean le Gros l'un des gene- Jo. Viriraux de cet Ordre, & quelques autres ecrivains du dar. Clau. même Ordre, aïent voulu fe divertir eux mêmes & de Malinis, divertir le lecteur; lorfqu'ils difent que la raifon pour forc. 9. laquelle les Carmes portoient anciennement des manteaux avec des barres blanches & tannées, ce qui leur Specul. avoit fait donner le nom de Barrés; c'eft que le Pro- melit. c. be phete Elie ayant été enlevé dans un char de feu, & ayant jetté fon manteau qui étoit blanc à fon disciple Elifée, ce qui toucha aux flammes devint roux, n'y ayant eu que ce qui étoit caché dans les plis & qui ne toucha pas au feu quirefta blanc.Si l'on en veut croire Didace Coria, le Prophete Abdias étoit du Tiers- Didac.Co Ordre des Carmes, auffi-bien que la Bifaïeule de Je-nual. delas fus Chrift, à laquelle il donne le nom de fainte Eme-berm. Ierrentienne. Si l'on vouloit, l'on feroit un gros recueil ceros de la de pareilles pensées, tirées des hiftoires & des anna- Carmele. les de l'Ordre des Carmes.

pro

ria, Ma

Beat. y

Ord. de

Mais ils ne font pas les feuls qui ont produit des hiftoriens amateurs des fables; l'Ordre de faint Dominique,fans parler de quelques autres,en a auffi duit, témoin le pere Louis d'Ureta qui a donné en efpagnol un roman pieux & divertissant sous le titre, d'hiftoire du facré Ordre des freres Précheurs dans le royaume d'Ethiopie: car comment penfer autrement Hift. del de cette histoire, lorfque l'on voit que cet auteur dit: Predica que le principal couvent de cette Province eft celui de dores, en la Plurimanos,qui a quatre ou cinq lieues de circuit:qu'il ya ordinairement dans ce couvent neuf mille religieux & trois mille domeftiques : que ces neuf mille

Tome Is

d

Orden de

Etiopia. G

pbid. c. 9.

ême re

Religieux mangent tous ensemble dans un même fectoire: que ce couvent contient quatre-vingts dortoirs, autant de cloîtres, autant d'Eglifes particulieres où les Religieux de chaque dortoir difent l'Office tous les jours, excepté les Fêtes & les Dimanches, qu'ils fe trouvent tous dans une grande Eglife commune à laquelle chaque dortoir répond: que le fonda teur de ce beau couvent, étoit un li grand Saint, que quand il vouloit dire la Meffe,un Ange defcendoit du Ciel pour la lui fervir, qu'il lui preparoit le pain & alloit tirer le vin: que ce Saint aïant chassé un Diable du corps d'une femme, il ordonna pour penitence à ce Diable de fervir dans le couvent pendant fept ans en qualité de valet: qu'on lui donna le nom de Malabeftia: que fon emploi étoit de fonner les cloches pour appeller les Religieux à l'Office; ce qui n'étoit pas une petite affaire, & il falloit être auffi adroit que Malabef tia, pour fonner en même tems les cloches dans quatre-vingts clochers; mais il ne faifoit pas paroîtremoins d'adrefle lorfqu'il falloit balaïer le Couvent c'est à-dire quatre-vingts dortoirs, autant de cloîtres, autant de cours & neuf mille cellules; car tout cela étoit balaïé en un inftant: tout ce qu'on lui comman doit étoit executé fur le champ; mais il y eut une cho fe à laquelle le pere Louis d'Ureta dit, d'un grand ferieux, que Malabeftia ne voulut point obeïr, c'est qu'on ne put jamais l'obliger à balaïer le chapitre à caufe que les Religieux y reconnoifloient leurs fautes devant le Superieur. Enfin il propose les Religieux de cette province d'Ethiopie comme des modeles d'humilité & de mortification; & il nous affure que du couvent de Plurimanos, de celui d'Alleluia, où il y a fept mille

Religieux, & de celui de Beningali, qui eft un monaftere de filles où il y a cinq mille Religieuses, il fort tous les matins de chacun de ces couvents, plus de trois mille Religieux & Religieufes qui vont balaïer les rues de la ville, & fervir de crocheteurs & porte-faix, quoique la plûpart foient enfans de Rois & de Princes.

C'est par le moïen de pareilles fables, que quelques Religieux ont cru relever la gloire de leurs Ordres; comme files grands fervices que ces Ordres ont rendus à l'Eglife, les perfonnes qui en font forties, & qui fe font rendues fi recommandables par leur picté, leur fcience, & les dignités qu'ils ont poffedées, ne fuffifoient pas pour en relever l'éclat. Mais nous les laifferons dans leurs pretentions, & je ne m'attacherai qu'à la verité. L'on ne doit pas s'etonner, fi je rapporte des vifions & des miracles qui ont donné lieu à l'établiffement de quelques uns de ces Ordres ; & qui ont été combattus par de fçavans écrivains aufquels d'autres fçavans ont répondu. Ce font des difficultés dont la difcuffion n'eft pas de mon dessein, je me suis feulement tenu à l'ancienne tradition appuyée fur de bons

auteurs.

J'ai mêlé parmi les Ordres tant ecclefiaftiques que militaires, ceux qui font fupprimés ou unis à d'autres, ne croyant pas devoir les feparer de ceux dont ils fuivoient la regle. Quoique mon dessein ait été de mettre ensemble tous les Ordres Religieux qui ont fuivi la même regle, j'ai cru neanmoins être obligé, en parlant de certains Ordres, de donner en même tems l'hiftoire de quelques autres Ordres,quoique de differentes regles, comme l'on remarquera, par exemple, dans la troifiéme partie, qui comprend tous les Or

dres qui fuivent la regle de faint Auguftin, où l'on trouvera cependant ceux des Theatins & des Barnabires, quoiqu'ils ne fuivent point cette regle; mais les Theatines de l'Ermitage y étant foumifes, je ne pouvois parler de ces Religieufes, fans parler en même tems des Theatins, & même des Theatines que l'on appelle de la Congregation pour les diftinguer des autres, & qui ne font que des filles feculieres, qui vivent en communauté. Il en eft de même des Religieufes Angeliques, qui font les filles fpirituelles des Barnabites, n'ayant pas pu parler de ces Religieufes fans parler auffi des Barnabites, ni même des Guastallines, qui compofent une congregation feculiere. L'on ne doit pas être auffi furpris, fi j'ai fait graver les habillemens de quelques Ordres fuppofés, tels que Schoonebeck & le pere Bonanni les ont donnés. Je ne l'ai fait que pour contenter ceux qui voudroient ajouter plus de foi à ce qu'ont dit ces auteurs touchant ces Ordres supposės, qu'à ce que j'ai avancé pour en montrer la fuppofition.

Le pere Bonanni dans fon catalogue des Ordres militaires, dit qu'il a fait graver les habillemens des chevaliers tels qu'ils doivent être, conformément à leurs regles; mais que pour ceux qui n'ont point d'habillemens particuliers il lesa fait reprefenter avec l'habillement que l'on portoit au tems de leur Inftitution dans les pays où ils ont été établis, ou en habit de foldatarmé pour aller en guerre. On ne s'apperçoit pas neanmoins que cela ait été fidellement executé; puifqu'il a habillé des François à l'allemande, & des Allemans à la françoife comme on peut remarquer dans la plupart de les figures, principalement dans celle qui reprefente un chevalier de faint Louis, dont l'Ordre

eft cependant recent en France; car ce chevalier a plus l'air d'un Suedois ou de quelqu'autre perfonne du Nord, que d'un François.

Mon deffein n'eft point de rapporter tous les privileges que les papes & les princes Souverains ont accor dés à plufieurs Ordres; il y en a neanmoins qui ont tant de rapport avec leurs hiftoires, que c'eft comme une neceflité d'en parler ; & quoique je ne veuille pas entrer dans le détail de la fondation de tous les couvens, je ne pourrai pas neanmoins m'empêcher de parler de quelques-uns des principaux & des plus confiderables, forfque l'occafion s'en prefentera.

Si l'on regarde l'état de la profeffion monaftique, où chaque regle forme un Ordre, & où il y a même des Ordres feparés & diftincts fous une même regle, il femble que je devois mettre au nombre des fondateurs d'Ordres tous ceux qui o..t écrit des regles; mais comme celles des anciens folitaires d'Orient que nous trouvons dans le code des regles, font depuis plufieurs fiécles confondues avec celle de faint Bafile, & qu'il nerefte plus aucune trace de leurs obfervances, non plus que de celles de plufieurs anciens peres d'Occident,qui ont été pareillement confondues avec celle de faint Benoît; c'est ce qui fait que je n'en parlerai qu'en peu de mots; mais je m'etendrai davantage fur les Ordres de faint Antoine, de faint Pachome & de faint Colomban; car l'on ne peut refuser à ces trois faints la qualité de fondateurs: le premier pour avoir étele pere des Religieux Cœnobites, y ayant encore plufieurs moines en Orient de differentes fectes qui fe difent tous de l'Ordre de faint Antoine, quoiqu'ils ne faivent point la regle que ce faint a laiffée par écrit, à

« PreviousContinue »