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REGLE avoit déja une églife dediée à faint Silveftre Moine de leur DES CAR- Ordre, & emporterent avec eux une copie du tableau de faint

MES.

Elie, titulaire de leur ancienne églife, dont ils n'avoient pu lever l'original qui étoit une peinture de plus de fix cens ans confumée de vieilleffe : ils firent mettre dans une chapelle de leur nouvelle églife, cette copie qui representoit le prophete Elie enveloppé dans un manteau rouge, avec une tunique de peau defcendant jufqu'aux genoux, ayant les pieds nuds, tenant à la main une épée, au haut de laquelle il y avoit une flâme, & ayant la tête couverte d'un bonnet rouge avec des galons d'or, comme on peut voir dans la figure que nous en donnons. Les Carmes n'eurent pas plûtôt vû ce tableau qu'ils en firent grand bruit. Ils fe plaignfrent d'abord aux Bafiliens de l'injure qu'ils faifoient à leur Ordre d'avoir ainfi expofé en public l'image de leur fondateur fans l'habit de Carme ; & voyant qu'ils n'avoient aucun égard à leurs plaintes, ils s'adrefferent à l'archevêque de Meffine, & le prierent d'employer fon autorité pour faire ôter ce tableau qui étoit fi injurieux à l'honneur de l'Ordre du Carmel. Les Bafiliens alleguoient qu'ils n'avoient rien innové, & qu'ils avoient feulement expofé à la devotion des fideles, une copie d'un tableau d'Elie, qui étoit depuis fix cens ans dans leur ancienne églife, & qu'au refte ils ne fouffriroient jamais que dans leur église l'on vît le prophete Elie habillé en Carme, ce qui pouvoit porter prejudice à l'antiquité de l'Ordre de faint Bafile.

L'archevêque de Meffine ayant rejetté les demandes des Carmes, ils eurent recours à Rome à la congregation des rites, à laquelle ils prefenterent une fupplique pour lui re. prefenter l'injure que les Bafiliens avoient faite à leur Ordre d'expofer dans leur églife le prophete Elie, leur pere & leur patriarche, avec un manteau & un bonnet rouge, comme fi c'étoit un bacha Turc ; & joignirent à cette fupplique un deffein colorié de ce tableau. La congregation des rites voulant contenter en quelque façon les Carmes, ordonna qu'on ôteroit ce tableau, & qu'on en mettroit un autre à la place reprefentant le même prophete ; mais qu'on ne lui donneroit pas l'habit de Carme. La difficulté fut de fçavoir quel habillement on lui donneroit. Les Carmes en donnerent de plufieurs façons qu'ils presenterent à la congregation,& qu'ils

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Le Prophete Elie

Tel qu'il est représenté dans l'Eglise du Convent des Religieux Basiliens de Troina en Sicile, de puis que le procez qu'ils ont eu avec les Carmes au sujet de l'habillem de ce Prophete,aete termine.

L

REGLE

appuyoient par des autorités de l'Ecriture-Sainte. Ils furent neanmoins tous rejettés,& elle approuva celui qui lui fut pre- DES CARfenté par les religieux Bafiliens, & qui consistoit en une tu- MES. nique de peau, une ceinture de cuir & un manteau de couleur de fafrand: ils ne lui donnerent point de bonnet ; mais ils avoient reprenté ce prophete ayant la tête & les pieds nuds. La congregation ordonna qu'il feroit ainfi peint & expofé dans l'églife des Bafiliens, & termina ainfi ce procès le 16. Mars 1686. après dix années de conteftations. Le pere Papebroch Papebroch dans fa reponfe au pere Sebaftien de faint Paul respons. ad n'a pas oublié de lui parler de ce procès, dont le recit lui avoit été fait à Rome par le pere dom Pierre Menniti procureur 16. general des religieux de l'Ordre de faint Bafile,& qui eft affez conforme à ce qui m'en a été dit auffi, étant à Rome en 1699. par le reverend pere dom Appollinaire d'Agrefta general de cet ordre.

Avant ce differend ils avoient renoncé à l'alliance avec les Bafiliens : c'eft pourquoi ils ont foin de retrancher du titre de leur regle, dans toutes les éditions qu'ils en font, qu'elle a été tirée des écrits de faint Bafile. Elle fut premierement approuvée par le pape Honorius III. l'an 1224. Mais après que les Carmes eurent paffé en Europe,& qu'ils y eurent fondé des couvents, ils trouverent qu'il y avoit dans cette regle quelques articles qui avoient befoin d'être corrigés & mitigés. Ils deputerent à cet effet deux religieux vers le pape Innocent IV. qui donna commiffion à Hugues cardinal de fainte Sabine, furnommé de faint Cher, de l'Ordre de faint Dominique, & à Guillaume évêque d'Antrada, ville de Syrie appellée prefentement Tortofe,pour examiner cette regle & faire telles corrections que bon leur fembleroit. Ces commiffaires jugerent à propos d'ajoûter au premier article, où il eft parlé de l'obéiffance que les freres doivent au prieur, qu'ils garderoient auffi la chasteté, & n'auroient rien en propre. Comme il n'y étoit point parlé des lieux où devoient être fitués leurs couvents, & que, comme ils étoient ermites, il y en avoit qui croyoient qu'ils ne pouvoient demeurer dans des folitudes; les commiffaires Apoftoliques, pour lever tous fcrupules, dirent qu'ils pouvoient avoir des couvents dans des folitudes & dans les autres lieux qui leur feroient offerts, pourvû que l'observance reguliere y pût

que

P. Sebaft. à
S.Paulo art

num

REGLE être gardée. Le patriarche Albert avoit défendu pour tou DES CAR- jours l'ufage de la viande, excepté dans le tems des maladies & d'extrême debilité: les commiffaires ôterent les mots de

MES.

toujours & d'extrême; & afin que les Carmes ne fuffent pas à charge à leurs hôtes, ils ordonnerent que dans les voyages ils pourroient manger des herbages cuits avec la viande ; & même manger dela viande étant fur mer. Ils prefcrivirent le filence feulement, depuis complies jufqu'à prime du jour fuivant. Ils leur permirent auffi de manger dans un refectoire commun, au lieu qu'auparavant ils devoient manger chacun feparément dans leurs cellules. Ils firent encore quelques reglemens touchant l'office divin, & leur accorderent la permiffion d'avoir des ânes ou des mulets, & de nourrir des animaux pour leur ufage. Cette regle avec ces corrections & mitigations, fut approuvée par Innocent IV. l'an 1247. & confiée dans la fuite par plufieurs papes. Elle fut encore mitigée par Eugene IV. & Pie II. qui y firent auffi des changemens, comme nous dirons en fon lieu. Ceux qui l'obfervent ainfimitigée font appellés conventuels, &ceux qui fuivent la regle avec les changemens & les mitigations qui y ont été faites par les commiffaires d'Innocent IV. font appellés obfervants. Les Carmes & les Carmelites déchauffés l'obfervent auffi. Et elle eft regardée dans l'Ordre comme la premiere & la primitive: ainfi s'il étoit vrai que Jean XLIV. évêque de Jerufalem, eût donné une regle aux Carmes, ou qu'ils euffent fuivi celle de faint Bafile, avant que d'avoir reçu celle du patriarche Albert; il s'enfuivroit que les Carmes & les Carmelites dechauffés, auffi-bien que les obfervants, ne fuivroient pas la regle premiere & primitive de l'Ordre.

La bulle d'Honorius III. de l'an 1224. par laquelle il approuve la regle des Carmes, eft la premiere de celles que les fouverains pontifes ont accordées en faveur de leur Ördre: cependant ils pretendent en avoir de plus anciennes, Silvera, 0-& Silvera entre les autres, dit, que les papes Etienne V. pufcul.var, qui vivoit l'an 816. Leon IV. l'an 847. Adrien II. l'an 868. op. 2. refol. Sergius III. l'an 908. Jean XI. l'an 931. & Alexandre II. l'an 1061. ont accordé par leurs bulles de grandes indulgences à ceux qui vifiteroient à certains jours de l'année les églifes des Carmes; lefquelles bulles furent confirmées par le pape

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