broch, au sujet de son differend avec les Carmes. Monfieur ORDRE du Cange lui écrivit au mois de Septembre 1682. pour l'en DES CAR remercier. Il lui marquoit dans sa lettre qu'il ne croyoit pas mes. que le pere Papebroch dût repondre aux libelles que l'on faisoit contre lui, & qu'il devoit negliger ces fortes d'invectives. Il faifoit l'éloge du travail immenfe des actes des saints; & après avoir parlé des pretentions des Carmes au sujet de leur antiquité, il difoit à Monfieur d'Herouval, que ces peres devoient plûtôt s'attacher à la verité, que non pas aller cher. cher des origines fabuleuses, comme faifoient les Grecs & les Romains, lorsqu'ils travailloient à l'histoire de leurs villes & de leurs provinces. Cette lettre de Monfieur du Cange ayant été divulguée, l'on y fit une reponse l'année suivante; l'on supposa que c'étoit Monfieur d'Herouval qui y repondoit, le nom de Monsieur du Cange étoit designé sous le titre de conseiller N. & l'on feignit que cette reponse étoit imprimée à Rome chez la Roche à l'enseigne de la verité, quoiqu'effectivement elle eût été imprimée à Liege. Il n'étoit pas necessaire que Monsieur d'Herouval se justifiat, & la desavouât, le style fai. soit assez connoître qu'elle n'étoit point de lui; il étoit trop ami de Monfieur du Cange, & ce qu'on y disoit contre lui ne pouvoit lui convenir, étant un des plus sçavans hommes de fon tems. L'auteur de cette reponse y a joint une pro. restation, où il dit, qu'il auroit bien voulu se dispenser de repondre à cette lettre, que le scandale qu'elle a causé ne lui permet pas de dissimuler ses sentimens, mais qu'il le fera avec toute la moderation possible. L'on peut juger de cette mode. ration, parce qu'il ajoûte ensuite: Après tout, quelque ridicule que foit le conseiller N. qui a fi mal écrit, & quelqu'indigne qu'il soit de ma reponse, je veux la lui faire, non parce qu'il le souhaite, (cette complaisance lui donneroit trop de fatisfaction) mais parce que je ne le crois pas de moindre condition que l'ane de Balaan à qui ce prophete voulut bien repondre. Fefpere neanmoins que le conseiller deviendra raisonnable, à moins de cela, je ne vois rien de plus juste que de le mener tout droit à l'étable, & de lui dire comme Daniel à Nabuchodonofor, votre demeure fera avec les bètes. Monfieur d'Herouval qui avoit meprisé cette mechante piece, donna neanmoins au mois de Decembre 1683. un certificat pardevant Notaires à Paris, Tome I, DES CAR MES. ORDRE qu'il n'y avoit eu aucune part, ni directement, ni indirecte ment, & l'envoya au P. Papebroch, ce qui mit dans la confusion ceux qui avoient abusé du nom de Monfieur d'Herouval. Cela n'empêcha pas neanmoins que l'année suivante les Carmes ne donnassent sous le nom emprunté de Pierre Fischer Francon, un libelle intitulé : Jefuiticum nihil Patri Papebrochio Jesuita, fuper ipfius cum Carmelitis quoadordinis illius histo riam, Controverfia, Carmeliticis fcriptis convicto & ad filentium redacto, demonßratum. Le neant Jefuitique dans la Controverse du P. Papebroch avec les Carmes,far l'histoire de leur Ordre,convaincu par les écrits des Carmes, reduit à garder le filence : où ils infererent la reponse supposée de Monfieur d'Herouval à la lettre de Monfieur du Cange avec quelques autres libellesqui avoient dėja paru. Comme on avoit rendu le P. Papebroch responsable de tout ce qui étoit dans les actes des saints, quoique ses confreres associés à ce grand ouvrage, y eussent aussi travaillé ; on lui en demanda compteen 1688. par le nouveau libelle qui parut sous ce titre: Debita Papebrochiana, five Palinodia cantata & cantande à Patre Daniele Papebrochio. Computo primo per D. J. S. Les debtes de Papebroch, ou les Palinodies que le pere Papebroch a déja chantées, & qu'il chantera. Premier compte arrèté par D. J. S. Il en parut un autre à peu près dans le même tems, sous le titre de Papebrochius Jefuita hiftoricus Conjecturalis bombardisans in altis Sanctorum, S.Lucam & fanc. tos Patres, S. Thomam, summos Pontifices, Cardinales, antiquas indulgentias & Bullas, Breviaria & veteres fundationes Monasticas, restinctus à Domino Chriftiano del Maré. Le feu du P. Papebroch Jefuite, Historien Conjectural bombardant dans les artes des Saints, S. Luc, les faints Peres, S. Thomas, les fouverains pontifes, les cardinaux, les anciennes indulgences & les bulles, les Breviaires & les anciennes fondations des couvents, éteint par Dom Chrétien del Maré. Il falloit bien que Monfieur de Launoi qui avoit écrit contre la bulle sabbatine, le scapulaire, & la vision du B. Simon Stok parût aussi sur le theatre. Les Carmes l'y firent monter la même année en donnant cet autre libelle: Epiftola informatoria ad Societatem Jefu, fuper erroribus Papebrochianis, five Hercules Commodianus Joannes Launoyus, repulfus ab admodum Reverendo patre Theophilo Rainaudo ejufdem Socie 4 tatis redivivus in patre Papebrochiano Jefuita commenta propria ORDRE titulo actorum Sanctorum evulgante. Lettre d'information adreffée DES CARà la Societé de Fefus, touchant les erreurs de Papebroch, ou l'Her-MES. cules Commodien, Jean de Launoi, revivant dans le P. Papebroch Jefuite, repoussé par le P. Theophile Raynaud de la mème Societé &c. Cette lettre est divisée en deux parties: on trouve dans la premiere un discours (fraternel, dit-on,) adressé a l'Ordre de la Societé de Jesus; mais qui est bien rempli de fiel & de bile; & dans la seconde partie il y a un autre discours adressé au pere Papebroch, que l'on represente comme un Hercule Commodien & sur lequel on fait tomber tous les coups que son confrere a portés à Monfieur de Launoi. Ce discours est fort satirique, & est suivi de seize demandes & reponses, dont voici quelques-unes. Quis Launoyus? Papebrochius procellofus & musca advolans ad exulcerata. An Launoyus Breviarii Romani impugnator? Papebrochius Breviarii dilacerator furentissimus. Num Launoyus mendax? Papebrochius mendax mendacissimus. An Launoyus,garrulus, inquietus, turbidus? Papebrochius instar feminæ garrulus, inftar Ismaëlis turbidus. Num Launoyus ignorans ? Papebrochius ftupidissimus & igno. rantissimus. Le pere Papebroch & ses confreres meprisant tous ces libelles, avoient gardé un grand filence, & travaillant plus utilement pour le public, ils donnerent la même année les deux derniers tomes du mois de Mai, qui avec deux autres qu'ils avoient donnés en 1685. le Propylæum du même mois, qui contient l'histoire chronologique des papes, & les trois premiers tomes qui avoient paru dès l'an 1680. faifoient en tout huit volumes du mois de Mai. Ils eurent à la verité une petite alarme la même année, lorsqu'ils virent que le pere Sebastien de saint Paul, provincial des Carmes de Flandres, quiavoit écrit en faveur de fon Ordre, avoirmis au commencement de son ouvrage une supplique adreffée au Pape Innocent XI. par laquelle il prioit ce pontife de terminer leur differend avec les Jesuites. Comme il avoit alle. gué beaucoup de choses contraires à la verité, les Jesuites se crurent obligés de prevenir les prelats de la cour de Rome; & le pere Jeanningh l'un des associés du pere Papebroch Ordre répondit aux faits allegués dans la supplique, pour justifier la DES CAR-conduite des continuateurs de Bollandus. Mais cette fup MES plique ne fut point presentée pour lors, elle avoit été impriimée à Francfort sans marquer l'année de l'impression, afin que quand on trouveroit l'occasion de la presenter au pape, elle parût toujours nouvelle. Elle fut même reimprimée à Venise quelque tems après, & en même tems proscrite par la republique, ce qui rassurale P. Papebroch & fes confreres. : Mais l'an 1690. les Carmes voyant que tout ce qu'ils avoient écrit contre le pere Papebroch, n'avoit pas pû l'obliger à se retracter de ce qu'il avoit avancé contre l'antiquité de leur Ordre, changerent de batterie ; & au lieu qu'auparavant ils avoient seulement défendu leur cause; ils devinrent les accusateurs & les denonciateurs du pere Papebroch qu'ils citerent au tribunal du Pape Innocent XII. l'accufant que les quatorze volumés des actes des Saints à la tête desquels fon nom se trouvoit, & qui comprenoient les mois de Mars, Avril & Mai, étoient remplis d'erreurs. Le pape en renvoya l'examen à la congregation de l'Index ; mais les Carmes croyant qu'ils auroient plus de credit en Espagne, y denoncerent aussi ces livres à l'inquisition de ce royaume, l'an 1691. & pendant que l'on travailloit à cette affaire, le pere Sebastien de saint Paul donna en 1693. un gros volume des erreurs dont il accusoit le pere Papebroch, sous le titre d'Expofitio errorum quos P. Daniel Papebrochius Soc. Jefu fuis in notis ad alta Sanctorum commifit, &c. Le pere Sebastien de saint Paul pretendoit en avoir trouvé deux mille, dont les principales étoient d'avoir avancé qu'il ne paroissoit pas que Notre-Seigneur Jesus. Christ eût fait profession de la pauvreté évangelique avant qu'il l'eût enseignée: d'avoir suivi le sentiment du P. Alexandre Dominicain, dont les livres ont été condamnés par l'église, en regardant comme supposés les actes de saint Silvestre, & comme fable le baptême de l'empereur Constantin par ce pontife: d'avoir été de l'opinion de Luther, en assurant que la donation du même empereur est une piece supposée : d'avoir douté que la fainte face de Notre-Seigneur Jesus-Christ eût été imprimée sur le mouchoir de sainte Veronique, & d'avoir même douté aussi qu'il y eût une Sainte de ce nom : de foûtenir que faint Pierre n'a été que quinze ans à Rome: d'avoir ravi à l'église d'Anvers l'honneur d'avoir le Pre-ORDRE puce de Jesus-Christ: d'avoir aussi suivi le sentiment du pere DES CARAlexandre, qui prétend que Jesus-Christ a vêeu trente sept MES. ans: d'avoir nié avec le même historien & les heretiques, que le droit que les électeurs de l'empire ont d'elire un empereur, leur ait été donné par le faint Siege: d'avoir encore foutenu avec le même pere Alexandre, que le pape Nicolas premier s'étoit trompé en recevant & approuvaut les actes du concile de Sinuesse: d'avoir dit avec les heretiques, que les actes de ce concile étoient faux & fupposés: d'avoir dit aussi avec Monfieur de Launoi, qu'il ne falloit point ajoûter foi à la bulle Sabbatine de Jean XXII. d'avoir donné des louanges à Monfieur de Launoi, au pere Alexandre, à Monfieur de Marca, au chevalier Marsham à Gerard Voffius, à Claude Saumaise, & autres sçavans, dont il avoit suivi les sentiments: de n'avoir pas mis dans fon Propyleum du mois de Mai, l'année de l'impression: d'avoir nie contre l'autorité de l'Ecriture - Sainte , que le Mont-Carmel fût anciennement un lieu de devotion: d'avoir regardé comme fable tout ce que l'on dit du prophete Elie, & qui n'est point marqué dans la Sainte-Ecriture: d'avoir nic que les Carmes eussent eu ce prophete pour fondateur: d'avoir nié que les Carmes eussent assisté aux conciles qui se font tenus depuis l'an 448. & d'avoir nié aussi que ces peres eussent eu des couvents en Europe avant le quatorziéme fiecle. L'affaire alla plus vite en Espagne qu'à Rome, & l'on fut étonné d'y voir paroître le 14. de Novembre 1659. un decret de l'inquisition, portant condamnation des quatorze volumes des actes des saints des mois de Mars, Avril & Mai; parce qu'ils contenoient plusieurs propositions erronées, heretiques, sentants l'herefie, perilleuses dans la foi, scandaleuses, impies, offenfants les oreilles pieuses, fchifmatiques, feditieuses, temeraires, presomptueuses, offenfants plufieurs fouverains pontifes, le saint siege, la facrée congregation des rites, le breviaire, & le martyrologe Romain, meprifants l'excellence de quelques faints & plusieurs écrivains, peu respectueuses à l'égard de plusieurs faints peres, & de de très-graves auteurs; & parce qu'ils contenoient aussi des propositions offenfants l'état Religieux, plusieurs Ordres, O o iij L : |