DE S. LA mencemens, se voyant extremêment riches, s'étoient d'abord CHEVAsoustraits de la jurifdiction de l'abbé du Monastere de la La-LIERS DE tine, & avoient obtenu des bulles du pape, qui les exenitoit 'ORDRE aussi de celle du patriarche de Jerufalem: Sic ergo de tam mo- ZAR.. dico incrementum habentes, præditæ domus fratres,prius à jurifdiftione se substraxerunt Abbatis :de indè multiplicatis in immenfum divitiis, per Ecclefiam Romanam à manu & potestate Domini patriarchæ funt emancipati. Ce n'est uniquement que des chevaliers de saint Jean de Jerufalem dont cet auteur parle, d'où l'on doit conclure que c'est sans aucun fondement que M. Maimbourg qui cite même Guillaume de Tyr, a avancé queles chevaliers de faint Jean de Jerufalem & ceux de faint Lazare, avoient été unis, & n'avoient fait pendant un tems qu'un même Ordre. Il est vrai que le grand-maître Raymond du Pui, de l'Ordre de saint Jean de Jerufalem, changea le titre de fon hôpital qui avoit été dedié à saint Jean l'Aumônier en celui de faint Jean-Baptiste, qu'il prit pour protecteur de fon Ordre, ayant voulu imiter la penitence de ce precurseur du Sauveur du monde, & l'ayant proposé pour modelle à ces chevaliers. C'est peut-être ce qui a donné lieu à M. Maimbourg, de croire qu'il avoit bâti à Jerufalem un troifiéme hôpital sous ce nom, comptant apparemment pour le premier de ceux qui étoient en cette ville, celui de faint Jean l'Aumônier proche le Monastere de fainte Marie de la Latine, & pour le second celui que les Allemands avoient fait bâtir sous le titre de Notre-Dame des Allemands ou des Teu tons. Quant à ce frere Boyant Roger, que le même auteur dit, qu'on élut à la pluralité des voix pour grand-maître des hospitaliers après la mort du B. Gerard; je ne sçai fi les chevaliers de saint Lazare le mettent au nombre de leurs grandsmaîtres; mais quoique Bosio dans son histoire de l'Ordre des chevaliers de faint Jean de Jerusalem, ait dit que ce frere Boyant Roger fut élu pour grand maître de cet Ordre après la mort du B. Gerard, il ne se trouve pas neanmoins au nombre des grands-maîtres, dont le commandeur Naberat Geronim. nous a donné un abregé des vies dans les privileges de cetrit. Ordre qu'il a recueillis. Le commandeur Maruli dans les Grand. vies des mêmes grands-Maîtres, mais plus amples que celles Malia. Maruli. de Maëft. Ni CHEVA-que Naberat avoit données, n'y met point aussi ce Boyant LIERS DE Roger. Il avoue bien qu'il en est fait mention dansune donaL'ORDRE tion de l'an 1120. que firà l'Ordre de saint Jean de Jerufalem DE S. LA- Otton comte d'Abruzze, où il declare avoir fait ce Roger ZARL. gouverneur de l'hôpital de faint Jean de Jerufalem; mais le commandeur Maruli pretend que l'on ne doit pas conclurre de là, que ce Roger ait été recteur ou prefet de l'hôpital, qui sont des titres qui ne conviennent qu'à un superieur & non pas celui de gouverneur, & qu'il se peut faire qu'il ait été établi gouverneur de l'hôpital en l'absence de Raymond du Pui qui fucceda à Gerard: d'autant plus qu'il n'y a aucun titre dans la chancellerie de l'Ordre où il soit parlé de ce Roger en qualité de superieur ou de maître. D'ailleurs s'il étoit vrai que les chevaliers de saint Jean de Jerufalem & de faint Lazare, ne se fussent separés qu'après l'élection de ce frere Boyant Roger, il s'enfuivroit que cette separation n'auroit été faite qu'après l'an 1120. puisqu'il eft fait mention de ce Roger en qualité de gouverneur de l'hôpital de faint Jean de Jerufalem dans la donation du comte d'Abruzze dont nous avons parlé, ce qui est contraire aux pretentions de M. de Guenegaud ci-devant chancelier de l'Ordre de faint Lazare, qui dansun de ses factums con. tre Monfieur le Marquis de Dangeau grand-maître de cet Ordre, s'est déja declaré en faveur de l'union des deux Ordres de faint Jean & de faint Lazare de Jerufalem, & dit qu'ils furent separés dans le onzième siecle. Peut-être que Monfieur de Guenegaud dans l'histoire de son Ordre qu'il promet de donner au public, & qui n'a rien épargné pour recouvrer les titres de cet Ordre, apportera des témoignages plus convaincans que ceux que M. Maimbourg a donnés pour prouver l'union de ces deux Ordres de saint Jean & de S. Lazare de Jerufalem. > En attendant les éclaircissemens que nous donnera cette histoire de Monfieur de Guenegaud, ce que l'on peut dire de plus certain touchant les chevaliers de saint Lazare, c'est qu'ils ont commencé d'abord par exercer la charité envers • les pauvres lepreux dans des hôpitaux destinez pour les recevoir, qu'ils prenoient le nomd hofpitaliers, & que dans la fuite, à l'exemple des autres hospitaliers, il y en eut une partie qui prit les armes pour le service des princes Chrétiens qui conquirent la Terre-Sainte, fans abandonner pour cela CHEVA l'hospitalité, ce qui ne peut être arrivé que dans le douzié-LIERS DE me fiecle. L'ORDRE Ils recevoient même dansleur Ordre des lepreux, appa-D remment pour avoir soin des autres lepreux, qui se retiroient volontairement dans leurs hôpitaux, ou que l'on obligeoit par force d'y entrer ; & ce qui est remarquable, c'est qu'ils ne pouvoient élire pour grand-maître qu'un chevalier lepreux de l'hôpital de Jerufalem, ce qui a duré jusque sous le pontificat d'Innocent IV. c'est-à-dire versl'an 1253. qu'ayant été obligés d'abandonner la Syrie, ils s'adresserent à ce pontife, & lui remontrerent qu'ayant toujours élu pour leur grand - maître depuis leur institution, un chevalier le. preux, ils se trouvoient dans l'impossibilité d'en élire un; parce que les infidelles avoient tué tous les chevaliers lepreux de leur hôpital de Jerufalem. C'est pourquoi ils prierent ce pontife de leur permettre d'élire à l'avenir pour grand-maître un chevalier qui ne fût pas attaqué du mal de lepre, & qui fût en bonne santé, & le pape les renvoya à l'évêque de Frescati, pour qu'il leur accordât cette permission après avoir examiné si cela se pouvoit faire felon Dieu. C'est ce qui est rapporté par le pape Pie IV. dans sa bulle de l'an 1565. fi étendue & fi favorable à l'Ordre de saint Lazare, par laquelle il renouvelle tous les privileges & toutes les graces que ses predecesseurs lui ont accordées, & lui en donne de nouvelles. Voici comme il parle de l'élection que les chevaliers de cet Ordre devoient faire d'un grand-maître lepreux : Et Inno- Bull. Rom. centius IV. per eam accepto,quod licet de antiqua, approbata, & Tom. 2. Const. 95. eatenus pacifice obfervata Confuetudine obtentum effet, ut miles Piil V.9.41. leprofus domus fancti Lazari Hyerofolimitani in ejus Magistrum affumeretur: Verum quia fcre omnes Milites leprofi diftæ domús ab inimicis fidei miferabiliter interfecti fuerant, & hujufmodi confuetudo nequibat commode obfervari : Idcirco tunc epifcopo Tusculano per quasdam commiferat, ut fi fibi fecundum Deum vifum foret expedire, Fratribus ipfis licentiam, aliquem Militem fanum, & Fratribus præditæ domus fancti Lazari in ejus Magiftrum (nonobstante confuetudine hujufmodi ) de cætero eligendi authoritate Apoftolica concederet. Les chevaliers qui n'étoient point lepreux, & qui étoient en état de porter les armes, rendirent de signalés services aux CHIVA- princes Chrétiens dans la Palestine, ce qui obligea les rois LIERS DE Baudouin II. Fouques, Amauri III. & IV. & les reines MeL'ORDRE lisinde & Theodore, à prendre leur Ordre sous leur protec DE S. LA ZARE. tion, & à faire beaucoup de bien aux maisons qu'ils avoient dansla Syrie. Ils reçurent aussi plusieurs privileges des fouverains pontifes, & étant passes en Europe, les princes leur donnerent de riches possessions. Clement IV. ordonna sous peine d'excommunication à tous les prelats de l'église, que lorsque les chevaliers de S. Lazare s'adresseroient à eux pour obliger les lepreux de se retirer dans leurs hôpitaux, ils eussent à donner main-forte à ces chevaliers, & à contraindre les lepreux de se retirer chez eux avec leurs biens meubles &immeubles. Alexandre IV. par une bulle de l'an 1255. leur permit de suivre la regle de S. Augustin qu'ils afssuroient avoir suivie jusqu'alors, comme il est marqué dans la bulle de ce pontife, où il n'est point fait mention de la regle de S. Bafile, ce qui fait voir que c'est sans raison que quelques-uns disent qu'ils ont autrefois suivi la regle de saint Basile. Le même pape les mit sous la protection du faint Siege l'an 1257. & confirma les donations que l'empereur Frideric II. leur avoit faites dans la Sicile, la Pouille, la Calabre & quelques autres provinces. Henri roi d'Angleterre, duc d'Anjou & de Normandie, Thibaut comte de Blois & plusieurs autres augmenterent leurs revenus. Mais de tous les princes Chrétiens il n'y en a point dont ces chevaliers ayent reçu de plus grands bienfaits que des rois de France; car ayant été chassés de la Terre-Sainte l'an 1253. ils suivirent le roi saint Louis, qui en reconnoissance des services qu'ils lui avoient rendus en Orient, confirma les donations que ses predecesseurs leur avoient faites, les mit en possession de plusieurs maisons, commanderies & hôpitaux que ce prince fonda, & leur accorda plusieurs privileges. Pour lors ils établirent le chef de leur Ordre à Boigni près d'Orleans, qui leur avoit été donné dès l'an 1154. par Louis VII, dit le jeune, & le grand-maître prit le titre de grandmaître de l'Ordre de saint Lazare, tant deçà, que delà les mers, sa jurifdiction s'étendant, non seulement sur les che. valiers qui étoient en France, mais même sur tous les étrangers. C'est pourquoi Jean de Couras, qui avoit été pourvû de cette charge l'an 1342. par Philippes de Valois, donna pouvoir ZARE. pouvoir l'an 1354. à frere Jean Hallidei Ecossois, de gouver- CHEVA ner en fon nom, tant au spirituel qu'au temporel, tout CELIERS DE qui appartenoit à l'Ordre en Angleterre & en Ecosse, à la L'ORDRE charge de faire tenir par chacun an à la grande commande-DE S. LA rie de Boigni trente marcs sterlins d'argent. Le roi Charles V. furnommé le Sage, ayant pourvû de la grande-maîtri. se l'an 1377. Jacques de Beynes, ce grand-maître donna à frere Dominique de saint Roi, la commanderie de Seringon en Hongrie, & l'établit son vicaire general dans tout ce royaume, avec obligation de se trouver aux chapitres generaux à Boigni, & d'y apporter quatre marcs d'argent fin. L'on trouve un F. P. Potier dit Conflans, prêtre de cet Ordre, commandeur de la Lande-Daron, mort en 1450. qui prenoit la qualité de vicaire general du grand-maître G. Desmares. La grande-maîtrise fut encore donnée par Charles VII. à Pierre Ruaux l'an 1441 & par Louis XI. à Jean Cornu l'an 1481. Mais comme les lepreux étoient rares, & que l'on voyoit peu de personnes attaquées de cette maladie, il semble que ces chevaliers hofpitaliers, qui d'ailleurs s'étoient beaucoup relâchés de leur premierinstitut, principalement ceux d'Italie, étoient devenus inutiles: c'est ce qui obligea le pape Innocent VIII. de supprimer leur Ordre & de l'unir avec tous les biens qui lui appartenoient à l'ordre de saint Jean de Jerufalem, par une bulle de l'an 1490. Mais cette bulle ne fur point reçue en France, où il y a toujours eu des grands maîtres del'Ordre de saint Lazare de Jerufalem, qui ont reçu des chevaliers ausquels ils ont conferé les commanderies qui en dépendent, & ont toûjours été maintenus dans ce droit. Le grand-prieur d'Aquitaine de l'Ordre de saint Jean de Jerufalem ayant pourvû un de ses chevaliers de la commanderie de saint Thomas de Fontenai appartenant à l'Ordre de saint Lazare, le grand-maître de cet Ordre & fes chevaliers s'y opposerent. Il y eut à ce sujet procès au parlement de Paris, qui fut decidé l'an 1547. en faveur du grand-maître de l'Ordre de saint Lazare, qui fut maintenu dans le droit de conferer toutes les commanderies de fon Ordre à ses chevaliers, & les chevaliers de saint Jean de Jerusalem furent déboutés de leurs prétentions. Le roi Louis XII, donna la grande-maîtrise à Aignan de Mareuil. Son frere, Tome I. LI |