MOINES TES. Enfin il quitta la Syrie, & avec vingt de ses Moines, il vint ACE'M E-à Constantinople, où il fonda un Monaftere près de l'église de faint Menne. En peu de tems il y eut jusqu'à trois cens Moines de diverses langues, Grecs, Latins & Syriens, tous Catholiques,& dont plusieurs avoient demeuré dans d'autres Monafteres. Il les divisa en fix chœurs qui chantoient l'office tour à tour se succedant les uns aux autres; de forte que Dieu étoit loué dans ce Monastere à toutes les heures du jour & de la nuit. Delà leur vint le nom d'Acémetes, qui signifie en grec des veillans, ou gens qui ne dorment point, parce qu'il y avoit toujours une partie de la communauté qui veilloit. Comme ils ne travailloient point, & n'avoient point d'autres biens que leurs livres, on admiroit comment ils pouvoient fubfifter: c'est pourquoi on les foupçonna d'être de la secte des Messaliens. Alexandre fut arrêté par deux fois, on voulut l'obliger à interrompre sa psalmodie, on renvoya fes disciples à leurs premiers Monafteres: ensuite on le mit en liberté croyant qu'il demeureroit seul; mais le jour même qu'il for. tit de prison, ses Moines le joignirent, & ils recommencerent leur pfalmodie. Il s'en alla avec eux vers l'embouchure du pont Euxin & il y fonda un Monastere où il mourut vers l'an 430. La reputation de faint Alexandre avoit attiré à Constan-nople faint Marcel, & il entra dans sa communauté, où il fit un grand progrès dans la perfection, enforte que prévoyant qu'on l'éliroit abbé après la mort de ce Saint, il fortit & alla visiter les autres Monasteres, d'où il ne revint qu'après l'életion del'abbé Jean, qui transfera sa communauté à une demie lieue de Constantinople dans un lieu appellé Gomon, & y fonda une maison qui fut depuis appellée le grand Monaftere des Acémetes. Ils le nommerent aussi Irenarion; c'est-à-dire, paisible, à cause de la tranquilité & de la liberté qu'ils y trouverent plus grande qu'à Constantinople, où la nouveauté de leur institut leur avoit attiré beaucoup de contradictions & de trouble. Mais l'abbé Jean étant mort peu de tems après, Marcel fut élevé en sa place, & il lui vint un fi grand nombre de difciples qu'il fallut augmenter de beaucoup les bâtimens du Monaftere. La providence divine le secourut dans cebefoin; car un homme très-riche nommé Pharetrius, se vint donner donner à lui avec ses enfans qui étoient encore fort jeunes. Le MOINES Saint les revêtit tous de l'habit religieux & employa leurs ri- ACE'MEchesses à l'usage de la communauté. Il bâtit une maison pour Tes. recevoir les malades & les personnes du dehors. Sa commu. nauté devint un seminaire d'excellens hommes. Ceux qui bâtissoient des Monasteres ou des églises,lui demandoient de ses disciples pour mettre dans ces lieux saints. Il étoit prêtre & abbé dès le tems du concile tenu à Constantinople l'an 448. comme il paroît par l'action quatrième du concile general de Calcedoine, & par deux lettres de Theodoret qui releve fort sa pieté & fon zele pour la foi. Il mourut vers l'an 485. après avoir été plus de foixante ans Religieux. Quelques-uns ont cru, après Nicephore, qu'il avoit été le fondateur des Acémetes; mais il n'en a été, comme nous avons dit, que le restaurateur & le propagateur. Ce fut du tems de S. Marcel, qu'un grand seigneur nommé Studius qui avoit été conful, fonda à Conftantinople un Monastere sous l'invocation de faint Jean-Baptiste, & y mit des Religieux qui furent tirés de Gomon. Ainfi les Acemetes retournerent dans cette ville imperiale l'an 463. ce qui fit qu'on les appella aussi Studites, du nom de ce Monaftere de Studius qui étoit à l'extrémité de Constantinople vers la porte dorée. On dit qu'il fut habité de mille Moines, & les lettres & la pieté y fleurirent beaucoup. S. Theodore, S. Nicolas, saint Platon & d'autres saints Religieux, ont été nommés Studites à cause qu'ils avoient demeuré dans ce Monaftere. Cet institut fut aussi introduit dans les Monafteres de S. Die, de S. Baffien & de plusieurs autres. L'on fonda même dans la suite, un autre Monastere à Constantinople sous le titre de saint Die, & il y en eut encore un troisieme qui étoit fort grand & fort spatieux. Ces religieux Acémetes s'opposerent avec beaucoup de generosité à Acace patriarche de Constantinople que fon ambition avoit revolté contre l'Eglife, en prenant le parti de l'heresiarque Eutychés vers l'an 484. mais dans le siecle suivant ils ne furent pas fi fideles. Ils donnerent dans les queftions du tems qui agitoient alors tout l'Orient & qui avoient si fort échauffé les esprits : de sorte que sous prétexte de dé. fendre la foi Catholique, ils s'engagerent dans les sentimens de l'impie Nestorius. L'empereur Justinien zelé défenseur de Tome I. Hh TES. MOINES la foi Catholique les fit condamner à Conftantinople. Ils cru ACE'ME- rent qu'ils feroient mieux traités à Rome, où ils envoyerent deux de leurs Moines vers le pape Jean II. sçavoir Cirus & Eulogius pour défendre leur opinion, & même en obtenir l'approbation du S. Siege. Leur erreur consistoit à nier qu'une des personnes de la Trinité eût souffert en sa chair, & que la Ste Vierge fût proprement & veritablement la Mere de Dieu. L'empereur de fon côté envoya à Rome Hypotius évêque d'Ephese, & Démétrius de Philippes, pour confulter le faint Siege sur ces questions, & pour lui exposer sa foi & celle de l'église d'Orient dont il demandoit l'approbation. La lettre de l'empereur est datée de l'an 533. & le pape, après l'avoir reçue & écouté ses ambassadeurs, approuva la confession de l'empereur contenue dans sa lettre, comme aussi l'édit qu'il avoit fait touchant ce qu'on devoit croire fur ces opinions,& qu'il avoit fait publier avant le départ de ses ambassadeurs. Comme ces Moines Acémetes perfistoient toûjours dans leurs erreurs, il les excommunia; & dans une autre lettre que le même pape écrivit l'année suivante aux fenateurs Avienus, Liberius & quelques autres, où il leur expose les questions qui lui avoient été proposées par l'empereur, & qu'il approuve comme très-Catholiques; il lesavertit en même tems qu'ils ne doivent pas communiquer avec ces MoinesAcémetes qui étoient de sentiment contraire. Cet Ordre a été entierement aboli dans la suite. Il y avoit aussides Religieuses du même institut, & il en restoit encore un Monastere à Constantinople lorsque les Turcs s'emparerent de cette ville. Leur habillement auffi-bien que celui des Religieux, étoit d'une étoffe verte, & ils avoient sur la poitrine une double croix rouge. C'est ainsi que les a representés Schoonebeck ; & le P. Bonannia fait graver seulement l'habillement des Religieuses ausquelles il ne donne point de croix. Je ne sçai si c'est de ces Acemétes ou Studites, qu'Abraham Bruin, Joffe Amanus & Michel Colyn ont voulu parler lorsqu'ils ont donne, il y a près de cent quarante ans, l'habillement d'un Religieux de l'Ordre de Constantinople, semblable à celui des Religieux Acémetes que Schoonebeck a grave; car ils n'ont point dit quel étoit cet Ordre de Constantinople. Adrien Damman dans les commentaires qu'il a faits sur les figures d'Abraham Bruin, dit que ces Religieux avoient des manteaux rouges, |