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GRICS

eft pendant la Meffe fans cuculle & a les pieds nuds. On lui fait MO1N1 les mêmes interrogations qu'au petit habit, l'inftruction ou exhortation eft plus longue auffi-bien que les prieres que l'on chante. On lui coupe encore les cheveux avec les mêmes ce. remonies, on lui donne les mêmes habillemens; & ce qu'on y ajoûte de plus, eft un anable que le fuperieur lui donne,en difant: Notre frere N. reçoit l'anable, au nom du Pere, du Fils, & du faint Efprit, & prenant la croix fur fes épaules & fuivant Jefus-Chrift; difons pour lui que le Seigneur lui faffe mifericorde. Cet anable confifte en un morceau d'étoffe quarré de la largeur d'un palme que l'on attache fur les épaules avec des cordons coufus aux quatre coins, & dans lefquels on paffe les bras. La croix & les autres marques de la Paffion de NotreSeigneur y font reprefentés, ou bien une grande croix au milieu,& quatre petites à fes côtés avec ces lettres IC. XC. NC. Jefus-Chriftus Vincit. Le P. Goard qui rapporte toutes ces ceremonies dans fon Euchologe des Grecs, a néanmoins donné un office du petit habit, dont l'original eft dans le Monastere de Grotta-Ferrata, par lequel il paroît que l'on donne aussi l'anable à ceux qui reçoivent le petit habit. Ils le portent or dinairement fous la tunique, & y attachent une croix de bois qui pend pardevant. La cuculle de ceux qui ont le grand habit eft differente de ceux qui n'ont que le petit habit, en ce que celle du grand habit couvre les épaules pardevant & par derriere, ayant un capuce pointu & cinq croix de ruban de laine qui y font attachées, l'une fur le front, une fur la poitrine, une autre par derriere, & deux fur les épaules. Celui qui a été revêtu de cet habit ne doit point fortir de l'Eglife pendant fept jours. Il a permiffion d'entrer dans le Sanctuaire, quoiqu'il ne foit pas dans les Ordres facrés, & au huitiéme jour on lui ôte dans le Sanctuaire la cuculle & les autres habits, qui pourroient l'empêcher de travailler, ce qui fe fait en recitant plufieurs oraifons. Tant ceux du petit habit, que ceux du grand & angelique habit, laiffent croître leurs cheveux. Il y a même de ces derniers qui croyent que c'eft une plus grande perfection de ne raccommoder jamais leurs habits, de ne point couper leurs ongles, ni laver leurs

mains.

Les ceremonies que nous venons de décrire s'observoient autrefois exactement, il fe peut faire qu'elles foient encore

A a iij

GRECS.

MOINES en pratique dans quelques Monafteres bien reglés; mais comme il s'en trouve peu prefentement, fi ce n'eft au mont Athos, & que dans ces couvents peu reglés, la plupart des fuperieurs & des religieux font fort ignorans, & prefque tous heretiques & fchifmatiques, ils ne les obfervent pas fi exactement. On en voit peu qui foient revêtus du petit & du grand & angelique habit, & ceux que l'on voit ordinaire. ment dans le Levant n'ont pour tout habillement qu'un doliman ou vefte de couleur minime qui defcend jufqu'à la cheville du pied. Ce doliman eft ferre d'une ceinture de toile brune qui fait plufieurs tours autour du corps, & pardessus ce doliman ils ont une autre vefte, ou tunique qui a les manches mediocrement larges. Cette veste ne se ferme jamais, quoiqu'il y ait quantité de petits boutons depuis le haut jus qu'en bas, elle defcend feulement jufqu'à la moitié des jambes. Pardeffous ces habits ils portent des chemifes de toile dont les manches qui font ouvertes par le bas defcendent auffi-bien que le doliman jufqu'au poignet, & un caleçon de toile en été, ou de drap en hiver, qui leur tombe, en faisant beaucoup de plis,jufqu'à la cheville du pied. Ils ont des chauffons de maroquin violet attachés à ce caleçon, & ont pour chauffure des babouches ou pentoufles qui fe terminent en pointe, comme portent tous les Levantins, aufquelles il n'y a. ni talons ni quartiers. Ils ne portent point la cuculle ou voile dont nous avons parlé, comme on peut voir dans la figure que nous avons fait graver fur un deffein qui m'a été envoyé d'Alep, & c'eft proprement l'habit des novices. C'est pourquoi nous l'avons mife la premiere des trois que nous donnons, & qui reprefentent les differens habillemens des religieux Grecs, fuivant les trois états de novices, de parfaits, & de plus parfaits.

Tous les Religieux travaillent au bien du Monaftere pendant qu'ils y demeurent. Les uns ont le foin des fruits, les autres des grains, les autres des troupeaux, & generalement de tout ce qui peut appartenir au couvent. Ils fe fervent en cela du fecours de leurs novices, qu'ils employent durant leur noviciat plus fouvent à la campagne, qu'aux exercices de la meditation & de la retraite fpirituelle, à quoi ils ne s'appli quent gueres, non plus qu'à l'étude; ce qui fait que ces Caloyers font extremement groffiers & ignorans. A peine en

trouve-t-on dans les plus grands couvents qui entendent Moist quelque chofe du Grec litteral, dans lequel font écrits tous GRECS, leurs offices & toutes leurs prieres.

La neceffité que ces Caloyers ont de cultiver eux-mêmes leurs terres, leur font recevoir quantité de freres laïcs. II n'y a gueres de couvents qui n'en ayent pour le moins autant que de Religieux destinés pour le chœur. Ces freres font prefque tout le jour à la campagne, & ne reviennent que le foir à la maifon, où, nonobftant la fatigue de leur travail, ils ne laiffent pas d'affifter à une longue priere & d'y faire quan, tité de genuflexions, qu'ils appellent Metanai, c'est-à-dire, inclinations jufqu'à terre, après quoi s'étant contentés d'un fouper fort leger, ils vont fe repofer de leurs peines fur un lit qui n'eft gueres moins dur que du bois, en attendant que la priere du matin foit fonnée, & que le point du jour les rap, pelle à leur travail.

Sur tous ces Religieux il y a des vifiteurs ou exarques,dont nous avons décrit les fonctions dans le dernier paragraphe de la differtation préliminaire. Ils n'entreprennent la vifite des couvents qui leur font foumis, que pour en tirer la fomme d'argent que le patriarche leur demande ; & ces pauvres Caloyers ont beau travailler, fatiguer & faire fuer leurs freres laïcs, ils ont toujours beaucoup de peine à amaffer quelque chofe, foit pour la communauté, foit pour leur particu lier; d'autant que leur patriarche leur envoye fouvent ces fortes de vifiteurs pour les décharger de ce qu'ils ont de meil leur. Nonobftant toutes ces taxes que les religieux Grecs font obligés de payer, tant à leur patriarche qu'aux Turcs il ne laiffe pas d'y avoir des couvents bien rentés, & des Religieux affez riches en leur particulier., pour ofer quelquefois encherir fur le patriarche même, & s'emparer du siege à force d'argent.

Les Egumenes ou fuperieurs des Monafteres font forg eftimés & refpectés des Religieux, principalement dans les grands Monafteres ou couvents bien reglés, car dans les petits où il y a quelques autres anciens Religieux,ils ne font fi abfolus. Ils ont quelquefois même affez de peine à fe faire obéir; fur-tout lorsqu'ils enjoignent quelques penitences qui ne confiftent qu'à faire plufieurs genuflexions & à jeûner quelquefois, car pour d'autres peines les fuperieurs

.pas

MOINIS n'ofent pas même feulement en parler. Ils craindroient qu'en GRICE. menaçant un Religieux de quelque châtiment, ils ne lui donnaffent lieu de s'en exemter pour toûjours en proferant quelques paroles, ou bien en levant feulement la main vers le Ciel pour fe faire Turc. Ainfi la crainte que les fuperieurs ont de perdre tout-à-fait les gens en voulant les châtier un peu rudement, fait que toutes les penitences que l'on donne font toutes legeres ou volontaires, à moins que l'on ne trouve un sujet tout-à-fait foumis, qui fe porte lui-même à recevoir de bon cœur tout ce que l'on voudra lui impofer de plus rude.

Après que le fuperieur a été élû par les Religieux, il doit être confirmé par l'évêque, ce qui fe fait de cette maniere. L'évêque vient au Monaftere, où, après avoir recité quelques prieres,les Religieux lui prefentent celui qui a été élû,en lui difant: Le Reverendiffime prêtre Moine N. élú eft présenté pour être confirmé & établi fupérieur de ce venerable Monaftere. N. L'évêque lui mettant la main fur la tête dit une oraison: on chante enfuite quelques antiennes, après lefquelles on fait affeoir le nouveau élû au milieu de l'Eglife, on lui ôte fon manteau, on lui en donne un neuf: l'évêque dit: Le ferviteur de Dieu eft mis fur le fiege, & fait fuperieur & pasteur de ce venerable Monaftere. N. Les Religieux le levent enfuite de fon fiege en difant trois fois : Il eft digne. L'évêque l'embraffe, & les Religieux en font de même; & l'évêque en lui mettant en main le bâton pastoral, lui dit: Recevez ce bâton qui vous doit fervir d'appui pour gouverner votre troupeau, par e que Dieu vous en demandera compte au jour du Jugement. On fouhaite enfin plufieurs années au pontife & au fuperieur, & on commence la Meffe.

Nous ajoûterons encore une ceremonie qui s'observe aux enterremens des religieux Grecs. Comme après leur mort on doit laver leurs corps, mais qu'ils ne peuvent pas être vûs nuds ; celui qui eft commis pour cet effet, trempe une éponge dans de l'eau tiede, & en la preffant, en fait fortir l'eau qu'il répand en forme de croix fur le front du mort, fur fa poitrine, fur fes mains, fur fes pieds, & fur fes genoux. On lui ôte fes vieux habits, on lui en donne de propres ; & s'il eft du grand & angelique habit, on lui met la cuculle & l'on fait defcendre fon bonnet jufques fur la barbe, afin que

fon

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