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general fait fa refidence en l'abbaye de faint Antoine proche ORDRE Vienne enDauphiné, & non pas en Autriche? S'ils avoient lú MILITAIl'histoire de cet Ordre pretendu, compofé par cet Abyffin, RE DE S. dont nous avons ci-devant parlé, ils auroient vû qu'il di- ENETHIO ftingue l'Ordre de faint Antoine de Viennois d'avec celui PIE. d'Ethiopie, quoiqu'il dife que les Religieux de l'un & de l'autre font tous freres.

'ANTOINE

L'abbé Giuftiniani voyant que cet Abyffin dit qu'il n'y a point de ville en Ethiopie où il n'y ait un couvent de cer Ordre, ou plûtôt autant d'abbayes toutes bâties en maniere de citadelle, & que dans chacune de ces abbayes il y a quatre Cloîtres: a cru que le grand nombre que cet Abyffin marquoit, n'étoit pas foutenable; c'eft pourquoi il s'eft contenté d'en mettre feulement deux cens cinquante, quoique cet Abyffin qui fe contredit en plufieurs endroits, en ait marqué deux mille fept cens. Mais comme dans un autre endroit, il n'en marque que dix-fept cens, & dans un autre deux mille cinq cens, quel fond peut-on faire fur un tel témoignage ? Seroit-il poffible que tant d'abbayes fi confidebles ayent été ruinées depuis environ fix-vingts ans que cet Abyffin a écrit ; puisqu'aucun de nos voyageurs qui ont été en Ethiopie n'en a parlé, & qu'au contraire ils faffent mention de plufieurs autres Monafteres? M. Poncet, entre les autres, fçavoit fort bien quelle étoit la croix de faint Antoine, que les Religieux qui portent ce nom en France, mettent fur leurs habits, puifque parlant d'une petite monnoye du royaume de Sennar, il dit que c'eft un petit morceau de fer de la figure d'une croix de faint Antoine. Ainfi ayant parlé des habillemens des Religieux d'Ethiopie, il auroit dit fans doute qu'ils portoient cette croix fur leurs habits, s'il étoit vrai, comme difent Giuftiniani & Schoonebeck, qu'ils en portaffent une. Mais ces auteurs ne parlent qu'après ce JeanBaltafar Abyffin, qu'Abraham Ezchellenfis refute affez bien dans fa preface fur la regle de faint Antoine; difant que. c'eft fans raifon que cet Abyffin a avancé, que les Moines d'Orient qui fuivent la regle de faint Antoine portent un Tau fur leurs habits, puifqu'il n'en a jamais vû aucun qui en portât, excepté les abbés, qui en ont une fur leurs man-teaux; & ce fçavant Maronite regarde comme une pure fable l'Ordre militaire de faint Antoine s'étonnant qu'on

ORDRE ait traduit en françois & en efpagnol l'hiftoire feinte qu'en a MILITAI- donnée cet Abyffin, qui n'eft remplie que de menfonges & RE DE S. de fauffetés: Deus bone, ac immortalis! s'écrie-t il, quæ mendacia ENETHIO- • qua fomnia, quæ commenta eo in libello fub nomine miferi ejus Ethiopis conficto, non continentur ?

ANTOINE

PIE.

Elucid. Ter

Tom. I.

Nous pouvons encore ajouter, que ce que le même Abys fin a avancé que les Maronites, Jacobites, Georgiens, Armeniens & Neftoriens, obéiffent tous à l'abbé du mont de Sion en Afie, eft auffi très - faux, puifqu'il n'y a point d'abbé du mont de Sion ; & que les Religieux de faint Fran. çois ont demeuré feuls fur cette montagne pendant près Francif d'un fiecle, jufqu'en l'an 1559. que les Turcs voulant clorre Quadrag la ville de Jerufalem, comme elle eft prefentement, & ne ra (anita. voulant pas faire la dépense qui eût été neceffaire pour y renfermer le couvent que ces Religieux avoient fur cette montagne, qui est la plus élevée de celles qui font dans cette ville; ils demanderent à ces Religieux une contribution de fix mille écus pour y travailler: ce que leur pauvreté les ayant empêché de fournir, ils allerent demeurer hors la ville. Mais depuis ce tems-là les Turcs, jugeant que le lieu où ils s'étoient retirés, étoit de défense, & que les Chretiens s'y refugiant pourroient furprendre la ville; ils en chafferent les Religieux qui font dans un autre lieu de Jerufalem, & les églifes qui étoient dans le couvent du mont de Sion ont été changées en des mofquées. D'ailleurs quelle appatence y a-t-il que les Armeniens qui font à Jerufalem, & qui fuivent la regle de faint Bafile auffi bien que les Moines Georgiens, euffent obéi à l'abbé du mont de Sion qui auroit été de P'Ordre de faint Antoine? Ceux qui voudront ajouter foi aux auteurs qui ont donné cet Ordre militaire pour veritable, pourront confulter ce Jean Baltafar Abyffin, dont l'histoire en efpagnol a été traduite en notre langue en 1632. l'hiftoire des Ordres militaires de l'abbé Giuftiniani, imprimée à Venise en 1691. celle de M. Hermant, imprimée à Rouen en 1698. celle d'Adrien Schoonebeck, imprimée à Amfterdam en 1699. & le Catalogue des Ordres militaires qu'a donné le P. Bonanni en 1712.

Entre les auteurs que l'abbé Giuftiniani cite pour prouver l'existence de cet ordre, il a mis Cefar Veccellio frere du Titien, qui a fait graveren 1589. les differens habillemens

de

RE DE S.

de toutes les Nations du monde. Il eft vrai que Veccellio a ORDRE donné l'habillement des plus grands feigneurs d'Ethiopie, MILITAIfemblable à celui que l'Abbé Giuftiniani a fait graver pour ANTOINE reprefenter un de ces prétendus chevaliers de S. Antoine, & INETHIOqui a été enfuite copié par Schoonebeck, & par le P. Bo-PIE. nanni. Mais au bas de cette figure, Veccellio n'a point qué que ce fut l'habillement d'un de ces chevaliers; il dit feulement que c'eft celui des principaux feigneurs de la cour du Prete- Jean, qui portent une chemise de foye avec un capuce de fourures de grand prix, & qu'ils ont au cou de riches ornemens d'or & de perles: I principali perfonagi del Prete- cello. haJeani portano una camiscia di feta, & un Capucio di pelli ani-buhi, an imali di grandissimo prezzo, & al collo ufano ornamenti grandif-chi, & mofimi d'oro & di gemme.

Cefar Vec

di tut

to il mondo.

S. Antoine

& 10:

Cet habit n'a même rien de commun avec celui qui eft marqué dans l'hiftoire de cet Ordre prétendu,compofée par ce faux chevalier Abyffin; car il dit que lorfque l'on reçoit Fondation, un Chevalier, un Frere fervant, ou un Oblat de cet Ordre, Vie, & Re'gle des Cheon leur donne un petit fcapulaire noir, avec un tau bleu waliers de qu'ils portent fur la chemife, qu'à la profeffion d'un cheva-Ordre de lier, on lui donne une foutane noire traînante à terreen Ethiopie. avec une croix bleue fur la poitrine : que par deffus la fou-Chaps. 6. tane, on lui met une cuculle noire, fort pliffée par le cou; ayant les manches longues qu'il s'entortille au tour des bras: qu'il y a auffi une croix bleue fur cet habit, qu'on lui donne encore une petite croix d'or de la même façon qu'il porte au cou. Il ajoûte que tous les chevaliers commandeurs tant les religieux prêtres, que les militaires, affiftent à l'office divin revêtus de cette cuculle noire, avec cette difference, que les manches des cuculles des prêtres font fermées ; mais que les uns & les autres ont la tête couverte d'un capuce femblable à celui des Moines Benedictins : que l'habit des freres fervans & des oblats prêtres eft noir auffi: mais femblable, quant à là forme, à celui des Chartreux, à la difference que les oblats n'ont point à côté de leur habit, ces bandes que les Chartreux portent, afin qu'ils foient diftingués par ce moyen des freres fervans : que les uns & les autres portent cet habit dans l'Abbaye; mais qu'ils ont une chape noire de la même façon que celle des Chartreux lorsqu'ils fortent. Enfin dans le Chapitre X. il dit que l'habit des

Tome I.

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A

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DE S. PA

CHOME.

ORDRE freres fervans qui ne font pas prêtres, confifte en une foutane noire qui defcend jufqu'à la moitié de la jambe, un manteau long jufqu'à terre, pliffé au collet, & une chape noire, qui eft le même habit que portent les chanoines de Benevent en Italie : que toute la difference qu'il y a, c'est que ces chanoines portent un bonnet quarré & les freres fervans de l'Ordre militaire de S. Antoine un bonnet rond. Quant à l'habit des oblats, il eft peu different, à ce qu'il pretend, de celui des feculiers. Voilà des habillemens bien differens de celui que Schoonebeck & le P. Bonanni nous ont donné comme le veritable, que portent ces prétendus chevaliers de S. Antoine, dont nous avons ci-devant fait la defcription, quoiqu'ils ne parlent qu'après ce faux chevalier Abyffin, ou plutôt qu'après l'abbé Giuftiniani,qui a été copié par Schoonebeck & le P. Bonanni qui s'en font rapporté à ce qu'il a dit. Non feulement le P. Bonanni ne s'eft pas contenté de faire graver l'habillement fuppofé de ces prétendus chevaliers de S. Antoine d'après l'abbé Giuftiniani; mais il a encore fait graver l'habillement fuppofé d'un prétendu grand-maître & celui d'un religieux de cet Ordre, habillemens qu'il a inventés, & que nous avons fait auffi graver pour faire voir le peu de raport de ces habillemens avec ceux, dont ce faux chevalier. Abyffin avoit fait la defcription ; & il femble que l'on ait voulu ajoûter d'autres fauffetés à celles que cet Abyllin avoit avancées.

CHAPITRE XIV.

Vie de Saint Pachome Abbé, premier Instituteur des Congregations Religieufes.

AINT Antoinea bien, à la verité, donné quelque perfection à la vie cœnobitique; mais l'on doit donner à S Pachome la gloire de l'avoir affermie, par l'union de plufieurs Monafteres, qui, quoique gouvernés par des fuperieurs particuliers, étoient néanmoins tous foumis à un abbé ou fuperieur general; c'eft ce qui a formé la premiere congregation religieufe.

Il nâquit dans la haute Thebaïde vers l'an 192. fon perc

Moine de S.Pachome.

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