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GATION DE

ces païs ont été accablés, ont bien apporté du changement CONGREtant dans le fpirituel que dans le temporel ; car outre que CLUSE. plufieurs Monafteres qui étoient de la dépendance de cette Abbaïe fe font fouftraits de fon obéïffance, fes Abbés ne joüiffent plus de tous ces droits temporels: cependant ils ne laiffent pas de joüir de beaucoup de privileges, nonobftant le grand changement de cette fameufe Abbaïe, qui après avoir fait l'admiration de tout le monde tant par fa fainteté que par fon autorité fur tant de Monafteres qui lui étoient foûmis,eft devenuë à un tel état d'anéantiffement, quelle eft réduite à servir de logement à un feul Prêtre feculier, qui Y eft entretenu par le Chapitre de Gavenne, auquel elle a été donnée. Elle a été gouvernée depuis fon établiffement, premierement par des Abbés électifs qui fe font diftingués par leur merite & par leur fainteté, & dans la fuite, par des Abbés,que la qualité rendoit refpectables, étant pour la plûpart Cardinaux, Princes, ou au moins de grande qualité,comme il eft facile de le voir dans un livre intitulé, Hiftoria Chronologica S. R. Ecclefia Cardinalium, Archiepifcoporum Epifcoporum & Abbatum Pedemontana religionis. C'eft préfentement, felon les Memoires que nous en avons reçus de Piémont, le Seréniffime Prince Eugene de Savoye, qui en est Abbé.

Quant à la maniere de vivre de ces Religieux, il eft fort difficile d'en avoir aucune connoiffance. Les guerres continuelles de ce païs aïant ruiné cette fameufe Abbaïe & difperfé fes Religieux,les Monafteres qui en dépendoientont changé leurs anciennes pratiques & obfervances, en forte qu'on n'en peut rien découvrir,non plus que de l'habillement. Tout ce que nous en avons pû fçavoir par des Memoires venus dePiémont,c'est qu'ils étoient habillés de noir comme on le voit encore dans la fepulture de ces anciens Moines, où on les trouve encore en chair & en os,revêtus de leur habit Monachal; mais le tems qui a épargné les corps n'en a pas fait de même des habits, dont il eft difficile de pouvoir bien distinguer la forme. Ce que nous avons de plus pofitif fur cet article, est tiré de certaines Conftitutions & Ordonnances que le Prince Maurice Cardinal de Savoye qui en étoit Abbé en 1631. fit les Moines de cette Congrégation qu'il avoit intention de remettre dans fa premiere fplendeur. Selon ces Ordonnan

pour

ORDREDIS Ces, il leur étoit défendu de fe fervir d'étofe de foïe; mais

LES.

CAMALDU- ils devoient avoir des habits modeftes,& ils étoient obligés de porter la couronne Monachale: ils devoient porter aux Offices leurs bonnets carrés & le domino avec le scapulaire, le tout suivant leurs Statuts, fondations & Regles, & ils ne pouvoient aller aux champs fans leur foutanne & fans leur Icapulaire. Outre cela les jeux de carte, le maille, la chasse & autres exercices & jeux fcandaleux leur étoient défendus, M. le Clerc, Confeiller, & Agent de fon Alteffe Roïale de Savoïe en la ville de Lyon, & Secretaire en Chef de ladite Abbaïe & fes dépendances, rapporte ces Statuts conjointement avec d'autres qui concernent le gouvernement de cette Congrégation, auffi bien que les Bulles de cinq Papes, en confirmation des privileges qui lui avoient été accordés par quinze de leurs prédeceffeurs, outre plufieurs Arrêts du Roi en faveur de ces Abbés. Nous donnons ici l'habillement des Religieux de l'Abbaïe de Clufe tels qu'ils font représentés dans quelques anciens monumens de l'Abbaïe de faint André-lès-Avignon, qui étoit de fa dépendance.

Le Clerc, Chronica Pedemontana. Joann. Mabillon, Annal. Ordinis Bend. Tom III. 4°. & 5o. Memoires venus de Pié.

mont.

CHAPITRE X X I.

De l'origine des Camaldules, avec la Vie de S. Romuald,
Fondateur de cet Ordre.

E

NTRE toutes les Congregations qui ont fait l'ornement de la vie Monaftique, & le fujet de l'admiration du monde Chrétien, par l'aufterité de leurs pratiques & par la fainteté de leur vie, celle des Camaldules doit tenir un des premiers rangs, puifque les faints Religieux qui la compofent obfervent tout ce qu'il y a de plus rude & de plus fevere, tant dans la vie Coenobitique que dans la vie Heremetique, dont ils ont embraffé la penitence & les mortifications, fans s'embarraffer des douceurs qui moderent les peines de ces deux états, dont ils font également profeffion; fuivant en cela l'exemple de faint Romuald leur Fondateur, qui a excellé dans l'un & dans l'autre par lapratique de toutes fortes de vertus.

T.V.P. 236

Ermite Camaldule

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CAMALDU

Ce Saint étoit na:if deRavenne,& defcendoit de l'illuftre ORDRE DES Maifon de ses Ducs; fon pere s'appelloit Serge. Ses premie- LES. res années ne furent pas des mieux reglées : car à peine eutil atteint l'âge de difcretion, qu'il s'abandonna aux vices qui ont coûtume de s'emparer du cœur des jeunes gens,qui s'y laiffent d'autant plus emporter, qu'ils font fecondés par les biens de la fortune, qui leur donnent les moïens de contenter leurs paffions. Mais Dieu qui avoit destiné Romuald pour être le Restaurateur de la Difcipline Reguliere, & qui vouloit fe fervir de fa voix pour appeller les pecheurs au defert, leur enfeigner & preparer les voïes du Seigneur, & à fe remettre dans le chemin du falut, n'abandonna jamais fon Serviteur à fes propres paffions: en forte que nonobftant les plaisirs de la chair, & les divertiffemens de la chaffe,qui faifoient toute fon occupation, il lui donnoit de continuels remors de conscience, qui le faifant rentrer en lui-même lui faifoient faire de fermes refolutions de s'en retirer, & d'être plus fidele à sa Divine Majesté. C'est à quoi il fe fentoit principalement porté, lorfque pourfuivant quelque bête, il fe trouvoit dans quelque endroit folitaire & champêtre que l'épaiffeur de la forêt rendoit inacceffible aux hommes: car pour lors par un effet de la grace qui illuminoit fon entendement, & échauffoit fon cœur, il fongeoit au bonheur & au repos dont joüiroit une ame qui voudroit s'attacher uniquement à Dieu, en renonçant au monde & à fes faux plaifirs, & foupiroit après la vie à laquelle il étoit destiné, quoique pour lors il n'en eût pas encore formé le deffein.

Jufqu'alors il n'y avoit eu dans Romuald qu'une idée fort legere d'abandonner le vice, & de fuivre la voix du Seigneur, qui fe manifeftoit à lui par fes infpirations, & par les bons defirs qu'il excitoit dans fon cœur : mais le tems auquel Dieu avoit determiné fa conversion étant venu, il fe foumit à la grace, rechercha avec empreffement la vie qu'il eftimoit, fans avoir envie de l'embraffer, ne fongea qu'à fe confacrer à Dieu & à renoncer au monde : ce qui arriva de la forte. Son pere avoit eu plufieurs difficultés avec un de fes parens au fujet d'un heritage, dont ils fe difputoient la poffeffion. Ne voïant point de jour à un accommodement, ils fe refolurent de terminer leur differend par un combat fingulier ; & effectivement en étant venus à l'e

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