Emeline sa femme, il paroît qu'il y avoit déja des Religieu- Bernar- Nous avons déja dit ailleurs que saint Bernard s'étant retiré à Cîteaux l'an 1113. avec trente Compagnons qui étoient la plûpart mariés , leurs femmes imiterent généreusement leur exemple, & que voulant se retirer dans la solitude, on avoit fondé pour elles un Monastere à Julli, que quelquesuns appellent Billette , & que sainte Humbeline , fæur de S. Bernard avoit été du nombre de celles qui s'y retirerent. Nous avons aussi prouvé par les témoignages du P.Mabillon & du Pere Chiflet, que ce Monastere ne fut fondé que l'an 1115. par Milan Comte de Bar , qui le donna à l'Abbaïe de Molesme, afin qu'il servît de retraite à des Religieuses qui y vécussent sous l'obéïssance de l'Abbé de ce Monastere, qui leur donneroit pour quatre Religieux. Or Molesme aïant toûjours été possedé par des Benedictins , quelle apparence que des Religieuses de Cîteaux eussent été soûmises aux Religieux de cette Abbaïe ? il est évident au contraire que les Religieuses de Julli profel- ' soient la Regle de saint Benoît . Car par les titres de la fondation de l'Abbaïe de Tart , il paroît que ce Monastere aïant été bâti, non pas l'an 1125. mais l'an 1120. par les liberalités d’Arnoul de Cornu & de la femme Emeline, qui Non iij DINES DE ne, DERNAR- avoient une fille nommée Elisabeth,déja Religieuse au MoTART. nastere de Julli de l'Ordre de faint Benoît : que cette Religieuse, qui étoit veuve de Humbert de Mailli Seigneur de Favernai, fur ti ée de ce Monastere pour commencer la fondation de celui de Tart, dont elle fut premiere Abbesse, & qu'elle & les Religieuses qui la fuivirent , embrasserent les Ştacurs & les usages de Cîteaux que leur donna S. Etien Abbé de Cîteaux,qui est ausli reconnu pour Fondateur de ce Monaftere. Ce qui prouve encore que Julli & le Tart étoient deux Monasteres differens, c'est que lorsque Guillaume de saint Thierri dit que sainte Humbeline fæur de faint Bernard mourut à Julli l'an 1141. où elle fut visitée par ce Saint dans fa maladie, il nomma ce Monastere fulli , & non pas le Tart : ce qui décruit encore une des conjectures de l'Auteur Anoniine de la vie de l'Abbesse de Tart, qui dic que l'on a changé le nom de Billette en celui de Tart par reconnoissance pour Arnulphe Cornu & fa femme Emeline qui s'étoient dépoüillés fi généreusement de leur Seigneurie de Tart en faveur de ces Religieuses : outre qu'il eft certain que l’Abbaïe de® Tare fut ainfi nommée à cause qu'elle avoit été bâtie dans un lieu qui s'appelloit Tart la Ville , & qui fur depuis nommé Iart l'Abbaie , & que Julli étoit encore appellé Filli , plus de trente ans aprés la fondation du Monastere de Tart. Une autre preuve encore que le Monastere de Tart a été la premierę Maifon de filles de l'Ordre de Cîreaux, c'est que les Chapitres Généraux des Religieuses s'y tenoient , & que l'Abbeffe avoit droit de visite dans les autres Monafteres de cet Ordre. D'ailleurs li fainte Humbeline fæur de faint Bernard avoir été Religieuse de Tart, les Religieuses de ce Monaltere ne manqueroient pas de s'en gloriher, & n'auroient pas oublié de la mettre au nombre des personnes Illustres de leur Monastere, ne fe vantant que d'avoir eu Adeline fa niéce, Adelaïde Duchesse de Lorraine , les Princesses Agathe & Barthole fes filles , & quelques autres qui ont fait profession Religieuse dans cette Abbare , dont la Bienheureufe Elifabetă, fille des Fondateurs fut premiere Abbeffe & fonda dix-huit ainres Monasteres de cet Ordre. Elle obtine du Pape Eugene II I. la confirmation de son Ab 1 TART. Maisons de l'Ordre, & les guerres étant survenuës,les Reli baïe que ce Pontife mit fous sa protection par une Bulle de BERNAR. Les Ducs de Bourgogne donnerent des marques de leur Le premier esprit de Cîceaux , sa ferveur & sa régularité. se conserverent dans ce Monastere jusques vers l'an 1475. que l'usage de la viande aïant été introduit dans plusieurs gieuses de cette Abbaïe quitterent aussi l'abstinence & abandonnerent entierement leurs autres Observances. Bien loin d'éviter le commerce des Seculiers, elles le rechercherent, Elles reçurent des vitites li fréquentes dans la suite , que ce Monastere écoit comme une hôtelerie où tout le monde, hommes & femmes sans distinction , étoient bien venus. La solitude & l’Oraison mentale en furent bannis , &ony dansoic & joüoit comme dans une maison séculiere. Ces Religieuses ne respiroient que le luxe , la vanité & les plaisirs. Elles ne voulurent plus recevoir dans leur maison que des filles nobles. Leurs robbes , & leurs scapulaires étoient de soye, & les jupes de dessous , de la plus belle étoffe qu'elles pou. voient avoir avec des dentelles d'or & d'argent. Le voile qu'elles portoient ne les empêchoit pas de se friser & de porter des pendans d'oreilles , aufli bien que des colliers de perles, & leur guimpe d'une toille empelée & fort claire ne cachoit rien de leur gorge. Tel étoit l'état de cette Abbaïe, lorsque Jeanne de Courcelle de Pourlan , fille du Baron de Pourlan , fut nommée à cette Abbaïe. Elle nâquit à Pourlan sur les frontieres de Bourgogne l'an 1591. & fut mise à l'âge de sept à buit ans dans l'Abbaïe de Tart, dont une de ses tantes étoit Abbesse. Aprés quelques années de séjour , elle y tomba malade : ce qui obligea ses parens de la retirer dans le dessein de la laisser dans le monde : mais dans un voïage qu'elle fit avec eux à Migette qui est un Monaftere de l'Ordre de sainte Claire, à deux lieuës de Salins dans le Comté de Bourgogne , pour |