DINES DU- BERNAR- que façon elles n'avoient pas eu la liberté de fuivre leur inclination. Enfin après bien des voux,des épreuves, & des Conferences ne dourant plus que ce ne fût la volonté de Dieu qu'elles réparassent dans leur Maison ce qui sembloid manquer dans les deux Congregations de Bernardines Réformées , dont nous avons parle, elles proposerent d'abord de changer la forme de leur habillement &de leur coëffure pour les rendre plus convenables à l'habillement des autres Religieuses de l'Ordre de Cîteaux,& pour accoûtumer par ce moïen peu à peu à la Réforme qu'elles projetcoient quel à ques-unes d'entr'elles qui s'y oppofoient. En effet ces Religieuses opposées à la Réforme ne trouverent aucune difficulté dans le changement d'habit : ainsi il fut fait selon l'usage des plus réformées de l'Ordre,qui est d'avoir une tunique blanche dessous leur robbe , faite en sac, d'une étoffe blanche un peu grolliere , un scapulaire noir large d'un tiers & aussi long que la robbe sans être ceint, avec un grand habit de Cheur qu'on nomme coule , d'une serge blanche plus fine que la robbe , fans porter ni jupes, ni corps de baseine. Pour celui des Novices, on le fit semblable à celui des Professes, sinon que pareillement selon l'usage des Religieuses de Cîteaux, le scapulaire étoit blanc , & qu'au lieu de coule elles devoient avoir un manteau en forme de chape. Elles prirent ausli la guimpe ronde au lieu de la quarrée qu'elles porcoient comme les Religieuses de la Visitation. Tous les habits étant disposés de la forte pour la Communauté, elle s'en revéric un Samedi 8. Mars 1653. & dans la suite celles qui voulurent embraffer la plus écroice Observance continuerent à s'éprouver en leur particulier & à demander à Dieu la grace de connoître & d'accomplir sa volonté. L'année suivante 1654. la Mere Bauder crut qu'il étoit rems de faire connoître à la Communauté l'inspiration qu'elle avoit euë dès l'année 1651. de dédier fon Monastere au précieux Sang de Notre-Seigneur Jesus-Christ afin que les filles fussent dévouées fingulierement à honorer les differentes effufions de ce sang adorable, & les engager davantage à être desvi× consacrées à la penitence pour être plus conformes à leur époux crucifié. Le Monastere étoit alors dans ane extrême pauvreté ; mais cette bonne Mere animée d'un. esprit de foi, ne doutoit point qu'en cherchant premierement DU CIEUX. le Roïaume de Dieu & la justice, le Pere Celeste né leur Bernaraccordât cout ce qui étoit necessaire pour subsister. Elles s'en- SANG PRAD gagerent donc par vou d'un commun consentement à à prendre le titre de Filles du précieux Sang, dès que leurs affaires étant remises en bon état, elles pourroient avoir une demeure fixe, sans laquelle elles ne pouvoient s'assurer de leur établissement, & se voïoient tous les jours exposées à être supprimées. Le fixiéme Mars de la même année, la plus grande partie de la Communauté persévérant dans le desir de la réforme , pour continuer l'épreuve qu'elle faisoit depais long-tems, prit des chemises de serge,& quitta l'usage de celles de toile. Celles qui ne crurent pas avoir assez de force & de courage pour imiter ces Religieuses ferventes , eurent la liberté de demeurer dans la pratique des Observances qu'elles avoient trouvées établies dans la maison, lorsqu'elles y étoient entrées. Comme on ne vouloit causer aucun trouble dans la Communauté , on n'introduisoit que peu à peu l'Etroite Obfervance, afin que celles qui la désiroient s'y accoûtumafsent plus facilement, & que les autres qui ne la vouloient pas у eulent moins de répugnance & y fussent attirées par la facilité avec laquelle elles voïoient que les plus ferventes en pratiquoient les exercices. En 1655. leur Superieur fit une visite reguliere au sujet de la réforme,afin de récueillir les sentimens de part & d'autre, & aprés avoir écouté toutes les Religieuses, il ficafsembler au Seminaire de faint Sulpice huit Docteurs , & leur aïant propofé les raisons que ces Religieuses avoient d'embrasser la Réforme , ces Docteurs furent d'avis de les laisser quelque tems fans leur donner de décision pour voir fi clles persevereroient. Trois années fe passerem encore pendant lesquelles chacune demeura ferme dans ses premiers fencimens. Le Cardinal de Bourbon , Abbé de faint Germain des Prés, sous la jurisdi&ion duquel ceMonaftere étoit, donna commission à l'Abbé de Gamaches d'y faire une seconde visite, aprés laquelle ces Religieuses présenterer une Requête au Cardinal, où aïant exposé leurs raifons pour embrasser la Réforme , elles lui demandoient les permissions nécessaires pour ce changement. Ce Prince conclut avec fon Conseil qu'elles feroientencore un an d'épreuve dans la prabu DU EIEUX. BERNAR, cique des austerités de cette Réforme, & cependanc il fic Réguliers que Séculiers le 7. Janvier 1659. qui conclurent, Aprés cette conclusion qui les mettoit en liberté de suivre Le vingtiéme Mars suivant, elles commencerent à fe lever la nuit à deux heures pour dire Matines, selon l'usage de l'Ordre de Cîteaux , & le 9. Mars 1660. elles célébreren; née 1659. pour la premiere fois la Fête du Précieux Sang, ce qu'elles BERNARont continué de faire jusquà présent tous les Vendredis de Sang PREl'année, en faisant l'Office double Majeur, (tiré de celui de CIEU X. la Passion qui est dans le Breviaire de Paris , ) avec solemnité, Exposition du faint Sacrement pendant la grande Messe, & les Vêpres, qui sont suivies de la Prédication, & ensuite du Salut, où il y a toûjours grand concours de peuple. Les mêmes Docteurs qui furent appellés pour conclure ce qui regardoit leur Réforme , furent chargés de travailler à des Constitutions conformes à la Regle de saint Benoît: ce qu'ils firent d'une maniere trés exacte,ne faisant qu'ajoûter à la fin de chaque chapitre de cette Regle ce qui étoic nécessaire pour la rendre convenable à l'usage des filles , & qui avoir besoin d'explication, par rapport au tems & aux lieux differens de ceux pour qui saint Benoît l'avoit écrite , se conformant aussi en beaucoup de choses aux coûtumes du premier esprit de l'Ordre de Cîreaux. Elles mirent aussi-tôt en pratique ces Constitutions, done les principaux points consistent en ce qu'elles doivent se lever la nuit à deux heures , dormir sur des paillasses posées sur deux ais soûtenus par deux traitaux , n'aïant que des draps de laine, sans tours de lits ni autres ornemens qui ressentent la vanité du monde , non plus que dans leurs autres meubles qui doivent se ressentir de la pauvreté & simplicité. L'abstinence de viande leur est ordonnée en tout tems, excepté dans les maladies, aussi-bien que l'usage de la serge au lieu de linge. Leurs jeûnes sont presque continuels le silence crés rigoureux, à la reserve de deux heures de conversation chaque jour, l'une aprés le dîné, l'autre aprés le soupé ou la collation. Elles font aussi deux heures d'oraison mentale chaque jour , & demi-heure de lecture spirituelle. Le travail des mains leur est recommandé,& elles ont conservé le Breviaire Romain, y ajoûtant seulement les , Fêres principales de l'Ordre. Ainli elles peuvent porter à à plus juste titre que les Religieuses des Congregations de la Providence Divine & de faint Bernard, le nom de Bernardines Réformées. Ces Reglemens furent approuvés le 14. Août 1661. par l'Abbé de Prieres, Vicaire Général de l'Etroite Observance ر L11 iij SANG PRL- BERNAR. de Cîteaux en France, & par le Prieur de l'Abbaïe de saint DINES DI Gerinain des Prés, comme Grand Vicaire du Cardinal de Bourbon, qui en cette qualité reçut aussi les veux que ces Religieuses firent de la nouvelle Réforme le jour de l'Octave de saint Bernard le 27. Août de la même année 1661. ce qui se fic avec beaucoup de solemnité, & acheva l’établifement d'une parfaite Réforme. Peu de tems aprés leurs constitutions furent aussi approuvées par le Cardinal de Vendôme Legat en France. Dès qu'on eut appris à Grenoble ce changement , la plus grande partie de la Communauté du Monastere de fainte Cecile ne l'approuva pas : sur tout la Mere de Ponçonas en témoigna beaucoup de chagrin, trouvant cette entreprise témeraire. Mais quelques-unes au contraire touchées du desir de participer à la grace que Dieu avoit faite aux Religieuses de Paris, obtinrent des obédiences pour venir se joindre à elles, dont la principale fut la Mere Françoise de Garcins, d'une illustre Famille de Dauphiné, qui étoit pour lors Superieure de ce Monastere de sainte Cecile de Grenoble. Elle vint à Paris avec une ferveur tout-à-fait touchante , se reduisant comme la derniere des Novices aux occupations les plus basses & les plus humiliantes. Elle se signala fur cout par son obéissance & son exa&itude à observer la Regle, & par son ardente charité envers Dieu & son prochain. Ausli fut-elle choisie pour être Prieure , aprés avoir exercé pendant plusieurs années l'Office de Sousprieure. Quant à la Mere Baudet, aprés avoir aussi gouverné cetteCommunauté pendant plusieurs triennaux , elle y mourut le 6. Septembre 1688. âgée de 84. ans. Le Monastere de Paris a donc eu le bonheur de porter à la derniere perfection ce qui sembloit n'avoir été qu'ébauché par les Meres des Congrégations de la Providence Divine & de faint Bernard. Memoires communiqués par la Mere de faint Augustin Roy ligieufe du Monaftere du Sang Precieux. . |