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SES FEUEL

Monaftere à Poitiers l'an 1617. où avec quelques Religiede Rucia ses de l'Ordre de Fontevraud qui la voulurent suivre, elle LANTINES reprit l'habit des Feüillantines; & étant morte quelque tems après, elle voulut que son corps fût porté au Monastere de Toulouse.

La retraite de cette Princesse dans le Monastere des Feüillantines de Toulouse, y attira un grand nombre de personnes de distinction: de sorte que l'an 1602. quatorze ans après leur fondation, elles se trouverent cinquante Professes, & il y avoit eu plus de deux cens Novices qui en étoient sorties, ne pouvant fupporter les grandes austerités de cet Ordre. La réputation de ces Religieuses s'augmentant de jour en jour, plusieurs personnes voulurent fonder d'autres Monasteres du même Ordre pour communiquer aux autres Provinces les exemples d'une vertu si sainte, & donner aux ames pieuses des Maisons de retraite, où elles pussent se consacrer à Jesus-Christ, & renoncer aux vanités du fiécle. Mais les Feüillans, qui étoient les Directeurs de ces Religieuses & leurs Superieurs, s'opposerent à cette propagation, & dans le Chapitre Général de l'an 1592. il fut ordonné qu'on ne se chargeroit plus de la direction d'aucunes Re ligieuses, à l'exception du seul Monastere des Feüillantines de Toulouse: ainsi en vertu de ce Réglement, on quitta les Religieuses de sainte Susanne de Rome. Il y a de l'apparence que dans ce tems-là on présenta plusieurs établissemens pour des Feüillantines, puisque dans le Chapitre Général de l'an 1595. il fut de nouveau conclu qu'on s'en tiendroit au Réglement du Chapitre précedent, & qu'on m'accepteroit pas les nouveaux établissemens que l'on offreit. On refusa encore en 1598. une fondation que M. Sublet des Noyers, Maître des Comptes à Paris, vouloit faire en faveur de deux de ses filles, qu'il conduifit lui-même depuis à Toulouse au Monastere des Feüillantines: où elles prirent P'habit & firent profeffion.

L'an 1602. le Comte de faint Pol étant à Rome demanda aux Peres Feüillans affemblés en leur Chapitre Général, au nom de trois Princesfes fes fœurs, la permission de fonderà Paris deux Maisons de Feüillantines : ce qu'elles vouloient faire en confideration de Madame Antoinette d'Orleans leur foœur, Religieuse à Toulouse; mais ils s'en excuserent far

Tome V.

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Rector Reglemens faits dans les Chapitres précedens, & n'ac-
SES FEUIL- corderent point cette permission. Le Cardinal de Sourdis
LANTINIS Archevêque de Bourdeaux, reçut un semblable refus en

1604. mais enfin Dieu dont les desseins font bien differens
de ceux des hommes, voulant faire connoître la sainteté de
ses nouvelles Epouses, & multiplier ces Sanctuaires, où on
chantoit jour & nuit des Cantiques de loüanges à la gloire
de son nom, permit que la Reine Anne d'Autriche, épouse
de Loüis XIII. voulut avoir des Feüillantines à Paris. Le
respect qu'on devoit à cette Princesse fit ceffer toutes les op-
positions qui s'étoient trouvées jusqu'alors de la part des
Superieurs, qui firent partir de Toulouse six Religieuses le
30. Juillet 1622. pour aller à Paris prendre possession d'une
nouvelle demeure qu'on leur avoit préparée au fauxbourg
saint Jacques : les deux filles de M. Desnoïers furent du
nombre de ces fix Religieuses.

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Elles eurent pour Superieure Donne Marguerite de fainte Marie. Elle s'appelloit dans le monde Marguerite de Clausse de Marchaumont, & étoit fille d'Henri de Clausse de Marchaumont Seigneur de Fleuri, Conseiller d'Etat, Gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi, Sur-Intendant & Grand-Maître des Eaux & Forêts de France, & de Denife de Neuville de Villeroi. Elle épousa en premieres nôces Henri Seigneur de Foui, Gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi, Capitaine de cinquante Hommes d'Armes, & Gouverneur du Vexin: mais ce Seigneur étant mort fix mois après leur mariage, elle épousa en secondes nôces Salomon de Bethune Seigneur de Rosni, aussi Gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi, & Gouverneur de Mantes & de Meulan, qui aprés deux ans & demi de mariage, la laissa encore veuve pour la seconde fois à l'âge de vingt-deux

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Une si grande jeunesse accompagnée d'une parfaite beauté, soutenue par sa noblesse & par ses grandes richesses, lui attira les cœurs de plusieurs Seigneurs de la Cour, qui se faisant gloire d'entrer dans son alliance la rechercherent en mariage, mais ce fut inutilement; car écoutant les inspirations du Ciel & désabusée des vanités du fiécle & des grandeurs de la terre, elle forma le dessein de se faire Religieufe Feüillantine & de ne plus aimer que Jesus-Chrift, auquel

SES FEUIL

seul elle vouloit facrifier son cœur ; & pour accoûtumer le RELIGIEUmonde à l'oublier, elle se retira peu à peu de la Cour, n'y paroissant que dans les occasions de necessité, negligeant celles qui n'étoient que de bienféance. Elle passa quatre ans dans cette espece de retraite, s'adonnant à la pratique des vertus, & éloignant d'elle tout ce qui pouvoit s'oppofer à ses desseins, elle fit connoître celui qu'elle avoit d'entrer en Religion, afin d'écarter ceux qui pourroient avoir quelque efperance fur la possession de fon cœur.

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Entre ceux qui la recherchoient en mariage, & qui se mirent en état d'empêcher qu'elle ne se donnât à Jesus-Christ il n'y en eut point qui fit paroître plus d'ardeur que le Marêchal de Marillac: son autorité jointe aux mesures qu'il prenoit lui faisant craindre qu'il n'empechât, ou tout au moins qu'il ne retarda confiderablement l'execution de ses bons desseins, elle jugea qu'il falloit encore diffimuler quelque tems, pour éviter ses oppofitions, & les surmonter par adresse, ce qui lui réüffit parfaitement. En effet lorsqu'elle vit qu'on la croïoit bien éloignée de ses premiers sentimens de retraite, feignant l'obligation d'accomplir un vœu à Notre-Dame du Puy en Auvergne, elle partit pour Toulouse avec M. de Courances fon cousin germain qu'elle avoit engagé à l'accompagner dans ce voïage: elle y arriva le 7. Août 1602. & se retira aux Feüillantines, où à l'exemple de Madame Antoinette d'Orleans, qui s'y étoit consacrée au Seigneur un an auparavant, elle reçut l'habit le 15. Septembre de la même année 1602. étant pour lors dans la vingt-sixiéme année de fon âge: elle fut accompagnée jusqu'aux pieds des Autels par M. de Courances qui étant encore resté fix mois à Tou louse pour voir fi elle ne changeroit point de résolution, fuivit enfin son exemple, & méprisant tous les avantages qu'il pouvoit prétendre dans le monde, se retira dans l'Abbaïe de Feüillans, où il reçut l'habit & y persévera jusqu'à sa mort aussi-bien que Madame de Rosni qui mourut à Paris, où elle étoit venuë pour être Superieure de la nouvelle Maison qu'on y avoit établie comme nous l'avons dit ci-dessus.

Les Religieuses Feüillantines ont les mêmes Observances que les Religieux de cet Ordre, & elles ont toûjours été fous leur jurifdiction, ce qui leur fut accordé par le Pape Clement VIII. par sa Bulle du 10. Octobre 1606. Ce Pon

BERNAR- tife les exemta de la jurisdiction de l'Abbé de Citeaux & DINES RE- des autres Peres de l'Ordre, & les soûmit immédiatement D'ESPAGNE à celle des Feüillans. Quant à leur habillement il est aussi

JORME'ES

semblable à celui des Religieux.

Memoires Communiqués par le R. P. Dom Mouchy, Religieux de cet Ordre.

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Des Religieuses Reformées de l'Ordre de Citeaux en Espagne, dites de la Recollection on Recollettes.

L

A Réforme des Religieuses de l'Ordre de Cîteaux en Espagne appellées Recollettes, doit son commencement & fon progrès au zele & à la pieté des Abbesses du celebre Monastere de las Huelgas près Burgos, dont nous avons parlé dans le Chapitre trente cinquiéme. Agnés Henriquez, qui avoit été la premiere Abbesse triennale de ce Monaftere en 1587. aïant été élûë pour la seconde fois en 1596. apporta d'abord tous ses soins pour réformer celui de Perales qui étoit de sa dépendance & d'où l'Observance Réguliere avoit éré entierement bannie. Elle dispersa les Religieuses en d'autres Monafteres, & en fit venir de plus zélées en leur place pour y rétablir la régularité. Elle conçut ensuite le dessein d'une nouvelle réforme, & obtint pour cet effet au mois de Septembre 1599. une Bulle de Camille Cajetan, Legat en Espagne du Pape Clement VIII. Jeanne de Ayala, qui lui succeda quelques jours après dans la qualité d'Abbesse de las Huelgas, poursuivit l'execution de cette Réforme,& fit venir pour ce sujet à Valladolid des Religieuses, qu'elle tira des Monasteres de sa dépendance. Elle choisit pour cet effet celles qu'elle jugea les plus propres pour en supporter les austerités, & elle leur fit bâtir un Monastere sous le titre de Sainte Anne. Elle voulut qu'elles vêcussent selon l'esprit primitif de Citeaux, & elle chargea les Peres Gaspard de Weda & Augustin Lopez Religieux de la Réguliere Obfera vance d'Espagne de travailler à leurs Constitutions; mais la mort l'aïant prevenuë, elle ne put les faire accepter. Marie de Navarre, qui fut élûe Abbesse l'an 1601. transfera le Monastere de Perales à Valladolid dans celui de sainte Anne,

DINES RE

en aïant obtenu la permission du Pape Clement VIII. la BERNARmême année; & elle fit approuver l'an 1604. par Domini-P que Gymnafius Archevêque de Syponte, Legat en Espagne D'ESPAGNE. du même Clement VIII. les Constitutions qui avoient éré dressées pour ces Religieuses réformées. La même année celles du Monastere de Malaca, quoique soûmises à l'Evêque, voulurent vivre sous les mêmes Observances, aïant demandé seulement ces Constitutions, sans qu'on y envoïât des Religieuses de Valladolid pour y introduire la Réforme.

L'Abbesse de las Huelgas, Francoise de Villa Mizaria, qui fucceda à Marie de Navarre, fit approuver ces mêmes Constitutions par le Pape Paul V. l'an 1606. & obtint du même Pontife la permission de fonder d'autres Monasteres de cette Réforme. Ce fut en vertu de cette permission que cette Abbesse en fonda un à Tolede, y aïant envoïé pour faire cet établissement des Religieuses de Valladolid.

Les autres Abbesses de las Huelgas firent dans la suite d'autres fondations. Jeanne de Leyna fonda un Monastere à Talavera. Anne d'Autriche fille du Roi Philippe II. fit trois autres fondations : la premiere l'an 1615. à Briguera, la seconde à Madrid l'an 1616. dont le Monastere fut bâti par les liberalités du Duc Duzeda, & la troifiéme à Consuegra l'an 1617. sous le gouvernement d'Anne Marie Manriquia. Cette Réforme passa dans les Indes, Dom Christophle dela Camara Evêque des Canaries y aïant bâti un Monaftere pour ces Religieuses. Catherine de Arellano & Zuniga fille du Comte d'Aguillar, fit un nouvel établissement à Cafarubios l'an 1634. yaïantenvoïé des Religieuses de Valladolid. Cette Réforme a fait dans la suite de plus grands progrès.

Conformement à leurs Constitutions ces Religieuses se levent à deux heures après minuit pour aller à Matines : à. cinq heures, elles font l'Oraison mentale jusqu'à fix.qu'elles chantent Prime. Après Vêpres elles ont encore une heure d'Oraison Mentale. Elles prennent la discipline tous les Mercredis & Vendredis de l'année, & encore le Lundi pendant l'Avent & le Carême. Elles observent une exacte pauvreté, n'étant permis à aucune Religieuse d'avoir des pensions, & tout doit être en commun. Leur habit doit être d'une étoffe grossiere. Il leur est permis d'avoir des sandales au lieu de Touliers. Elles observent l'abstinence perpetuelle de la vian

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