fance du Bienheureux Joachim, conserve son menton, & BERNARquelques autres parties de fon Corps furentaussi distribuées TALLE. des Monafteres de son Ordre. Deux ans avant sa mort, il avoit écrit une protestation de foi, dans laquelle faisant le dénombrement de ses Ouvrages, dont il avoit écrit la plupart par ordre des Papes Lucius III. Urbain III. & Clement III. il declare qu'il n'a pas eu le tems de les donner à examiner pour les corriger : & comme il ne doute point qu'il n'y ait des choses sujettes à correction, non seulement dans ceux qu'il avoit achevés, mais aufli dans ceux ausquels il travailloit actuellement; il prie les Abbés de fon Ordre, en cas qu'il meure avant que d'y avoir mis la derniere main, & les avoir donnés à corriger, de les faire examiner par le faint Siége, se soû. mettant à la censure qu'il en fera, ne prétendant point soûtenir son opinion contre ses décisions, condamnant ce que 'Eglife condamne, & ne prétendant point s'éloigner de ce qu'elle croit. Après cette protestation, qu'on peut voir tout au long dans les Historiens de sa Vie, il me semble que ce faint Homme ne doit point être un problême, comme l'a avancé M. Hermant, dans son Histoire des Ordres Religieux. Dans le doute (dit-il) où l'on est de la pureté de sa Doctrine, & s'il s'est écarté de la créance de l'Eglise au sujet du Mystere de la sainte Trinité, dans son Livre contre le Maître des Sentences; il y a bien de l'apparence qu'aïant eu des sentimens plus Catholiques dans le Livre qu'il composa ensuite sous le titre de Pfeautier de dix Cordes, qui est une espece de retractation de ce qu'il avoit avancé d'abord; il auroit sans doute corrigé son premier Ouvrage, s'il avoit eu le tems de le mieux examiner, ou s'il avoit cru être dans l'erreur: aussi le Pape Innocent III. condamnant cet Ouvrage dans le Concile General de Latran l'an 1215. ne prononça rien contre la personne de l'Abbé Joachim, ni contre son Monastere;parce que (dit ce Pape) il avoit ordonné par un écrit signé de fa main, que l'on remît au saint Siége ses Ouvrages, & que dans cet écrit il avoit declaré qu'il croïoit fermement tout ce que l'Eglife Romaine croit. Nonobstant cette declaration du Pape Innocent III. quelques-uns ne laisserent pas d'inquiéter les Religieux de Ddd iij DINS D'ITALIE. BERNAR- Flore, les soupçonnant d herefie, auffi-bien que leur FonDINSDI dateur. Un Evêque de la Basilicate fut l'un de ceux qui se declarerent ouvertement contre eux : mais le Pape Honorius III. prit leur défense, & par une Lettre qu'il écrivit à ce Prélat l'an 1217. il lui défendit d'attaquer davantage ces Religieux fur le fait d'herefie, par rapport à la comdamnation que le Concile de Latran avoit faite du Livre de leur Fondateur, ni de souffrir que ses Diocésains les diffamaffent, puisque l'on ne pouvoit soupçonner d'heresie l'Abbé Joachim, comme l'avoit reconnu son prédecesseur, attendu que cet Abbé avant sa mort avoit soûmis ses Ouvrages à la censure de l'Eglife, & qu'il avoit declaré ne vouloir en aucune maniere s'éloigner de ce qu'elle croit. Comme on ne cessoit point de calomnier ces Religieux à ce sujer, & qu'on traitoit toûjours leur Fondateur d'Heretique, le même Pape adressa l'an 1221. une Bulle à l'Archevêque de Cosenza & à l'Evêque de Bifaccia, par laquelle il leur ordonnoit de faire publier dans toute la Calabre, qu'il regardoit l'Abbé Joachim comme Orthodoxe, & attaché à la Foi Catholique; que l'Observance qu'il avoit instituée étoit très falutaire, & qu'ils eussent à punir ceux qui auroient la temerité d'attaquer cet Ordre & de lui faire infulte. Cette persecution qu'on fufcita aux Religieux de Flore n'empêcha pas que leur Ordre ne s'étendît & ne fît du progrès: mais dans la suite les malheurs des tems ont aboli la memoire de plusieurs de ses Monasteres, dont les Religieux se sont retirés, ne pouvant plus y subsister, tant à cause de la diferte que des autres calamités dont étoient affligés les endroits où ils étoient situés. Gregoire de Laude en rapporte feulement trente-quatre, dont on a conservé le souvenir, du nombre desquels font quatre Monafteres de Filles, dont celui de fainte Helene dans le territoire delle Scale proche la ville d'Amalphi, qui avoit été fondé du vivant de l'Abbé Joachim, est le principal. Tous ces Monafteres obéïssoient à celui de Flore, dont l'Abbé étoit General de l'Ordre. Matthieu fut le premier fuccefleur de l'Abbé Joachim, & gouverna l'Ordre jusqu'en l'an 1234. qu'il le quitta pour monter fur le Siége Epifcopal de Cerenza. Cette Abbaïe de Flore eut toûjours des Abbés Reguliers TALIE. jusqu'à la mort de l'Abbé Evangeliste vers l'an 1470. que BERNAR Louis de faint Ange en fut le premier Commendataire. Il DINS D'Icommença à ruiner cette Abbaïe, & à faire violence aux Religieux, qui étant encore plus tourmentés sous l'Abbé Sauveur Rota son successeur, aimerent mieux quitter cette Abbaïe, & fous la conduite de Dom François de Notarion, allerent demeurer dans un autre lieu, où ils jetterent les fondemens d'un Monastere, qu'on nomme presentement Notre-Dame du Secours. L'Abbé Rota voulut cependant dans la suite reparer les torts que lui & fes prédeceffeurs avoient faits à cette Abbaïe. Il fit reparer l'an 1576. l'Eglife qui tomboit en ruine, y mit des ornemens, & fit bâtir le bourg qu'on nomme presentement S. Jean de Flore. L'Abbé Rota eut pour successeur le Cardinal Antoine Sanctorius, dit le Cardinal de Santa Severina, du nom de fon Archevêché. Il ne ressembla pas à ses prédecesseurs: car au lieu de diffiper les revenus de ce Monaftere, il les augmenta, & affigna cent cinquante ducats pour la Mense des Religieux, qui y étoient déja revenus. Alfonse Pisani son neveu qui lui fucceda à l'Archevêché de Santa-Severina, & à l'Abbaïe de Flore, imita sa pieté, embellit fon Monaftere, fit bâtir un Dortoir pour les Religieux, augmenta leur Menfe, & enfin se demit de cette Abbaïe en leur faveur, afin que joüiffant de tout le revenu, ils pussent être en plus grand nombre, servir Dieu avec moins de trouble & d'inquiétude, & afin de leur faciliter l'execution de ce qui avoit été resolu dans le Chapitre de Cîteaux de l'an 1505. qui étoit d'unir tous les Monafteres de l'Ordre de Flore à celui de Cîteaux, dont les Monasteres se trouvoient situés dans la Calabre & la Bafilicate. Depuis ce tems-là l'Abbaïe de Flore a été gouvernée par des Abbés Reguliers comme auparavant. Aux premieres Vêpres de la Fête de saint JeanBaptifte, & à la grande Messe, l'Abbé de ce Monaftere cite les Abbés de fa filiation, qui font au nombre de douze, à venir fatisfaire à la reconnoissance qu'ils lui doivent d'un cierge de deux livres. Ils doivent s'y trouver, & lorsqu'ils ne peuvent pas y venir, ils font obligés d'y envoïer quelqu'un pour faire leurs excuses, finon ils sont condamnés à une amende, à la volonté de ce même Abbé. Les ruines qui restent de cette Abbaïe font connoître quelle étoit son :: TALIE BERNAR. étenduë & fa magnificence, & que quelque soin que les DINS D'I. Abbés Commendataires bien intentionnés dont nous avons parlé,aïent pris pour la rétablir & l'embellir, auffi-bien que ses Abbés Reguliers qui leur ont succedé, ils n'ont pû réparer entierement les torts confiderables que les autres Abbés Commendataires lui ont caufés par leur avidité & leur mauvaise conduite. Tous les Monafteres de l'Ordre de Flore ne passerent pas à celui de Cîteaux. Le Monastere de saint Etienne del Bosco fut rendu, comme nous avons dit, aux Chartreux l'an 1513. & les Religieux de l'Ordre de saint Dominique ont aussi eu le Monastere de la Bagnara, qui étoit confiderable, aïant vingt-fix Eglifes de fa dépendance. L'on ne peut pas dire le tems que les autres Monasteres de l'Ordre de Flore pafferent à celui de Cîteaux : quelques-uns croient que ce fut vers l'an 1570. Celui de Flore qui étoit Chef de tout l'Ordre appartient, comme nous l'avons dit, à la Congregation de Calabre,auffi-bien que ceux de Fonte Lauretano au Diocése de Tropeia & de sainte Marie de Calabro dans la Campagne de Rome. Il y en a qui ont confondu cet Ordre avec celui de Cîteaux; mais il est certain qu'ils avoient des Observances differentes, puisque le Pape Gregoire IX. l'an 1227. défendit aux Religieux de Cîteaux de recevoir parmi eux ceux de Flore à cause que cet Ordre étoit plus austere. Jacques Grec & Gregoire de Laude, pour montrer la difference qu'il y avoit entre ces deux Ordres, rapportent l'ordre que les Religieux de Flore gardoient dans la récitation de l'Office Divin, qui étoit different de celui de Cîteaux: ceux qui ont confondu ces deux Ordres, font en quelque façon excusables, puisque l'on peut regarder l'Ordre de Flore comme une branche de celui de Citeaux: mais on ne peut excufer Schoonebeck, qui dans son Histoire des Ordres Religieux confondant l'Abbaïe de Flore en Calabre avec celle de Fleuri, ou faint Benoît fur-Loire en France, dit qu'on y conferve le Corps de faint Benoît queles Benedictins de la Congregation de faint Maur ont fait mettre dans une belle châsse. Quant à l'habillement des Religieux de l'Ordre de Flore, il étoit d'une étoffe grossiere & blanche, & à peu près femblable, quant à la forme, à celui de l'Ordre de Cîteaux. Ils alloient : |