CITEAUX. ORDRE DE du Septentrion, par où entroient les Moines pour chanter les Nocturnes & la Messe. Le mur de separation avoit une fenêtre grillée avec un rideau au dedans, par ou les Religieuses recevoient la Communion, même les malades qu'on y apportoit en quelque état qu'elles fussent: car les Religieux leur rendoient tous les services spirituels, sans jamais entrer dans la clôture ; & elles avoient un Frere Laïc pour leur Procureur, qui les servoit quant aux besoins temporels. L'Abbé Etienne avoit fait venir dans son Monastere des Religieux de Dalone, pour instruire les siens des Obfervances de Citeaux, qui se pratiquoient déja à Dalone, quoique ce Monastere ne fût pas encore aggregé à l'Ordre. Mais comme ils les traitoient durement & avec peu de discretion, comme s'ils avoient dû sçavoir tout d'abord les pratiques Monaftiques, ils s'en plaignirent au Bienheureux Etienne, qui les avoit accoûtumés à être traités charitablement: mais il ne leur répondoit qu'en les exhortant à la patience. Ce faint Abbé aïant appris que le Pape Eugene étoit en France, & qu'après le Concile de Reims il étoit venu à Cîteaux,alla l'y trouver pour obtenir par son moïen d'être aggregé à l'Ordre. Le Pape fit appeller Rainard Abbé de Cîteaux, & lui recommanda Etienne, pour le regarder comme son fils, & l'associer à l'Ordre. Rainard le presenta aux Abbés afsemblés en Chapitre General, & leur aïant declaré l'ordre du Pape, ils reçurent Etienne tout d'une voix, & l'assignerent à la Maison de Cîteaux pour être de sa generation. Etienne retourna à Obasine, amenant ceux que l'Abbé de Cîteaux lui avoit donnés pour Maîtres dans l'Observance ; sçavoir, deux Moines Prêtres, & deux Freres Laïcs. Ces nouveaux Maîtres furent bien differens de ceux de Dalone; ils instruisoient doucement, familierement, & avec une grande discretion leurs Disciples. Le changement qui fit le plus de peine à Etienne, fut d'accorder l'usage de la viande aux malades, conformément à la Regle. Les Monasteres qui étoient de la dépendance d'Obafine, entrerent aussi dans l'association. Il y en avoit quatre, y compris celui de Filles dont nous avons parlé. Les trois Monasteres d'Hommes, • étoient ceux de la Valette au Diocése de Tulles, Gondon au Diocése d'Agen, & Bonne-Aigue au Diocése de Limoges. Obasine a encore produit depuis la Frenade au Dio cése de Xaintes, & Gros-Bois au Diocése d'Angoulême. ORDREDE Le Bienheureux Etienne vécut encore onze ans, & mourut Cirra. le 8. Mars 1159. L'Abbaïe d'Obasine est la quinziéme Fille de Citeaux, & toutes les Filles de sa generation, à l'exception de la Ferté, Pontigni, Clairvaux & Morimond, qui ont leurs filiations separées, n'ont pas produit plus de cent foixante & dix autres Monasteres, qui avec les vingt-fix Filles de sa generation, ne font que quatre-vingt-seize Monafteres, dont toute sa filiation est composée. Le Chapitre General se tient toûjours à Citeaux: autrefois on le convoquoit tous les ans : ce fut saint Etienne qui en prescrivant les Loix de cet Ordre, voulut que tous les Abbés des Monasteres vinsent tous les ans à Cîteaux rendre compte de leur conduite & de celle de leurs Religieux; & cette institution parut si belle & fi avantageuse à l'Eglife, que tous les autres Ordres, qui dans la suite tinrent aussi des Chapitres Generaux, prirent celui de Cîteaux pour modele, & en tirerent leurs principaux Reglemens. Elle fut aussi approuvée par le Concile de Latran, qui se tint sous le Pape Innocent III. l'an 1215. puisqu'il commanda à tous les Abbés & à tous les Prieurs de chaque Province, qui n'étoient pas unis en Corps d'Ordre, de célébrer entr'eux, ( au moins tous les trois ans ) un Chapitre General, & d'y appeller dans les commencemens deux Abbés de l'Ordre de Citeaux, pour y présider, & pour leur apprendre la maniere de s'y conduire, comme nous avons déja remarqué en un autre endroit. Ce Chapitre General qui se tenoit à Citeaux regulierement tous les ans au mois de Septembre, comme nous l'avons déja dit, commença à souffrir quelque interruption en 1411. par rapport aux guerres qui survinrent dans ce temslà, qui empêchant les uns d'y venir, empêcherent la tenuë du Chapitre : ensorte qu'on le differoit de deux en deux ans, ou de trois en trois ans, selon que la guerre le permettoit. Il y a même eu des interruptions de vingt années ; mais le Pape Alexandre VII. par le Bref de réformation de cet Ordre de l'an 1666. a ordonné qu'il fe tiendroit à l'avenir de trois ans en trois ans. Quoiqu'au commencement, on tînt ce Chapitre tous les ans, il y avoit neanmoins de la distinction entre les Abbés CITEAUX ORDRE DE qui étoient obligés d'y assister, parce qu'il auroit été trop pénible & même impossible à ceux qui étoient éloignés des'y rendre si souvent. C'est pourquoi les Abbés d'Irlande,d'Ecoffe & de Sicile, ne devoient venir que de quatre en quatre ans: ceux de Syrie & de Palestine seulement la septiéme année. Les Abbés de Norvege, de Grece, de Livonie & ceux d'Hongrie de trois en trois ans. Il y avoit aussi des Reglemens qui marquoient le tems que les Abbés de Galice, de Portugal, de Leon, de Castille, de Navarre, d'Arragon, de Catalogne, de Frize & d'autres Provinces, devoient s'y trouver. Les Abbés de France n'y pouvoient mener que deux ferviteurs & deux chevaux jusqu'aux quatre premieres maifons de l'Ordre, c'est-à-dire, jusqu'à la Ferté, Pontigni, Clairvaux, & Morimond, & les autres Abbés des Provinčes étrangeres, deux ferviteurs & trois chevaux;il n'y a que les quatre premiers Abbés d'exceptés, avec les Abbés de Savigni & de Prulli, qui peuvent entrer dans Cîteaux avec quatre chevaux, & mener avec eux leur Secretaire. La langue Latine est seule en usage dans ce Chapitre General, & celui de 1242. fit un Décret par lequel il fut arrêté que fi quelqu'un qui n'avoit pas l'usage de la Langue Latine étoit élû, fon élection feroit nulle, & les électeurs & celui qui y auroit présidé, feroient au pain & à l'eau pendant un fort long-tems. Ce Chapitre ne laisse rien d'impuni, de forte que fi quelqu'un a fait quelque faute, il doit s'en accuser, & s'il ne le fait pas, un autre le proclame, c'est-à-dire, le dénonce, & l'Abbé lui donne penitence. L'Abbé de Cîteaux conjointement avec les Deffiniteurs, juge & regle toutes les affaires qui se proposent dans l'Affemblée: ce font eux qui composent le Tribunal du Chapitre General, & c'est dans les Deffiniteurs que reside la pleine autorité du Chapitre. L'Abbé de Cîteaux nomme le premier, quatre de ces Déffiniteurs, de sa generation speciales enfuite les quatre premiers Abbés lui présentent chacun cinq Abbés de leurs generations, dont il en choifit quatre de chacune, qui avec les quatre qu'il a choisis de sa generation, font le nombre de vingt; & chacun de ces quatre premiers Abbés, avec l'Abbé de Cîteaux tenant aussi lieu de Deffiniteurs, le Deffinitoire est composé de vingt-cinq Deffiniteurs. |