2 jardins ou granges, soit qu'ils les eussent à ferme, ou leur ORDRE D vie durant, & que toutes fortes de revenus seroient appli- Citas. qués à la bourse commune. Que les portes des Monasteres en seroient exactement fermées aux heures marquées, pour empêcher les sorties & les entrées, à des heures peu convenables à la regularité & au bon exemple. Qu'il n'entreroit plus de femmes dans les lieux Reguliers, à moins que ce ne fussent de grandes Dames ou de vieilles femmes, pour avoir soin de la basse court & des laitages. Que les Religieux ne marcheroient plus dans le païs qu'avec leurs habits Reguliers, ou au moins avec un manteau & un chaperon dessus, qu'ils ne frequenteroient plus les fêtes publiques, les spectacles & les cabarets; & ne porteroient plus d'armes offenfives, & s'il en étoit besoin pour se défendre des chiens, que ce seroit des armes qui ressentissent la gravité Religieuse. Qu'aucun Religieux ne pourroit tenir les enfans sur les Fonts de Baptême, ni avoir des comperes & des comeres, & ne pourroit proferer des sermens ou paroles deshonnêtes. Que suivant les Ordonnances du Pape Benoît XII. toutes les cheminées des chambres à feu qui font dans les Dortoirs seroient ruinées, & qu'à l'avenir ils n'auroient plus de lits de plume,de matelats, de draps de toile, ni de chemises de lin, mais seulement de serge. Quant à l'abstinence de la viande, qu'ils se conformeroient à l'usage introduit dans la plupart des Monafteres, où l'on ne mangeoit point de viande les Lundis, les Mercredis, les Vendredis & les Samedis de chaque semaine. La confirmation & l'execution de ces Articles furent renvoïées au premier Chapitre General qui se tiendroit à Citeaux ; mais bien loin qu'ils fussent reçus, quelques Religieux firent sous main donner un Arrêt par le Parlement de Dijon, sur les remontrances du Procureur Général de ce Parlement, par lequel ces Articles. furent caffés, comme aïant été faits à Paris au préjudice des statuts de l'Ordre, & des Arrêts de cette Cour, qui veulent que les Assemblées Générales de l'Ordre se tiennent à Citeaux. Ainsi ces Articles demeurerent sans effet, & la réforme générale de cet Ordre ne se fit que sous le Pontificat du Pape Alexandre VII. Cependant plusieurs Monasteres qui ne fouhaitoient que la Regularité & le bon ordre, eurent recours à la puissance Tome V. Zz ORDRE DE des Princes, pour s'exemter de la Jurisdiction des premiers CITEAUX. Abbés de l'Ordre; tels furent ceux des Provinces de Tof cane & de Lombardie, qui par l'entremise de Loüis- Marie Sforce Duc de Milan, firent une Congregation separée l'an 1497. à l'exemple de celle de Castille: d'autres les imiterent dans la suite. Dom Jean de la Barriere, Abbé de NôtreDame de Feüillans en France,commença en ce Roïaume la réforme qui a pris le nom de cette Abbaïe. Dom Denis l'Argentier, Abbé de Clairvaux, établit aussi en France une autre Réforme sous le nom d'étroite observance. Il s'en est encore formé plusieurs autres, que nous rapporterons en particulier dans la suite de cet Ouvrage. Nous croïons avoir suffisamment parlé jusqu'à present de tout l'Ordre en General, qui pendant plus d'un siécle fut si puissant, qu'il gouverna presque toute l'Europe pour le fpirituel & pour le temporel. Il a aussi rendu de grands services à l'Eglife, par les grands Hommes qui en font fortis. Ces Religieux furent emploïés par le Pape Innocent III. pour la conversion des Heretiques Albigeois. Arnaud, Abbé de Cîteaux, avec Pierre de Châteauneuf & Raoul, furent Legats de ce Pape dans la Croisade que l'on fit contre les Heretiques. Foulques, Archevêque de Toulouse, qui étoit Religieux de cet Ordre, y fit paroître son zele, aussi-bien que Gui, Abbé de Vaux-Cernai. Quelques Auteurs disent qu'il en est sorti six Papes;mais on auroit bien de la peine à en trouver d'autres qu'Eugene III. & Benoît XII. Il y a eu aussi environ quarante Cardinaux, un grand nombre d'Archevêques, d'Evêques, & d'illustres Ecrivains, dont on peut voir les noms dans Ange Menriqués & Charles Vich, qui en ont donné le Catalogue. Plusieurs Rois & Reines ont préferé l'habit de cet Ordre à la Pourpre & au Diadême. Plusieurs Princes & Princesses les ont imités ; & dans le seul Monastere de Trebnitz en Silefie, l'on compte plus de quarante Princesses de Pologne qui y ont pris l'habit. Ce qui rend encore cet Ordre recommandable, font les Ordres Militaires de Calatrava, Alcantara, & Montesa en Espagne, d'Avis & de Christ en Portugal, qui lui font foumis. L'Abbé de Cîteaux est seul Chef, Superieur General, & Pere de l'Ordre de Citeaux, qualité qu'on lui a disputée & dans laquelle il a été maintenu par Arrêt Contradictoire ORDRE DB du Conseil d'Etat du Roi du 19. Septembre 1681. mais fon CirEAUX. pouvoir est plus limité que celui des autres Generaux d'Ordre: car il ne peut souvent rien faire qu'avec le consente. ment du Chapitre General. Il est premier Conseiller né au Parlement de Dijon, & a féance aux Etats de Bourgogne. Il y en a eu jusqu'à present cinquante-huit, dont vingtquatre font reconnus pour Saints & Bienheureux. Jean de Cirey, XLII. Abbe, obtint du Pape Innocent VIII. que l'Abbé de Citeaux & ses successeurs pourroient donner à tous les Religieux de l'Ordre, le Soû-Diaconat & le Diaconat, & que les quatre premiers Abbés les pourroient conferer aux Religieux seulement de leurs filiations. Cette Abbaïe a vingt-fix Filles immédiates, qu'on appelle de sa generation, qui en ont produit d'autres;& sa filiation s'étend en France,en Espagne,en Savoye,en Flandres, en Angleterre & en Dannemarck, où l'Abbaïe d'Hareswal au Diocéfe de London en avoit produit trois autres: mais l'Heresie qui domine dans ces deux derniers Roïaumes, y a caufé la ruine des Monafteres de cet Ordre. Entre les Filles de la generation de Citeaux, l'on compte P'Abbaïe d'Obafine, qui a été Chef d'une Congregation. Le Bienheureux Etienne en fut le Fondateur. Il étoit né de parens de condition médiocre dans le Limousin. Après avoir fait ses études, il fut ordonné Prêtre, & voulant se donner entierement à Dieu, il se retira avec un Compa• gnon dans la folitude d'Obafine, où en peu de tems il eut plusieurs Disciples. Il y fonda un Monaftere, & reçut la benediction Abbatiale l'an 1142. des mains de Geraud Evêque de Limoges, qui donna l'habit Monastique à tous ceux de ses Disciples qui étoient Clercs, laissant les autres dans l'habit qu'ils portoient auparavant. Comme il avoit aussi reçu des femmes, dont il avoit converti un grand nombre, l'Evêque, le nouvel Abbé & ses Moines, menerent en proceffion les Religieuses au Monastere qui leur étoit préparé, où l'Abbé les enferma pour n'en fortir jamais, sous quelque prétexte qué ce fût. Leur Eglise étoit disposée, comme nous voïons encore celles des anciens Monafteres de Filles; c'està-dire, que la partie-orientale comprenant l'Autel, étoit separée du reste par une muraille, & avoit une porte du côté |