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de bois peint. Il retrancha le grand nombre de chandeliers, ORDRE DE & n'en referva qu'un de fer. Il condamna les encenfoirs pré- CîTEAUX, cieux, & n'en permit que de cuivre ou de fer. Les chafubles ne devoient être que de futaine ou de lin, auffi-bien que les aubes & les amits, fans or ni fans or ni argent. Il retrancha l'ufage des chapes, des dalmatiques & des tuniques. Les étoles & manipules devoient être feulement de drap, fans argent ; & il permit seulement que les calices fuffent d'argent doré, auffi-bien que les chalumeaux, mais jamais d'or.

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Il ya deux chofes à remarquer dans ces Reglemens ; la premiere eft qu'ils femblent condamner les ufages qui s'étoient introduits dans Cluni, où tout ce qui fervoit à l'Eglife étoit non feulement précieux, par rapport à fa matiere, mais encore majeftueux par rapport à la beauté du travail, & à la grandeur de plufieurs chofes qui fembloient n'être utiles que pour l'ornement de l'Eglife, tels qu'étoit certaine couronne d'or, d'argent, ou de cuivre,qui portoit un grand nombre de chandeliers, laquelle couronne étoit fufpenduë au milieu de leur Choeur, & des chandeliers à branches, d'une grandeur fi extraordinaire, que faint Bernard les traite dans fon Apologie à l'Abbé Guillaume,) d'arbres ( élevés au milieu des Eglifes, qui n'étoient remarquables que par la quantité du métail dont ils étoient compofés, par beauté de leur travail,& par le grand nombre de leurs pierreries, qui ne les faifoient pas moins reluire que les lumieres dont ils étoient chargés; lefquels chandeliers ce Saint condamne, auffi-bien que ces couronnes & ces autres meubles précieux, les traitant tous de chofes inutiles & fuperfluës, qui ne fervent qu'à ôter la devotion & le refpect dus aux Eglifes, par l'attention qu'on donne plûtôt à admirer leur beauté & leur magnificence, qu'à offrir à Dieu des facrifices de loüanges,& plus capables d'infpirer de la vanité que le mépris du monde, & le repentir des pechés. Ce qui nous donne lieu de croire que par ces Reglemens les anciens Religieux de Cîteaux vouloient condamner la magnificence de Cluni: c'est qu'outre la grande fimplicité ou pauvreté de leurs ornemens facrés, un de leurs principaux Reglemens étoit qu'ils n'auroient dans leur Eglife qu'un feul chandelier de fer, comme voulant dire par là que cette grande

ORDRE DE Couronne & ces chandeliers à bras étoient inutiles & contre CITEAUX. la pauvreté.

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La feconde remarque c'eft ce Reglement qui ordonnoit le chalumeau avec lequel ceux qui devoient communier fous les deux efpeces tireroient le précieux Sang,ne feroit que d'argent doré : d'où il eft facile de conclure que quoique la Communion fous les deux efpeces fût déja abolie,l'Ordre de Câteaux ne laiffa pas de conferver cet ufage encore plufieurs années pour ceux qui fervoient à l'Autel: ce qui dura, felon les apparences, jufqu'en l'année 1437. puifque Martin de Vargas, Auteur de la Reforme d'Efpagne, dont nous parlerons dans la fuite, aïant confulté fur ce fujet le Pape Eugene IV. auffi-bien que fur quelques autres difficultés, Louis Barbo, Evêque de Trévise, Fondateur de la Congregation de fainte Juftine de Padouë, que le Pape avoit commis pour en décider, ordonna que les Religieuxde Cîteaux de cette Obfervance d'Espagne,ne communieroient plus fous les deux efpeces, même ceux qui fervoient à l'Autel, & que les Prêtres pour l'élevation du Calice, fe conformeroient à l'Eglife Romaine, en ne montrant au peuple le Calice qu'après l'élevation de l'Hoftie: ce qui fait voir encore que l'Ordre de Cîteaux ne fe conformoit pas en cela à l'Eglife Romaine. Nous avons fait voir ailleurs qu'il y a des Monafteres qui ont confervé jufqu'à prefent la Communion fous les deux efpeces à certains jours de l'année, comme ceux de Cluni & de faint Denis en France, où l'on fe fert d'un chalumeau d'or pour prendre le précieuxSang de Jesus-Christ.

Le nombre des Religieux de Cîteaux diminuant par la mort de ceux que Dieu appelloit à lui, & perfonne ne fe prefentant pour remplir leur place, faint Etienne perdoit l'efperance de laiffer des fucceffeurs : car non feulement l'aufterité de la vie étoit fi rigoureufe en ce Monaftere,que perfonne ne vouloit fe foûmettre à un joug fi pesant; mais encore la pauvreté étoit fi grande dans le commencement du Gouvernement de cet Abbé, que les Religieux furent contraints quelquefois de vivre d'aumône. Mais Dieu ouvrit les entrailles de fa mifericorde, & exauça les prieres de fes Serviteurs,aïant infpiré à faint Bernard l'an 1113. & à trente de fes Compagnons d'embraffer eette vie penitente. Ils vin

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CÎTEAUX

rent à Cîteaux demander l'habit: ils y furent reçus avec ORDRE DE beaucoup de joï, & y donnerent au monde de fi grands exemples de vertu, que plufieurs perfonnes touchées de leurs pechés renoncerent au fiécle, & voulurent à leur imitation embrasser la même vie, afin d'expier par une vie fi penitente les defordres de leur vie paffée: le nombre de ces nouveaux Difciples étoit fi grand, que faint Etienne voïant que fon Monaftere n'étoit pas fuffifant pour les loger tous, fongea à en établir de nouveaux. Le premier qu'il fonda l'année 1113. fut celui de la Ferté, dans le Diocéle de Châlons, où il mit pour Abbé Bertrand. L'année fuivante il fonda Pontigni, au Diocéfe d'Auxerre, & y envoïa faint Hugues pour le gouverner. Clairvaux, dans le Diocéfe de Langres, aïant été bâti l'an 1115. faint Bernard en fut le premier Abbé, & la même année Arnaud, frere de Frideric Archevêque de Cologne, fut envoïé à Morimond, auffi dans le Diocese de Langres, pour y faire un nouvel établif fement. L'Ordre fut encore augmenté en 1118. par la fondation de quatre autres Monafteres, qui furent Prully, la Cour-Dieu, Trois-Fontaines, & Bonnevaux; & l'année fuivante 1119. Bouras, Fontenai, Cadovin & Mazan, furent auffi fondés. Pours lors faint Etienne forma un Corps de ces Monasteres, & voulant les unir par les liens de la charité & d'uniformité d'Obfervance, afin qu'ils puffent fe fecourir les uns les autres, dreffa avec les Abbés, & quelques Religieux de ces Monafteres, le premier Statut de l'Ordre, qu'il appella la Carte de Charité, laquelle contient en cinq Chapitres tous les Reglemens neceffaires pour l'établiffement & la conduite de cet Ordre, & pour maintenir la regularité, l'union, la dépendance & la charité.

Le premier Chapitre de cette Carte ordonne l'Obfervance Litterale de la Regle de faint Benoît fans glofe & fans difpenfe, ainfi qu'on l'observoit à Câteaux. Le second détermine le pouvoir des Abbés, celui de l'Abbé de Cîteaux fur les Monasteres de la Ferté, Pontigny, Clairvaux & Morimond qui font fes quatre premieres filles, & celui des Abbés de cés quatre premiers Monafteres fur l'Abbé & le Monaftere de Cîteaux. Le troifiéme regle la maniere de tenir les Chapitres Generaux, le pouvoir de ces Chapitres, l'obligation qu'ont les Abbés de s'y trouver, le maniere d'y ter

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