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VALLOM-
BREUSE.

ORDRE DE Chapitres de la ville, qui vont enfemble y chanter la grande Meffe le jour de faint Marc. Celle des Religieux de faint Nicolas un des jours des Rogations ; & celle du jour de la Fête Dieu, que l'on appelle du Sucre, & qui eft generale, non feulement le Clergé Seculier & Regulier, mais auffi toutes les Compagnies & Communautés Seculieres de la ville y affiftent au nombre de plus de deux mille perfonnes, afant chacun un flambeau à la main, & paffent tous au travers du Choeur des Religieufes.

Memoires envoies d' Angers en 1712 par M. le Maffon, Chanoine & ancien Curé de la Trinité.

CHAPITRE XXVIII.

De l'Ordre de Vallombreuse, avec la Vie de faint Jean
Gualbert, Fondateur de cet Ordre.

'ORDRE de Vallombreuse a eu pour Fondateur faint

L'Jean Gualbert. Son pere qui le nommoit aufli Jean

fe

Gualbert, Seigneur de Petroio au Val dé Pefa, étoit d'une
ancienne famille qui defcendoit, à ce que l'on prétend, de
Bonacorfo Bisdomini, lequel avoit été fait Chevalier par
l'Empereur Charlemagne. Il eut deux fils dont l'un s'appel-
loit Hugues, & l'autre, qui étoit nôtre Saint s'appelloit fean.
Il étoit déja en état de porter les armes lorfqu'un de leurs
parens aïant été tué (quelques-uns veulent que ce fut Hu-
gues fon
propre frere) fon pere l'engagea à en prendre ven-
geance, & l'obligea à chercher comme lui toutes fortes de
moïens pour perdre celui qui avoit commis cet homicide.

Un jour que ce Saint allant à Florence avec les écuïers, penfoit en lui-même où il pourroit aller chercher fon ennemi, tant pour obéir aux ordres de fon pere, que pour fatisfaire à fa propre vengeance, il ne fut pas moins joïeux que furpris lorfque par un hazard auquel il ne s'attendoit pas, il apperÇut celui dont il avoit juré la perte qui venoit au devant de lui dans un lieu fi étroit que ni l'un ni l'autre ne pouvoit se détourner. Il crut que la fortune lui préfentoit une occafion favorable de s'en défaire & il fe préparoit déja à lui paffer fon épée au travers du corps, lorfque fon adverfaire fe jettant promptement à ses pieds, le fupplia les bras étendus en Croix

Religieux de Vallombreuse

en

habit ordinaire dans la maison

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VALLOM-
BREUSE.

de lui accorder le pardon pour l'amour de Jefus-Chrift cru- ORDRE DE cifié. Cette priere le défarma auffi tôt, & fe reffouvenant que le Sauveur étant en Croix avoit pardonné à fes ennemis, il appaifa fa fureur & tendant la main au fuppliant, il l'afsura qu'il lui pardonnoit pour toûjours.

Après cette action heroïque étant entré pour faire fa priere dans l'Eglife de faint Miniat ( qu'il trouva peu après fur fon chemin ) le Crucifix devant lequel il prioit,baiffa la tête, & s'inclina, comme pour le remercier du pardon qu'il avoit fi genereufement accordé pour fon amour : l'on garde encore ce Crucifix dans cette Eglife.

Ce miracle changea de telle forte l'efprit & le cœur de ce jeune homme,qu'il penfa ferieufement à quitter le monde & à fe donner tout à Dieu. Quand il fut arrivé prés de Florence, il y envoïa fes gens fous prétexte de preparer le logis; par ce moien se trouvant feul & fans témoin, il retourna fur fes pas à faint Miniat, où aïant demandé avec beaucoup d'inftance, l'habit Monaftique, l'Abbé pour l'éprouver lui représenta toutes les rigueurs de la vie qu'il vouloit embraffer, & combien lui qui étoit de qualité, auroit de peine à fouffrir la pauvreté dans la Heur & la force de fa jeuneffe. Ces gens cependant voïant qu'il ne venoit point à Florence, retournerent à la maison,& avertirent fon pere de ce qui s'étoit paffé: ce qui obligea ce Gentilhomme qui en fut allarmé, d'aller à Florence, où aïant cherché par tout fon fils, & l'aïant enfin trouvé dans faint Miniat, il le redemanda à l'Abbé & aux Religieux, les menaçant de plufieurs maux s'ils ne lui accordoient fa demanmais Jean Gualbert animé d'un esprit extraordinaire de ferveur, & craignant que les Religieux ne fe rendiffent aux volontés de fon pere, aïant trouvé la cucule d'un des *Religieux, la porta à l'Eglife, la mit fur l'Autel, & a rés s'être coupé les cheveux, il s'en revêtit avec joïe en préfence de toute la Communauté qui ne put s'empêcher de lui applaudir. Cette action heroïque, de zele & de pieté aïant été rapportée à son pere, il en fut tellement touché, qu'il ceffa fes menaces contre les Religieux, eut pour lui des fentimens plus doux, & approuva enfin fa réfolution.

de:

II s'occupa pendant l'année de fon Noviciat à déraciner de

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BREUSE.

ORDRE DE fon cœur le vice & à acquerir de folides vertus. Il emploïa cela les abftinences, les jeûnes, les veilles & les macerapour tions corporelles. Son humilité étoit très grande, & il obéïffoit aveuglément à la volonté de fes Superieurs. A peine eut-il-fait profeffion,que l'Abbé de faint Miniat étant mort, il fut élû en fa place par les fuffrages de toute la Communauté. Mais il fit tant d'inftance pour être déchargé de cette dignité, qu'il fit confentir les Religieux à proceder à une nouvelle élection.

Les Historiens de l'Ordre de Vallombreuse prétendent qu'aprés la renonciation de ce Saint à cette Abbaïe, un Religieux nommé Ubert l'obtint, moïennant une fomme d'argent qu'il donna à l'Evêque de Florence que quelquesuns difent avoir été Lambert, d'autres Atthon I. que ce fur le fujet pourquoi faint Jean Gualbert quitta ce Monastere, & qu'avant qu'il fe retirât dans la folitude il alla à Florence avec un autre Religieux, où voulant foulever la populace contre l'Evêque qu'ils accufoient publiquement de fimonie, ils furent fort maltraités par ceux qui favorifoient ce Prélate mais Pere Mabillon n'attribuë la retraite de faint Jean Gualbert & fa fortie du Monaftere de faint Miniat qu'à l'amour qu'il avoit pour la folitude afin d'y vivre éloigné du tumulte du monde. Ni Lambert ni Atthon, dit ce fçavant Hiftorien,n'ont point été fimoniaques. Lambert au contraire étoit un très faint homme, qui animé du defir d'une plus grande perfection quitta fon Evêché l'an 1032. pour embraffer la vie Monaftique, & Atthon fon fucceffeur eft appellé par Ughel un Prélat digne d'une memoire éternelle pour fes belles actions & les grands bienfaits dont il enrichit, tant fon Eglife Cathedrale, que le Monaftere de faint Mi

niat.

Ce fut donc l'amour de la folitude & le defir d'une plus grande perfection qui fit fortir faint Jean Gualbert de faint Miniat avec cet autre Religieux, & aïant paffé par divers lieux, ils vinrent à Camaldoli & y demeurerent affez longtems. Le Prieur, qui étoit encore Pierre Daguin, voulut engager Jean Gualbert à prendre les Ordres & promettre ftabilité en ce lieu, mais il le refufa & fe retira à Vallombreufe. La raifon qu'en donnent le Pere Mabillon & M. l'Abbé Fleury, c'est parce que l'attrait de ce Saint étoit

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