ORDRE DE quatre principales Fêtes de l'année , comme aussi en tour tems dans les Hôtelleries & chez les Seculiers, lorsque les Religieux feroient en voïage. CLUNI. Jean de Bourbon (fils naturel de Jean de Bourbon Comte de Clermont, ) qui avoit été Religieux du Monaftere de S. André d'Avignon d'où il fut tiré pour monter sur le Siége Epifcopal du Puy en Vellay, aïant été pourvû en Titre de l'Abbaïe de Cluni en 1443. fit encore de nouveaux Statuts l'an 14.58. pour le maintien de la discipline Reguliere, ou du moins pour empêcher que le relâchement n'augmentat ; ordonnant entr'autres choses que les Religieux diroient Matines la nuit, ne porteroient point des chemises de lin ,coucheroient avec leurs habits, dormiroient dans un même dortoir, mangeroient dans un même refectoire, & ne porteroient point d'habits qui ressentissent la vanité : ce qui fut encore observé sous les Abbés Jacques d'Amboise, Aimard de Poiffi, & Godefroi d'Amboise qui étoient encore Reguliers. Mais le Cardinal Jean de Lorraine aïant été postulé pour Abbé de Cluni en 1528. à la recommandation du Roi François Premier, & cette Abbaïe étant tombée en Commende, les Religieux tomberent aussi bien-tôt aprés dans le relâchement, & les autres Maisons de la dépendance de Cluni suivirent malheureusement l'exemple de seur Chef. Le Cardinal Charles de Lorraine, aïant succedé à Jean de Lorraine, voulut à fon retour du Concile de Trente, reformer cet Ordre en vertu du Decret de ce Concile qui avoit ordonné la reformation des Monafteres. Il fit assembler pour cela un Chapitre General, où on fit des Statuts; mais Tinterruption de ce Chapitre en empêcha l'execution. Dom Claude de Guise Abbé Regulier, bâtard de la maison de Lorraine, fucceda au Cardinal de Lorraine, & le Cardinal de Guise, Loüis de Lorraine fucceda à Dom de Guise. Ce Cardinal chargea Dom Jacques de Vesni d'Arbouze, pour lors Grand-Prieur de Cluni, de travailler au rétablissement de la difcipline reguliere. Il fit quelques Reglemens pour ce sujet, qui furent approuvés en 1621. & ce Prélat étant mort peu de tems après, Dom d'Arbouze lui fucceda, poursuivit son projet, & introduisit à Cluni la reforme, dont nous parlerons dans le Chapitre suivant. Dom d'Arbouze qui fut le dernier Abbé Regulier, se voïant avancé en âge, demanda pour Coadjuteur le Cardinal Armand Jean du Plessis de Ri- ORDRE DE chelieu, Ministre d'Etat, qui eut pour successeur l'an 1642. CLUNI. Armand de Bourbon Prince de Conti. Le Cardinal Jules Mazarin sur la demiffion de ce Prince fut poftulé pour Abbé l'an 1654. le Cardinal Renard d'Est fut aussi Abbé de Cluni en 1661. mais après sa mort qui arriva l'an 1672. le Siége Abbatial fut vacant pendant quelques années, & l'Ordre pendant ce tems là, fut gouverné par la Voute de Cluni, c'est-à-dire, par le conseil de l'Abbé, composé de douze Officiers ou Senieurs de l'Abbaïe de Cluni, parce que toutes les affaires qui surviennent pendant l'intervalle des Chapitres Generaux passent par le Tribunal, en l'abfence de l'Abbé hors du Roïaume, ou pendant la vacance du Siége Abbatial, & il a fur tout l'Ordre toute jurifdiction spirituelle & temporelle. Pendant la vacance du Siége Abbatial, on tint par Ordre du Roi Loüis XIV. dans le College de Cluni à Paris deux Chapitres Generaux en 1676. en 1678. en prefence de l'Archevêque de Paris François de Harlai, du Pere de la Chaise de la Compagnie de Jesus, Confeffeur du Roi, & de M. Pelissons, Maître des Requêtes, auquel Sa Majesté avoit donné l'administration generale du temporel de l'Abbé. Ces Chapitres furent convoqués par Dom Pierre du Laurens Grand-Prieur de Cluni, depuis Evêque de Bellai. On reçut dans celui de 1676. les Statuts de Jean de Bourbon faits en 1458. Les Religieux de l'ancienne observance promirent de les suivre, à l'exception des explications, modifications & restrictions dont ils convinrent dans leur deffinitoire, c'està-dire, en retranchant tout ce qui leur parut trop austere & trop gênant ; & les Reformés promirent reciproquement de les executer en ce qui seroit conforme à leur obfervance; c'est-à-dire, en ce qui ne diminueroit rien de leur austerité, sans que ni les uns ni les autres pussent être obligés à davantage. Le Roi approuva les Reglemens de ce Chapitre, par ses Lettres patentes du mois de Septembre de la même année ; & en accorda d'autres au mois d'Avril 1679. pour confirmer ce qui s'étoit passé au Chapitre General de l'an 1678. Après que le Siége Abbatial eut été vacant pendant onze ans, l'on proceda à l'élection d'un nouvel Abbé l'an 1683. CLUNI. ORDRE DE le Cardinal de Boüillon, Emmanuel Theodose de la Tour d'Auvergne, pour lors Grand Aumônier de France, qui eft mort Doïen du sacré College l'an 1714. fut poftulé & reconnu pour Abbé Chef de l'Ordre le 5. Mars de la même année 1683. & fur le refus que fit le Pape Innocent XI. d'accorder des Bulles à ce Prélat, le Roi par un Arrêt du Conseil d'Etat du mois de Decembre de la même année, lui permit de prendre poffeffion de cette Abbaïe, en vertu d'une Bulle du Pape Leon X. de l'an 1518. qui donne pouvoir aux Religieux de Cluni de proceder à l'élection de leur Abbé, le Siége étant vacant, & à l'Abbé le droit d'en prendre l'adminiftration, & de disposer des Benefices à sa nomination, sans attendre aucune confirmation, pour laquelle il se pourvoiroit en Cour de Rome dans les fix mois après son éle Aion, Le Cardinal de Boüillon tint un Chapitre General l'an 1685. & obtint enfin ses Bulles du Pape Alexandre VIII. l'an 1690. Il fut delegué en 1693. par le Pape Innocent XII. pour travailler à la reformation de cet Ordre, & presida en cette qualité au Chapitre qui se tint la même année, où il crut être en droit de changer quelque chose aux Reglemens du Chapitre de 1676.qui avoient été confirmés dans celui de 1678. Il tint encore quatre autres Chapitres en 1697.1701. 1704. & 1708. qui ne se passerent pas fans conteftations, & même celui de 1708. fut rompu pour les raisons que nous dirons dans le Chapitre suivant. Ce Cardinal étant obligé d'aller à Rome en 1697. par Ordre du Roi, demanda un Coadjuteur pour l'Abbaïe de Cluni. Sa Majesté envoïa ses ordres à M. Ferrand, Maître des Requêtes & Intendant dans la Province de Bourgogne & de Bresse, afin qu'il permît aux Religieux de cette Abbaïe de s'assembler pour nommer un Coadjuteur au Cardinal de Boüillon. Les Religieux s'étant assemblés le 22. Avril de la même année, M. Henri Ofwald de la Tour d'Auvergne, Grand-Prevôt de l'Eglife de Strasbourg, fut poftulé pour Coadjuteur avec future fucceffion au Cardinal de Boüillon fon oncle. Quelques Religieux de l'étroite Obfervance s'oppoferent d'abord à cette poftulation, ce qui n'empêcha pas le Pape Innocent XII. d'accorder des Bullesàl'Abbé d'Auvergne, au mois de Seprembre de la même année. Quatre ans après, c'est-à-dire, l'an 1701. les mêmes Religieux qui avoient formé oppofi- ORDRE DE tion à la Coadjutorerie, interjetterent appel comme d'abus CLUNI. de l'Acte de poftulation faite de M.l'Abbé d'Auvergne pour Coadjuteur, & de tout ce qui s'étoit ensuivi; mais par un Arrêt du Grand-Conseil du mois d'Avril 1703. l'Abbé d'Auvergne fut maintenu dans la Coadjutorerie. Le Chapitre General que le Cardinal de Boüillon avoit tenu l'an 1701. comme nous avons dit, ne fut pas plûtôt terminé, que les mêmes Religieux qui avoient interjetté appel comme d'abus de la postulation de l'Abbé d'Auvergne pour Coadjuteur de Cluni, intenterent aussi un procès au Cardinal de Boüillon son oncle, & le firent assigner au Grand-Conseil, pour voir declarer nuls & abufifs tous les Chapitres Generaux ausquels il avoit présidé depuis qu'il avoit été postulé Abbé de Cluni, attendu qu'il n'avoit aucune jurisdiction : c'est ce qui donna lieu à l'Arrêt du même Grand-Conseil, rendu le 30. Mars 1705. dont ce Cardinal demanda la caffation au Conseil d'Etat du Roi, comme ne lui étant pas favorable; mais comme cette affaire regarde particulierement les Religieux de l'étroite Observance, nous en parlerons plus amplement dans le Chapitre suivant. Il ne nous reste présentement à parler, que de quelques privileges dont joüit l'Abbaïe de Cluni. Nous avons déja dit que Guillaume Duc d'Aquitaine, par son Testament, l'avoit exemté de toute Jurisdiction Epifcopale, la soumetrant uniquement au saint Siége, ou comme il dit, la donnant aux Apôtres faint Pierre & faint Paul, au Souverain Pontife, & à ses successeurs. Aufsi ne reconnoit-elle point d'autre Evêque que le Pape, sous qui elle joüit d'une jurifdiCtion absoluë, tant dedans que dehors la ville, en une certaine distance de territoire que l'on nomme les sacrés bans. Urbain II. après le Concile de Clermont, étant venu à Cluni, établit & fixa ses limites, qui ont été depuis confirmées par plusieurs Papes. Dans toute cette étenduë, sa jurisdiction est comme Epifcopale & s'exerce par un Archidiacre dont la nomination appartient à l'Abbé. C'est un Office en titre: cet Archidiacre fait toutes les fonctions d'Evêque qui ne dépendent pas du caractere Epifcopal ; & dans les matieres contentieuses, l'appel de ses Sentences est porté immediatement à Rome. Par un privilege special, ceux qui assistent à l'autel ORDRE DE dans l'Eglise de cette Abbaïe les Dimanches & les Fêtes) communient fous les deux especes avec le Celebrant. CLUNI. Cette Abbaïe a donné à l'Eglise les Souverains Pontifes Urbain II. Gregoire VII. & Pafchal II. il en est sorti plusieurs Cardinaux, Archevêques & Evêques, ausli-bien que des autres Monafteres de sa dépendance, qui ont aussi fourni un grand nombre de personnes illustres par leur naissanсе, celebres par leur sçavoir & recommandables par leur fainteté. L'an 1119. le Pape Gelase II. fuïant la perfecution de l'Empereur Henri IV. se refugia dans l'Abbaïe de Cluni où fatigué du voïage & accablé de maladies, il mourut & fut enterré dans l'Eglife. On y voit encore son tombeau & le reste de l'appartement où il logea, qui a retenu le nom de Palais du Pape Gelase. Après sa mort les Cardinaux qui l'avoient accompagné en affez grand nombre, élûrent dans l'Abbaïe même, Gui Archevêque de Vienne qui fut son succeffeur fous le nom de Calixte II. & ce nouveau Pontife voulant favorifer cette celebre Abbaïe, ordonna que l'Abbé auroit toûjours le titre de Cardinal. L'an 1245. le Pape Innocent IV. après la celebration du premier Concile General de Lyon, alla à Cluni accompagné des Patriarches d'Antioche & de Constantinople, de douze Cardinaux, de trois Archevêques, de quinze Evêques & de plusieurs Abbés. Le Roi faint Loüis, la Reine sa mere, son frere le Duc d'Artois & fa fœur, l'Empereur de Constantinople, les fils des Rois d'Aragon & de Castille, le Duc de Bourgogne, six Comtes & quantité d'autres Seigneurs, s'y trouverent dans lemême tems, & tous avec une suite fort nombreuse, sans que les Religieux quittassent aucun des lieux reguliers, ce qui est une marque de la grandeur & de la magnificence de ses anciens bâtiments qui, quoique ruinés en partie par les Calvinistes en 1562.ne laissent pas d'avoir encore une si grande étenduë que l'on ne peut s'empêcher de les admirer. Son Eglife, qui est sans contredit une des plus grandes du Roïaume, a cinq cens dix pieds de longueur, cent vingt de largeur ; & l'on y entrepar un vestibule qui a cent dix pieds de longueur & quatre vingt-un de largeur. Cette Eglise est bâtie en forme de Croix Patriarchale, aïant deux Croisées. Elle étoit autrefois en possession d'un des plus beaux & des plus riches Trésors de France. Ce Tré |