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CONGRE de fix-vingts coudées de long; Helmfride, qui par fon FULDES. exemple excitoit les Religieux à obferver exactement leur Regle, & Hildebrand que l'on prétend avoir eu le don de prophetie, & qui fut auffi Archevêque de Mayence. Mais fous Hademar fucceffeur d'Helmfride, dans le Gouvernement de l'Abbaïe de Fuldes,il y eut une très grande division, &un defordre exceffif & fcandaleux,dont on attribuë la cause à Frideric Archevêque de Mayence, qui fut obligé de s'y retirer par l'incident qui fuit.

L'an 939. Henri, frere puîné de l'Empereur Othon I. croïant qu'il avoit plus de droit à la Couronne que fon frere, parce qu'il étoit né depuis l'élevation de leur pere Henri à l'Empire, voulut maintenir fa prétention par les armes. Everard, frere du défunt Empereur Conrad, & Giflebert, Duc de Lorraine, fe liguerent avec lui contre Othon, qui les aïant défaits, obligea fon frere à venir implorer fa clemence. Ce Prince croïant que Frideric, Archevêque de Mayence avoit favorifé les rebelles, le relegua dans l'Abbaïe de Fuldes, quoiqu'il fe fût purgé de ce foupçon, par la reception du Corps & du Sang de Jefus-Christ, Brufchius s'eft trompé, lorfqu'il a dit que ce Prélat étoit fils du Roi de France, & qu'on le fit revêtir de l'habit Monachal pour l'enfermer dans cette Abbaïe: car outre qu'il n'étoit point du Sang Roïal de. France, c'eft qu'il avoit été Religieux à Fuldes, avant que d'être élevé fur le Siége Archiepifcopal de Mayence, & par confequent il devoit avoir toûjours confervé l'habit Religieux, conformément au huitiéme Concile General de Conftantinople tenu l'an 869. qui défendoit aux Evêques de quitter l'habit Religieux, fur peine d'être dépofés, lorfqu'ils avoient été tirés du Cloître pour monter à l'Epifcopat.

Frideric aïant été relégué à Fuldes,comme nous venons de le dire, fufcita, à ce que l'on croit, une cruelle perfecution dans tous les Monafteres qui étoient de fa dépendance contre les Religieux, fous prétexte de les réformer. Ils avoient à la verité grand befoin de l'être; & plufieurs Evêques témoignoient qu'il valoit mieux qu'il n'y eût qu'un petit nombre de Religieux fans tache,que d'en voir un très grand nombre mener une vie mondaine & relâchée:ce qui fit que plufieurs fe fentant coupables,& ne voulant pas arriver à une fì grande

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perfection que celle à laquelle on les vouloit obliger,aime- CONGRE. rent mieux quitter l'habit & fortir du Monaftere ; quelques- FULDES. uns même fe marierent, comme dit Brufchius. Hademar étoit pour lors Abbé de Fuldes: il traita d'abord avec assez d'honnêteté l'Archevêque de Mayence; mais aïant intercepté des Lettres qu'il écrivoit fecretement, il ufa de rigueur envers lui: ce qui fut caufe que ce Prélat pour s'en venger, lorfqu'il fut en liberté, perfecuta les petits Monafteres avec violence; cependant il ne put rien faire à Fuldes, à cause d'Hademar, qui avoit les bonnes graces de l'Empereur.

Hatton, furnommé Bonofe, qui fucceda dans le Gouvernement de Fuldes à Hademar, fut auffi Archevêque de Mayence. Bruschius dit que dans une famine il fit affembler une grande quantité de pauvres dans un grenier, fous prétexte de leur faire donner du bled; mais qu'il y fit mettre le feu, & qu'en punition il fut mangé des rats, quoiqu'il fe fût fauvé dans une ifle au milieu du Rhin pour éviter ces animaux, qui pafferent ce fleuve à la nage pour l'y aller trouver. Quelques Auteurs prétendent que c'eft une calomnie inventée contre ce Prélat par les Centuriateurs de Magdebourg : neanmoins Brufchius, qui apparemment l'avoit appris de quelqu'autre, en avoit déja parlé dans fa Chronologie des Monafteres d'Allemagne,qu'il donna en 1550. cinq ans avant que ceux de Magdebourg euffent commencé leurs Centuries:au refte,aucun Auteur contemporain de ce Prélat n'a parlé de ce fait.

La Difcipline Reguliere étoit encore beaucoup relâchée, lorfque Richard prit le gouvernement de l'Abbaïe de Fuldes en 1021. mais par le moïen des Religieux Hibernois, il réforma ce Monaftere, & felon Brufchius, il obligea les Religieux à prendre l'habit Monastique, & la tonfure qu'ils avoient quittés pour en prendre d'autres, qui n'avoient jamais été en ufage. Il fit bâtir le Monaftere d'Amerbak,dans le Diocéfe de Wiltzbourg, & celui de faint André fur la riviere de Fuldes,& eut un grand foin d'entretenir les études dans fon Abbaïe, où il y eut cependant de grands défordres fous le gouvernement de l'Abbé Widerad l'an 1063. Le differend qui fuit fut ce qui y donna lieu. C'étoit la coûtume depuis un long-tems, que les Abbés de Fuldes, dans les Affemblées d'Evêques, avoient place immédiatement après

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CONGRE- l'Archevêque de Mayence. L'Empereur Henri IV. étant à FULDES. Goflar l'an 1062. & devant affifter à l'Office du jour de Noël, comme on plaçoit dans l'Eglife pour les premieres Vêpres les fiéges des Evêques, il y eut querelle entre les Officiers de l'Evêque de Hildesheim, & ceux de l'Abbé de Fulde l'Evêque prétendant avoir le pas au deffus de l'Abbé, à caufe que Goflar étoit de fon Diocéfe. Des paroles on en vint aux mains, & on couroit déja aux armes, lorfqu'Othon Duc de Baviere, qui foûtenoit l'Abbé, fit ceffer la querelle.

L'année fuivante l'Empereur voulant affifter à l'Office du jour de la Pentecôte, il y eut une nouvelle difpute, lorfqu'il fallut encore placer les fiéges. L'Evêque d'Hildesheim se reffouvenant de l'affront qu'il avoit reçu l'année précedente, fit cacher derriere l'Autel des gens armés, qui fe jetterent fur les Officiers de l'Abbé de Fuldes,lorfqu'ils voulurent placer le fiége de leur Maître. Ceux-ci aïant été fecourus par des Soldats de l'Abbé qui entrerent dans l'Eglife, il fe fit de part & d'autre un grand carnage, dont on jetta toute la faute fur l'Abbé, qui quoi qu'innocent de ce defordre, fut obligé, pour fe redimer de la vexation, de donner de groffes fommes à l'Empereur,à l'Evêque, & à leurs Officiers: de forte qu'il fallut pour cela engager une grande partie des biens de l'Abbaïe: ce qui irrita tellement les Religieux, que lorfque l'Abbé retourna à Fuldes, la plupart, principalement les jeunes, fe foûleverent contre lui, & les plaintes qu'ils lui firent, de ce qu'il avoit ruiné leur Monaftere, dégenererent en une fédition ouverte. L'Abbé aïant eu ordre d'aller trouver l'Empereur, son absence échauffa encore de plus en plus ces efprits mutins, dont feize prirent la refolution d'alfer trouver ce Prince pour fe plaindre de leur Abbé. Pour cet effet ils fortirent du Monaftere en Proceffion, portant la Croix élevée, & afin de prévenir l'Empereur fur leur démarche, ils envoïerent l'un d'eux à cheval, avec une Lettre pour ce Prince. Mais l'Empereur fut fi indigné de ce procedé, que fans attendre leur arrivée, par le confeil de l'Archevêque de Cologne & du Duc de Baviere, il fit arrêter le porteur de la Lettre, avec trois autres qui étoient les Auteurs de la fédition, qu'il envoïa en divers Monafteres pour y être enfermés dans des prisons, & ordonna à l'Abbé d'u

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fer de main forte pour contraindre les autres de fe foûmet- CONGRE tre à l'obéïflance. Widerad envoïa des Soldats qui oblige- FULDES. .rent les Religieux mutins de retourner à Fuldes : il fit mettre des Gardes aux environs du Monaftere ; & aïant fait affembler les féditieux, il en fit fuftiger deux, dont l'un étoit Prêtre, & l'autre Diacre, & les chaffa tous deux du Monaftere: à l'égard des autres, il ufa de plus grande feverité ou de plus grande douceur, felon leur naiffance & leurs fautes.

Le Gouvernement de Gottard ou Gottfrid, fucceffeur de Widerad, ne fut pas plus tranquille. La guerre qui furvint entre l'Empereur Henri IV. & fon fils Henri V.Tan 1105. caufa de nouveaux troubles à Fulde. L'Abbé avoit pris le parti d'Henri IV. après la mort duquel on porta des plaintes contre lui à Henri V. de ce qu'il avoit diffipé les biens de l'Abbaïe. Ce Prince les écouta & priva Gottard de fon Abbaïe. La fortune de fon fucceffeur Wotffhem ne fut pas meilleure; il affiégea le Château de Haselsteim; & comme il faifoit le fiége de Wartemburg avec l'Abbé d'Hersfeld, il fut pris & retenu prifonnier pendant trois ans dans le Château de Mulsemburg, & aïant été encore accufé d'avoir diffipé les biens dont il n'avoit que l'œconomat, il fut auffi déposé l'an

II14.

Les Abbés de Fuldes ne s'étoient pas mis en peine jufqu'alors de pouvoir fe fervir d'ornemens Pontificaux ; mais Berth Schliz qui fut élu l'an 1133. les obtint du Pape Honorius II. Cet Abbé eut un grand differend avec l'Archevêque de Magdebourg, au fujet de la préféance. La caufe fut plaidée devant l'Empereur,qui ordonna que l'Abbé de Fuldes prendroit fa place au deffus de l'Archevêque de Magdebourg. L'Abbé Marquard fit entourer de murailles le bourg de Fuldes,& en fit une ville l'an 1150. mais l'an 1331. les Bourgeois oubliant que les Abbés étoient les Fondateurs de cette ville, fe revolterent, démolirent la Citadelle qui joignoit l'Abbaïe, ruinerent les lieux reguliers, pillerent tous les meubles, & enleverent ce qu'il y avoit de plus précieux. Henri de Hombourg, qui en étoit pour lors Abbé, aïant porté fes plaintes à l'Empereur Henri VII. ce Prince ordonna à l'Archevêque de Tréves de reduire les Rebelles à la raifon,& de les foûmettre à l'obéïflance de leur Seigneur. Il

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CONGRE ramena l'Abbé & les Religieux à Fuldes,& obligea les Bour FULDES. geois de recevoir avec foumiffion l'Abbé, qui en fit mourir douze, & en envoïa autant en exil. Les Païfans de la dépendance de Fuldes fe revolterent auffi vers l'an 1525. & ruinerent tous les Monafteres, lorfque Jean Comte d'Hemerberg, de la Maifon de Brandebourg, en étoit Abbé.

par

Če n'étoit pas feulement contre leurs Sujets que les Abbés de Fuldes avoient à combattre, ils avoient encore à foûtenir la force des armes leurs droits contre leurs voisins, & à défendre leurs Terres contre des troupes de bandits & de voleurs qui s'étoient fortifiés dans plufieurs Châteaux. Conrad de Malk aïant été Abbé en 1220. fit entourer de murs Hamelburg, & y fit faire des fortifications: mais Herman de Lodembourg, Evêque de Witzbourg, aïant voulu l'empêcher, & s'étant avancé pour ce fujet avec des troupes,fut mis en fuite par celles de l'Abbé,qui fit prifonniers plufieurs Seigneurs du parti de l'Evêque, qui fut obligé de païer leur rançon. Henri de Eftel, fucceffeur de Conrad de Malks, l'an 1248. ajoûta de nouvelles fortifications à Hameburg, & fortifia auffi Mackhenzell, Bruckneau, Neugenhoffen, & Stoltzberg, & rafa les Châteaux de Witterfperg, Trunberg, Kralak, & plufieurs autres, qui fervoient de retraite aux voleurs & aux bandits qui ravageoient le païs. Berthold qui fut Abbé en 1261. acheta le Château d'Hafeltein, fit bâtir Lutterbak & Bridenbalk,changea le Château de Blan kual, qui étoit une retraite de voleurs en un Monaftere de faintes Vierges, & ruina plufieurs Châteaux,qui fervoient de retraites à ces bandits. Mais pendant qu'il travailloit ainfi pour le bien public, & à affurer le païs ; des perfonnes aufquelles il avoit fait le plus de bien, confpirerent contre lui & l'affaffinerent l'an 1270. Berthold deMackencell fon fucceffeur, vengea fa mort, fit mourir trente des complices, & brûler la Citadelle de Steinaw, où ils s'étoient refugiés.

Les limites que nous nous fommes preferites,ne nous permettent pas de nous étendre davantage fur les évenemens differens arrivés en cette Abbaïe, dont nous croïons avoir rapporté les plus finguliers. Nous ajoûterons feulement que PÂbbaïe d'Hirsfeld, qui étoit auffi Chef d'une Congregation en Allemagne, fut unie à celle de Fuldes fous le Pontificat de Leon X. Nous avons déja dit en parlant de la fon

dation

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