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DE L'OR

Quoique ce Concile eût derogé à cette ancienne rigueur, PROGRE'S elle fut encore neanmoins pratiquée en Angleterre,où l'on re- DRE DE S. cevoit les enfans à l'âge de fept ans, de cinq,de deux & même BENOIT. d'un an. Elle fubfiftoit encore en Italie l'an 726.puifque faint Boniface Evêque de Mayence, aïant confulté dans ce temslà le Pape Gregoire II. fur quelques doutes, entr'autres s'il étoit permis aux enfans qui avoient été offerts par leurs parens de retourner au monde,ou de fe marier lorfqu'ils étoient parvenus à l'âge de pubertés ce Pontife lui répondit qu'il ne leur étoit pas permis. Cette pratique fubfifta encore longtems en Allemagne ; car quoique par le 36. Canon du Con- Ann. 8174 cile d'Aix-la-Chapelle il eût été ordonné que les enfans qui avoient été offerts par leurs parens dans les Monafteres étoient tenus de confirmer cette offrande lorfqu'ils étoient parvenus dans un âge de fçavoir ce qu'ils faifoient, neanmoins par le 22. Canon de celui de Wormes, les enfans of- Ann. 8784 ferts aux Monasteres par leurs parens étoient encore cenfés engagés fuivant la Regle de faint Benoît & le IV.Concile de Tolede. Dans la fuite du tems, on fe relâcha par tout de cette ancienne rigueur, & on ne reçut plus dans les Monasteres les enfans qui étoient offerts par leurs parens, parce que ce n'étoit plus un effet de leur pieté, mais de leur cupidité, n'offrant plus aux Monafteres que ceuxde leurs enfans que la nature n'avoit pas avantagés, qui fe trouvoient difgraciés, 'difformes,ou ftupides, & nullement propres pour le monde, ce qui caufa le relâchement dans l'Ordre deS. Benoît. Il fem que Guillaume Abbé d'Hirfauge ait été le premier qui ait refufé l'oblation de ces enfans; puifque Uldaric dans fa Préface fur les coûtumes de Cluny, le louë d'avoir exclus de fon Monaftere les enfans par le moïen defquels la Difcipline monaftique avoit tant fouffert. Plufieurs Abbaïes firent la même chose. Pierre le venerable, Abbé de Cluny,fit auffi pour empêcher ces fortes de réceptions,un Statut qui fut confirmé par l'Abbé Hugues V. aïant feulement excepté de cette Loy fix enfans que l'on éleve encore dans l'Abbaïe de Cluny en habit monaftique ; mais fans aucun engagement d'être Religieux. Enfin dans le douziéme fiéclé cette coûtume fut entierement abolie par l'autorité du Pape Clement III. & la même chofe fut défendue par le Concile de Trente. Pourquoy donc fe récrier aujourd'hui contre les

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PROGRE'S

profeffions qui fe font à l'âge de feize ans que le même ConDE L'OR- cile a determiné,auquel âge ceux qui s'engagent dans la ReBENOIT.ligion, bien-loin d'y avoir été amenés & offerts

leurs papar

rens, leur refiftent le plus fouvent pour fuivre les attraits de grace & fe confacrer de bonne heure à Dieu?

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Quant aux habillemens, ils étoient reglés à la difcre tion des Abbés fuivant la qualité du païs, plus chaud ou plus froid. Dans les climats temperés c'étoit affez d'une cu culle & d'une tunique, la cuculle plus épaiffe pour l'Hyver, plus rafe pour l'Eté ; & un fcapulaire pour le travail. Le fcapulaire étoit l'habit de deffus pendant le travail; on l'ôtoit pour prendre la cuculle que l'on portoit le refte du jour. Chacun avoit deux tuniques & deux cuculles, foit pour changer les nuits, foit pour les laver. Les étoffes étoient celles qui fe trouvoient dans le païs à meilleur marché. Pour ôter tout fujet de proprieté, l'Abbé donnoit à chacun toutes les chofes neceffaires ; c'est-à-dire, outre les habits, un mouchoir, un couteau,une aiguille, un poinçon pour écrire, & des tablettes. Leurs lits confiftoient en une natte ou paillaffe, un drap de ferge, une couverture & un chevet.

Saint Benoît n'a rien determiné fur la couleur de l'habillement; mais il paroît par d'anciennes peintures que la robe que les anciens Benedictins portoient étoit blanche, & le fcapulaire noir.Ce fcapulaire n'avoit pas la même forme que ceux dont on fe fert prefentement dans cet Ordre. Il reffembloit plûtôt aux capotes de Matelots, excepté qu'il n'étoit point ouvert par devant, mais un peu par les côtés; comme on peut voir dans la figure que nous donnons d'un de ces anciens Benedictins, & que nous avons tirée de celles que le Pere Mabillon a données dans fes Annales Benedictines. Ces fortes de fcapulaires étoient depuis long-tems l'habit ordinaire des Pauvres & des Païfans.

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y a encore un grand nombre de Monafteres dont les Religieux prennent le titre d'anciens Benedictins, plûtôt pour recevoir les revenus qui dépendent de leurs Monasteres, que pour obferver la Regle de S.Benoît,qui eft prefque inconnue dans la plupart de ces Monafteres,qui fe difent du grand Ordre,& qui font foûmis aux Ordinaires des lieux où ils font fitués, ne formant entre eux aucune Congregation, on excepte neanmoins celles des Exemts en France, en

T.V.P. 12

Ancien Benedictin

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DRE DE S.

Flandres & en Allemagne. Lorfqu'ils fortent par la ville,ils PROORE'S font habillés comme les Ecclefiaftiques; ils portent feulement DE L'ORun petit fcapulaire, & dans la maison ils ont confervé quel- BENOIT, que refte d'habit Monacal, en mettant un camail par deffus le fcapulaire,& au Chocur une grande coule.

Il y a des Auteurs qui ont cru que faint Benoît n'avoit écrit la Regle que pour le Monaftere du Mont-Caffin; mais cette opinion fe détruit par le témoignage même de faint Benoît, qui dans le 55. Chapitre de cette Regle', ordonne que les vêtemens feront donnés aux Freres, felon la qualité des lieux où ils demeureront, & la temperature de l'air, & qu'il en faudra davantage aux païs froids qu'aux païs chauds ; & quant à la qualité des étoffes, il ordonne aux Religieux de ne s'en point mettre en peine, mais de fe contenter de celles qui fe trouveront aux païs où ils demeure

ront.

Quelques-uns, comme Gallonius, Prêtre de l'Oratoire de Rome, dans fa défense des Annales de Baronius, & après lui Dom Pierre Menniti, de l'Ordre de faint Bafile,dans fon Calendrier des Saints de fon Ordre, ont auffi avancé que la Regle de faint Benoît n'avoit été publiée qu'après fa mort, l'an 586. par Simplicius, troifiéme Abbé du Mont-Caffin Gallonius s'étant fondé fur un ancien Manufcrit de la Bibliotheque du Vatican, qui contient en partie la Regle de faint Benoît, à la tête de laquelle il y a une petite Preface, où on lit ces paroles: Simplicius Chrifti Minister Magiftri latens opus propagavit. Ce que Pierre Diacre du MontCaffin & Sigebert avoient auffi lu il y a plus de cinq cens ans. Hæftenius avoit déja refuté Gallonius dans fes Difquifitions Monaftiques. Le Pere Mabillon le refute auffi dans fes Annales, & cite un ancien Manuscrit de 700. ans, qu'il a vu dans la Bibliotheque de M.de la Marre, Confeiller Praf. Toma au Parlement de Dijon, où au lieu de Latens, on lit Late: Benedict ce qui change le fens, puifque dans l'un on lit que Simplicius a communiqué à tous l'Ouvrage de fon Maître qui étoit caché, & que dans l'autre on y lit qu'il a communiqué avec beaucoup d'étendue l'Ouvrage de fon Maître, c'eft-à-dire, que la Regle de faint Benoît qui n'étoit connuë que dans les Monafteres qu'il avoir fondés, fut publiée prefque par toute la terre : & une preuve que faint Benoît l'avoit écrite pour

I. Annal.

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