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GUILLEL

MILES.

ORDRE DIS Conde d'Allemagne,& la troifiéme de Flandres & deFrance, quoiqu'il n'y eut qu'uneMaifon de cet Ordre dans ceRoïaume,toutes les autres étant fituées dans les Païs Bas. Le Pere Henfchenius a donné le Catalogue des Maifons de ces trois Provinces, & entre celles d'Allemagne, il ne s'en trouve pas une de Religieufes Guillelmites. Cependant il y a encore à prefent un Monaftere de ces Religieufes à Montpellier, dans le Languedoc. Ces Religieux vinrent s'établir au Village de Mont-Rouge près Paris l'an 1256. dans le Monaftere des Machabées, d'où ils furent transferés à Paris l'an 1298. le Roi Philippe le Bel leur aïant donné le Monaftere des Religieux Blancs Manteaux, ainfi appellés à caufe des manteaux blancs qu'ils portoient,mais dont le veritable nom étoit celui de Serviteurs ou Serfs de la fainte Vierge. Comme cet Ordre étoit un de ceux qui furent abolis dans le Concile de Lyon, le Pape Boniface VIII. obligea les Religieux de cet Ordre ou d'entrer dans celui des Guillelmites, ou de leur céder le Monaftere qu'ils avoient à Paris. Ces Guillelmites y refterent jufques vers l'an 1618. que le Prieur de ce Monaftere y introduifit les Benedictins de la Congregation de faint Maur, fous prétexte de le réformer. Ceux-ci obligerent une partie des Religieux Guillelmites qui y étoient, iy d'embraffer leur Ordre, & renvoïerent ceux qui s'y oppoferent. Les Guillelmites plaiderent contre les Benedictins pour rentrer dans la poffeffion de cette Maison. Les Recteurs & Suppots de l'Univerfité de Paris intervinrent pour eux dans la caufe contre les Benedictins, fur ce que les Guillelmites étoient membres de leur Corps. Le Plaidoïer de l'Univerfité eft rapporté tout au long dans le fecond Tome de la Bibliotheque Canonique, auffi bien qu'une longue Requête que le Provincial des Guillelmites préfenta au Roi à ce fujet: mais toutes ces procédures furent inutiles. Le Monaftere des Blancs-Manteaux fut adjugé aux Benedictins de la Congregation de faint Maur, qui étoient encore en quelque façon unis en ce tems-là avec ceux de la Congregation de faint Vanne. C'est pourquoi M. Baillet dans la vie de faint Guillaume au 10. Février, dit qu'il fut cedé aux Religieux de S. Vanne; ceux des Guillelmites qui ne voulurent point embraffer la Réforme des Benedictins, fe retirerent à Mont-Rouge, où le dernier mourut en 1680. Le Pelletier

GUILLEL

dans fon Histoire des Ordres Religieux, dit que dès l'an ORDRE DIG 1615. fix Religieux Guillelmites avoient paffé contrat le 29. MITES Janvier avec le Provincial des Feuillans pour lui remettre entre les mains le Monaftere des Blancs- Manteaux à condition de leur païer une pension, mais que les autres Religieux s'y oppoferent, & que l'an 1618. feprautres Religieux Guillelmites y introduisirent les Benedictins. Chopin dit qu'ils ont encore eu une Maison en France dans la Ville de Reims : ainfi ce feroit au plus deux Maifons qu'ils auroient eu dans ce Roïaume, ce qui eft bien different de ce qu'a avancé Silvestre Maurolic, lors qu'il a dit, que faint Guillaume Duc de Guïenne, voïant que l'Ordre de faint Auguftin étoit presque aboli en France, fit en forte par fes prédications que cet Ordre fût rétabli en ce Roïaume, qu'il y fit plufieurs établiffemens, & qu'il fut le premier qui par privilege des Papes Anastase IV. & Adrien I V. abandonna la folitude pour se retirer avec fes Religieux dans les Villes, & qu'il fit bâtir un magnifique Monaftere à Paris, qui fut le premier de fa Congregation & de la Réforme, bâti dans une Ville, leur demeure étant auparavant dans des Ermitages; mais cet Auteur fe trompe dans tous ces articles. Car premierement faint Guillaume Duc de Guienne n'a jamais été, ni Fondateur, ni Réformateur d'aucune Religion, puifqu'il eft mort dans fon voïage de faint Jacques qu'il entreprit auffi-tôt qu'il fut converti, c'est-à-dire en 1136. ( ce qui fait voir une autre erreur de ce même Auteur, qui dit qu'il vivoit encore en 1178.) fecondement le Monaftere des Blancs Manteaux, qui eft le feul que les Guillelmites ont occupé à Paris, ne fut bâti pour ces premiers Religieux que plus de 120. ans aprés la mort de ce Saint, c'eft-à dire l'an 1258. outre que les ReligieuxGuillelmites n'y font entrés que l'an 1298.

Cet Ordre n'a prefentement qu'environ douze Maifons en Flandres, aïant perdu tous les Monafteres qu'il avoit en Allemagne & en Italie. L'Etable de Rhodes ou Malaval,qui en étoit le Chef & où réfidoit le Général, fut détruit durant les guerres des Siennois & des Florentins. On a rétabli dans la fuite ce Monaftere, auquel on a donné le nom de faint Guillaume. Il a été érigé en Abbaïe & donné aux Ermites de l'Ordre de faint Auguftin, & le Pape Pie IV. la

ORDREDES donna en Commende l'an 1564. à Barthelemi Conchivi HUMILIE'S de la Famille des Comtes de la Penna. Les Religieux de ce Monaftere par leur travail & leur induftrie ont rendu trés commode & trés agréable, cet affreux defert qui n'infpiroit auparavant que de la trifteffe. Les Guillelmites font préfentement gouvernés par un Superieur, qui ne prend que le titre de Provincial, & qui s'élit tous les quatre ans. Leur habillement eft femblable à celui des Religieux de Cîteaux, dont nous avons donné le deffein dans le V.Tome ils en ont pris auffi le Breviaire. Le Couvent de Grevembrok au païs de Juliers, fe foûmit même entierement aux loix de Cîteaux vers le milieu du dernier fiécle..

Bolland. Act. SS. Tom. II. Febr. pag. 453. & feq. Ang, Manriq. Annal. Ord. Cifter. Tom. I. Chryfoftom. Henriquez, Fafcicul. Sanct. Ciftert. & Regul. & Conftitut. ejufd. Ord. Dubouchet, Biblioth. Canonique Tom. II. Silveft. Maurol. Mar. Ocean. di tutt. gl. Relig. pag. 272. Baillet, Vies des SS. 10. Fevrier. Herman,Hift. des Ord. Relig. & Châtelain, Martyrologe Romain Tom. I. p. 602.

CHAPITRE XIX.

Des Religieux de l'Ordre des Humiliés, & leur fuppreffion.

L

Es differens fentimens, que les Ecrivains qui ont parlé de l'Ordre des Humiliés ont eus touchant fon origine, les uns la mettant en 1190. fous l'Empire de Frederic Barberouffe,d'autres en 1180. quelques-uns en 1196. & plufieurs enfin la faisant remonter jufqu'en l'an 1017. fous l'Empire d'Henri II. furnommé le Saint, m'ont obligé d'avoir recours aux Religieufes de cet Ordre pour fçavoir fi elles n'auroient point d'anciens titres qui puffent lever ces difficultés. Si je n'en ai point été tout-à-fait éclairci par les memoires qui m'ont été envoïés en 1709. par l'Abbeffe du Monastere de faint Erasme de Milan, j'ai au moins appris beaucoup de particularités concernant cet Ordre qui ont été inconnues jufqu'à préfent. Et comme dans ces memoires l'on cite fouvent une Chronique de cet Ordre compofée en Latin l'an 1419. par le Père Jerôme Torecchio ( Prevôt

du

en,

du Couvent que les Humiliés avoient à la porte neuve à ORDRE DIS Milan) & que l'on me marque qu'elle fe trouve dans la fa- HUMILIA'S meufe Bibliotheque Ambrofienne de la même ville; dans le defir que j'avois de découvrir la verité je me suis adreffé à d'autres perfonnes defquelles j'efperois de plus grands éclairciffemens: mais je n'ai pas eu un fuccés plus heureux dans cette feconde tentative: puifque les memoires que j'en ai reçus en 1710. ne different des premiers qu'en ce qu'ils m'ont appris de plus qu'il y avoit dans la même Bibliotheque une autre Chronique de cet Ordre compofée auffi Latin en 1493. par le Pere Marc Bofto avec des Ordonnances des Chapitres Généraux de cette Congregation, la Regle de faint Benoît adaptée pour les Religieux Humiliés, leurs Constitutions, un Catalogue de leurs Saints & de leurs Bienheureux, avec un abregé de leur vie, & quantité d'autres pieces qui font quatre volumes in folio ; & que Pierre Puricelli (qui donna en 1633. les monumens de l'Eglife Ambrofienne) avoit traduit en Italien ces deux Chroniques & toutes ces autres pieces qu'il avoit ramaffées & écrites de fa main dans le deffein de donner au public une Hiftoire de cet Ordre, que le Pere Papebroch dit avoir vûë entre les mains de fes heritiers.

Ce qui flattoit le plus mes efperances c'eft que je m'attendois que cette Chronique du P. Torecchio, qui eft le plus ancien original que l'on m'indiquoit dans ces memoires, me donneroit quelque connoiffance de ce que je cherchois; mais ce que cet Auteur met fur l'établiffement de cet Ordre eft fi peu probable, & s'accorde fi mal avec la Chronologie, que nous ne pouvons pas adherer à son sentiment. Voici ce qu'il en dit.

Les villes de Pavie, de Lodi, de Crémone, & quelques autres de Lombardie, principalement celle de Milan,s'étant revoltées contre l'Empereur S. Henri, ce Prince étant passé en Italie, remit ces villes fous fon obéïffance, & pour châtier les Chefs des rebelles qui étoient les perfonnes les plus confiderables d'entre la nobleffe, il les mena prifonniers en Allemagne. Ces Gentilshommes fe laffant de leur captivité, le Bienheureux Gui qui s'étoit acquis beaucoup de crédit parmi eux, les exhorta à profiter de leur malheur & de faire un veritable retour vers Dicu,en méprisant toutes les vanités

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HUMILIE'S.

ORDREDIS de ce monde dont l'inconftance leur étoit connuë par leur propre experience, & en s'exerçant dans la pratique des vertus. Ces Gentilshommes aïant fuivi fon avis, fe revêtirent l'an 1017. d'habits de couleur cendrée, qui confiftoient en une robe de gros drap,ceinte d'une ceinture de même étoffe, avec un grand manteau qui defcendoit jufqu'à terre, & des bonnets de même étoffe pour couvrir leurs têtes. Les exercices de pieté, de charité & de mortification qu'ils pratiquoient, étant venus à la connoiffance de l'Empereur, il les fit venir en fa présence, où s'étant profternés à ses pieds les larmes aux yeux, les premieres paroles que cePrince leur dit, furent celles qui fuivent: vous voila-donc à la fin humiliés; & après avoir continué à leur dire quelque chofe de leur rebellion paffée, fur les affurances qu'ils lui donnerent de leur fidelité à fon fervice & de la refolution où ils étoient de continuer le genre de vie qu'ils avoient entrepris, il leur accorda la liberté leur › permettant de retourner en leur païs.

Etant arrivés en Lombardie, leurs femmes les voulurent imiter dans leurs exercices de pieté & dans la pratique des vertus, elles fe revêtirent auffi d'habits de même couleur, & comme leurs maris introduifirent la fabrique des étoffes de laine, aufquelles ils travailloient eux-mêmes, elles s'emploïoient auffi à filer la laine. Mais dans le fejour que faint Bernard fit à Milan, les Humiliés (que l'on nommoit les Berretins de la penitence, a caufe qu'ils portoient un gros bonnet que les Italiens appellent Barettino,outre qu'ils fe fervent quelquefois de ce terme pour fignifier le gris brun qui étoit la couleur de leur habit) prierent ce Saint de leur prefcrire quelques Réglemens pour leur conduite. Il leur confeilla de fe feparer de leurs femmes & de vivre en commun. Il les exhorta auffi de fe mettre fous la protection de la fainte Vierge & pour cet effet de changer leurs habits cendrés en habits blancs pour marquer la pureté de leur ame.

T'els furent les commencemens de l'Ordre des Humiliés felon le Pere Torecchio le plus ancien Hiftorien de cet Ordre: mais fi lon confidere que faint Bernard n'alla à Milan que l'an 1134.& qu'il y auroit déja eu près de fix vingts an nees d'écoulées depuis le retour de ces Gentilshommes en Lombardie on trouvera que cela ne peut pas être arrivé

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